SOIXANTE-SIXIÈME JOURNÉE.
Samedi 23 février 1946.

Audience de l’après-midi.

LE PRÉSIDENT

J’ai une déclaration à faire. Tout d’abord, en ce qui concerne ce que j’ai dit ce matin, il se peut que le Tribunal entende avant samedi les requêtes relatives aux témoins et documents à décharge des accusés Kaltenbrunner, Rosenberg, Frank et Frick. Cela dépendra de la marche du Procès. J’ai déjà déclaré que ces requêtes doivent être remises au Secrétariat général mercredi avant 17 heures.

Deuxièmement, tous les accusés, à l’exception des huit premiers nommés dans l’Acte d’accusation, devront présenter leurs demandes de témoins et de documents, avec détails justificatifs, avant 17 heures vendredi prochain. Troisièmement, le Tribunal siégera à huis-clos lundi prochain, à partir de 16 heures.

J’ajouterai que ceci n’intéresse pas directement les avocats représentant les organisations criminelles. Ces avocats seront entendus après la fin de l’exposé du Ministère Public, comme cela a déjà été précisé. Ensuite viendra Hess.

SIR DAVID MAXWELL-FYFE

Si le Tribunal désire avoir des précisions sur la question des représailles soulevée par le Dr Exner, M. Dodd est à la disposition du Tribunal.

LE PRÉSIDENT

Oui, le Tribunal désire entendre cela maintenant.

M. THOMAS DODD (Avocat Général américain)

Plaise au Tribunal, je voudrais dire dès le début, que, pendant la suspension d’audience, j’ai préparé assez rapidement quelques notes à ce sujet, en me référant à un travail que nous avions fait précédemment. Je ne suis pas tout à fait en mesure d’entrer dans les détails pour l’instant, mais je désire attirer l’attention du Tribunal sur quelques-unes de ces observations et réfuter l’affirmation du Dr Exner, suivant laquelle certains des documents déposés par la Défense, ou qu’elle a l’espoir ou l’intention de déposer, en ce qui concerne la question des représailles, peuvent être admis. Je déclare donc que la Convention de 1929 concernant le traitement des prisonniers de guerre interdit de façon expresse les représailles contre les prisonniers de guerre. D’autre part, depuis 1862 ou 1863, les États-Unis ont interdit, dans les instructions à l’Armée, de prendre des représailles contre les prisonniers de guerre.

Deuxièmement, j’aimerais souligner que la Convention de La Haye ne fait pas mention, autant que nous avons pu nous en assurer, de l’utilisation de « mesures de représailles » contre les civils. Or, il semble que la conférence de Bruxelles de 1874, qui a admis, sans qu’elle soit ratifiée, ce qu’on appelle en Droit international la « Déclaration de Bruxelles », ait rejeté ou écarté plusieurs clauses proposées à l’époque par les Russes et qui traitaient de l’utilisation de mesures de représailles contre les populations civiles. J’en fais mention, car il est intéressant de constater que, dès cette époque, les puissances envisageaient la question de représailles contre les populations civiles.

Troisièmement, j’aimerais signaler que les autorités qui se sont prononcées sur ce sujet admettent généralement qu’un avertissement quelconque doit être donné avant qu’il soit procédé à des représailles et que celles-ci ne peuvent être prises que dans les cas précis auxquels la première puissance attribue un caractère offensif et qui, de son point de vue, appellent ou justifient l’application de mesures de représailles. Il semble donc indispensable qu’un avertissement préalable soit donné à la Puissance attaquante par la Puissance qui s’estime lésée.

Je dois dire que dans l’exposé introductif du Ministère Public, on a spécialement évité toute référence au fait bien connu qu’au cours du dernier conflit, des prisonniers de guerre ont été enchaînés, car, dans cette occasion, une sorte d’avertissement avait été donné et la question fut résolue par les Puissances intéressées.

Voilà les divers points que nous avons envisagés pendant cette courte suspension d’audience. Si le Tribunal le désire, nous sommes disposés à préparer un exposé plus précis sur la question.

LE PRÉSIDENT

Très bien, le Tribunal vous remercie.

SIR DAVID MAXWELL-FYFE

Plaise au Tribunal. La situation de l’accusé Hess est exposée dans le rapport qu’a présenté le Dr Seidl au Tribunal et j’ai une ou deux remarques à faire à ce sujet, au nom du Ministère Public.

LE PRÉSIDENT

Docteur Seidl, voulez-vous faire une déclaration à ce sujet. Ne serait-il pas bon de procéder comme le Dr Stahmer ? Peut-être Sir David pourra-t-il nous dire s’il a des objections à formuler, en particulier en ce qui concerne les divers témoins dont vous avez demandé la comparution.

Dr SEIDL

Je demanderai au Tribunal de me permettre de faire un bref commentaire et de lui présenter une requête.

LE PRÉSIDENT

Oui.

Dr SEIDL

Messieurs les juges, au cours de l’audience de ce matin, j’ai acquis la certitude que désormais les débats sont entrés dans une phase décisive. Tout au moins en ce qui concerne la Défense. C’est pourquoi je me sens obligé de déposer devant vous la requête suivante : le Tribunal ne pourrait-il, au point où en sont les débats, d’une part limiter aux témoins l’examen de la recevabilité des preuves déposées par la Défense et, d’autre part, remettre à un peu plus tard l’examen de la recevabilité des documents ? A l’appui de cette requête, j’indiquerai ce qui suit :

Le Tribunal a pris, le 17 décembre 1945, une première résolution relative à la déposition des preuves par la Défense. A cette occasion, il n’a été question que des témoins et non des documents.

