SOIXANTE ET UNIÈME JOURNÉE.
Lundi 18 février 1946.

Audience de l’après-midi.

COLONEL SMIRNOV

Permettez-moi de continuer.

LE PRÉSIDENT

Je vous en prie.

COLONEL SMIRNOV

Je reprends donc la présentation de la documentation prouvant les atrocités commises par les criminels germano-fascistes sur des enfants. Je me réfère à la déposition du témoin Bespaloff, déposition figurant dans un document déjà présenté au Tribunal sous le n° URSS-32. Le passage auquel je fais allusion se trouve à la page 33 du livre de documents, cinquième paragraphe. Bespaloff s’exprimait ainsi :

« A la fin de juin, l’année dernière, j’ai vu personnellement amener dans un parc boisé 300 femmes et jeunes filles chargées sur dix à douze camions.

« Les malheureuses titubaient, terrorisées de tous côtés, pleuraient, s’arrachaient les cheveux et les vêtements. Mais les germano-fascistes s’en souciaient peu. A coups de pied, à coups de crosse et de bâton, ils les obligeaient à se lever. Celles qui ne se levaient pas, ces bourreaux leur enlevaient eux-mêmes leurs vêtements et jetaient ces malheureuses dans les fosses. Certaines jeunes filles, et aussi des enfants, qui cherchaient à s’enfuir, étaient aussitôt abattues. J’ai vu, après une rafale de mitrailleuse, des femmes, titubant et levant en vain les bras au ciel, se diriger en poussant des cris pitoyables vers les Allemands qui leur faisaient face. A ce moment, les Allemands les abattaient à coups de pistolet. De peur et de douleur, perdant toute contenance, les mères, serrant leurs enfants sur leur poitrine, couraient ça et là dans le champ, se lamentant de façon effroyable, à la recherche de secours. Les employés de la Gestapo s’emparaient des enfants, les saisissant par les bras ou par les jambes et les jetaient vivants dans la fosse. Quand leurs mères se précipitaient pour les retirer de ces fosses, elles étaient abattues. »

Je cite maintenant un paragraphe du document déjà présenté sous le n° URSS-9. C’est un extrait du rapport de la Commission extraordinaire d’État sur la ville de Kiev. Il se trouve à la page 238 du livre de documents, deuxième colonne du texte, sixième paragraphe. Je cite :

« Le 29 septembre 1941, les bandits hitlériens rassemblèrent aux coins des rues Mieinik et Doktorovskaya des milliers de civils soviétiques. Leurs bourreaux les conduisirent ensuite à Baby-Yar où ils furent fusillés après avoir été dépossédés de tout objet de valeur.

« Les citoyens M. F. Petrenko et N. T. Gorbatcheva qui habitaient près de Baby-Yar ont raconté qu’ils avaient vu des Allemands jeter dans les fosses des nourrissons et les enterrer vivants avec leurs parents tués ou blessés. On pouvait voir la couche de terre dont ils étaient recouverts agitée par les mouvements de gens encore vivants. »

Il ne s’agit pas de cas isolés mais d’un plan systématique. En exerçant une terreur inhumaine contre les enfants, les chefs fascistes allemands savaient bien qu’ils possédaient là un moyen d’intimidation particulièrement puissant contre les vivants. La compassion pour les faibles et ceux qui sont sans défense est un sentiment humain bien connu. En mettant à mort et de façon particulièrement horrible des enfants, les monstres germano-fascistes démontraient aux populations civiles qu’ils étaient décidés à ne reculer devant aucun crime pour « pacifier » les régions occupées.

Non seulement les enfants partageaient le sort de leurs parents, mais bien souvent ils étaient l’objet de « Massen-Aktionen » de la part des Allemands. Les enfants étaient arrachés à leurs parents par la force, concentrés dans un endroit quelconque et exécutés.

Je me réfère maintenant à une citation très courte tirée d’un document déjà présenté au Tribunal, d’un rapport de la Commission extraordinaire d’État sur les crimes des conspirateurs allemands en Lettonie. Cette citation figure au verso de la page 286 du livre de documents, deuxième colonne, cinquième paragraphe.

« A la prison centrale de Riga, ils ont tué plus de 2.000 enfants arrachés aux parents. Au camp de Salaspilsko, plus de 3.000. »

Le Tribunal constatera, d’après le rapport de la Commission extraordinaire d’État sur « les crimes hitlériens en Lituanie », la cruauté des procédés employés par les Allemands pour enlever les enfants des gens détenus dans des prisons, des camps ou des ghettos, séparation qui signifiait habituellement le massacre des enfants. Ce document a déjà été présenté sous le n° URSS-7. Le passage que je vais lire se trouve à la page 295 du livre de documents, première colonne, sixième paragraphe. Je saute le premier paragraphe où l’on parle de l’organisation du camp — ce qui ne concerne pas directement les enfants — et je commence au deuxième paragraphe où l’on voit ce qu’ils faisaient des enfants :

« Au début de 1944, les Allemands, dans ce camp, arrachèrent par la force à leurs parents les enfants de 6 à 12 ans et les emmenèrent. Un habitant de la ville de Kaunas, Wladislas Blum, a porté le témoignage suivant :

« Sous mes yeux se passèrent des scènes à fendre l’âme. Les « Allemands enlevaient les enfants à leurs mères et les envoyaient dans une direction inconnue. Nombreux sont les enfants qui furent alors exécutés et leurs mères aussi. »

A l’intérieur du camp, sur les murs des bâtiments, on a trouvé des inscriptions convaincantes, témoignant des agissements diaboliques des criminels fascistes. Voici quelques-unes d’entre elles :

« Vengez-nous. » « Que le monde entier apprenne et sache la bestialité avec laquelle nos enfants ont été massacrés. » « Nos jours sont comptés. Adieu. » « Le monde entier doit le savoir et qu’il n’oublie pas de venger nos enfants innocents. » « Femmes du monde entier ! Pensez-y et essayez de vous imaginer les atrocités qui au XXe siècle furent commises sur nos enfants innocents. » « Mon enfant n’est plus, tout m’est maintenant égal. »

Je me réfère maintenant à un document déjà présenté au Tribunal sous le n° URSS-63. C’est un rapport officiel sur les mauvais traitements subis par des enfants de la maison d’enfants de Domatchev, aux environs de Brest, en Russie blanche, et finalement leur exécution. Le Tribunal le trouvera à la page 223 du livre de documents, cinquième paragraphe, première colonne. Je vais citer trois ou quatre paragraphes de ce document et passer le reste :

« Sur l’ordre des autorités d’occupation de la région, le chef du district, Prokoptchuk, a ordonné à la directrice de la maison d’enfants, A. P. Pavljnk, d’empoisonner un enfant malade de 12 ans, Lena Renklach. Comme Pavljnk avait refusé d’empoisonner l’enfant, des policiers exécutèrent l’enfant près de la maison sous prétexte qu’il essayait de s’enfuir. »

« En 1942, pour préserver les enfants de la famine et de la mort, onze d’entre eux avaient été partagés entre les habitants de la localité et seize placés chez des parents. »

Je continue et lis maintenant ce qui arriva ultérieurement aux enfants restés à la maison d’enfants :

