SOIXANTE-DIX-NEUVIÈME JOURNÉE.
Mardi 12 mars 1946.
Audience de l’après-midi.
Le Tribunal suspendra aujourd’hui l’audience à quatre heures et demie.
Témoin, je vais vous présenter un document, une lettre qui vous a été adressée par le représentant du ministère du Reich pour les territoires occupés de l’Est et qui traite de questions intéressant ces régions. Il s’agit du document URSS-174. Je vous prie de prendre connaissance de ce document. Vous souvenez-vous avoir reçu cette lettre ? Comme vous pouvez le constater, elle commence par ces mots : « Monsieur le secrétaire d’État Körner, cher camarade de Parti ». Cette lettre a rapport à l’unification de la direction des affaires économiques.
Je viens de prendre connaissance de ce document. Il est exact que j’ai reçu cette lettre, sans aucun doute.
Oui, vous l’avez bien reçue. D’après ce qui ressort du texte, il s’agit d’entretiens particuliers qui se déroulèrent sous votre présidence.
Parfaitement.
J’en déduis que vous avez intimement collaboré avec l’accusé Göring dans ces questions d’unification de la direction des affaires économiques.
Oui, lors de cette conférence qui devait avoir lieu.
Une dernière question. Reconnaissez-vous que l’accusé Göring, en tant que délégué au Plan de quatre ans, contrôlait la totalité des organisations allemandes civiles et militaires, chargées de l’exploitation économique des régions occupées, et que, dans toutes ces questions, vous avez été son collaborateur immédiat ?
L’entretien auquel il est fait allusion dans cette lettre n’eut jamais lieu. La question de l’unification de la direction’ économique des territoires occupés ne fut que soulevée et on ne posa jamais réellement le problème. C’est pourquoi les entretiens auxquels on pensa un instant se révélèrent superflus.
Le problème ne fut pas en effet résolu mais, par suite de circonstances indépendantes de votre volonté, du fait de l’avance de l’Armée rouge et des armées alliées. Ai-je raison ?
Je n’ai pas assez clairement compris la question pour pouvoir y répondre
Vous dites que la question ne fut pas résolue. Je vous demande : N’est-ce pas du fait de circonstances indépendantes de votre volonté ? Les troupes de l’Armée rouge et les armées alliées vous empêchèrent de réaliser vos projets.
Je crois qu’à l’époque où cette lettre fut expédiée, de semblables faits ne pouvaient encore nous influencer. Nous n’en arrivâmes pas à l’unification de la direction des affaires économiques dans les territoires occupés car d’autres facteurs s’y opposaient.
Je n’ai pas l’intention de discuter ces raisons avec vous pour le moment. Vous n’avez pas répondu à ma dernière question. Je vous ai demandé : Reconnaissez-vous que Göring, en tant que délégué au Plan de quatre ans, dirigeait la totalité des organisations allemandes, tant civiles que militaires, chargées de l’exploitation économique des régions occupées, et que vous avez été son collaborateur le plus proche ?
Pour ce qui est d’une exploitation des territoires occupés, on ne peut pas en parler en ce sens. Le Plan de quatre ans pouvait influencer l’économie dans les territoires occupés, mais il ne le faisait que lorsque cela devenait absolument nécessaire. En général, il s’en abstenait. Les services qui contrôlaient dans la pratique les questions économiques dans les territoires occupés étaient ceux des commandants militaires ou ceux des directeurs de l’administration civile et, à l’Est, l’État-Major économique « Ost » et le ministère d’État « Rosenberg ». Dans les cas seulement où une entente ne pouvait intervenir entre les autorités militaires et les services civils du Reich, alors on faisait appel au Plan de quatre ans. Alors le Reichsmarschall pouvait prendre des décisions correspondantes. Mais cela n’est arrivé que dans des cas très très rares, comme par exemple au cours de l’entretien dont vous faites aujourd’hui mention, aux termes duquel les territoires occupés devaient aider à fournir des produits alimentaires pour l’Europe. Ce droit, nous le possédons bien, car dans les territoires occupés, aussi bien à l’Ouest qu’à l’Est, nous avons accompli d’importantes réalisations constructives dans le domaine de l’agriculture. Je me rappelle qu’à l’Ouest...
Quel est ce droit dont vous parlez ?
Je parie du droit qu’avait l’Allemagne de profiter de la production économique de ces pays car nous y avons accompli une œuvre constructive tout à fait extraordinaire. Je me rappelle en particulier que les régions qui avaient été complètement dévastées à l’Est étaient sans semences, sans machines agricoles, et les plus grandes difficultés...
Qui a donné ce droit à l’Allemagne ?
Ce droit ? Lorsqu’on occupe un pays et qu’on le remet en état, il est juste de partager le surplus. Nous avions à nous occuper de toute l’Europe et nous connaissions les besoins et les problèmes que nous rencontrions dans les territoires occupés.
Je vous ai demandé qui avait octroyé ce droit à l’Allemagne ?
Je ne suis pas juriste, c’est pourquoi je ne puis répondre à la question.
Mais vous avez parlé d’un droit appartenant à l’Allemagne ?
Je parle seulement du droit naturel qui existait, lorsque nous faisions un travail constructif, de participer ensuite aux bénéfices résultant de ce travail.
Après avoir dévasté ces régions !
L’Allemagne n’a pas dévasté ces régions ; certainement pas au point de vue économique. Au contraire, nous avons accompli un travail constructif immense dans ces territoires. Je me souviens qu’à l’Ouest une importante partie de la France était complètement dévastée. A l’Ouest, nous avons réalisé des travaux constructifs importants par l’intermédiaire d’organisations telle que « Das Reichsland », nous avons remis ces régions en état et y avons ramené les Français Nous leur avons donné à nouveau la possibilité de participer à la production agricole du pays. A l’Est, nous avons trouvé des territoires dévastés par la guerre et sur lesquels il n’y avait plus de machines. Tous les tracteurs avaient été enlevés par les Russes, de même que toutes les machines agricoles qui avaient été aussi détruites. Là-bas, nous avons été obligés de faire repartir l’agriculture avec les moyens les plus primitifs. Cette tâche accomplie au cours de nos années d’occupation à l’Est le fut grâce à l’initiative allemande et aux machines allemandes.
Doit-on aussi attribuer à l’initiative allemande la mise en place du vaste réseau de camps de concentration, que vous avez établi dans les territoires occupés ?
Je n’ai rien eu à voir avec ces questions et je ne puis en parler.
Mais je vous pose la question.
Et c’est pourquoi je ne comprends pas ce que vous voulez dire.
Vous n’êtes pas suffisamment au courant de la question des camps de concentration et pourtant vous semblez bien informé sur les mesures économiques de restauration de l’agriculture.
Évidemment, je sais beaucoup de choses relatives à la reprise économique dans les régions occupées.
Vous ne savez absolument rien sur les camps de concentration ?
Ces questions ne me concernaient pas.
Vous ne saviez pas que des millions d’hommes furent exterminés par les autorités allemandes d’occupation ?
Non, je n’en savais rien.
Réellement, vous n’en saviez rien.
Je viens seulement d’en entendre parler.
A l’instant seulement ?
Oui.
Je n’ai plus de questions à poser.
Témoin, savez-vous que Heines était Polizeipräsident de Brelau ?