La deuxième résolution a été prise le 18 février 1946, et elle commençait ainsi : « Afin d’éviter que la convocation des témoins et que le dépôt des documents ne prennent trop de temps, les avocats devront... », suivait le reste du texte de la décision.

Je suis d’avis, Messieurs les juges, que, pour décider si un document est recevable ou non, il faut avoir ce document entre les mains, c’est-à-dire connaître le contenu exact de ce document. Il est impossible, au cours d’une procédure sommaire telle que celle que nous essayons d’appliquer, et au cours de laquelle il doit être décidé de la recevabilité de livres entiers, il est impossible de décider en connaissance de cause si telle ou telle partie d’un document est recevable ou non. Cette question ne peut être réglée d’une façon claire et définitive que si le Ministère Public et le Tribunal ont en mains le document, tel que la Défense désire le soumettre. Je suis convaincu...

LE PRÉSIDENT

Mais, Docteur Seidl, j’ai déclaré à deux reprises, ce matin, que la question de l’admissibilité définitive des témoins ou des documents ou de toute preuve documentaire ne pouvait être tranchée que lorsque les documents seront réellement déposés, ou lorsque le témoin sera réellement interrogé. Ce qui nous préoccupe en ce moment, c’est de savoir si le document a quelque possibilité d’être recevable et, par conséquent, s’il faut le réclamer ou le faire rechercher, le cas échéant.

Dr SEIDL

Oui. Si je vous comprends bien, Monsieur le Président, il n’est pas nécessaire...

LE PRÉSIDENT

Le Tribunal pense, Docteur Seidl, que vous feriez mieux de traiter de vos témoins et de vos documents maintenant ; nous ne désirons pas entendre d’autres discussions générales sur la question. Nous aimerions vous entendre sur la question des documents et des témoins à décharge que vous désirez produire ou citer.

Dr SEIDL

Il s’agit en somme des documents que j’ai entre les mains et non pas des documents que j’aurai à produire. plus tard ?

LE PRÉSIDENT

Oui. Il s’agit des documents dont vous allez faire état.

Dr SEIDL

Il s’agit donc de tous les documents et non pas seulement de ceux que je déposerai plus tard.

LE PRÉSIDENT

Nous avons devant nous votre requête concernant certains témoins et certains documents et nous désirons vous entendre à ce sujet.

Dr SEIDL

Bien, mais d’ici mercredi prochain, je devrai présenter une requête pour l’accusé Frank, et je vous prie de me faire savoir si les documents que j’ai déjà en mains à cet effet doivent être mentionnés aujourd’hui ?

LE PRÉSIDENT

Vous feriez mieux de traiter tout d’abord des témoins, ainsi que l’a fait le Dr Stahmer.

Dr SEIDL

Le premier témoin que j’ai à citer est Mademoiselle Ingeborg Berg, une ancienne secrétaire de l’accusé Hess.

SIR DAVID MAXWELL-FYFE

Monsieur le Président, je n’ai pris connaissance de cette liste qu’à l’instant.

LE PRÉSIDENT

Le témoin que le Dr Seidl désire citer est Ingeborg Berg, je crois.

SIR DAVID MAXWELL-FYFE

Si le Dr Seidl déclare que cette dame a été la secrétaire particulière de Hess, il semble que ce soit, au premier abord, une raison suffisante pour admettre sa comparution. D’ailleurs, il me paraît évident qu’on admette la comparution d’une secrétaire particulière, qui est en mesure de donner des indications sur l’activité de l’accusé. Je ne crois pas que le Ministère Public ait des objections à faire sur ce point.

Dr SEIDL

Le deuxième témoin est l’ancien gauleiter et chef de l’organisation nationale-socialiste des Allemands à l’étranger, Ernst Bohle, qui se trouve en prison ici, à Nuremberg.

LE PRÉSIDENT

Docteur Seidl, vous n’avez pas suivi la procédure que le Tribunal vous avait demandé d’adopter. Vous n’avez donné aucune indication quant à la recevabilité des témoignages que vous désirez nous soumettre. Vous vous êtes référé à quelque requête antérieure et le Tribunal n’a pas ces requêtes sous les yeux en ce moment ; par conséquent, nous désirons savoir. en quoi le témoignage de Ingeborg Berg est recevable.

Dr SEIDL

Le témoin Ingeborg Berg était la secrétaire de l’accusé Hess à son État-Major de liaison à Berlin. Elle peut donner des indications sur les préparatifs faits par Hess pour son départ en avion pour l’Angleterre et dire quels furent ces préparatifs. Elle doit en outre témoigner de l’attitude de Hess envers les Juifs à un moment déterminé, c’est-à-dire lors du pogrom du 8 novembre 1938.

LE PRÉSIDENT

Est-elle à Nuremberg ?

Dr SEIDL

Oui.

LE PRÉSIDENT

Voulez-vous parler maintenant du deuxième témoin que vous désirez citer.