« Le 23 septembre 1942, vers 7 heures du soir, un camion de 5 tonnes apparut dans la cour de la maison d’enfants, occupé par six soldats allemands armés. Le chef du groupe, un dénommé Max, expliqua que les enfants allaient être emmenés à Brest. Il ordonna qu’on les monte sur le camion. On y plaça ainsi 55 enfants avec leur monitrice, Grocholskaya. Scharzmalov Tossia, une fillette de 9 ans, réussit à sortir du camion et à se sauver. Mais les 54 enfants restant et leur monitrice furent dirigés sur la gare de Dubitz, à 1, 5 kilomètre du village de Leplevka. Le camion s’arrêta à 800 mètres de la rivière Bug de l’Ouest, à un endroit où se trouvait un poste de tir frontière. Les enfants furent déshabillés, comme en témoigne le linge retrouvé dans le camion à son retour à Domatchev, et fusillés. »

Je passe le passage suivant du rapport. Des documents ont prouvé que, lors des exécutions collectives, les Allemands coupaient tout vivants les enfants en deux et les jetaient ensuite dans un feu. Pour le prouver, je m’appuie sur la déposition du témoin Hamaidas, du village de Lisinchi, dans la région de Lwow, qui a été interné par les Allemands au camp de concentration de Janov à Lwow. Hamaidas, sur l’ordre des criminels allemands, avait pour tâche de brûler les corps des fusillés. De ce fait, il devait assister à des exécutions en masse de civils, hommes, femmes et enfants.

La déposition d’Hamaidas a déjà été soumise au Tribunal en même temps que d’autres documents relatifs au camp de Lwow, sous le n° URSS-6 (c). Je désire en lire deux lignes figurant à la page 55 du livre de documents. Je commence à la onzième ligne à partir du bas :

« J’ai assisté en personne à de telles atrocités. Le bourreau attrapait l’enfant par les jambes, le déchirait en deux, puis le jetait au feu. »

Les tueurs nazis, qui fusillaient les adultes, trouvaient inutile de gaspiller des balles pour des enfants. Quand ils ne jetaient pas les enfants vivants dans les fosses, ils les assommaient en les frappant avec des objets pesants ou en leur broyant la tête contre le sol.

Pour le prouver, je m’appuie sur un document qui a déjà été présenté au Tribunal sous le n° URSS-6 (c), en même temps que d’autres documents de la commission médico-légale qui procéda aux exhumations dans le camp de Janov. Je ne citerai que deux lignes des conclusions de ce rapport. Le Tribunal trouvera cette citation dans les conclusions des médecins légistes relatives au camp de Janov, au verso de la page 330, paragraphe 2, à partir du haut, deuxième colonne, du livre de documents. J’en cite le court passage suivant : « Les bourreaux ne pensaient pas devoir gaspiller des munitions pour des enfants. Ils les assommaient tout simplement avec un objet pesant. Des enfants étaient coupés en deux avec des scies rouillées, étaient soumis à toutes sortes d’autres tortures des plus douloureuses. »

Je demande au Tribunal la permission de lire un paragraphe de la note du Commissaire du peuple pour les Affaires étrangères d’URSS, en date du 27 avril 1942. Le Tribunal trouvera le passage dont je vais donner lecture au recto de la page 8, deuxième colonne, deuxième paragraphe :

« Les occupants soumettent les enfants et les adolescents aux tortures les plus raffinées. Parmi les cent enfants blessés et mutilés par les tortures, actuellement en traitement à l’hôpital Roussakovski à Moscou et qui avaient été victimes de la terreur hitlérienne dans la région maintenant libérée de Moscou, se trouvent par exemple :

Un garçon de 14 ans, Vanya Gromov, du village de Novinkia, à qui les nazis avaient coupé la main droite avec une scie rouillée après l’avoir attaché à une chaise avec des courroies. Vania Kmkov, 12 ans, du village de Kryukovo, région de Koursk, auquel ils ont coupé les mains et qu’ils ont chassé vers les lignes russes, perdant abondamment son sang. »

Je saute la suite du document, deux pages, qui traitent de faits analogues et qui confirment ce que je viens de dire. Des enfants furent les premiers à être asphyxiés à l’oxyde de carbone dans des « camions à gaz ». Pour le prouver, je me référerai au document déjà présenté sous le n° URSS-1, rapport de la Commission extraordinaire d’État sur « les crimes des fascistes allemands dans la région de Stavropol ». Le Tribunal trouvera un extrait de ce rapport à la page 269 du livre de documents, quatrième paragraphe. J’en commence la citation :

« Il a été établi qu’en décembre 1942, sur l’ordre du chef de la Gestapo de la ville de Mikojanschachar, l’Oberleutnant Otto Weber, fut perpétré de façon particulièrement cruelle un massacre d’enfants soviétiques atteints de tuberculose osseuse et qui se trouvaient en traitement au sanatorium de Teberda. Des témoins oculaires de ces crimes, des employés du sanatorium pour enfants, la garde-malade S. E. Ivanoff et l’infirmière M. I. Palonpanova ont déclaré :

« Le 22 décembre 1942, un véhicule allemand se présenta à l’entrée de la première section du sanatorium. 7 soldats allemands qui étaient arrivés avec la voiture firent sortir de force du sanatorium 54 enfants gravement malades ; les plus jeunes avaient 3 ans. Puis ils les entassèrent sur plusieurs épaisseurs dans le véhicule. Il s’agissait d’enfants malades ne pouvant pas bouger et, pour cette raison, il leur était impossible d’entrer eux-mêmes dans le véhicule, même par la force. Aussi on les y entassait. La portière fut refermée et du gaz insufflé dans le véhicule pendant qu’il quittait le sanatorium. Une heure après, il entrait à nouveau dans le village de Teberda. Tous les enfants avaient péri, assassinés par les Allemands qui avaient jeté leurs cadavres dans les ravins de Teberda près de Gunatchigir. »

Des enfants furent aussi noyés en pleine mer. J’apporte en preuve le document déjà présenté sous le n° URSS-63. Il s’agit d’un rapport dénonçant les crimes des Allemands à Sébastopol. Le Tribunal trouvera le passage auquel je fais allusion au verso de la page 226 du livre de documents, septième paragraphe, deuxième colonne.

« Non contents de procéder à des exécutions en masse, les nazis noyaient en pleine mer des civils. Sur ces crimes, l’Oberleutnant Friedrich Heile, de l’unité 2-19 MKA des transports maritimes, depuis lors fait prisonnier, a déclaré ce qui suit :

« Alors que je me trouvais dans le port de Sébastopol, j’ai vu des camions amener au port de nombreux groupes de civils parmi lesquels des femmes et des enfants. Tous ces Russes étaient chargés sur des chalands. Nombreux étaient ceux qui résistaient. Mais ils étaient malmenés et hissés à bord par la force. 3.000 personnes en tout furent chargées sur les chalands qui prirent ensuite le large. Pendant longtemps encore, on entendit des cris et des pleurs.

