CENT QUATRE-VINGT-TREIZIÈME JOURNÉE.
Vendredi 2 août 1946.
Audience du matin.
(Le témoin Hoeppner est à la barre.)Témoin, je vous demande de me dire si j’ai bien compris certains points sur lesquels vous avez témoigné hier. Je vous demande de me répondre brièvement par oui ou par non. Vous avez dit que le SD n’avait aucun rapport avec l’élaboration des plans d’agression et n’en savait même rien. Est-ce exact ?
Oui.
Vous avez dit ensuite que le SD, de 1934 à 1939, c’est-à-dire au moment de l’organisation idu RSHA, avait une activité qui ne touchait en rien aux tâches d’exécution de la Police, et avait surtout un caractère de recherches scientifiques. Est-ce exact ?
Je n’ai pas parlé de questions scientifiques.
Je veux dire de recherches scientifiques. C’est ainsi que vous vous êtes exprimé hier. Est-ce exact ?
J’ai déclaré que les services du SD avaient deux tâches différentes : d’abord], la question vitale du service de renseignements, puis les questions de statistiques et de recherches, dirigées contre les autres idéologies.
Je vous remercie. Ensuite vous avez dit que le SD n’avait aucun rapport avec les crimes contre la Paix et l’Humanité. Est-ce exact ?
Oui.
Bien. Monsieur le Président, je vous prie de me permettre de présenter un document original allemand saisi dans les archives du SD. C’est un document qui a été trouvé par l’Armée rouge à l’administration du SD à Berlin et qui se rapporte aux plans d’agression contre la Tchécoslovaquie.
Témoin, je vous demande de me suivre penidant que je vais lire ce document dans la traduction russe.
« Très secret, Berlin. Juin 1938. Objet : utilisation du SD dans le cas de la Tchécoslovaquie. En cas de complications entre le Reich allemand et la Tchécoslovaquie, le SD doit se préparer à être éventuellement utilisé. »
Je passe un paragraphe et continue : « Un plan général et détaillé et la mise sur pied des Einsatzstàbe doivent se faire après l’avis de principe ».
Vous avez dit juin 1938. Je ne vois pas cette date sur le document.
Oui, juin 1938.
Elle ne figure pas en tête du document que j’ai. Ailleurs, peut-être ?
Monsieur le Président, nous avons soumis la copie de deux documents qui ont été lus ici. Je pense que le malentendu provient du fait que la copie que vous avez ne se rapporte pas au document que je lis en ce moment.
Ou bien l’exemplaire que nous avons est un document entièrement différent, ou alors certaines parties du document sont omises. Ce document n’a pas de date. Continuez, je vous prie.
Je cite :
« Le SD suit immédiatement les éléments de l’Année qui progressent. Il prend sur lui, comme en Allemagne, toutes les tâches propres à assurer la sécurité de la vie politique, ainsi que la sécurité de toutes les entreprises qui ont quelque importance pour l’économie du pays ainsi que pour l’économie de guerre. Pour atteindre ce but, on propose de partager temporairement le pays en certains Oberabschnitte et Unterabsdmitte (secteurs), divisés en services extérieurs, afin de permettre le partage des compétences et des activités entre les membres du SD — j’insiste sur le terme, membres du SD — qui ont été prévues. »
Ce document prouve que non seulement le SD était renseigné sur les plans d’agression, mais aussi qu’il participait activement à leur élaboration.
Témoini, je vous ai demandé si la citation que je viens de lire ne prouve pas que le SD, non seulement était au courant des plans d’agression, mais qu’il prenait une part active à l’élaboration de ces plans ?
Puis-je tout d’abord dire quelque chose au sujet de ce document ?
Je vous ai demandé de répondre brièvement par oui ou par non, ensuite vous donnerez vos explications.
Le document fait ressortir qu’il s’agit là uniquement d’un projet.
Nous en parlerons un peu plus tard. Vous verrez, je pense, qu’il ne s’agit pas de projet, mais la citation que je viens de faire ne prouverait-elle pas que le SD était intégralement au courant des plans d’agression et qu’il prenait part à leur élaboration. ?
J’ai déjà dit hier que le service de renseignements de l’intérieur et celui de l’étranger étaient deux organisations parfaitement différentes. Le service de l’intérieur...
Témoin, ne vous occupez pas de ce que vous avez dit hier. On vous pose une question aujourd’hui, vous pouvez y répondre par oui ou par non et vous expliquer ensuite.