Dr SEIDL

Le deuxième témoin est l’ancien gauleiter de l’organisation nationale-socialiste des Allemands à l’étranger, Ernst Bohle. Il se trouve également à Nuremberg, en prison. Ce témoin peut nous dire si l’organisation nationale-socialiste des Allemands à l’étranger s’est jamais manifestée sous la forme de ce que l’on pourrait appeler une « Cinquième colonne ».

SIR DAVID MAXWELL-FYFE

Un des points de notre accusation porte bien sur l’Auslandsorganisation. Il semble par conséquent que ce deuxième témoin puisse être admis à comparaître. Je n’élève aucune objection.

Dr SEIDL

Le troisième témoin est Walter Schellenberg. Je ne pourrai savoir s’il m’est possible de citer ce témoin qui se trouve actuellement à Nuremberg que si le Tribunal me donne la permission de lui parler. Je ne sais pas encore si ce témoin peut ou non fournir des renseignements de quelque valeur sur la période qui m’intéresse, c’est-à-dire avant le 10 mai 1941. Je voudrais éviter de faire perdre son temps au Tribunal en faisant comparaître un témoin dont l’interrogatoire s’avérerait sans intérêt. C’est pourquoi je demande la permission d’avoir un entretien avec lui, dans un but d’information.

LE PRÉSIDENT

Avez-vous quelque chose à dire, Sir David ?

SIR DAVID MAXWELL-FYFE

Si je comprends bien, il s’agit du témoin Schellenberg qui a été cité comme témoin à charge.

LE PRÉSIDENT

Oui.

SIR DAVID MAXWELL-FYFE

J’estime qu’il n’est pas du tout souhaitable que des entretiens privés aient lieu avec les témoins avant l’interrogatoire contradictoire. Si le Dr Seidl désire encore contre-interroger le témoin Schellenberg il devrait demander à le faire en audience publique.

LE PRÉSIDENT

Je crois me souvenir que certains des avocats ont demandé à remettre à plus tard le contre-interrogatoire du témoin Schellenberg.

SIR DAVID MAXWELL-FYFE

Ce n’est pas contre un nouvel interrogatoire contradictoire que j’élève une objection, Monsieur le Président. Une telle décision est évidemment du seul ressort du Tribunal, à partir du moment où il s’occupe d’un témoin. Mais, si je me souviens bien, le Dr Merkel et le Dr Kauffmann désiraient également contre-interroger ce témoin. C’est pourquoi je me permets de dire que, d’une façon générale aussi bien que dans ce cas particulier, il n’est absolument pas souhaitable qu’un avocat qui a l’intention de contre-interroger un témoin puisse avoir avec lui un entretien préalable. Tel est le sens de mon objection.

LE PRÉSIDENT

Oui, mais si, en fin de compte, l’avocat décide de ne pas contre-interroger le témoin, je pense qu’il serait possible alors de lui accorder un entretien, s’il le demande.

SIR DAVID MAXWELL-FYFE

Je n’ai jamais entendu parler d’une procédure semblable, Monsieur le Président. Si un témoin est cité par une des parties, il me semble que l’autre partie n’a d’autre possibilité que le contre-interrogatoire. Étant donné que la comparution du témoin a été demandée par le Ministère Public, je propose que la Défense examine le témoin au cours d’un interrogatoire contradictoire. Elle jouira ainsi des prérogatives que lui confère cette procédure, qui compensent celles qu’elle aurait eues si elle avait cité elle-même le témoin.

Dr SEIDL

Nous pourrions peut-être trouver une solution si je renonçais à contre-interroger le témoin et, dans le cas où il ferait des déclarations intéressantes, je lui demanderais un affidavit. Je ne pense pas que le Ministère Public puisse s’y opposer.

LE PRÉSIDENT

Sir David, comme, dans ce Procès, nous ne sommes liés par aucune règle particulière de procédure en ce qui concerne l’admissibilité des preuves, estimez-vous qu’il serait possible d’autoriser l’avocat à s’entretenir avec Schellenberg en présence d’un représentant du Ministère Publie, si cela lui convient.

SIR DAVID MAXWELL-FYFE

Je suis convaincu que le Ministère Public dans son ensemble désire que seuls les intérêts de la justice soient défendus ; donc, si le Tribunal estime que c’est là une procédure convenable, le Ministère Public ne formulera pas d’objection.

LE PRÉSIDENT (Au Dr Seidl.)

Donc, à moins que vous ne désiriez encore dire quelque chose au sujet de Schellenberg, le Tribunal prendra votre requête en considération.

Dr SEIDL

Très bien.

LE PRÉSIDENT

Avez-vous encore d’autres témoins que vous désiriez citer ?

Dr SEIDL

Pas pour l’instant. Cependant, l’ordonnance du 18 février accorde à chaque avocat le droit d’exprimer de nouvelles requêtes jusqu’à la fin de l’exposé du Ministère Public.

LE PRÉSIDENT

Je crois qu’il faut que vous présentiez cette requête maintenant ; selon la décision que vous mentionnez, le moment est venu de citer les témoins que vous désirez. Le Tribunal aura toujours la possibilité de se prononcer si vous lui présentez d’autres requêtes. Si vous désirez plus tard faire comparaître d’autres témoins, le Tribunal prendra votre requête en considération. M’avez-vous compris ?