Quelques heures après, les chalands revinrent vides au port. J’appris des équipages que tous les Russes avaient été jetés à la mer. »

Les criminels germano-fascistes dirigeaient intentionnellement le feu de leurs batteries lourdes sur les crèches, les écoles, les hôpitaux et autres institutions pour enfants de la ville de Leningrad encerclée par eux. Je présente au Tribunal le rapport général de la Commission de Leningrad pour l’investigation des crimes fascistes, sous le n° URSS-85. Je ne citerai pas longuement ce rapport. J’attire l’attention du Tribunal sur le fait qu’à la page 347, tome II, quatrième paragraphe, dans le livre de documents, on trouve la liste des bâtiments soumis au tir allemand, liste confirmée par les journaux de campagne des Allemands eux-mêmes. Voici quelques-uns de ces bâtiments :

N° 736 : école dans la rue Baburinsk ;

N° 708 : institut pour la protection de la mère et de l’enfance ;

N° 192 : palais des pionniers.

Je vais citer un court extrait des dépositions du directeur de l’école n° 218, extrait que le Tribunal trouvera à la page 346, tome II, premier paragraphe. Le rapport du directeur de l’école n° 218, au 13 de la rue Rubinstein, dit ceci :

« Le 18 mai 1942, l’école n° 218 a été soumise à un tir d’artillerie. Un garçon de 12 ans, Lenja Isarow, fut tué. Une petite fille, Dora Binamova, en train de mourir, gémissait de douleur : Maman, comment vais-je pouvoir marcher sans mon pied », dit-elle. Léo Hendelev perd son sang abondamment. On lui porte secours, mais il est trop tard. Il meurt dans les bras de sa mère en prononçant les mots : « Maudit soit Hitler. » Eugen Kutariev, bien que grièvement blessé, supplie qu’on ne cause pas d’émotion à son père qui a le cœur malade. Les maîtres d’école et les grands élèves portent secours aux blessés. »

Ceci termine mes citations consacrées à Leningrad. Je passe deux pages du texte et j’attire l’attention du Tribunal sur la page 355 du livre de documents, deuxième colonne, sixième paragraphe, où figure un document que nous présentons sous le n° URSS-8. C’est le rapport de la Commission extraordinaire d’État sur les crimes monstrueux du Gouvernement allemand à Auschwitz.

Je vais citer quelques courts extraits du chapitre intitulé « Meurtres d’enfants ». Pendant que je lirai ces passages, je demande au Tribunal de bien vouloir consulter l’album d’Auschwitz, pages 47, 48 et 49 où il trouvera des photos qui montrent clairement quel point d’amaigrissement et d’épuisement avaient atteint les enfants internés dans ce camp. Je passe le premier paragraphe et je commence la citation :

« L’enquête a révélé que les Allemands soumettaient les enfants de 8 à 16 ans à des travaux physiques extrêmement durs, les mêmes que ceux qu’ils exigeaient des adultes. Ces travaux qui surpassaient leurs forces, les tortures, les coups, amenaient très vite ces enfants à un état d’épuisement complet. Alors, on les tuait. »

L’ex-détenu Jakob Gordon, médecin de la ville de Vilnius, fait la déposition suivante :

« Au début de 1943, 164 garçons furent tués dans le camp de Birkenau. On les amena à l’hôpital, où, par des injections d’acide phénique dans le cœur, on les tua. »

L’ex-détenu Waldraut de Dusseldorf, en Allemagne, a fait la déposition suivante :

« En 1943, au moment où nous travaillions à élever un mur autour du four crématoire n° 5, j’ai vu de mes propres yeux les SS lancer dans le feu des enfants vivants. »

Voici maintenant ce que racontent eux-mêmes les enfants sauvés par l’Armée rouge, sur les tortures qu’ils eurent à endurer de la part des bêtes fascistes.

Je saute le paragraphe suivant et demande au Tribunal de considérer pendant ma lecture la page 50 de l’album sur Auschwitz où y figurent les photos d’un garçon de 12 ans, Schimpick, et d’un autre garçon de 13 ans, Mandel. Ces photos montrent quels préjudices physiques ces enfants ont eu à subir d’expositions au froid. Je recommence à citer :

« Un garçon de 9 ans, Andréas Lerintziakoch, né à Kioz (Hongrie), a fait la déclaration suivante :

« Dès la date de notre transfert au bloc 22 du camp, nous avons été battus, surtout par les femmes allemandes qui nous gardaient. « Elles nous frappaient avec des bâtons. Pendant mon séjour au « camp, le Dr Mengele me fit des prises de sang à de nombreuses reprises.

« En novembre 1944, tous les enfants furent transférés au camp A, dénommé camp des Tziganes. Comme à l’appel l’un des enfants manquait, la directrice du camp des femmes, Brandem, et son assistante, Mengele, nous chassèrent dehors, à une heure du matin.Nous restâmes jusqu’à midi, exposés aux rigueurs du froid. »

Je saute les trois paragraphes suivants et je passe au dernier paragraphe :

« Parmi les détenus libérés du camp d’Auschwitz qui furent examinés par des médecins, se trouvaient 180 enfants dont 52 âgés de moins de 8 ans et 128 de 8 à 15 ans. Tous étaient arrivés au camp au cours du deuxième semestre de 1944, c’est-à-dire qu’ils avaient passé de 3 à 6 mois au camp. Ces 180 enfants ont tous été examinés par des médecins. Cet examen a établi que 72 d’entre eux souffraient de tuberculose pulmonaire ou glandulaire, 49 de sous-alimentation et étaient dans des états d’épuisement très accentué, 31 de suites de refroidissements. »

Je présente maintenant au Tribunal le document URSS-92. Il s’agit d’instructions de la direction du Ravitaillement et de l’Agriculture, intitulées « Traitement des femmes enceintes non allemandes ». Ce document apporte la preuve que dans leur haine des peuples slaves, les criminels germano-fascistes se proposaient d’exterminer les enfants, avant même leur naissance. Le Tribunal trouvera le document auquel je me réfère à la page 362 du tome II du livre de documents. Je vais lire deux courts extraits de ce document :

« Depuis quelque temps, on remarque une augmentation notable de la natalité chez les femmes de nationalité non allemande. Il en résulte d’abord des complications dans l’utilisation de la main-d’œuvre technique et surtout cela représente un danger politique et démographique à ne pas sous-estimer. »

Je saute un paragraphe et continue ma citation :

« La solution la plus simple permettant de prévenir ces difficultés est de signaler le plus rapidement possible les femmes enceintes aux organismes chargés de l’emploi de la main-d’œuvre. »

Je vous prie de prêter particulièrement attention au dernier paragraphe.

« Ces organismes devront alors essayer d’amener ces femmes à se laisser avorter. »

Je termine ma citation.

Au dépouillement de la documentation relative à la terreur déclenchée par les nazis dans l’Est européen, il ressortira que les crimes commis par des nazis contre ces enfants souilleront à jamais de la pire des façons l’histoire du fascisme allemand.

Je demande maintenant, Monsieur le Président, l’autorisation de présenter les photos que je n’ai pu projeter ce matin pour des raisons techniques. Si vous le permettez, je vais les présenter immédiatement. J’espère avoir plus de chance que la dernière fois pour cette projection. Je souligne que ces documents n’ont pas été choisis pour les atrocités qu’ils montrent, mais simplement pour présenter les méthodes les plus typiques des criminels nazis. (0n projette les photographies.)