Le document n’a absolument rien à voir avec le service de renseignements intérieur.
Alors, je vous demanderai de passer à la page 3 de ce document. Vous avez dit hier que le SD ne s’occupait pas du recrutement du personnel des Einsatzkommandos. Je vais lire une petite citation. Nous y trouverons peut-être aussi la réponse à ce que nous avons dit auparavant. Je rite :
« Occupation des postes : le recrutement du personnel du SD doit se faire conformément aux principes suivants : 1. D’abord suivant les principes du SD lui-même. »
Cela ne prouve-t-il pas...
Vous parlez trop rapidement, colonel ; les interprètes n’ont pas le temps de traduire.
Je vous remercie, Monsieur le Président, je parlerai plus lentement. La citation que je viens de lire ne prouve-t-elle pas que le recrutement du personnel des commandos se faisait d’après les points de vue du SD ? On dit :
« Le recrutement du personnel des commandos se fait d’après les principes du SD. »
Je vous demande pardon, la phrase a été traduite d’une façon incompréhensible. Je n’ai pas compris.
A mon avis, le sens en est très clair :
« Le recrutement du personnel du SD doit se faire conformément aux principes suivants : 1. Suivant les principes du SD lui-même ».
J’attire votre attention sur le texte même du document.
Mon texte ne dit pas que les services du SD seront complétés.
Avez-vous trouvé le passage ?
Oui.
A quels mots faites-vous allusion ?
Je parle de la deuxième partie qui est intitulée : « Mise à la disposition de personnel qualifié du SD », et du texte qui suit.
Colonel Smimov, il vous faut parler plus lentement. Vous dites simplement page 3. Cela ne figure pas à notre page 3 mais à la page 2. Nous le trouverons si vous nous donnez le renseignement. C’est le deuxième paragraphe du début ?
C’est la deuxième partie, devant laquelle nous voyons le chiffre romain II. Quelle réponse allez-vous donner, témoin, au sujet de la composition des services du SD ? Ne devaient-ils pas être constitués conformément aux exigences du SD ?
Le paragraphe fait simplement ressortir que l’on demandait que des gens du SD fussent mis à la disposition, mais non que quelqu’un fût mis à la disposition sur les exigences du SD.
Alors, je vous demanderai de voir la troisième partie qui s’appelle « Mise en œuvre ». Elle est à la page 4 du texte russe. Je lis cette partie, III en chiffres romains :
« Les Einsatzgruppen prévus en Allemagne » — remarquez ce mot qui se trouve pour la première fois dans ce document — « seront rassemblés dans votre secteur et seront rattachés aux Unterabschnitte comme bases de départ et de répartition. Ils recevront le matériel qui s’y trouve. »
Je laisse la phrase suivante et passe maintenant à la page 4. Je lis le paragraphe portant le chiffre 2. C’est après le mot « Vienne », après l’énumération des villes.
« Dès qu’un cercle est libéré des troupes ennemies, c’est-à-dire qu’il est occupé, on y dirige immédiatement les groupes qui suivent les troupes d’occupation. En même temps, on envoie également certains groupes qui seront utilisés pour les autres régions à occuper ultérieurement. »
Niez-vous que ce soit justement le SD qui formait les premiers Einsatzgruppen ?
Ce document fait simplement ressortir qu’en effet le service du SD de cette époque avait préparé ces groupes.
Si ce document ne vous convainc pas, je vous demanderai...
Il faut essayer de parler plus lentement, colonel Smirnov ; nous ne pouvons comprendre ce que le témoin a répondu si vous l’interrompez avant de laisser le temps de traduire. Dans ces conditions, il nous est impossible de comprendre.
Je vous prie de m’excuser, Monsieur le Président. Je parlerai plus lentement. Si cela ne persuade pas le témoin que c’était justement le SD qui formait les Einsatzgruppen, je lui ’demande de regarder le paragraphe V.
Un instant. Le témoin a dit quelque chose à propos des Einsatzgruppen. Témoin, qu’avez-vous dit à ce sujet ?
On me demandait si j’étais maintenant convaincu que le SD avait formé les Einsatzgruppen.. A quoi j’ai répondu...
On ne vous a pas posé de question sur les Einsatzgruppen, mais simplement sur le SD.
On m’a demandé si le SD avait mis sur pied les Einsatzgruppen, et j’ai répondu que le document faisait simplement ressortir que le service du SD avait préparé ces groupes.