Dr SEIDL

Oui, Monsieur le Président. En ce qui concerne l’assimilation de l’« Auslandsorganisation », du « Volksbund für das Deutschtum im Ausland », et du « Bund Deutscher Osten » à une Cinquième colonne, un autre témoin pourrait être cité, le frère de l’accusé Rudolf Hess, Alfred Hess, ancien gauleiter adjoint de l’organisation nationale-socialiste des Allemands à l’étranger, qui se trouve actuellement détenu au camp d’internement de Mergent-heim.

LE PRÉSIDENT

Nous n’avons pas encore sous les yeux votre requête à ce sujet. Si vous désirez faire une telle requête, nous l’examinerons.

Dr SEIDL

Je viens de déposer ma requête.

LE PRÉSIDENT

Vous dites que vous voulez la présenter maintenant ?

Dr SEIDL

Si cela est possible, puisque le Tribunal vient me demander de prendre la parole ; je la soumettrai ensuite par écrit, si c’est nécessaire.

LE PRÉSIDENT

Le Tribunal veut bien vous entendre maintenant à ce sujet, et vous pourrez ensuite soumettre votre requête par écrit pour les archives. Quel est le nom du témoin ?

Dr SEIDL

Hess Alfred ; il était en dernier lieu gauleiter adjoint de l’« Auslandsorganisation der NSDAP » et est actuellement détenu au camp d’internement de Mergentheim.

LE PRÉSIDENT

Dans quel but désirez-vous le citer ? Vous disiez qu’il parlerait des activités de la Cinquième colonne ?

Dr SEIDL

Au sujet de la Cinquième colonne et sur la question de savoir si l’« Auslandsorganisation der NSDAP », le « Volksbund für das Deutschtum im Ausland » et le « Bund Deutscher Osten » constituaient ou non une Cinquième colonne.

LE PRÉSIDENT

Sir David ?

SIR DAVID MAXWELL-FYFE

Monsieur le Président, j’ai déjà admis que ce point de vue est pertinent ; il reste cependant à savoir si un tel témoignage ne ferait pas double emploi. L’accusé Hess lui-même pourra parler de cette question et le témoin également, si le Tribunal veut bien l’entendre. Il me semble que le Tribunal pourrait considérer si, dans le cas d’un troisième témoin, une déposition sous serment ou un questionnaire sur ce point ne suffirait pas pour le moment, à moins qu’un nouveau point ne soit soulevé, auquel cas le Dr Seidl pourrait alors citer le témoin.

LE PRÉSIDENT

Bien, vous pouvez maintenant passer aux documents.

Dr SEIDL

J’ai l’intention de citer d’abord d’autres extraits de documents particuliers tirés du livre de documents « Rudolf Hess » déposé par le Ministère Public, afin de les situer par rapport à l’ensemble. Il me paraît superflu de justifier plus avant leur recevabilité, étant donné qu’il s’agit uniquement de documents déjà soumis par le Ministère Public et acceptés comme preuves par le Tribunal.

SIR DAVID MAXWELL-FYFE

Monsieur le Président, la requête est rédigée comme suit :

« J’ai l’intention de lire des extraits des livres suivants : Discours de Rudolf Hess et Ordonnances du délégué du Führer. La recevabilité de ces documents découle du fait qu’ils ont déjà été déposés par le Ministère Public ».

Dans la mesure où les documents sont déjà devant le Tribunal, le Dr Seidl pourra évidemment, et dans les limites habituelles, les commenter comme bon lui semblera. Mais s’il a l’intention de présenter d’autres discours et d’autres directives, ou documents du même ordre, le Ministère Public le prie d’indiquer alors exactement de quels discours ou directives il s’agit.

Dr SEIDL

Ce que Sir David Maxwell-Fyfe vient de lire est le deuxième point de ma requête. Certes, je compte lire certains extraits des discours de Rudolf Hess ainsi que du livre des Ordonnances du délégué du Führer. Mais étant donné que le Ministère Public a déjà déposé des extraits de ces deux livres, qui avaient eux-mêmes été acceptés comme preuves, je crois pouvoir déclarer que pour certains passages au moins, il s’agit là de documents tout à fait recevables. La question de savoir si les extraits que je compte lire sont recevables ou non ne pourra être tranchée que lorsque je les soumettrai au Tribunal ; c’est exactement ce que j’entendais par mes remarques du début : on ne peut décider de l’admissibilité d’un document avant de l’avoir devant soi et d’en connaître parfaitement le contenu.

SIR DAVID MAXWELL-FYFE

J’espère que le Dr Seidl se rendra compte qu’il s’agit là en grande partie d’une question technique. S’il a l’intention de déposer d’autres discours et d’autres directives, ceux-ci devront être traduits en anglais, en russe et en français. Par conséquent il sera nécessaire, pour la bonne marche des débats, qu’il nous indique quels sont les passages qu’il a l’intention de lire, afin qu’ils puissent être traduits et pris en considération.

Je suis sûr que le Dr Seidl ne désire faire état que de passages recevables. Il est évident que tout politicien fait de nombreux discours sur des sujets fort variés, et je pense que certains des discours de Hess peuvent ne pas être recevables. Il me semble que notre demande est raisonnable : le Ministère Public ne désire par là qu’aider à la bonne marche des débats.