1. Cette photo montre comment on exécutait un homme. La photographie a été prise dans la région de Moscou, au moment du siège de cette dernière ville par les Allemands. L’homme a été exécuté en représailles à la suite de la mort d’un Allemand.

2. Ici on assiste à l’exécution de quatre hommes. Les quatre jeunes gens condamnés à mort se tiennent au bord d’une fosse qu’ils ont creusée eux-mêmes. Le Tribunal peut constater que les criminels germano-fascistes qui se trouvent à l’orée du bois se moquent de leurs victimes.

3. Il s’agit maintenant de l’exécution elle-même. Méthode typiquement allemande : un coup de revolver dans la nuque. Le Tribunal peut se rendre compte d’après les photographies que les hommes qu’on exécute sont en train de crier.

4. Les photos que je vais maintenant projeter sont des photos de l’Obergruppenfuhrer Karl Strock, chef de la Gestapo de Nipol.

Il s’agit ici d’une exécution collective. On a donné l’ordre aux victimes de se déshabiller sur les lieux de l’exécution. Vous voyez une jeune fille déjà dévêtue. A côté d’elle, son frère, Vakob, est en train, lui aussi, de se déshabiller.

Je souligne que cette photo a été prise au mois de décembre, époque particulièrement froide dans ces régions.

5. Ici des femmes déshabillées qui doivent être exécutées. Auparavant elles ont été obligées de poser devant l’appareil. A côté des femmes, une fillette terrorisée, qui cherche à se cacher derrière sa mère. Vous la voyez à gauche de la photo.

6. Encore une photo du même Strock, toujours au mois de décembre. Des femmes déshabillées sont conduites au lieu d’exécution.

7. Un autre groupe : des hommes, une femme qu’un enfant suit. On les conduit à l’exécution. L’enfant est serré contre sa mère.

8. Le moment de l’exécution. C’est une photo d’amateur et elle n’est pas très nette. Déjà quelques cadavres. Si vous observez la photo avec attention, vous verrez à droite une partie de mitrailleuse. Je demande au Tribunal de considérer attentivement la position des corps. De cette position il ressort que cette exécution a probablement eu lieu dans les premiers mois de l’occupation. Les cadavres sont jetés pêle-mêle dans la fosse. Plus tard, les bourreaux forcèrent les condamnés à se placer eux-mêmes dans la fosse et les exécutaient alors en série.

9. Le même groupe. Vous les voyez étendus après l’exécution et des enfants se trouvent aussi parmi le groupe.

10. J’ai déjà rapporté au Tribunal comment, à Janov, les exécutions se faisaient au son d’un orchestre qui jouait le « Tango de la mort ». Un détenu du camp, le Professeur Stricks, dirigeait l’orchestre, en collaboration avec le chef d’orchestre Mundt. A droite de la photo, vous voyez, en uniforme blanc, le commandant du camp, dont j’ai parlé dans la première partie de mon exposé. J’attire votre attention sur un autre point caractéristique. Derrière le chef du camp, l’Obergruppenführer Gebauter, en uniforme blanc, et son chien Rex. Ce chien nous est connu par de nombreux documents. Il était dressé à déchiqueter vivants les détenus. A droite, l’orchestre de la mort. Il faut remarquer l’attitude de l’Obergruppenführer se rendant à l’exécution collective.

11. Voici une potence, de celles que les germano-fascistes érigeaient pour asseoir dans les territoires momentanément occupés de l’URSS leur régime de Gestapo. Vous voyez une femme, se tenant à côté des gens de la Gestapo, rire à la vue de la potence.

12. Deuxième potence, sur la même place du marché, à Lwow. C’est encore une photo saisie dans les archives de la Gestapo de Lwow.

13. Voici des documents que j’ai déjà présentés au Tribunal. Vous vous souvenez que des rues entières étaient plantées de potences auxquelles pendaient les corps de citoyens soviétiques habitant ces rues à Lwow. Je signale au Tribunal une note du Commissaire du peuple aux Affaires étrangères mentionnant que les mêmes faits se reproduisirent à Kharkov.

14. Autre photo de cette même rue, à Lwow. C’est encore une photo saisie dans les archives de la Gestapo.

15. La potence n’était pas le seul moyen d’exécution employé. On guillotinait aussi, sur une grande échelle. Voici une guillotine qui a beaucoup servi. Voici les têtes de personnes guillotinées à la prison de Dantzig. Ces photos ont été prises à l’institut anatomique de Dantzig où l’on avait amené les corps des guillotinés après l’exécution.

16. Je ne veux pas produire trop de photos de tortures. Je me contenterai de passer quelques vues typiques. Cette photo a été saisie sur le cadavre d’un employé de la Gestapo. Elle montre une jeune fille frappée. La photo suivante vous montrera comment agissait la Gestapo.

17. Ici, nous ne voyons pas très bien si la jeune fille est pendue par les cheveux ou réellement pendue. Cependant, aux gestes convulsifs de ses mains, il est à penser que la corde vient de lui être passée autour du cou. C’est clair pour un criminaliste. J’attire votre attention sur le visage du scélérat qui est en train de la pendre.

18. Une photo saisie sur le cadavre d’un employé de la Gestapo. Je tiens à souligner à quel point les germano-fascistes bafouaient la pudeur des femmes russes. Voici des Ukrainiennes obligées de défiler nues devant leurs bourreaux, qui les observent en riant.

19. C’est une photo qui doit faciliter la compréhension de ce qui suit : la machine à moudre les os humains. Un détenu se tient à côté, chargé de son fonctionnement. Les os d’environ 200.000 hommes ont été broyés dans ce concasseur. La Commission a établi qu’environ 200 mètres cubes de poudre d’os sont sortis de cette machine. Je reviendrai sur la question et présenterai au Tribunal des documents qui l’éclaireront.

Veuillez me permettre maintenant de passer à la présentation de documents à charge complémentaires.

Dans la première partie de mon exposé, j’ai surtout parlé des exécutions collectives perpétrées par les Allemands sur des enfants, des méthodes bestiales qu’ils utilisaient pour ce faire. En effet, faire régner la terreur chez les enfants, la terreur la plus brutale, la plus bestiale, est ce qu’il y a de plus caractéristique de la bestialité germano-fasciste. Je passe maintenant à la présentation de documents relatifs aux exécutions collectives d’adultes dans divers pays de l’est de l’Europe.

Je présenterai d’abord de courts extraits du rapport du Gouvernement polonais que le Tribunal trouvera à la page 127 du livre de documents, au deuxième paragraphe. On y décrit ce qu’on appelle « le bain de sang d’Anin ». Je cite ce passage :

« A la fin de décembre 1939, un policier polonais fut abattu aux environs de Varsovie par un bandit. Des recherches révélèrent que le meurtrier se cachait dans un restaurant de Vaver près de Varsovie. Deux policiers vinrent l’arrêter. Alors que ces policiers entraient dans le restaurant, il ouvrit le feu, tuant vraisemblablement un policier et blessant l’autre. En réponse, les autorités allemandes ordonnèrent pour le 26 décembre 1939 des représailles massives et une expédition punitive se produisit contre ce village.