Je vous demande de passer au paragraphe V intitulé : « Mesures préparatoires ».
Oui.
Monsieur le Président, je voudrais lire le paragraphe V qui s’appelle « Mesures préparatoires », V en chiffres romains :
« Mesures préparatoires. Limitation des domaines du SD et de la Gestapo : a) En Allemagne ; b) Dans les territoires occupés. Propositions : les mesures en Allemagne sont prises sous la direction de la Gestapo. Le SD collaborera avec la Gestapo. Les mesures pour les territoires occupés sont prises sous la direction d’un haut chef du SD. Les états-majors d’opérations reçoivent des fonctionnaires de la Gestapo. Ce qui est important, c’est que la Gestapo, dans la mesure du possible, s’occupe comme le SD des préparatifs, de l’instruction, de l’utilisation du matériel, etc. »
Est-ce que cela ne prouve pas que c’était justement le SD qui avait le rôle essentiel dans la mise en œuvre des Einsatzkommandos qui devaient exécuter leur activité criminelle sous la direction des fonctionnaires du SD ?
On ne parle pas d’activité criminelle. Et quant à la question du SD, il me faut me référer à la première réponse, c’est-à-dire qu’il n’avait absolument rien à voir avec le service de renseignements intérieur.
On parle ici du SD.
Colonel Smirnov, le témoin n’a pas terminé sa réponse, nous ignorons sa réponse. (Au témoin.) Répétez votre réponse.
Je ne vois rien dans le document qui parle d’activité criminelle. J’ai déjà dit précédemment que ce document n’avait absolument rien à voir avec le service de renseignements intérieur.
On parie ici du SD. Pouvez-vous nier que ce terme soit employé ici ?
L’abréviation SD est équivoque.
Mais ici, ce mot, me semble-t-il, a bien le sens qui lui est donné par les principaux spécialistes : service central du SD. Je pense qu’ils savaient employer ce terme ?
Oui, mais il est question de services de renseignements de l’étranger.
Je vous prie de passer à la suite de cette même citation. Chiffre 2, intitulé : « Création d’un fichier M à la section III, 225, du service central du SD : a) Le rassemblement et l’utilisation, de tout le matériel dont on disposait pour l’Oberabschnitt du SD ont lieu auprès du service III, 225.
b) Création d’un double fichier local pour chaque secteur : un exemplaire reste au centre, le second est remis à l’état-major d’un groupe d’opérations destiné à un certain secteur ».
Je m’arrête ici et attire votre attention spécialement sur le point c) : c) Voici quelles doivent être les références : arrêter — liquider — observer — confisquer — éloignement du service — observation de police — retrait du passeport — etc. »
Ne croyez-vous pas que lorsque l’agent du SD écrivait sur la fiche de la victime prévue les mots « arrêter », « liquider », il ne prenait pas part à des crimes contre la Paix et contre l’Humanité ?
Je ne puis que vous répéter que ce document n’a rien à voir avec le service intérieur de renseignements.
Bien. Vous ai-je bien compris hier quand vous avez nié tout lien direct entre le SD et les SS ?
Oui.
Je vous prie de passer à la fin de ce document, dernier paragraphe, chiffre romain VII. Je lis :
« Il est indispensable d’affecter une unité des SS-Verfügungstruppen, ou Tête-de-Mort, à une opération spéciale. »
Allez-vous nier après cela la liaison du SD et des unités SS, et l’activité des Einsatzkommandos ?
Ce paragraphe, dans tous les cas, ne dit pas cela.
Dans ce cas, comment interprétez-vous ce paragraphe ?
Ce paragraphe dit uniquement que dans le cas où un Einsatzgruppe est engagé, un élément des SS-Verfügungstruppe doit lui être adjoint. Si une formation d’un service civil quelconque avait été flanquée, au cours de son action, d’une unité militaire, il n’y eût pas lieu d’en conclure qu’une liaison existait entre ce service civil et cette unité militaire. Je tiens encore à vous répéter que l’ensemble du document se rapporte, comme le montre la copie, uniquement à un projet d’un adjoint qui n’a même pas été signé par un administrateur, par un chef de service, par un chef du service central, un directeur ou un directeur principal.
Donc, vous trouvez que le document qu’on vous a remis n’est qu’un projet ?