Dr SEIDL

Il est bien entendu, Monsieur le Président, que je ne lirai que quelques passages de ces discours et seuls ceux qui sont recevables. Je n’ai aucune intention de faire traduire des chapitres entiers du livre, si cela n’est pas nécessaire. Je déclare solennellement devant le Tribunal que, ni en ma qualité de défenseur de l’accusé Hess, ni à titre de défenseur de l’accusé Frank, je ne déposerai un seul document qui ne puisse être considéré comme recevable.

LE PRÉSIDENT

Oui, mais ce que Sir David voulait dire, c’est que, au point de vue pratique, étant donné que malheureusement nous ne savons pas tous l’allemand, il est nécessaire de faire traduire ces documents, qui sont en allemand. Il faudra donc que vous indiquiez exactement quels discours et quels extraits de discours vous vous proposez de lire, afin qu’ils puissent être traduits.

Dr SEIDL

Monsieur le Président, tous les extraits que j’ai l’intention de citer seront assemblés dans un livre de documents, que je présenterai en temps voulu au Tribunal et au Ministère Public, avec l’indication exacte de tous les extraits de discours que j’ai l’intention de lire. Il n’est évidemment pas question de charger le Ministère Public ou le Secrétaire Général d’un travail que je dois entreprendre moi-même.

SIR DAVID MAXWELL-FYFE

Je suis entièrement satisfait sur ce point, Monsieur le Président, c’est tout ce que je demandais.

LE PRÉSIDENT

Très bien. Alors, nous pouvons en venir au paragraphe 3.

Dr SEIDL

Oui. Troisièmement je lirai des extraits du rapport de l’entretien du 9 juin 1941 entre Hess et Lord Byron, qui à ce moment-là, je crois, était le Lord Garde des Sceaux. Cela doit permettre d’éclaircir les motifs et les buts du voyage de Hess en Angleterre. L’admissibilité de ce document découle du fait que, de son côté, le Ministère Public a déposé comme preuves les rapports de Sir Kirkpatrick sur ses entretiens avec Hess.

SIR DAVID MAXWELL-FYFE

Si le Dr Seidl pense que cet entretien peut ajouter quoi que ce soit aux conversations avec le duc de Hamilton et M. Kirkpatrick, je ne ferai aucune objection à ce qu’il lise ce rapport.

LE PRÉSIDENT

Où est le document ?

Dr SEIDL

Ce document est entre mes mains.

LE PRÉSIDENT

Quelle est la nature du document, je veux dire, quelle garantie d’authenticité offre-t-il, qui l’a établi, qui l’a écrit ?

Dr SEIDL

Ce document se trouvait dans les papiers de l’accusé Hess, papiers qui lui furent remis lorsqu’il revint d’Angleterre. C’est une copie de l’original ou plutôt un double au papier carbone, muni d’une série de tampons officiels, qui prouvent sans doute possible que c’est une copie conforme à l’original.

LE PRÉSIDENT

Le Tribunal aimerait voir ce document.

Dr SEIDL

Très bien.

LE PRÉSIDENT

Si vous voulez bien nous le remettre, nous allons l’examiner.

Dr SEIDL

Très bien.

LE PRÉSIDENT

Avez-vous terminé vos déclarations ?

Dr SEIDL

Oui.

LE PRÉSIDENT

Un instant, Docteur Seidl, il y a encore une lettre, je crois. Il y a même encore deux documents. Vous ne demandez pas à les citer ? Une lettre adressée à Hitler en date du

10 mai 1941 concernant le Cabinet du Reich.

Dr SEIDL

Cette demande a dû être faite par mon prédécesseur, le Dr von Rohrscheidt. Je demande au Tribunal la permission d’éclaircir cette question.

LE PRÉSIDENT

Très bien. Avez-vous quelque chose à dire à ce sujet, Sir David ?

SIR DAVID MAXWELL-FYFE

Nous n’avons pas ce document. Le Ministère Public n’a pas cette lettre de l’accusé Hess à Hitler, nous ne pouvons absolument rien dire sur ce point.

LE PRÉSIDENT

Très bien, si ce document peut être trouvé,

il vous sera soumis.

Dr SEIDL

Très bien.

LE PRÉSIDENT

Vous avez la parole, Docteur Horn.

Dr HORN

J’ai l’intention de désigner comme premier témoin pour l’accusé von Ribbentrop l’ancien ambassadeur Friedrich Gaus, qui se trouve actuellement dans un camp à Minden, près de Hanovre. L’ambassadeur Gaus a été pendant plus de trente ans le chef du Service juridique du ministère des Affaires étrangères du Reich. Je crois que ce seul titre rend indispensable la comparution de ce témoin.

SIR DAVID MAXWELL-FYFE

Si le Dr Horn veut bien adopter la même procédure que le Dr Stahmer et s’arrêter un instant après avoir désigné le témoin, je pourrai dire alors si le Ministère Public a des objections à formuler.

Dr HORN

Certainement.

SIR DAVID MAXWELL-FYFE

En ce qui concerne M. Gaus, je n’ai aucune objection à formuler. Il appartient à une catégorie de témoins que j’appellerais le groupe des témoins des Affaires étrangères. Je crois qu’il serait bon que je m’explique dès maintenant à ce sujet, après quoi le Dr Hom pourra traiter du problème particulier qu’il a soulevé.