« Un détachement de protection du territoire, commandé par un officier, se rendit à Vaver et dans la région de villégiature d’Anin. Ces deux localités furent encerclées par la troupe. Le propriétaire du restaurant fut pendu sur-le-champ et son cadavre resta pendu devant sa maison pendant trois jours. En même temps, la population mâle de ces localités se vit petit à petit chassée des maisons. Après que de cette façon les Allemands eurent rassemblé environ 170 hommes, ils leur firent faire face au mur de la gare et les laissèrent plusieurs heures les bras croisés derrière la tête. Après contrôle des papiers, quelques-uns des hommes furent relâchés et aux autres, la grosse majorité, on annonça qu’ils allaient être fusillés. On les conduisit dans un champ, on les répartit par groupes de 10 à 14 et on les abattit à la mitrailleuse. On a retrouvé sur le lieu d’exécution 107 tombes individuelles. Parmi les fusillés, on compte deux médecins, 30 fusillés avaient moins de 16 ans et 12 plus de 60 ans. L’un d’eux était citoyen américain d’origine polonaise. Son fils fut fusillé en même temps que lui.

Je saute le paragraphe suivant du rapport polonais, qui concerne la tuerie de Pastoszyn et citerai sans plus un avis paru dans la Weichsel Zeitung (journal allemand, en date du 23 octobre 1939), avis qui est rappelé dans le rapport du Gouvernement polonais. Je cite :

« Dans le district de Tuchol, non loin de Prepine, la ferme du Volksdeutscher Fritz a été incendiée au cours de la nuit du 21 au 22 octobre par des bandits polonais. Le « Volksdeutscher » Fritz en eut une crise cardiaque. Sur l’ordre des autorités civiles, une expédition punitive a été envoyée contre cette localité pour montrer aux coupables que des actes de ce genre seraient réprimés avec la plus grande sévérité. En représailles, dix Polonais, connus pour leur hostilité envers les Allemands, furent fusillés. En outre, la population polonaise des environs reçut l’ordre de reconstruire les bâtiments incendiés et de réparer les dommages causés. »

Je saute la moitié de la page suivante et expose brièvement les circonstances dans lesquelles eut lieu la tuerie de Jozefow en Pologne. Le Tribunal trouvera le passage que je cite à la page 128, deuxième paragraphe du livre de documents :

« Vers la mi-janvier, en 1940, une famille de colons allemands du village de Jozefow était massacrée après pillage par des bandits, d’après ce que les Allemands ont annoncé plus tard dans leurs journaux. Une expédition punitive fut envoyée contre Jozefow à la suite de cela. »

Je saute quelques lignes et continue :

« L’expédition devait noyer l’incident dans le sang. Tous les hommes qu’on put arrêter à Jozefow et dans les environs, même des garçons de 11 ans, furent fusillés sur place. En tout, il y eut 300 victimes. »

En Yougoslavie, les massacres collectifs de civils eurent un caractère particulièrement cruel. Je cite le rapport du Gouvernement yougoslave intitulé « Extermination massive de la population civile et destruction des localités habitées ».

Je demande au Tribunal de joindre au dossier comme document à charge sous le n° URSS-188 la photocopie de l’ordre du Generalleutnant Neidtnolt. Je cite le passage de cet ordre inséré dans le rapport du Gouvernement yougoslave :

« Les localités de Zagnjezde et d’Udora doivent être détruites. La population mâle de ces localités doit être pendue. Les femmes et les enfants doivent être envoyés à Stoliatz. »

Je saute la page suivante du texte et cite un passage où il est question des crimes germano-fascistes à Kragujevac. Confirmant le rapport du Gouvernement yougoslave, je présente également au Tribunal une photocopie certifiée conforme d’un ordre de la Standort-Kommandantur allemande de Kragujevac, dans lequel la Kommandantur elle-même reconnaît l’exécution de 2.300 personnes. Ce document sera présenté au Tribunal sous le n° URSS-74 et je vous demande de l’accepter comme preuve. Je cite maintenant le passage annoncé du rapport yougoslave, concernant les exterminations en masse à Kragujevac :

« Il s’agit d’exécutions collectives perpétrées par l’expédition punitive du commandant Kœnig, le 21 octobre 1941, à Kragujevac. En plus de Kœnig, prirent part à l’organisation et à la réalisation de ce crime le Kreiskommandant Bischofshausen et l’Ortskommandant Dr Zimmermann, entre autres. Déjà dix ou quinze jours avant la perpétration du crime arriva un bataillon à Kragujevac pour renforcer la garnison allemande. On procéda d’abord à l’anéantissement des villages de Mechkovatz, Marsich et Grochnitz situés à proximité de Kragujevac. L’expédition punitive tua à Mechkovatz 66 personnes, à Marsich 161 et à Grochnitz 100. Toutes les victimes étaient de paisibles civils. »

Je saute deux paragraphes et continue ma citation :

« Après que l’expédition punitive, ayant perpétré ces crimes, eut atteint Kragujevac, les Allemands se mirent à réaliser leur plan d’extermination de sa population, en particulier des intellectuels serbes. Dès le début d’octobre, le Kreiskommandant, le Dr Zimmermann, insistait auprès des directeurs d’écoles sur le fait que les écoliers qui n’assistaient pas régulièrement aux cours seraient considérés comme saboteurs et fusillés. Après de telles menaces, tous les élèves vinrent régulièrement à l’école. Le 18 octobre 1941, on arrêta, d’après une liste préétablie, tous les Juifs de sexe masculin ainsi que tous ceux qui étaient considérés comme communistes. Ils furent internés dans les baraques de l’ancienne compagnie yougoslave de transport automobile à Stanovljensko-Polje où ils furent laissés sans nourriture jusqu’au 20 octobre. Au soir de ce jour, vers 18 heures, ils furent tous fusillés. Ils étaient près de 60.

Le même jour, le 20 octobre, commença le rassemblement des hommes de Kragujevac. Après que toutes les sorties de la ville eurent été bloquées, les Allemands envahirent tous les bâtiments publics et en firent sortir tous les fonctionnaires. Ensuite, on alla chercher au lycée et à l’école normale professeurs et élèves ayant dépassé la cinquième ainsi que les directeurs. »

Je passe les deux phrases suivantes et je cite :

« En même temps que ces derniers, on transféra dans une caserne tous les détenus de la prison de Kragujevac, on les rassembla dans la cour de la caserne et là, on leur enleva tous leurs objets personnels. Sur-le-champ, on fusilla les détenus de la prison, environ 50 hommes. Les autres furent enfermés dans des baraques. Le jour suivant, le 21 octobre, on commença à partir de 7 heures du matin à les conduire par groupe au « champ de Stanovijensko » où ils furent exécutés à la mitrailleuse. Ceux qui n’expiraient pas immédiatement étaient ensuite achevés à coups de pistolets ou d’armes automatiques. »

J’interromps cette citation pour poursuivre, trois paragraphes plus loin :

« Les parents des victimes de ces exécutions collectives se sont vu interdire l’accès du lieu de la tuerie avant que ne soit terminée l’inhumation des victimes et qu’il en ait disparu toutes traces. Il fut également interdit aux parents des victimes de faire célébrer des messes ou services commémoratifs pour les fusillés. Il était interdit dans les faire-part d’indiquer l’exécution comme cause du décès. »

Je saute les cinq paragraphes suivants et prie le Tribunal de porter son attention sur un extrait également très bref du rapport du Gouvernement yougoslave ayant trait à la marche sanglante ou marche de la mort, de sinistre mémoire, qui eut lieu dans la région de la petite localité de Yarak-en-Srem. Je cite la partie du rapport du Gouvernement yougoslave qui se rapporte à ce crime monstrueux des hitlériens.