C’est le projet d’un administrateur adjoint du service II, 225, qui a été établi le 29 juillet 1938, ainsi que je le vois sur la photocopie. Le chef du service III 22 n’a pas signé, non plus que le chef du service central III 2, non plus que le directeur du service III.
Bien. Monsieur le Président, afin de réfuter cette déclaration du témoin, je vous demande de regarder le rapport signé par Walter Schellenberg, chef du service central. Il ressort du schéma original qu’on avait même nommé les chefs de ces Einsatzkommandos.
Puis-je ajouter quelque chose ?
Un instant. Laissez-moi lire.
Un instant. Colonel Smimov, le Tribunal aimerait que vous poursuiviez la lecture du paragraphe V où vous êtes arrivé, afin que le document soit traduit tout de suite. Vous étiez arrivé à l’endroit où l’on parle de fichier, à la fin du deuxième paragraphe.
Très bien, Monsieur le Président. Voulez-vous que je commence par le point b) ou c) ?
Au chiffre 13.
Oui. « Création d’un double fichier local pour chaque région ».
Ce n’est pas ce que je voulais dire. Vous avez lu le paragraphe V, en chiffres romains, jusqu’à la fin du numéro. Le dernier mot est le mot retrait de passeports. Ensuite, vous avez le petit 3 en chiffre arabe : « Le matériel nécessaire ».
C’est exact.
Nous voulons que vous lisiez tout le document à partir de là.
Très bien, Monsieur le Président.
3. Le matériel nécessaire dans les questions d’économie et de politique, pour autant qu’il n’existe pas encore, doit être procuré très rapidement.
4. Il en est de même des cartes, répertoires, fournitures de bureau :
5. Les collaborateurs du SD et les agents V qui sont destinés à être engagés suivent un cours d’instruction dans le but d’apprendre la langue, ainsi que les conditions générales de vie en Tchécoslovaquie. Pourtant, il n’est utile d’instruire que les personnes qui sont destinées aux Unterabschnitte en tant que dirigeants et chefs d’entreprises, afin die ne pas mettre trop de personnes au courant de cette préparation.
6. Ces personnes sont libérées du service militaire.
7. Élaboration d’un plan : a) Pour la réalisation des tâches nommées dans le paragraphe III-5 ; b) Pour renseigner en temps voulu les personnes nommées dans les points III-5, II-l di et 11-2 c, afin qu’elles sachent en temps voulu ce qu’elles ont à faire, évitent l’arrestation et l’expulsion et puissent réaliser leurs missions’.
8. Il faut en temps voulu se procurer les laissez-passer nécessaires pour la zone d’opérations militaires, afin d’assurer la liberté de passage des cantonnements privilégiés qui soient en même temps des locaux de travail. »
Faut-il que je lise le paragraphe VI, Monsieur le Président ?
Oui.
« VI. Divers. Il est recommandé de prendre, autant que possible, uniquement des personnes rompues au métier militaire, étant donné que : 1° Au premier moment il faut éventuellement compter avec une lutte de francs-tireurs ou de partisans ; 2° C’est pourquoi l’armement est indispensable : carabines, revolvers, grenades à main, masques à gaz et, sa. possible, mitraillettes ; 3° Les conditions dans la zone militaire exigent une conduite adéquate.
« VII ».
Vous avez déjà lu le numéro VII. Voudriez vous revenir au paragraphe III-5. Je crois que vous ne l’avez pas lu, mais n’avez fait que le mentionner.
Oui, Monsieur le Président. Je cite le paragraphe III-5 :
« Avoir des agents spéciaux V (à l’avance) tels que ceux cités dans le point II-l a, pris en Tchécoslovaquie parmi les personnes d’origine allemande qui y vivent et doivent se charger d’assurer la sécurité intérieure des principales entreprises afin d’éviter le sabotage de la part des organisations tchèques, ainsi que leur maintien. (Ils sont complètement indépendants ’des gardes militaires.) »
Voulez-vous relire à partir du chiffre romain II, au paragraphe 11-2 a : « Instruction de personnel approprié ».
Oui, Monsieur le Président. Je lis le paragraphe II-l a.
Un instant. Les interprètes sont-ils prêts ?
Oui.
Les interprètes devraient avoir le document original .et lire les paragraphes que j’indiquerai. Je crois que vous pouvez continuer, colonel Smimov, car ce texte sera vérifié par la section de traduction. Le procès-verbal sera confronté avec le document original.