J’ai fait demander aux avocats par le Dr Stahmer à la fin de l’interrogatoire s’ils désiraient poser des questions. Ils ont répondu par la négative. Par conséquent, vous ne pouvez plus maintenant poser de questions.
Monsieur le Président, il s’agit d’un point de l’interrogatoire par M. Justice Jackson qui mériterait quelque éclaircissement. La question n’avait pas été soulevée auparavant Il concerne le Polizeipräsident Heines et j’aimerais pouvoir poser deux ou trois questions à ce témoin pour éclaircir cette affaire.
Très bien, nous espérons que vous ne prendrez pas trop de temps.
Je me résumerai très succinctement, Monsieur le Président Je vous remercie.
Témoin, savez-vous que Heines était Polizeipräsident de Breslau ?
Parfaitement.
Savez-vous, qu’à ce titre, les prisons de Breslau dépendaient de lui ?
Évidemment, les prisons dépendaient du Polizeipräsident.
Savez-vous qu’à cette époque, c’est-à-dire lorsque ce camp fut installé, les prisons de la police de Breslau étaient surchargées ?
Je ne m’en souviens plus. J’ai seulement cité le camp Heines comme l’un de ceux qui furent installés à ce moment sans le consentement du ministre président ou plutôt du ministre de l’Intérieur.
Vous saviez très bien que Heines pouvait installer ce camp en sa qualité de Polizeipräsident ?
C’est possible.
Je vous remercie.
Docteur Stahmer, avez-vous encore des questions à poser ?
Je n’ai plus de questions à poser au témoin.
Dans ces conditions, le témoin peut se retirer.
Avec la permission du Tribunal, je présente comme prochain témoin le Generalfeldmarschall Kesselring.
Voulez-vous indiquer votre nom ?
Albert Kesselring.
Voulez-vous répéter ce serment après moi :
Je jure devant Dieu tout puissant et omniscient que je dirai toute la vérité, que je ne cèlerai ni n’ajouterai rien.
Vous pouvez vous asseoir si vous le désirez.
Témoin, depuis quand appartenez-vous à la Luftwaffe ?
Depuis le 1er octobre 1933.
Quel grade aviez-vous lors de votre passage dans la Luftwaffe ?
A cette époque j’étais colonel et commandant d’artillerie à Dresde. Par la suite, je pris ma retraite comme Kommodore de la Luftwaffe.
Vous avez participé à la construction de la Luftwaffe ?
Durant les trois premières années, je fus chef de l’administration, puis chef de l’État-Major général et ensuite j’ai servi dans le Gruppenkommando.
La construction de la Luftwaffe était-elle défensive ou agressive ?
L’Aviation allemande n’était qu’une arme défensive. Je dois ajouter cependant que l’avion en lui-même, aussi bien que l’Aviation, est par essence une arme offensive. Déjà sur terre, se défendre sans prendre l’offensive peut être considéré comme plus ou moins avantageux. C’est particulièrement le cas pour l’Aviation. L’arme aérienne poursuit ses buts de façon très large, soit en se défendant à proprement parler, soit en attaquant. C’est ce qui a été compris par le Reichsmarschall et ses généraux.
Il est évident que l’on commence à produire des avions légers lors de la réorganisation d’une aviation, ou que ce sont les premiers appareils à arriver aux terrains C’est ainsi que, jusqu’en 1936-1937, nous n’eûmes que des avions légers, des avions de chasse, des Stukas, des avions de reconnaissance et quelques « vieux coucous » comme nous les appelions, tels que les Ju-52, Do-11 et Do-13, donc des avions impropres au bombardement.
Il peut se trouver des gens pour avancer qu’une défense peut être assurée victorieusement avec ces sortes d’avions légers. Je ne citerai qu’un exemple pour réfuter cette allégation et rappellerai la fin de la guerre mondiale, où l’aviation défensive allemande a été battue par l’aviation offensive de l’ennemi.
Docteur Stahmer, le Tribunal est d’avis que le témoin se perd par trop dans les détails.
Je continue Jusqu’en 1937 nous ne disposions pas d’aviation offensive, nous manquions d’avions de combat en particulier, et les avions qui furent plus tard introduits dans la Luftwaffe n’avaient ni un rayon d’action ni une capacité de charge suffisants pour pouvoir être considérés comme appareils offensifs. Les quadrimoteurs manquaient.
Avez-vous participé à l’attaque sur Varsovie ?
Comme chef de la première flotte aérienne, j’ai dirigé cette attaque.
La situation militaire du moment justifiait-elle cette attaque ? De quelle façon a-t-elle été conduite ?
Nous avons effectué plusieurs attaques sur Varsovie. D’après les conceptions allemandes, Varsovie était une forteresse et très fortement défendue contre les attaques aériennes et répondait ainsi à toutes les conditions de la Convention de la Haye sur la guerre terrestre qui peuvent s’appliquer par analogie à la guerre aérienne.
La première opération contre Varsovie, selon les principes gouvernant l’emploi de la Luftwaffe en période d’opérations, consista en une attaque de l’Aviation ennemie en vue de sa destruction, et des usines d’armement se trouvant à proximité des champs d’aviation. J’estime que ces attaques étaient parfaitement justifiées et en accord avec les règles de la Convention de la Haye.
La deuxième phase consista à combattre les déplacements de troupes polonaises. J’ajouterai que Varsovie est la plaque tournante de la Pologne septentrionale et centrale. Lorsque notre reconnaissance lointaine annonça, ce qui fut confirmé par la suite des opérations, que les gares étaient encombrées de matériel qui était de plus en plus dirigé vers Varsovie, on ordonna d’attaquer ces transports par avion, ce qui fut exécuté. L’attaque fut surtout dirigée contre les gares, les quais de déchargement et les ponts de la Vistule. Je dois ajouter que, personnellement, j’ai désigné pour ces attaques des Stukas et des chasseurs-bombardiers parce que la précision de ces engins garantissait, selon toute probabilité, la destruction des objectifs militaires.
La troisième phase englobe la période du bombardement de Varsovie. Je considère que ce bombardement fut l’affaire de l’Armée car n’y participèrent que de petites unités de la Luftwaffe contre des objectifs militaires et sur l’ordre de l’Armée de terre. J’ai personnellement survolé Varsovie et, après presque chaque attaque aérienne, j’ai conféré avec les commandants des incidences de l’opération. Je peux vous assurer, d’après ce dont j’ai pu me rendre compte ou ce dont je fus informé, que l’on a fait tout ce qui était humainement possible pour ne toucher que les objectifs militaires et épargner les objectifs civils.
En conclusion, pouvez-vous assurer que ces attaques étaient nécessaires au point de vue militaire ?
Parfaitement.
Avez-vous aussi participé à l’attaque contre Rotterdam ?