« Au début de septembre 1941, une importante expédition punitive allemande rassembla toute la population mâle de Schabach entre 14 et 70 ans et leur fit traverser la Save et gagner dans des conditions spéciales le village de Yarak-en-Srem. C’est ce qu’on a appelé la « marche sanglante ». Près de 5.000 hommes durent, au pas de course, couvrir une distance de 23 kilomètres, aller et retour. Ceux qui ne pouvaient suivre l’allure et s’arrêtaient en chemin étaient impitoyablement abattus sur-le-champ. Si l’on tient compte du fait que la colonne comprenait beaucoup de vieillards et d’hommes de médiocre constitution, on s’explique facilement le nombre considérable des victimes, en particulier au cours de la traversée du pont sur la Save. »

J’interromps ici la citation de ce paragraphe et je continue au paragraphe suivant :

« Sur le chemin du retour, ils rencontrèrent un autre groupe de 800 paysans, également astreints à couvrir le même parcours. Mais ils étaient traités de façon encore plus cruelle. Ils durent courir avec les bras levés. Tout le long de la route ils furent abattus systématiquement ; 300 d’entre eux seulement purent regagner Yarak vivants. »

J’arrête la citation et saute la page ainsi que la suivante. Pour finir la présentation des documents prouvant l’extermination massive de la population yougoslave, je demande au Tribunal de me permettre de présenter un avis officiel du Commandant en chef des Forces armées allemandes en Serbie. Ce document est présenté sous le n° ÜRSS-200. Je ne ferai aucun commentaire. Je citerai simplement ce document, en empruntant le texte original du rapport du Gouvernement yougoslave.

Je cite : « Le Commandant en chef des Forces armées de Serbie communique ce qui suit :

« Dans le village de Skela, une bande communiste a ouvert le feu sur un camion militaire allemand. Il a été établi que certains habitants de la localité avaient eu connaissance des préparatifs de cette attaque. Il a été aussi établi que ces habitants avaient la possibilité de prévenir secrètement le poste de gendarmerie serbe le plus proche. Il a été établi enfin qu’ils pouvaient prévenir sans aucun risque pour eux le camion militaire allemand de l’attentat qui se préparait contre eux. Ils ne l’ont pas fait et se sont ainsi prononcés pour les bandits.

Le village de Skela a été incendié et rasé. Dans quelques maisons, au moment de l’incendie, des munitions ont sauté, ce qui prouve la complicité des habitants du village dans ce crime.

Tous les habitants mâles du village dont la complicité a été « établie ont été fusillés. 50 communistes ont été pendus immédiatement. »

Je saute cinq pages de mon exposé et demande au Tribunal de porter son attention sur un rapport du Gouvernement grec qui se trouve aux pages 39 et 40 de la traduction russe de ce rapport et montre que les mêmes méthodes criminelles inhumaines d’extermination collective étaient employées par les criminels nazis dans les régions provisoirement occupées de la Grèce. J’en commence la citation :

« Aussitôt après l’occupation de la Grèce, le Haut Commandement allemand fit savoir ce qui suit : « Les localités à proximité desquelles auront eu lieu des attentats contre des soldats allemands seront incendiées de fond en comble et leurs habitants rendus responsables ». En accord avec cet avis, on commença à procéder à des représailles. Quantité de personnes, pour la plupart tout à fait innocentes, furent exécutées et les villages de Skini, Prassi et Kandanos (je prononce peut-être mal ces noms car je ne connais pas la langue grecque) furent complètement incendiés, en représailles du meurtre par les milices locales de quelques parachutistes allemands pendant l’invasion de la Crète.

Là où s’élevaient auparavant ces villages, on avait érigé des panneaux où l’on pouvait lire à titre d’avertissement ce qui suit en allemand et en grec : « Anéanti en représailles du meurtre bestial d’un peloton de parachutistes ainsi que d’un demi-peloton de pionniers attirés dans une embuscade par des hommes et femmes armés ».

La politique des représailles, qui ne fut d’abord appliquée que sporadiquement, prit petit à petit plus d’ampleur, surtout lorsqu’en 1943 des guérillas se mirent à entreprendre dans tout le pays des opérations de résistance. La technique était partout la même.

« Au lendemain d’un acte de sabotage ou de quelque action des partisans, dans le voisinage d’un village, les troupes allemandes apparaissaient. On demandait à la population de se rassembler sur la place du marché du village ou en quelque endroit approprié sous prétexte de quelque communication à lui faire et là, on abattait tout le monde à la mitrailleuse. Ensuite, les Allemands incendiaient ou même quelquefois ouvraient un feu d’artillerie sur le village, après l’avoir pillé. Ils tuaient les gens dans les rues, dans les maisons, dans les champs, sans considération de sexe ou d’âge. Dans certains cas exceptionnels, seuls les hommes furent exécutés, à partir de 16 ans. Parfois, alors que les hommes avaient fui dans les montagnes, les Allemands exécutèrent vieillards, femmes, enfants restés dans le village dans l’espoir que, vu leur âge ou leur sexe, ils seraient épargnés. »

On peut citer, comme exemples caractéristiques de ce fait, les noms des villages d’Arachova, Kolovryta, Gestamon, Klissoura, Kommeno, Lissovouni. Quelques villages furent détruits pour la simple raison qu’ils se trouvaient dans une région où opéraient des partisans. »

Je saute le paragraphe suivant, qui ne se rapporte pas au même sujet, et je continue à citer :

« Le nombre de civils assassinés se monte presque à 30.000. »

Je passe maintenant à la présentation des documents prouvant l’extermination en masse par les Allemands des civils de l’URSS. En ce qui concerne les circonstances ayant entouré les exécutions en masse de citoyens soviétiques, nous sommes présentement en mesure de nous faire une idée sur la question, non seulement d’après des déclarations de témoins oculaires ou même des meurtriers, mais aussi, bien que moins parfaitement, en nous basant sur la documentation rassemblée par des médecins légistes. Je dis « moins parfaitement car à partir de 1943, par crainte de représailles pour les crimes commis, les hitlériens commencèrent à faire disparaître toutes traces de leurs crimes. Ils déterraient et brûlaient les cadavres de leurs victimes, en faisaient moudre les os et dispersaient les cendres dans les champs. Ils utilisaient les résidus de l’incinération ainsi que la poudre d’os comme engrais dans les champs et comme matériel de rechargement des routes. Mais en dépit du mal que se donnèrent les criminels pour effacer toutes traces de leurs méfaits, il leur fut impossible de faire disparaître tous les cadavres des personnes assassinées par eux.