Le Dr Horn demande la comparution de M. Gaus, de M11 e Blank secrétaire particulière de l’accusé ainsi que des témoins 3 à 7, cinq fonctionnaires du ministère des Affaires étrangères : MM. von Sonn-leitner, von Rintelen, Gottfriedsen, Hilger, Bruns. La situation est actuellement la suivante : nous ne savons pas exactement si M116 Blank a été admise à comparaître par le Tribunal ; d’autre part, deux des témoins, von Sonnleitner et Bruns, ont été admis à comparaître le 5 décembre. Sonnieitner a fait l’objet d’un choix entre deux témoins et la déposition de Bruns a été admise.

Le Ministère Public attire l’attention du Tribunal sur le fait que l’objet de la déposition de ces témoins n’est pas précisé et que, pour le moment, ces requêtes ne sont donc pas conformes aux dispositions de la règle de procédure 4 (a), mais le Ministère Public suggère ce qui suit : il est raisonnable que soient accordés à l’accusé certains témoins qui parleront des activités du ministère des Affaires étrangères, mais le Ministère Public estime que si M. Gaus et Mlle Blank déposent, il sera suffisant d’entendre un seul autre fonctionnaire du ministère des Affaires étrangères, sur des questions d’ordre général. Von Sonnieitner est manifestement le genre de personne qui pourrait être utile à l’accusé sur les questions relatives aux Affaires étrangères. Le Ministère Public estime que les sept témoignages relatifs à des questions d’ordre général au sujet du ministère des Affaires étrangères ne pourraient être que cumulatifs et pense que trois témoins seraient suffisants.

J’espère que le Tribunal ne désapprouvera pas la position que je prends vis-à-vis de ces sept témoins ; il s’agit uniquement de leur nombre.

Dr HORN

L’ambassadeur Gaus sera sans doute mon principal témoin à décharge. C’est pourquoi, depuis le 10 novembre 1945, mon prédécesseur et moi-même nous avons tout fait pour trouver ce témoin, et une fois ce résultat atteint, pour le faire comparaître. Bien que l’on sache maintenant où se trouve le témoin, il n’est pas encore ici. En conséquence, je ne sais pas encore sur quels points il pourra témoigner, et quel genre de preuve il m’apportera. C’est pourquoi je ne voudrais pas prendre position tout de suite, en ce qui concerne les autres témoins du ministère des Affaires étrangères. Je voudrais simplement faire l’objection suivante, à savoir que les témoins qui ont été nommés après lui ne sont pas comme l’a dit Sir David, des témoins qui parleront de questions de routine administrative, de questions d’ordre général sur l’activité du ministère des Affaires étrangères, mais au contraire des témoins qui peuvent déposer sur des points particuliers soulevés par l’Accusation.

Je suggère donc, en ce qui concerne la convocation des autres témoins, qu’une décision définitive ne soit prise que lorsque l’ambassadeur Gaus sera ici. En conclusion, je voudrais personnellement demander une fois encore au Tribunal de bien vouloir m’aider à faire comparaître ce témoin dont l’importance est exceptionnelle, car ce n’est que s’il peut être ici dans un délai assez bref, que je pourrai présenter à temps à M. le Secrétaire Général ma demande de comparution.

LE PRÉSIDENT

Nous prendrons cette demande en considération. Ceci s’applique aux témoins 1 à 7 n’est ce pas ?

Dr HORN

Monsieur le Président, je tiens à faire remarquer qu’il faut excepter le témoin n° 2, c’est-à-dire Mlle Margarete Blank. Il reste donc les témoins 3 à 7. Puis-je donner à ce sujet les éclaircissements suivants ? Mlle Blank a été très longtemps secrétaire de l’ancien ministre des Affaires étrangères von Ribbentrop, c’est-à-dire depuis 1933. Mlle Blank a eu l’occasion de copier une quantité de projets et de mémoires et de s’entretenir sur des points décisifs, avec l’accusé von Ribbentrop. Je parle ici de documents ayant trait à des points soulevés par le Ministère Public et je demande en conséquence que soit maintenue la première décision du Tribunal, accordant la comparution de ce témoin.

LE PRÉSIDENT

Vous demandez donc que l’ambassadeur Gaus et Mlle Blank soient amenés ici aussitôt que possible, et que notre décision au sujet des autres témoins, 3 à 7, soit remise à plus tard, jusqu’à ce que vous ayez vu l’ambassadeur Gaus et Mlle Blank ?

Dr HORN

C’est cela, Monsieur le Président. Au sujet de Mlle Blank, je puis dire qu’elle n’est pas loin de Nuremberg, elle est à Hersbruck dans un camp d’internement.

LE PRÉSIDENT

Voulez-vous dire que vous pourriez vous y rendre vous-même et lui parler ?

Dr HORN

Oui, Monsieur le Président, c’est tout à fait possible.

LE PRÉSIDENT

Très bien.

Dr HORN

Puis-je considérer ceci comme une autorisation d’aller voir Mlle Blank, pour information ?

LE PRÉSIDENT

Si nous comprenons bien, c’est là ce que vous nous demandez. Nous examinerons votre requête.