En tant que chef en second de la Luftwaffe, grade qui m’avait été conféré entre temps, j’ai commandé des attaques contre la Hollande, la Belgique et la France, et sous mon commandement combattit aussi le corps des parachutistes. Le corps des parachutistes était commandé par le général Student qui demanda de soutenir ses parachutistes par un bombardement. Le général Student est le seul qui connaissait le terrain avec assez de précision pour être rendu responsable de la préparation et de l’exécution de l’attaque. Le soutien aérien fut donné par le 4e corps d’aviation et, dans ce but, un groupe extrêmement réduit fut engagé. Les éléments engagés dans cette attaque et qui la réalisèrent furent uniquement déterminés par les exigences tactiques, compte tenu de possibilités techniques données. Les ordres du général Student m’arrivèrent très tôt et les préparatifs purent donc se faire tranquillement, suivant les plans prévus. Les troupes, sur l’initiative du Reichsmarschall en particulier, furent informées de la situation à Rotterdam et de son évolution, ainsi que de l’approche des divisions blindées. Les objectifs du général Student étaient très précis : dispersion, points névralgiques et positions-clés, occupation du terrain, etc. Des unités habituées au combat ne pouvaient rencontrer de difficultés de transmissions. Il existait une liaison radiophonique entre l’État-Major du général Student, le mien et les autres officiers d’État-Major, y compris le Commandant en chef de l’Aviation. Une interruption des communications n’aurait pu être que très brève, étant donné que les ordres radio étaient transmis par moi-même ou par le Reichsmarschall. Cette installation radiophonique offrait la possibilité, et ceci existait en fait, d’établir la liaison entre les différentes unités tactiques au sol et la formation aérienne, par l’intermédiaire du poste au sol. Les moyens ordinaires de communication au sol de cette époque tels que : fanions, fusées, signalisation de premières lignes, étaient réglementaires. Leur utilisation n’offrait pas de difficulté. Conformément à l’habitude et aux instructions reçues, la formation aérienne était précédée d’un avion de reconnaissance qui la tenait au courant de la situation et de l’objectif. De plus, par ordre du Reichsmarschall, un officier d’État-Major général était affecté à ma flotte aérienne avec la même mission.
C’est-à-dire que si l’ordre avait été donné que la situation et l’objectif...
Je n’ai jamais personnellement douté que cette attaque dût être effectuée ; je me demandais simplement s’il fallait la renouveler et les appels télégraphiques avaient pour objet d’éclaircir cette question.
Connaissant parfaitement le général Student et — je dois le souligner particulièrement — sa technique du commandement aérien et ses indications précises, je devais m’attendre à ce que l’attaque fût effectuée. L’attaque fut menée conformément aux plans établis et à l’horaire fixé. L’annonce que des bombes avaient atteint leur but nous parvint avec une rapidité exceptionnelle, ainsi que le message que des attaques ultérieures n’étaient plus nécessaires. Le Commandant en chef de la Luftwaffe fut constamment tenu au courant de la situation pendant les trois jours que durèrent les combats en Hollande. Particulièrement le troisième jour ; celui dont je parle, le Reichsmarschall, agissant avec la hardiesse qui est dans sa manière, est intervenu dans la conduite de la flotte faisant, à mon avis, tout ce qui était possible d’une position aussi élevée Je ne me souviens pas que l’on eût fait savoir au commandement que l’attaque aérienne ne correspondait plus au développement de la situation tactique.
Un bombardement eut-il lieu après que les pourparlers de capitulation eurent déjà été engagés ?
Comme je vous l’ai dit, le commandement n’a jamais reçu d’informations à ce sujet, du posté au sol, non plus que la formation opérant au-dessus de Rotterdam. Il se pourrait d’ailleurs qu’une certaine confusion se soit produite au poste de commandement de Rotterdam dont je n’ai pas eu connaissance. J’ignore également les accords passés entre le général Student et le chef des troupes hollandaises à Rotterdam. L’entretien que j’avais demandé à la suite de ces conversations n’a pu avoir lieu en raison des sérieuses blessures à la tête que le général Student avait reçues. Si réellement, contrairement à ma conviction profonde, cette attaque avait été dépassée par les événements, ce serait regrettable. En tant que soldat depuis 42 ans, artilleur, aviateur, chef d’État-Major général, pour avoir exercé un commandement pendant des années, je tiens à souligner très clairement que le cas est à imputer à ces coïncidences inévitables de la guerre qui, malheureusement, arrivent à toutes les armées du monde plus fréquemment qu’on ne le pense. Elles restent seulement ignorées.
A quoi doit-on attribuer les graves incendies qui survinrent à Rotterdam ?
Je fus agréablement surpris en recevant le rapport suivant lequel les effets du bombardement étaient limités à la zone des objectifs Mais l’expérience a montré que, pendant cette guerre, les destructions les plus étendues n’avaient pas été causées par les bombes elles-mêmes, mais par les incendies qui se propageaient très rapidement. Une bombe avait malheureusement là-bas, à Rotterdam, touché une fabrique de margarine ou d’un autre produit, si bien que l’huile se répandit et que l’incendie se propagea plus loin. Comme, après l’attaque, l’armistice était sans aucun doute déjà entré en vigueur on aurait pu à la rigueur, en engageant les piquets d’incendie et en amenant la troupe, réussir à empêcher l’extension de l’incendie.
Quelles furent les conséquences militaires de cette attaque ?
La conséquence immédiate fut la capitulation des troupes de Rotterdam. Comme le général Wenninger, alors attaché de l’Air et qui plus tard fut affecté à ma flotte aérienne, me l’annonça, l’Armée hollandaise entière capitula à la suite de cette attaque.
Avez-vous, au mois de novembre 1940, dirigé l’attaque contre Coventry ?
J’ai évidemment participé à cette attaque en tant que chef de la flotte aérienne n° 2. Je ne saurais présentement dire si la flotte aérienne n° 3 y participa également, mais j’y pris part.
Quel était le but de l’attaque ?
Coventry, d’après la carte-index des objectifs militaires qui était constituée au département d’archives du Commandement en chef de la Luftwaffe, était un centre d’armement anglais. Il était désigné sous l’appellation militaire de « Petit Essen ». Ces archives avaient été constituées avec la plus grande minutie par des experts, ingénieurs et officiers, et contenaient des cartes, des plans, des photographies, des descriptions d’objectifs, de positions-clés, etc. Toute cette documentation était connue dans le détail par moi-même et par mes hommes.
En outre, à plusieurs reprises, j’ai fait prononcer des conférences par le général Wenninger dont j’ai parlé précédemment et par plusieurs ingénieurs du Commandement en chef de la Luftwaffe afin que la troupe soit au courant de la nature des objectifs, de leur vulnérabilité et des conséquences de l’attaque aérienne. Les préparatifs d’attaque étaient menés très consciencieusement. J’ai souvent pris part en personne à ces préparatifs. Le Reichsmarschall les a même quelquefois surveillés. Dans le cas de Coventry, les données étaient particulièrement simples car les nuits à cette époque présentaient des conditions atmosphériques favorables. L’approche de Coventry pouvait donc se faire sans l’aide de la radio. La répartition des objectifs était de même très simple, de telle sorte que les bombes pouvaient presque être lancées à vue. A proprement parler, il était presque impossible de manquer l’objectif. Mais les bombes restent soumises aux mêmes lois balistiques que les autres projectiles. En d’autres termes, le combat, et en particulier le combat aérien, occasionne des dispersions considérables. L’Aviation a, en outre, ceci de particulier que, lors d’engagements massifs, chaque objectif particulier ne peut plus être visé directement, si bien que c’est l’ensemble des objectifs visés qui sert de cible. Ce fait entraîne naturellement un élargissement de l’objectif proprement dit.