Vous étiez en train de lire le paragraphe 11-2 a, qui parle de l’instruction du personnel approprié.
C’est cela. Permettez-moi de continuer, Monsieur le Président.
Oui.
Je lis le .paragraphe II-l a)« Outre les collaborateurs attitrés du SD, il faut aussi utiliser des collaborateurs honoraires, étant donné qu’il ne faut pas dégarnir les organismes allemands, et que pour les autres régions il faut prendre des mesures sembla’bles d’occupation.
« b) La mesure du paragraphe II-l a) est utile, car il peut s’avérer inutile de prendre des personnes des régions frontières pour l’occupation, étant donné que ces gens devront compter avec une activité accrue. »
Je ne crois pas que vous ayez besoin de poursuivre. Le Tribunal décide que les documents tels qu’ils sont rapportés ici seront vérifiés par la section de traduction et seront comparés avec le texte allemand original.
Très bien, ce sera fait aujourd’hui même.
Colonel Smimov, le Tribunal décide que les documents originaux allemands seront traduits dans les autres langues, en anglais, en français et en russe.
Oui, Monsieur le Président.
Maintenant, voulez-vous passer au document suivant. Ce document paraît être une lettre d’un Oberfùhrer SS adressée au Dr Best.
Voulez-vous que je lise le texte entier ou seulement le premier paragraphe ?
Lisez le premier paragraphe de toute façon.
Très bien. Témoin, elle figure à la page 9 :
« III-225. Au SS-Oberführer Dr Best, Berlin. Objet : Mise en œuvre de la Gestapo et du SD-RFSS sur le territoire de la Tchécoslovaquie. La mise en œuvre du SD-RFSS et de la Gestapo, qui vous a été proposée sur la base de douze détachements le long de toute la frontière tchécoslovaque, subit une nouvelle modification résultant de la nouvelle situation qui admet uniquement la cession par la Tchécoslovaquie de la région allemande des Sudètes. Comme certains détachements ne se trouveront pas dans la région qui doit être cédée à l’Allemagne, on propose les modifications suivantes ».
Dois-je continuer la citation, Monsieur le Président, ou puis-je me limiter à celle-ci ?
Vous n’avez pas besoin de lire le reste. Ce document porte-t-il une date ?
Non, Monsieur le Président, le ’document n’est pas daté. Mais il y a une date sur le document suivant que je voudrais que vous me permettiez de lire. Le document qui est adressé au Dr Best ne porte pas de date, mais le document suivant est daté. Ce document me paraît très important ; je demande au Tribunal de me permettre de le lire. C’est un document très court signé par Schellenberg.
« Berlin, le 13 septembre 1938. Chancellerie d’État. 1/113. Au chef du service III, SS-Oberfûhrer Jost ou son remplaçant. Objet : Mise sur pied des Einsatzkommandos. »
Je passe la phrase suivante et continue :
« Conformément au rapport cité plus haut, on trouvera ci-incluse une photocopie du schéma de mise sur pied des Einsatzkommandos. Cette mise sur pied a été ordonnée par C. dans la forme ci-dessus. Le chef du service central 1-1 a). Signé : Schellenberg, SS-Hauptsturmführer. »
Monsieur le Président, je vous demande de regarder le plan qui est attaché à ce document et qui donne une reproduction exacte, à cette époque déjà, d’un schéma d’Einsatzkommando. On cite ici les Einsatzkommandos, l’Einsatzstab K et l’Einsatzstab L. Onze commandos figurent sous la référence de l’Einsatzstab K.
Vous voyez dans la deuxième colonne apparaître le nom de Rauff qui sera plus tard un spécialiste des voitures à gaz. C’est à lui qu’ont été adressés plus tard tous les rapports sur le fonctionnement des voitures qui servaient de chambres à gaz.
Je ne vois pas cela sur le tableau.
C’est dans la deuxième colonne, Monsieur le Président ; Rauff.
Pouvez-vous nous dire où cela se trouve ?
Certainement, Monsieur le Président. Ici.
Colonel Smirnov, il doit y avoir quelques mots sur le document qui indiquent ce que vous dites.
Monsieur le Président, je crois que tout cela provient de l’inexactitude de la traduction. J’ai simplement attiré votre attention sur le nom de Rauff. Si vous vous souvenez, c’est à lui que plus tard seront adressés tous les rapports que vous connaissez sur les voitures qui servaient de chambres à gaz.