La première extermination collective au cours de laquelle furent exécutés en bloc des dizaines de milliers de civils paisibles et innocents fut l’opération de Kiev. Pour qu’il se rende compte de l’ampleur de ces monstruosités, je demande au Tribunal de prendre en main le rapport de la Commission extraordinaire d’État, rapport déjà présenté sous le n° URSS-9. Je cite un passage situé au verso de la page 238 du livre de documents, à la fin du troisième paragraphe en partant du haut :

« Dans la région de Kiev ont été torturés à mort, fusillés ou asphyxiés dans des camions à gaz plus de 195.000 citoyens soviétiques, dont : a) Plus de 100.000 hommes, femmes, enfants et vieillards à Baby-Yar ; b) Plus de 68.000 prisonniers de guerre et civils soviétiques à Damitza ; c) Dans une tranchée anti-char située près du camp de Syretzk, plus de 25.000 civils et prisonniers soviétiques ;

d) 800 fous à l’intérieur de l’hôpital Kirillov ; e) Environ 500 paisibles citoyens soviétiques sur le territoire du monastère Pechersk à Kiev. f) 400 paisibles civils au cimetière de Loukeanov. »

Je continue à citer ce document à la page 238, deuxième colonne, sixième paragraphe, et en lis de courts extraits :

« En 1943, sentant le peu de solidité de leurs positions à Kiev, les occupants projetèrent de faire disparaître toutes traces de leurs crimes. Ils déterrèrent les corps de leurs victimes et les brûlèrent. Pour ce travail d’incinération, les Allemands utilisaient, à Baby-Yar, les détenus du camp de Syretzk. L’officier SS, Topaida, dirigeait le travail. Il était secondé par certains membres de l’État-Major de la gendarmerie, Johann Merker et Focht, ainsi que par le SS-Zugführer Rêver. Les témoins L. K. Ostrovski, S. B. Berliand, V. U. Davydov, J. A. Steuk, W. M. Brodski, qui échappèrent de l’exécution de Baby-Yar du 29 septembre 1943 ont déclaré :

« Nous étions prisonniers de guerre au camp de concentration de Syretzk à la périphérie de Kiev. Le 18 août, cent d’entre nous furent dirigés sur Baby-Yar. Là, on nous enchaîna et on nous força à exhumer et à brûler les cadavres de citoyens soviétiques supprimés par les Allemands. Les Allemands avaient amené du cimetière des pierres tombales en granit et des grilles de fer. Ces pierres tombales servirent de soubassements entre lesquels nous plaçâmes des rails et sur ces rails, les grilles de fer comme grils. Sur ces grilles de fer, nous mettions une couche de bois, et sur le bois une couche de cadavres, puis de nouveau une couche de bois, et nous arrosions le tout d’essence. Suivant ce procédé, plusieurs couches de cadavres étaient disposées. On y mettait ensuite le feu. Chacun de ces brasiers englobait environ de 2.500 à 3.000 cadavres. Les Allemands avaient désigné des équipes spéciales chargées de prélever sur les cadavres boucles d’oreilles, bagues et dents en or. »

« Sitôt les cadavres incinérés, on préparait de nouveaux brasiers et « ainsi de suite. Les os étaient finement broyés à la machine, les cendres dispersées dans les champs, comme cela avait été ordonné, pour qu’aucune trace ne subsistât. Ainsi, nous travaillions de 12 à 15 heures par jour. Pour activer le travail, les Allemands employaient des machines à déterrer les cadavres. Du 18 août jusqu’au jour de notre évasion, le 29 septembre, nous avons brûlé à peu près 70.000 cadavres. »

J’arrête la lecture de ce document et demande au Tribunal de porter son attention sur un nouveau document qui se trouve à la page 287 du tome II du livre de documents, deuxième colonne, cinquième paragraphe. Il s’agit d’un rapport de la Commission extraordinaire d’État sur les crimes des envahisseurs germano-fascistes dans la RSS de Lettonie. Le passage sur lequel je voudrais attirer l’attention du Tribunal montre le caractère systématique des exterminations auxquelles procédèrent les nazis dans le bois de Birkenek. Je cite aussi ce passage parce que nous présenterons plus tard une série de films qui se rapportent en partie à ces faits. Je cite :

« Dans la forêt de Birkenek, aux environs de Riga, les hitlériens fusillèrent 46.500 civils paisibles. Le témoin Staboulnek qui habitait non loin de cette forêt nous a déclaré :

« Les vendredi et samedi de Pâques 1942, des cars bondés firent la navette entre la ville et la forêt. J’ai pu compter, de vendredi matin jusqu’à midi, 41 cars passer devant ma maison. Le dimanche de Pâques, de nombreuses personnes ( j’étais du nombre ) se rassemblèrent dans la forêt, sur les lieux de l’exécution. Nous y avons vu une fosse énorme où gisaient les corps des fusillés, des femmes et des enfants, la plupart nus ou ne portant plus que des sous-vêtements. Sur les cadavres des femmes et des enfants, on pouvait apercevoir des traces de tortures ou de mauvais traitements. Plusieurs cadavres portaient des bleus sur le visage, des plaies à la tête ; certains avaient les mains ou les doigts coupés, les yeux crevés ou le ventre ouvert. »

Je saute le paragraphe suivant et continue tout de suite après :

« Sur les lieux de l’exécution, la Commission a découvert 55 fosses d’une superficie totale de 2.885. mètres carrés. »

Je citerai encore un dernier passage de ce rapport :

« Dans la forêt de Dreilin, à 5 ou 7 kilomètres à l’est de Riga, sur la grande route de Luban, les Allemands ont fusillé plus de 13.000 paisibles civils et prisonniers de guerre. »

Le témoin Canus a déposé :

« Dès août 1944, les Allemands commencèrent à ouvrir les fosses et à brûler les cadavres, ce qui dura une semaine. La forêt était entourée d’un cordon de sentinelles allemandes armées de mitrailleuses. Vers le 20 août commencèrent à arriver de Riga des véhicules noirs, fermés et chargés de soi-disant « réfugiés » parmi lesquels des femmes et des enfants. Ils furent fusillés sur-le-champ et leurs cadavres brûlés immédiatement. Je suis resté caché dans les buissons et ai assisté à ce spectacle effroyable. Les gens criaient affreusement. J’entendais les cris d’« assassins, bouchers, bourreaux ». Les enfants criaient : « Maman, ne nous laisse pas seuls. » Les balles des tueurs mettaient fin à ces cris. »

J’arrête de lire ce document car il ne contient que de semblables descriptions. Je voudrais attirer l’attention du Tribunal sur le fait que, dans cette forêt, 38.000 personnes ont été tuées. Je demande au Tribunal de se référer au document déjà présenté sous le n° URSS-47, rapport de la Commission extraordinaire d’État sur les crimes des envahisseurs roumains et allemands dans la ville et la région d’Odessa. Je citerai deux courts extraits de ce rapport. Le passage auquel je me réfère se trouve à la page 283 du tome II du livre de documents, première colonne, cinquième paragraphe. Je cite :

« Le 21 décembre 1941, les postes de garde roumains se mirent à fusiller les détenus du camp. On conduisait sous bonne garde les détenus jusqu’à un bâtiment à demi-détruit à l’orée d’un bois. Là ils devaient s’agenouiller au bord d’un fossé et étaient exécutés. Les tués, ou le plus souvent les blessés, tombaient dans le fond de la fosse où crépitait un énorme feu de paille, de roseaux et de bois. Les bourreaux jetaient vivants des nourrissons dans les flammes de ce feu gigantesque. Les corps brûlèrent pendant des jours entiers. »

J’arrête la lecture de ce document et demande aux membres du Tribunal de se reporter à la page 283, deuxième colonne, troisième paragraphe. Il y figure un résumé des dates dont nous pouvons disposer. Suivant les chiffres provisoirement établis par la Commission, les occupants germano-roumains ont, dans la ville et la région d’Odessa, exécuté, torturé à mort ou brûlé 200.000 personnes environ.