Par ordre du Commandement en chef de la Luftwaffe et sur l’initiative du pilote de reconnaissance lui-même, le résultat de tous les lancements de bombes et des attaques fut vérifié photographiquement le jour suivant. La visibilité au sol était bonne, mais comme je l’ai dit tout à l’heure pour Rotterdam, l’objectif ne fut pas seulement détruit par les bombes mais de plus amples destructions furent opérées par la propagation de l’incendie.
Je ne sais si je dois encore m’étendre sur la question. La Convention de la Haye, relative à la guerre sur terre, n’a pas tenu compte des exigences de la guerre aérienne. Afin d’éviter que le choix des objectifs ne fût laissé au hasard, le Commandement suprême dut naturellement étudier la question et publier des directives générales qui découlaient naturellement du préambule de la Convention de la Haye, des ouvrages publiés entre temps et, enfin, des données particulières des possibilités de l’Aviation. Seuls, les objectifs considérés comme autorisés par le Droit international étaient assignés à la flotte ou aux formations aériennes, ce qui n’exclut pas que nous ayons dans des cas particuliers, après discussion avec le Commandement en chef de la Luftwaffe, reconsidéré et changé de catégorie certains objectifs, ce dont nous prîmes la responsabilité...
Vous parlez trop rapidement.
A la suite de visites personnelles et par d’autres moyens, nous avons amené nos formations à préparer à fond l’attaque : lancement des bombes, délimitation des objectifs, conditions météorologiques, avec suffisamment de soin pour que la plus grande précision puisse être atteinte et que soient évitées les déviations regrettables, dans les parages des objectifs. Dans le cas de Coventry, on pouvait particulièrement se réjouir du choix car on avait affaire à un important objectif militaire, et il ne pouvait être question d’attaque terroriste.
Je n’ai plus aucune question à poser.
D’autres avocats désirent-ils interroger le témoin ?
Témoin, à quelle époque avez-vous été nommé Commandant en chef d’un groupe d’armées ?
Je fus Commandant en chef d’un groupe d’armées à partir de septembre 1943, après avoir, dans le cadre du Commando suprême et en tant que Commandant en chef dans l’Armée allemande, exercé un certain droit de regard sur toutes les questions d’un intérêt stratégique général et d’ordre tactique.
Le groupe d’armées que vous aviez sous votre commandement était engagé en Italie ?
Ce groupe d’armées se trouvait engagé en Méditerranée.
La composition du groupe d’État-Major général et de l’OKW, telle qu’elle a été présentée par le Ministère Public, vous était-elle connue ?
Parfaitement.
Je vous poserai d’abord une question préliminaire. Qu’entend-on à proprement parler par le mot « État-Major général allemand » à propos des différentes armes de la Wehrmacht ?
L’État-Major général des différentes armes de la Wehrmacht rassemble tous les officiers qui, à l’intérieur d’une même arme, secondent le commandement ou sont chargés de missions spéciales d’une certaine importance.
Voudriez-vous nous indiquer comment, par exemple, ce groupe était composé dans la Luftwaffe, quels services il englobait ?
L’État-Major général de la Luftwaffe était une organisation similaire à l’État-Major général de l’Armée, absolument identique. L’État-Major général se composait du Service central appelé à la Luftwaffe « Führungsstab » ou « Führungsamt » à la tête duquel étaient placés le chef d’État-Major général et des services d’opérations, des groupes d’organisation, des chefs de service de la Luftwaffe, de « L’Oberquartiermeisteramt », etc.
Les différentes autorités de commandement de la flotte aérienne jusqu’à la division, le personnel à terre, les régions aériennes, disposaient d’officiers d’État-Major général pour seconder le commandement. La co-responsabilité des chefs d’État-Major général, jadis couramment admise, tomba en désuétude comme incompatible avec le Führerprinzip. Ces chefs d’états-majors généraux et jusqu’au chef du Service central de l’État-Major général, exerçaient leur influence pour ce qui est de la formation et de l’entraînement militaire sur tous les officiers d’État-Major général des forces armées, sans engager en quoi que ce soit la responsabilité des militaires, chefs de département, immédiatement placés au-dessus d’eux.
Si je résume votre réponse en disant que, par État-Major général de la Luftwaffe, on comprend le chef d’État-Major général de la Luftwaffe et les officiers d’états-majors d’unités, je crois avoir, sans me tromper, détaillé le personnel composant l’État-Major général de la Luftwaffe ?
Parfaitement.
Pouvez-vous dire que vous considérez cette désignation d’« État-Major général » qui vous est bien connue, telle qu’elle a été employée au cours de ce Procès, comme conforme à l’usage militaire ?
J’ai déjà dit que l’État-Major général était composé d’officiers secondant le commandement. Pour ce qui est de l’Armée allemande, les commandants et commandants en chef étaient exclus de ces cadres Ils n’appartenaient pas à cette organisation car nombre de ces commandants et commandants en chef n’avaient pas suivi la même école que les officiers d’états-majors généraux. Les commandants en chef avaient une situation à part. Ils n’étaient traités comme un corps qu’en considération de leur rang de généraux et pour les questions de solde et de budget.
Serait-il inexact d’employer le terme d’État-Major général vis-à-vis des chefs militaires supérieurs ?
Selon les conceptions allemandes, c’est une désignation impropre.
Une semblable centralisation des services militaires supérieurs, telle celle que ce groupe réalisait, a-t-elle jamais existé auparavant dans la Wehrmacht ?
En Allemagne, une telle centralisation ne se rencontrait pas, elle n’était même pas possible pour des raisons très diverses. Les commandants en chef ne se groupaient pas davantage en conseils de guerre ou en groupements similaires. Ils n’appartenaient pas non plus individuellement ou collectivement au Conseil de Défense du Reich. Ils étaient uniquement désignés comme commandants d’un théâtre d’opérations ou d’une circonscription administrative.
La centralisation des commandants en chef, quel que fût le but recherché, n’était, à mon avis, pas possible pour la simple raison qu’ils étaient eux-mêmes sous l’autorité des commandants en chef de l’Armée de la Luftwaffe ou de la Marine ou du Haut Commandement des Forces armées. De plus, quelques-uns d’entre eux étaient entièrement sous les ordres du Commandement suprême allemand et d’autres dépendaient entièrement du commandement unifié. Quelques-uns dépendaient aussi de deux commandements différents ou bien étaient des commandants en chef indépendants et d’autres encore commandants d’armée subordonnés au Commandant en chef d’un groupe d’armée.
Témoin, vous parlez trop vite. Les commandants en chef n’étaient-ils chargés que de l’étude de questions de technique militaire qu’ils traitaient sur ordre ou prenaient-ils d’eux-mêmes l’initiative d’étudier de telles questions en vue de les soumettre à Hitler pour approbation ?
Ces commandants n’étaient que des chefs militaires uniquement responsables des tâches qui leur étaient confiées. A ce titre, ils pouvaient évidemment présenter des suggestions ou des projets d’amélioration à l’OKW ou à l’OKH. Là se bornaient leurs activités dans le sens de la collaboration.
Vous venez de mentionner certaines améliorations et certains changements. Ne s’agissait-il là que de rectifications de technique militaire ou de telles suggestions pouvaient-elles aussi mettre en cause la réalisation d’un projet ?