Dr HORN

Je vous remercie, Monsieur le Président. Le témoin suivant est l’ancien SS-Gruppenführer, aide de camp personnel de Hitler, il est ici, à Nuremberg, au secret.

LE PRÉSIDENT

Sir David ?

SIR DAVID MAXWELL-FYFE

En ce qui concerne ce témoin, la requête déclare qu’une conversation décisive eut lieu entre Hitler et l’accusé von Ribbentrop et que ce témoin peut faire des déclarations sur certains points qui y furent discutés. S’il en est ainsi, c’est-à-dire si le témoin peut faire des déclarations comme ayant assisté à la conférence, le Ministère Public ne fait aucune objection.

Il s’élève, et ceci s’adresse à des nombreux témoins, contre ce que j’appellerai les témoignages subjectifs, le témoin déclarant simplement que l’accusé lui a dit qu’il avait telle ou telle opinion. Nous estimons que cela ne nous avance en rien. Si, comme je le comprends, ce témoin doit témoigner sur ce qu’il a entendu au cours de la conférence, nous ne faisons aucune objection.

Dr HORN

Je peux donner à Sir David l’assurance qu’il s’agit là d’un témoin qui a des connaissances directes sur des événements décisifs au sujet desquels il peut déposer.

Le témoin suivant est Adolf von Steengracht qui depuis 1943 était secrétaire d’État aux Affaires étrangères. Ce témoin est actuellement à Nuremberg, au secret.

SIR DAVID MAXWELL-FYFE

Si le Tribunal veut bien considérer la septième ligne à partir du bas de cette requête, il y verra que Steengracht doit témoigner en outre sur le fait que, contrairement à l’affirmation du Ministère Public américain, les protestations des Églises et du Vatican étaient toujours prises en considération, ce qui évita des excès pires encore.

Si on veut dire par là — l’anglais de cette requête est un peu obscur — que l’accusé Ribbentrop transmettait les protestations des Églises à Hitler, le Ministère Public estime qu’il ne doit faire aucune objection à ce que ce témoin soit cité.

Dr HORN

A ce sujet, je peux ajouter, Monsieur le Président, que non seulement ces protestations ont été transmises à Hitler, mais qu’en outre, sur l’initiative et sur l’ordre de l’accusé, d’autres services allemands impliqués dans ces violations du Droit international ont été approchés dans le but d’aplanir les difficultés posées par les protestations des Églises et du Vatican.

LE PRÉSIDENT

Voulez-vous passer au témoin n° 10 ?

Dr HORN

Le témoin n° 10 est le témoin Dahlerus, dont nous avons déjà parlé longuement aujourd’hui, et je voudrais savoir s’il est nécessaire que je fournisse d’autres détails pour obtenir la comparution de ce témoin.

SIR DAVID MAXWELL-FYFE

J’ai déjà exprimé mon point de vue sur ce point. Apparemment, l’accusé demande qu’il dépose sur un point particulier, à savoir un ordre de Hitler. Il me semble que la meilleure méthode serait d’envoyer au témoin un questionnaire sur ce point. Au premier abord, il paraît très improbable que Hitler ait communiqué ses ordres privés à un ingénieur suédois, mais étant donné le fait qu’il y a déjà eu des questionnaires sur ce point, je suggère que le Dr Hom envoie un nouveau questionnaire au témoin Dahlerus.

Dr HORN

Puis-je ajouter une observation ? Il ne s’agit pas, comme on l’a traduit, d’un ordre de Hitler, mais de la note décisive qui fut à l’origine de la deuxième guerre mondiale.

SIR DAVID MAXWELL-FYFE

Ce que je dis concerne un grand nombre de requêtes. Ceci ne peut constituer une preuve que si M. Dahlerus peut nous dire ce que Hitler lui a dit. Ce n’en est pas une si Monsieur Dahlerus nous dit : « von Ribbentrop m’a dit que Hitler avait ordonné, etc. » Cela n’ajouterait rien au témoignage de l’accusé lui-même. Il me semble donc essentiel qu’avant de juger de la valeur probatoire de ce témoignage, ce point soit éclairé au moyen d’un interrogatoire écrit.

LE PRÉSIDENT

Docteur Hom, si vous n’avez rien d’autre à ajouter sur ce témoin, nous nous en tiendrons là, parce que nous pensons qu’il est impossible d’aller plus loin aujourd’hui et qu’en tous cas, il est impossible de terminer l’examen de toutes vos requêtes cet après-midi. Désirez-vous ajouter quelque chose au sujet de Dahlerus ?

Dr HORN

Oui, Monsieur le Président, je voudrais faire une courte déclaration au sujet de ce que Sir David considère comme décisif pour ce témoignage. Le témoin ne déposera pas sur ce qu’il a entendu dire par M. von Ribbentrop mais sur ce qu’il a entendu dire de Ribbentrop par une importante personnalité et par Hitler lui-même ; c’est pourquoi je considère son témoignage comme particulièrement décisif.