A l’appui du fait que les criminels allemands, au cours des exécutions collectives entreprises par eux, ont enterré des hommes vivants, je présente sous le n° URSS-37 un rapport de la Commission extraordinaire d’État du 24 juin 1943. Je lirai ce rapport, qui se trouve à la page 359 du tome II du livre de documents. Le passage auquel je me réfère figure à la page 362 du livre de documents.

« Lors de l’ouverture d’une fosse au pied des collines Mielouaya Gora, dans la ville de Kupyansk, on a trouvé à un mètre de profondeur 71 cadavres de fusillés, habitants de cette ville. Parmi eux, 62 cadavres d’hommes, 8 cadavres de femmes et le cadavre d’un nourrisson. Tous les fusillés étaient sans chaussures et plusieurs dévêtus. »

Je cite à partir du quatrième paragraphe :

« La Commission a établi que, dans plusieurs cas, les blessures n’étaient pas mortelles et que, selon toute probabilité, les personnes en question avaient été jetées vivantes dans les fosses et ensevelies vivantes. Ce fait a aussi été certifié par des civils qui passèrent à côté de ces fosses peu après l’exécution et qui ont vu la terre remuer au-dessus de la fosse et entendu des gémissement sourds en sortir. »

Pour confirmer ces faits, je désirerais lire ici l’original d’un document qui est contenu dans le rapport de la Commission extraordinaire d’État relatif à l’interrogatoire auquel elle procéda du témoin Basilev Joseph Ivanovitch, qui eut lieu devant le procureur de la ville de Stanislav. Nous le présentons sous le n° URSS-346. Je lirai en tout deux paragraphes du procès-verbal de l’interrogatoire :

« Au début de 1943 nous brûlâmes les corps des victimes fusillées au cimetière local. Dans quelques cas, des femmes et des enfants avaient été jetés vivants dans les fosses et recouverts de terre. A une femme, dont je ne connais pas le nom, qui demandait à un officier de ne pas la fusiller, ce dernier donna sa parole d’honneur qu’il ne le ferait pas. Il ajouta même « Je vous donne ma parole d’officier que vous ne serez pas fusillée. Après que l’anéantissement du groupe auquel cette femme appartenait fut terminé, l’officier s’en saisit lui-même et la jeta vivante dans la fosse. Elle fut enterrée vivante. »

Les criminels nazis procédaient souvent de cette façon, parce qu’enterrer des hommes vivants conférait à leurs méfaits un caractère de cruauté particulière. En d’autres cas, les gens furent enterrés vivants parce que les criminels ne se donnaient pas la peine de vérifier si les exécutés étaient déjà morts. L’examen des cadavres exhumés des fosses que les fascistes allemands n’avaient pas eu le temps de faire disparaître montre qu’en 1941 et en 1942 ces criminels ne se donnaient pas grand mal pour camoufler les lieux d’exécution malgré les instructions des quartiers généraux fascistes, instructions déjà connues du Tribunal, de garder secrètes ces exécutions et de les cacher.

Je pense que ceci s’explique par le fait que les Allemands, bien qu’ils aient déjà à cette époque subi quelques défaites, étaient encore persuadés de leur victoire finale, et par là même, de l’impunité. Je me réfère à un document déjà présenté au Tribunal parmi d’autres documents sous le n° URSS-2 (a). Il est intitulé « Atrocités perpétrées par les envahisseurs germano-fascistes dans la région de Stalinsk. Il s’agit des conclusions d’une expertise médico-légale sur les atrocités commises par les criminels germano-fascistes aux carrières d’albâtre situées dans les environs de la ville de Artemovsk dans la région de Stalinsk. Je ne lirai qu’un court extrait de ce document, à la page 366 du livre de documents, cinquième paragraphe de la première colonne du texte, c’est-à-dire ce qui suit :

« A 2 kilomètres à l’est de la ville d’Artemovsk, dans un tunnel de la carrière de marbre, à 400 mètres de son entrée, fut découvert un petit passage muré. Après déblaiement de ce mur, on trouva la continuation du tunnel, sous forme d’un étroit couloir de pente rapide et se terminant dans une large grotte ovale : 30 mètres de largeur, 20 mètres de long et 3 à 4 mètres de haut. La grotte entière était remplie de cadavres humains. Seuls, l’accès de la grotte et une étroite travée en son milieu étaient libres de cadavres. Les cadavres étaient pressés les uns contre les autres et tournaient le dos à l’entrée de la caverne, ce qui est caractéristique du mode d’exécution toujours employé par les Allemands : le coup de revolver dans la nuque.

« Les cadavres étaient à ce point pressés les uns contre les autres qu’à première vue on ne voyait plus qu’une masse compacte, un empilement de corps. Des couches de cadavres s’empilaient les unes sur les autres et les corps de ceux qui avaient été fusillés en premier étaient comprimés contre le sol de la grotte par les autres. »

Je saute les deux pages suivantes de ce document et vais, pour finir, citer les conclusions de l’expertise médico-légale. Vous trouverez ce passage à la page 366, deuxième colonne, quinzième paragraphe :

« D’après les déclarations des habitants de la ville d’Artemovsk, plusieurs milliers de personnes portant quelques objets personnels et du ravitaillement furent poussées le 9 novembre 1942 dans les carrières de marbre.

« On commença par remplir la grotte de personnes puis elles furent exécutées soit debout soit à genoux. Sur quoi, on y amena un autre groupe de personnes qui étaient exécutées sur les morts et les blessés du premier groupe. Plusieurs couches de cadavres s’entassèrent ainsi. Nombreux étaient ceux qui essayaient de s’échapper mais, sous la pression des corps, ils mouraient dans d’effroyables tortures. »

Je saute trois autres pages de mon exposé et continue à la page 209. A l’époque des exécutions massives, les criminels germano-fascistes élaborèrent toute une technique pour perpétrer leurs crimes. Je vais citer certaines de leurs méthodes les plus typiques pour que le Tribunal, au cours de l’exposé de certains documents, se rende bien compte du point auquel cette technique criminelle était poussée, du cynisme et de la cruauté diabolique et préméditée qui présidèrent de plus en plus à ces crimes monstrueux. A l’appui de ces faits, je présenterai quelques documents au Tribunal.

LE PRÉSIDENT

Nous allons lever l’audience ; il est 4 heures. Le Tribunal aimerait savoir combien de temps prendra encore la présentation de votre exposé ?

COLONEL SMIRNOV

J’en aurai terminé demain avec la présentation des preuves, Monsieur le Président.

(L’audience sera reprise le 19 février 1946 à 10 heures.)