En général, ces projets d’améliorations ne portaient que sur des questions de technique militaire. Dans les questions de moindre importance, les commandants en chef pouvaient naturellement émettre aussi des objections. Si cependant les autorités supérieures avaient pris une décision, les autres n’avaient plus qu’à se taire.
Nous reparlerons de cela tout à l’heure. L’État-Major général, dont on parle ici, s’est-il jamais réuni en entier ?
Non.
Y avait-il des règles prévues pour une organisation de ce groupe ?
Non.
Des membres de ce groupe ont-ils jamais suggéré des violations au Droit international ?
Je ne crois pas. C’est plutôt le contraire.
Les postes détenus par ce groupe ont-ils été fréquemment redistribués ou les titulaires les ont-ils gardés longtemps ?
Dans les dernières années, les commandants en chef et les commandants ont été assez souvent mutés.
Que saviez-vous des conférences qui eurent lieu chez Hitler entre les grands chefs militaires ?
Il faut à ce sujet distinguer deux sortes de conférences : les premières prenaient la forme d’un important discours tenu avant une campagne aux officiers de haut rang qui y participaient. Ce discours avait généralement pour but de renseigner les chefs sur la situation et de leur préciser leurs attributions. En raison de la persuasion rhétorique du Führer, il nous était presque impossible de prendre position, d’autant plus que nous n’étions pas tenus au courant de tous les détails. A de telles conférences, aucune discussion n’avait lieu. Elles n’étaient pas admises. Ensuite se déroulaient parfois des entretiens purement militaires ou tactiques où chaque chef exposait avec force ses opinions et ses requêtes. Comme je l’ai déjà mentionné, nous n’étions pas écoutés sur les questions politiques. Nous étions placés, comme il est bien connu, devant un fait accompli et, en tant que soldats, nous devions nous en accommoder.
Vous avez pris part à une conférence chez Hitler le 22 août 1939, c’est-à-dire peu de temps avant le commencement de la campagne de Pologne ?
Parfaitement.
Ne vous a-t-on pas fait savoir à la fin de cette conférence que nous avions conclu un pacte avec l’Union Soviétique ?
En fin de réunion, après l’allocution, nous avons été à nouveau réunis pour nous annoncer que l’on venait d’apprendre que la Russie adopterait une position de neutralité bienveillante.
Quelle impression l’annonce de cette nouvelle produisit-elle sur vous et sur les autres grands chefs militaires ?
Pour ma part, cela m’enlevait un grand poids. Pour les autres aussi c’était un soulagement, car autrement nous n’aurions pu éviter l’extension de la guerre vers l’Est. Puisque la Russie ne prenait pas part à l’entreprise, l’Aviation tout au moins — je parle comme commandant d’Aviation — obtenait une supériorité garantissant un succès rapide et décisif qui, par-dessus tout, à mon avis, pouvait empêcher la guerre de se propager.
De toutes façons, vous avez éprouvé un grand soulagement à la suite de cette communication ?
Oui, un très grand soulagement.
Témoin, savez-vous si des membres de l’État-Major général et de l’OKW se sont parfois réunis et ont eu des entretiens avec des hommes politiques ou membres du Parti influents ?
En ce qui me concerne, j’ai dirigé des opérations aussi bien en Méditerranée qu’à l’Ouest. En Méditerranée, on m’ordonna de collaborer avec les Gauleiter Rainer et Hofer et à l’Ouest avec.
Ce n’est point le sens de la question. Je voulais savoir si les grands chefs militaires se sont parfois rencontres avec des hommes politiques influents et ont discuté lors de leurs entretiens des projets politiques ?
Non, non, je puis affirmer que cela ne s’est jamais produit. Nous, en tant que soldats, ne nous sommes jamais occupés de politique. Les décisions politiques étaient prises par les politiciens et nous avions à les exécuter.
Cette éducation apolitique du soldat est d’usage parmi les chefs militaires de la Wehrmacht. Elle découle d’une longue expérience qui les a amenés à développer ce principe.
Ce principe a été adopté dans l’Armée allemande au dix-huitième siècle.
Que savez-vous des rapports des grands chefs militaires avec la Cinquième colonne ?
Le commandement militaire ne s’est pas occupé de Cinquième colonne. Elle se plaçait à un plan inférieur.
Quelle impression avez-vous retirée de l’entretien de Hitler avec les grands chefs militaires avant la campagne de l’Est ? Vous a-t-on présenté à cette époque la situation, comme si la guerre était inévitable ?
J’avais la ferme impression que le but de ce discours était de convaincre les chefs militaires de la nécessité d’une guerre préventive et de l’urgence de frapper avant que la mobilisation et le degré d’armement des Forces armées russes ne deviennent un danger pour l’Allemagne.
Pouvez-vous nous exposer les raisons qui vous ont amené à cette conviction ?
Comme je l’ai déjà dit tout à l’heure, le discours avait pour objet, et il y réussit, de nous donner de la situation militaire et de son déroulement chronologique une image convaincante. En ce qui concerne la campagne de Russie, je dois dire que je n’avais pas le moindre doute sur cette entreprise jusqu’au dernier jour du mois d’août...
Témoin, voulez-vous parler plus lentement s’il vous plaît, et avoir quelques égards pour les interprètes.
Témoin, veuillez, s’il vous plaît, répéter encore une fois cette dernière réponse.
J’avais encore moins de raisons de douter des déclarations de Hitler que, jusqu’au dernier moment, j’assurais, en qualité de Commandant en chef de la flotte aérienne n° am11031946 z2, la direction des opérations contre l’Angleterre et n’avais ni le temps ni les moyens de porter, comme cela eût été nécessaire, un jugement personnel, technique et fondé sur la situation de la Russie. Je devais m’en tenir.
Dans ce Procès, des commandants en chef ont été tenus pour responsables d’événements résultant du fait de la guerre. Pourriez-vous détailler au Tribunal l’emploi du temps journalier d’un commandant en chef de groupe d’armées, armée ou flotte aérienne ?
Cet emploi du temps journalier dépendait évidemment de la personnalité du commandant en chef. Si je puis parler de mon cas...
Témoin, je vous demanderai d’être très bref.
Témoin . .. Docteur Laternser, le témoin sera certainement amené à répéter ce qu’il vient de dire et risque d’être assez long. Pour ce qui est de la description de la journée d’un commandant en chef, le témoin a déjà indiqué précédemment que les commandants en chef n’avaient rien à voir ni avec les questions politiques ni avec l’État-Major général. Pourquoi donc nous soucier de la manière dont il occupait sa journée ?
Monsieur le Président, j’attache une importance particulière à ce que le témoin réponde à la question et pour les raisons suivantes : vu l’ampleur de l’activité d’un commandant en chef, particulièrement au front, n’importe quel rapport relatif à un quelconque événement ne lui parvient pas nécessairement. En effet, même les messages provenant de son propre secteur doivent être examinés par les services compétents, de façon à ce que seuls arrivent jusqu’à lui les messages particulièrement importants et se rapportant aux décisions du commandement militaire.
Eh bien, posez-lui donc la question de cette façon, plutôt que de lui demander de nous détailler l’emploi du temps journalier d’un commandant en chef.