SIR DAVID MAXWELL-FYFE

Une remarque d’ordre général, Monsieur le Président, en ce qui concerne les témoins demandés par le Dr Hom, j’avais préparé les commentaires du Ministère Public. Ces commentaires ont été dactylographiés en anglais. Le Tribunal comprendra que la traduction des commentaires à cette requête, que nous n’avons reçus qu’hier, ne soit pas encore prête. Je n’ai pas pu avoir la traduction, mais j’en ai donné un exemplaire au Dr Hom, de façon tout à fait officieuse, afin qu’il soit informé de notre point de vue. Il serait peut-être utile que je le soumette au Tribunal, car cela pourrait abréger les débats et aussi servir d’aide-mémoire quand le Tribunal reprendra la considération de ces points. Je ne sais si cela convient au Tribunal.

LE PRÉSIDENT

Oui, très bien, dans ces conditions nous allons suspendre l’audience maintenant. Je désire demander au Procureur Général russe si le Ministère Public soviétique ne voit pas d’inconvénient à ce que nous poursuivions lundi matin l’examen des requêtes concernant les témoins. Je crois que cela absorbera la matinée entière, si nous traitons des requêtes de l’accusé Ribbentrop et de celles de l’accusé Keitel ; de sorte que si cette procédure était adoptée, le Ministère Public soviétique reprendrait son exposé à deux heures de l’après-midi. Cela lui convient-il ?

GÉNÉRAL RUDENKO

Si cela convient au Tribunal, cela nous convient également, Monsieur le Président.

LE PRÉSIDENT

Je désirerais vous poser encore une question :

le Tribunal a été informé, je crois, que la Délégation soviétique se proposait de citer deux témoins. Je crois que le général Halder et le général Warlimont doivent comparaître afin que la Défense ait la possibilité de les contre-interroger.

GÉNÉRAL RUDENKO

Si le Tribunal le désire, je parlerai de la question maintenant. J’ai pris connaissance du procès-verbal des déclarations faites par le général Zorya et le colonel Pokrovsky au cours de la discussion du cas des témoins Warlimont et Halder. Le Ministère Public soviétique considère qu’il n’y a pas de raisons de repousser la demande de comparution, au profit de la Défense, des témoins Warlimont et Halder. Mais le Ministère Public soviétique a l’intention de faire comparaître ces témoins au nom du Ministère Public soviétique.

Je voudrais encore exposer le plan que le Ministère Public soviétique a l’intention de suivre pour terminer l’exposé de ses preuves. Il nous reste à en présenter au Tribunal la dernière partie, à savoir : « Les Crimes contre l’Humanité ». Cet exposé nous prendra à peu près trois ou quatre heures.

De plus, nous demanderons au Tribunal de nous autoriser à interroger sur différents points quatre témoins, des citoyens soviétiques qui ont été spécialement appelés et qui sont arrivés à Nuremberg. De cette façon, si nous commençons notre exposé demain à 2 heures, nous aurons complètement terminé mardi la présentation des preuves sur tous les chefs d’accusation.

LE PRÉSIDENT

Le Tribunal entendra le général Warlimont et le général Halder avant la fin de l’exposé soviétique, et cela non pas pour que la Délégation soviétique leur pose encore des questions, mais pour que la Défense puisse procéder à leur contre-interrogatoire, si elle le désire. Mais ceci pourra avoir lieu au moment qui vous conviendra. Ils pourront être cités lundi à 2 heures, ou bien, si vous le préférez, à la fin de l’exposé soviétique, soit lundi après-midi, soit mardi matin, comme cela vous conviendra le mieux.

GÉNÉRAL RUDENKO

Comme je viens de le dire, le Ministère Public soviétique n’a pas l’intention de citer les témoins Warlimont et Halder. Le Ministère Public soviétique ne s’oppose pas à ce que Halder et Warlimont soient, sur la demande de la Défense, soumis à un contre-interrogatoire. Pour autant que je me souvienne, le Tribunal a, dès le mois de décembre de l’année dernière, accordé à la Défense le droit de faire comparaître Halder en qualité de témoin. Aussi, afin de terminer le plus rapidement possible l’exposé du Ministère Public soviétique, et étant donné que ces dépositions ne pourront en rien influer sur des points essentiels, il serait souhaitable que l’interrogatoire des témoins Warlimont et Halder ait lieu au moment de l’exposé des preuves par la Défense.

Autant que je sache, Halder et Warlimont sont désignés comme témoins dans la requête adressée par l’accusé Keitel au Tribunal ;

l’accusé Keitel et son avocat ont demandé qu’ils soient entendus comme témoins de la Défense. C’est pourquoi je suis d’avis que l’audition de ces témoins ait lieu au moment de l’exposé des preuves de la Défense.

LE PRÉSIDENT

Le Tribunal doit-il comprendre que Warlimont et Halder sont ici à Nuremberg ?

GÉNÉRAL RUDENKO

Oui.

LE PRÉSIDENT

Dans ces conditions, la meilleure méthode serait que le Tribunal voie exactement quelles décisions il a prises en vue de leur comparution. Nous vérifierons le procès-verbal de l’audience, nous verrons quelles décisions nous avons prises et nous traiterons de la question lundi matin. Dans l’intervalle, nous continuerons lundi matin, puisque vous vous êtes déclarés d’accord, à étudier les requêtes du Dr Horn pour l’accusé Ribbentrop et les requêtes du Dr Nelte pour l’accusé Keitel. Nous ne siégerons que de 2 heures à 4 heures lundi après-midi.

(L’audience sera reprise le 25 février 1946 à 10 heures.)