Témoin, vu l’ampleur de vos activités de Commandant en chef, tous les messages vous parvenaient-ils ou seulement ceux qui, après avoir été étudiés par les officiers compétents, se révélaient d’une telle importance qu’ils devaient être soumis au commandant en chef ?
Spécialement en période d’opérations on ne pouvait songer à faire parvenir tous les messages personnellement aux commandants en chef. Dans mon cas particulier, c’était d’autant moins possible que je passais cinquante à soixante-dix pour cent du temps au front. L’autonomie respective des états-majors de l’Armée, des unités de l’Aviation et de la Marine devait être respectée dans le cadre qui leur était assigné.
Vu le nombre des activités d’un commandant en chef, était-il possible que des messages rapportant des violations du Droit international, même minimes, lui parviennent ?
On faisait tout pour qu’ils lui parviennent, mais je doute cependant, pour les raisons mentionnées précédemment, que cela fût toujours possible.
Sur ce point, le commandant en chef devait donc pouvoir s’en rapporter à ses collaborateurs ?
Absolument. Cent pour cent.
Avez-vous été Commandant en chef d’une flotte aérienne sur le front de l’Est de juin 1941 à novembre 1941 ?
Parfaitement.
Aviez-vous eu connaissance de l’extermination de Juifs à l’Est ?
Non.
Avez-vous appris quelque chose de l’activité des « Einsatzgruppen » SS ?
Non. Je ne connaissais même pas le nom de ces unités.
Saviez-vous quelque chose de l’ordre regrettable d’après lequel les commissaires russes faits prisonniers devaient être fusillés ?
J’ai eu connaissance de cet ordre à la fin de la guerre. La flotte aérienne n’avait rien à voir avec ces questions, étant donné qu’elle n’était pas engagée dans les combats au sol. Je peux dire avec certitude que l’Aviation ne savait absolument rien à ce sujet. Même au cours de mes prises de contact fréquentes avec le Generalfeldmarschall von Bock, avec les chefs d’armées, les commandants des troupes blindées, aucune de ces personnes ne m’a rien dit concernant un tel ordre.
Connaissiez-vous l’ordre des commandos ?
Oui, j’en ai eu connaissance.
Quelle fut votre attitude en face de cet ordre ?
Je considérais un tel ordre qui m’avait été adressé en tant que Commandant en chef pour la Méditerranée où j’occupais un double poste, non pas comme un ordre qui aurait pu me lier, mais comme un ordre général dont j’étais libre de régler les détails A ce sujet, je considérais qu’il m’appartenait, en qualité de Commandant en chef, de décider si une opération de commando était contraire au Droit international ou justifiée du point de vue tactique. La théorie qui, peu à peu, s’imposa aux unités et que j’avais fixée, était que des hommes portant l’uniforme, ayant à remplir une tâche d’après un ordre tactique précis, devaient être considérés et traités en soldat, conformément à la Convention de La Haye, relative à la guerre sur terre.
L’ordre sur les commandos n’a pas, en conséquence, été appliqué par vos unités.
On l’a certainement appliqué dans un cas.
De quel cas s’agit-il ?
Il s’agit du cas du général Dostler.
Le cas du général Dostler a déjà été mentionné au cours de ce Procès En avez-vous eu connaissance à l’époque où il s’est présenté ?
J’ai déjà témoigné sous la foi du serment que je ne me souvenais pas de ce cas Je crois que les raisons pour lesquelles je n’ai pas conservé le souvenir de cette affaire sont au nombre de deux. Premièrement, après entrevue avec mon chef, qui en avait parlé à un autre commandant, il s’avéra qu’aucun de nous trois n’en était informé. Deuxièmement, en raison de l’ampleur gigantesque des opérations du front sud, j’étais le plus souvent absent de mon Quartier Général.
Témoin, si l’on vous avait demandé de prendre une décision dans le cas Dostler, qu’auriez-vous fait ?
Je ne connais pas assez bien le cas en lui-même, je ne connais cette affaire que par ouï-dire.
Je ne pense pas que nous puissions rouvrir ici le cas Dostler, ni que le témoin doive présenter son point de vue. Ce cas a déjà été jugé par un tribunal compétent et cette question a été réglée. Je ne m’oppose pas à la présentation de ’faits qui renseignent le Tribunal. Cependant, le point de vue du témoin sur la culpabilité de son camarade ne nous est d’aucun secours.
D’autant plus qu’il vient de nous indiquer ne pouvoir s’en souvenir.
Je retire cette question. (Au témoin.) Témoin, pouvez-vous citer d’autres cas relatifs à votre secteur et dans lesquels l’ordre des commandos ne fut pas appliqué.
Petits débarquements derrière le front à Commazio, dans la région maritime au sud de Venise. Parachutages au nord d’Albenda, région de Gênes. Petites interventions dans le district du Lago di Ortona. Je suis convaincu que les troupes adoptèrent ce point de vue et agirent en conséquence.
Vous avez été Commandant en chef d’une flotte aérienne à l’Est ? Pouvez-vous nous fournir des indications sur la façon dont furent traitées les populations civiles russes au cours de la campagne ?
Je suis resté en Russie jusqu’à la fin novembre et je puis dire que les relations entre la population et la troupe étaient des meilleures, que les cuisines roulantes étaient mises à la disposition des pauvres et des enfants, que la haute moralité reconnue à la femme russe fut respectée par le soldat allemand de façon tout à fait remarquable. Je sais que les heures de consultations de nos médecins ont souvent été réservées pour la population russe Je me souviens de cela car les docteurs m’ont parlé de l’endurance de cette population à la souffrance La guerre passa si vite au delà des plaines jusqu’à Smolensk que l’ensemble de ces territoires donnait une impression de paix ; les paysans travaillaient ; des troupeaux de bétail, plus ou moins importants, paissaient ; les petites localités que je visitais étaient le plus souvent intactes.
Avez-vous eu connaissance d’attentats aux mœurs perpétrés à l’Est par les soldats allemands ?
Chaque fois que des cas de violation du Droit international vous étaient rapportés, avez-vous toujours agi avec tous les moyens dont vous disposiez ?
Je l’ai tout au moins essayé, pour sauvegarder tout d’abord la réputation de la Wehrmacht et des Forces armées de nos alliés les Italiens. J’estimais alors qu’il était nécessaire de prendre des mesures résolument sévères contre tout soldat allemand qui commettait une infraction. Pleinement conscient que la guerre est une entreprise cruelle, dont la cruauté augmente avec la durée, particulièrement si les chefs et les chefs subalternes ne sont plus capables de suffire à leurs devoirs, j’ai attaché beaucoup d’importance aux mesures préventives. Ces mesures qui, j’en suis sûr, ont pu être remarquées sur place par les alliés, lors de leur avance en Italie, de même que les ordonnances diverses relatives à la répression, qui d’ailleurs sont de notoriété publique, sont les meilleures preuves de ce que je viens d’avancer.
Comme mesures préventives, j’ai ordonné que des villes entières ou, si cela n’était pas possible, leurs centres, soient évacués par les services administratifs militaires et par les soldats, et que l’on interdise ces parties de la ville. De plus, autant que les mesures de précautions contre les attaques aériennes le permettaient, les soldats devaient être casernes ou cantonnés dans des endroits déterminés. J’ai également ordonné que des soldats isolés — ce sont eux qui en général causaient les perturbations — par exemple, les soldats allant ou revenant de permission, soient groupés à part et aussi que les véhicules servant à l’économie du pays soient formés en convois. Pour assurer la surveillance, j’avais organisé des cordons de police militaire, de police de campagne, de gendarmes et des tribunaux mobiles et des patrouilles de camions.
L’achat de produits italiens qui a joué un certain rôle dans ces troubles devait être jugulé en établissant, en liaison avec le Gouvernement italien, le long des routes conduisant vers l’Allemagne des magasins où les soldats pouvaient acheter des marchandises à rapporter chez eux. Des sanctions furent prévues. Je fis poursuivre ou poursuivis moi-même, les délinquants allemands qui m’étaient signalés par les Italiens. Partout où les opérations ne me permettaient pas d’intervenir personnellement, comme par exemple à Sienne, je fis savoir aux Forces armées que l’affaire serait ultérieurement poursuivie devant les tribunaux militaires. Dans d’autres cas, lorsque la situation était critique, j’ai déclaré l’état d’exception et infligé la peine de mort pour pillage, vol, meurtre, etc. La peine de mort, cependant avait rarement un effet d’intimidation. J’ai pris des mesures contre les officiers qui, naturellement disposés à protéger leurs hommes, avaient fait preuve d’une trop grande indulgence à leur égard.
Je crois que tous les dossiers se trouvent ici, de telle sorte que toutes les précisions peuvent être retrouvées sur les notes marginales des rapports envoyés par la police militaire.
Témoin, êtes-vous au courant de certaines violations du Droit international commises du côté adverse ?
Au cours de mes nombreuses visites au front, j’en ai naturellement relevé un grand nombre...
Je proteste contre une telle question car, à mon avis, le témoin n’est pas autorisé à procéder à des déclarations sur le point de savoir si les ennemis de l’Allemagne ont violé le Droit international. Par conséquent, cette question doit être rejetée.
Puis-je prendre position à ce sujet ? J’attache un grand intérêt à la réponse qui sera faite à cette question. A la suite de celle-ci, j’en poserai une autre afin de savoir si, après avoir eu connaissance de violations du Droit international par l’ennemi, le témoin ne serait pas devenu plus indulgent envers les violations du Droit international commises par ses troupes. C’est pourquoi j’insiste pour qu’il soit répondu à cette question.
Le Tribunal aimerait savoir quelle est exactement votre question et pourquoi vous la considérez comme valable.
Le texte exact de la question est le suivant. J’ai demandé au témoin : Avez-vous eu connaissance de violations du Droit international du côté adverse ?
D’après sa réponse, je voulais poser au témoin une question supplémentaire en vue de savoir si, peut-être, de telles violations du Droit international par le côté adverse ne l’avaient pas incité à fermer les yeux ou à traiter avec plus d’indulgence les violations du même Droit commises par ses propres hommes.
D’après la réponse à cette dernière question, je désirais m’assurer de l’attitude du témoin en tant que membre du groupe et c’est pourquoi je considère comme importante une réponse à la première.
Le Tribunal aimerait savoir ce qu’en pense le Ministère Public américain.
Plaise à Votre Honneur. Je crois savoir que c’est un principe bien établi du Droit international que la violation de ce Droit par un pays n’excuse nullement ou ne justifie pas les mêmes violations commises par un autre pays. Il existe, évidemment, une « doctrine des représailles », mais elle ne saurait de toute évidence s’appliquer à aucun des cas qui ont été soulevés ici.
En deuxième lieu, à supposer qu’il fût admis de traiter ici de cette question, je crois qu’elle a été considérée d’une manière inopportune. La question : « Avez-vous entendu parler de violations du Droit international ? » va très loin. Même s’il nous était permis d’aborder ce sujet, il faudrait au moins présenter un cas précis dans ses détails. Une incrimination générale portant sur toutes les violations du Droit international suffirait à peine à éclairer le Tribunal sur les causes qui ont incité le témoin à agir Un cas tout à fait particulier, sur lequel le témoin serait susceptible de fournir des renseignements dignes de foi, pourrait servir de base. Mais la question, sous la forme où elle a été posée par le défenseur, ne présente ici aucun fondement.
Il me semble que nous nous écartons beaucoup trop de l’accusation et que tout cela est très éloigné de notre sujet. J’ignore les atrocités spéciales ou les violations du Droit international que l’on désirerait excuser de cette façon. Il se peut qu’il y ait eu des atrocités commises, à travers lesquelles on cherche à excuser des atrocités commises par d’autres. Qui en a été l’auteur et pourquoi, voilà un sujet que nous pourrions avoir à traiter si nous voulions approfondir cette question. Il me semble qu’une telle question est tout à fait à côté du sujet. Même si elle ne l’était pas, et à supposer que nous puissions la faire rentrer, d’une manière ou d’une autre, dans le cadre de notre démonstration, elle serait mal posée de toute façon.
Cette question est d’une importance fondamentale et a déjà été discutée il y a quelque temps devant ce Tribunal lorsque j’avais demandé la production des « Livres Blancs » où figurent des rapports sur les atrocités. Je crois que c’était à l’audience du 25 février.
A ce moment-là, le professeur Exner prit position à ce sujet et le Tribunal me permit alors de produire ces « Livres Blancs » à condition que j’indique d’abord les parties de l’ouvrage que je voulais citer.
On a déjà, à ce moment, attiré notre attention sur l’importance de savoir si des atrocités avaient aussi été commises également du côté adverse, car ce fait permettrait de juger plus équitablement et probablement de façon plus indulgente la conduite des Allemands.
Le motif d’une action joue toujours un rôle décisif dans le fondement d’une décision judiciaire et on admettra qu’un acte commis du côté allemand soit jugé différemment si le côté adverse a vraiment fait preuve d’une conduite incorrecte.
De plus, il est important de savoir si, dans un pareil cas, il ne s’agissait pas de représailles. En raison de toutes ces considérations, je maintiens que la question posée est d’importance et devrait être admise.
Le Tribunal suspend l’audience dix minutes.
Le Tribunal a examiné les questions que le Dr Laternser avait l’intention de poser au témoin. Il a également considéré les objections soulevées par le général Rudenko et par M. Justice Jackson. Le Tribunal estime que ces questions sont inadmissibles.
Monsieur le Président, je présume que je suis autorisé à poser la question suivante : (Au témoin.) Témoin, n’aviez-vous pas décidé de ne pas punir ou de traiter avec plus d’indulgence les violations du Droit international commises par vos propres hommes lorsque vous aviez appris des violations de ce Droit par vos adversaires ?
Vous formulez maintenant en une seule question ce qui faisait l’objet de deux questions auparavant.
Monsieur le Président, cette question n’a pas pour but de faire donner par le témoin des exemples de violations du Droit international commises par le côté adverse. Je voudrais simplement, par la réponse du témoin, connaître son point de vue et savoir particulièrement si, quand bien même lui auraient été signalées des violations du Droit international par le côté adverse, il a puni sévèrement, en tant que Commandant en chef, les violations du Droit international commises par ses propres hommes. Je retire la question.
Le Tribunal ne voit aucune objection à ce que vous demandiez au témoin s’il s’est employé à empêcher des violations du Droit international. Si vous désirez lui poser cette question, il n’y a aucune objection. La question que vous aviez l’intention de poser est en vérité identique à la précédente.
Témoin, à ce Procès, de graves accusations ont été portées pour des cruautés commises par des soldats allemands Chaque soldat était-il suffisamment renseigné et instruit des règles du Droit international ?
Je dois répondre par l’affirmative à cette question. Lors des conférences tenues par moi et par les commandants placés sous mes ordres, j’ai constamment donné des instructions et fait allusion à ces sujets.
Avez-vous, en tant que Commandant en chef d’un groupe d’armées, épargné, quand c’était possible, les œuvres d’art et les églises ?
Je considérais de mon devoir et comme naturel d’épargner les centres artistiques et culturels ainsi que les églises. J’ai donné des ordres en conséquence que j’ai appliqués lors des opérations stratégiques et tactiques.
Que savez vous du traitement des prisonniers de guerre qui étaient tombés entre les mains des Allemands ?
Ces prisonniers de guerre étaient traités correctement, d’après le Droit international. Si, à la suite des inspections que j’ordonnais, certaines négligences apparaissaient, j’y faisais remédier et je faisais rappeler à l’ordre le commandant responsable.
J’ai encore trois questions. Avez-vous été informé par avance, en tant que Feldmarschall, de l’entrée en guerre de l’Italie ?
Non, je n’en ai pas été informé. Autant que je m’en souvienne, l’entrée en guerre de l’Italie fut si soudaine que les chefs politiques eux-mêmes en furent très surpris.
Avez-vous été informé par avance qu’une déclaration de guerre devait être faite à l’Amérique ?
Non. Je n’ai rien à dire à ce sujet.
Une dernière question : quelles étaient les possibilités de démission des chefs militaires en temps de guerre ?
Démissionner de] a Wehrmacht de sa propre initiative ou demander sa démission de la Wehrmacht étaient interdits. En 1944, un ordre fut publié qui l’interdisait, sous peine des châtiments les plus sévères. Le Chef suprême de la Wehrmacht s’était réservé pour lui seul le droit exclusif de muter le personnel des services dirigeants.
Existait-il un ordre écrit à ce sujet ?
Je suppose que oui.
Merci beaucoup. Je n’ai pas d’autres questions à poser.
Témoin, vous avez dit tout à l’heure que les commandants en chef avaient, pour les questions militaires, le droit et la possibilité de faire valoir leurs demandes et leurs points de vue à Hitler, Chef suprême de la Wehrmacht. Ai-je bien compris ?
Parfaitement.
Avez-vous personnellement été en désaccord avec Hitler à propos d’ordres ?
Parfaitement, pour des questions tactiques et stratégiques.
Y a-t-il eu réellement conflit à ce sujet ?
Conflit est peut-être trop dire. Il s’agit plutôt de divergences de vue.
Nous dirons donc divergences de vue. Étaient-elles fréquentes ?
Oui.
D’après tout ce que nous avons entendu dire ici, Adolf Hitler devait être un caractère quelque peu difficile ?
Il faut le reconnaître. D’un autre côté j’avais, je ne sais pourquoi, le bonheur de rencontrer le plus souvent chez lui de la compréhension pour les questions que je lui soumettais.
Avez-vous personnellement résolu des divergences de vue avec Hitler ?
Dans les cas critiques, lorsque le Generaloberst Jodl ne pouvait faire valoir son point de vue, il me faisait appeler.
Si vous ne pouviez faire valoir votre point de vue ?
Non, si Jodl ne pouvait y parvenir.
Si Jodl ne pouvait faire valoir son point de vue, vous étiez appelé ?
Oui.
Mais Jodl était-il souvent, lui aussi, en désaccord avec Hitler ?
A différentes occasions, lors des conférences, j’ai remarqué des divergences de vue très profondes entre les deux hommes et constaté que le Generaloberst Jodl, qui était notre porte-parole auprès de l’OKW, défendit ses idées avec une énergie des plus remarquables, qu’il les soutint jusqu’au bout.
Que voulez-vous dire par porte-parole ? Il a été votre représentant, représentant de qui ?
Les théâtres d’opérations qui m’étaient assignés en tant que général de la Wehrmacht étaient dénommés théâtres d’opérations de l’OKW, et l’Est était théâtre d’opérations de l’Armée de terre, contrairement aux autres qui étaient théâtres d’opérations de l’OKW.
L’OKW n’avait-il rien à voir avec les théâtres d’opérations à l’Est ?
Non.
Et l’Armée de terre n’avait rien à voir avec les théâtres d’opérations de l’OKW ?
Non.
Je ne crois pas que tout le monde comprenne la différence.
Ce serait trop demander, car moi-même je ne la comprends pas très bien.
Ainsi vous vous êtes trouvé sur un théâtre d’opérations de l’OKW ?
Oui.
Que veut donc dire OKW sous ce rapport ?
Oberkommando der Wehrmacht, Haut Commandement des Forces armées.
Oui, je sais.
Cela signifiait que le commandant en chef était directement responsable devant Adolf Hitler et que le Quartier Général l’était devant l’État-Major de Jodl.
Au cours d’un interrogatoire précédent, n’avez-vous pas parlé d’ordres de l’OKW ?
Oui.
De quel OKW provenaient ces ordres ?
Les ordres d’importance décisive n’émanaient que d’une seule personne, Adolf Hitler, Les autres personnalités n’étaient que des organes d’exécution. Ce qui n’excluait pas qu’elles eussent, en tant qu’organes d’exécution, leur point de vue ou celui des groupes d’armées qui leur étaient subordonnés et qu’elles devaient défendre ce point de vue devant Adolf Hitler dans l’esprit des demandes ou des avis émis par ces groupes d’armées.
Ce que vous dites là me surprend un peu car on répète que Jodl qui, dites-vous, était une sorte de porte-parole du commandement en chef, était la créature d’Adolf Hitler.
Je crois que l’un n’exclut pas l’autre. Je ne peux pas me représenter un mariage de six années sans qu’il y ait eu, des deux côtés, un essai de compréhension. Mais je réalise très bien que, comme dans les plus heureuses unions, de sérieuses querelles aient parfois éclaté.
Mais dans un ménage normal l’époux ne doit pas nécessairement être tout dévoué à la femme ?
Ici la situation est un peu différente. Comme toutes les comparaisons, celle-ci est boiteuse. Car il y a, dans l’Armée, le principe de l’indiscutable subordination.
Oui, mais d’après ce que vous nous avez dit des fonctions de Jodl, porte-parole du commandement en chef, il semble qu’il ait agi pour aplanir les choses, n’est-ce pas ?
Jodl a représenté nos intérêts d’une façon tout à fait. supérieure ; il agissait ainsi en qualité d’intermédiaire de la communauté.
A-t-il également exprimé des opinions contraires à celle d’Adolf Hitler lorsque ce dernier donnait un de ces ordres particulièrement redoutés ?
Je déclarerai seulement qu’à l’occasion des quelques visites que je fis au Quartier Général, je vis le Generaloberst Jodl — si je puis m’exprimer ainsi — devenir rouge d’emportement et exprimer ses opinions sous une forme que je considérais à la limite de ce qui était militairement possible.
Je vous remercie.
L’audience est levée.