Quel est son nom ?
Rauff, Monsieur le Président. Son nom figurait- sur ce plan en 1938 et c’est sur ce point que je voulais respectueusement attirer votre attention.
Colonel Smirnov, le Tribunal aimerait avoir des photocopies de ce document.
Oui, Monsieur le Président, nous avons dix photocopies.
Nous espérons que vous allez présenter ce document au témoin et lui poser des questions à son sujet.
Oui, Monsieur le Président, il a déjà été remis au témoin.
Monsieur le Président, je voudrais poser au témoin la question suivante : Témoin, dites-moi si les personnes de confiance du SD n’ont pas composé des listes nominales de personnes destinées plus tard à être épuisées par le travail ou à être exterminées ?
Est-ce que cette question a un rapport avec le document ?
Oui, un rapport avec ce document et aussi avec ce que vous savez sur ce point.
Je ne sais pas du tout si des listes ont été établies.
Monsieur le Président, je vous demande...
Le témoin n’a pas encore terminé sa réponse. Voulez-vous poser à nouveau votre question ?
J’ai dit que je ne savais pas si des listes semblables avaient été établies.
Monsieur le Président, je vous demande de me permettre de vous présenter un deuxième document allemand qui ne concerne plus les dirigeants du SD.
Colonel Smirnov, nous voudrions que vous posiez des questions au témoin pour éclairer ce tableau. Nous l’avons vu simplement. Vous n’avez pas de questions à poser ?
Oui, Monsieur le Président, je vais poser ces questions tout de suite. (Au témoin.) Avez-vous le schéma sous les yeux ?
La photocopie idu schéma écrit à la main ?
Non, il s’agit du schéma qui a fait l’objet de photocopies. On va vous donner tout de suite l’original de ce schéma. (On remet un document au témoin.)
Connaissez-vous les noms des collaborateurs indiqués sur ce tableau ?
Oui.
Qui était Jost ?
Jost était le chef du service III, service des informations extérieures, à l’ancien service principal du SD. Il est devenu par la suite le premier chef du service VI, chargé des informations de l’étranger.
En tout cas, il faisait partie du SD en 1938 ?
Oui. Il faisait partie du SD à la formation spéciale des SS. Il dirigeait le service central III à la direction principale ’du SD.
Un instant... Je croyais que vous aviez dit que les SS n’avaient rien à voir avec le SD et maintenant vous nous dites que cet homme était chef au SD d’une section SS.
Sans doute on a mal traduit. Puis-je répéter ma réponse ?
Voulez-vous répéter votre réponse.
Jost était le chef du service III, des informations de l’extérieur à l’ancien service principal du SD. Plus tard, il a été le premier chef du service VI chargé des informations de l’étranger, et le prédécesseur du Gruppenführer Schellenberg que le Tribunal vient d’entendre.
Connaissez-vous le nom d’Ehrünger ?
Oui.
Qui était Ehrünger ?
Je ne l’ai connu que plus tard. Il a été le dernier chef du service 1 du RSHA.
Faisait-il aussi partie du SD ?
Il faisait aussi partie des SS, formation spéciale du SD.
Connaissez-vous le nom de Rauff ?
La traduction nous indique qu’il était membre des SS-SD.
Il faisait partie des SS, formation spéciale du SD, sur laquelle je me suis déjà expliqué hier. C’étaient des membres des SS qui étaient dans la Police d’État, la police criminelle ou le SD. Tous n’en faisaient pas partie, mais ’dans la mesure seulement où ils appartenaient aux SS. On trouvait ensuite aussi des fonctionnaires honoraires qui appartenaient aux SS ou à d’autres organisations qui collaboraient avec la Police de sécurité, par exemple la police douanière, la répression douanière et, plus tard, un grand nombre de Landràte, etc.
Puis-je continuer, Monsieur le Président ?
Continuez, je vous prie.
Connaissez-vous le nom de Rauff ?
Oui.
Qui était Rauff à cette époque ?
Il s’occupait alors du contrôle des voitures du SD, autant que je puisse encore m’en souvenir. Je tiens à spécifier qu’alors je n’avais pas de rapport direct avec l’administration centrale à Berlin car, d’après l’organisation ’dû service principal du SD à cette époque, il y avait un service intermédiaire, qui a disparu en septembre 1939, entre le service principal et les services inférieurs.
Monsieur le Président, le Ministère Public américain a bien voulu me donner les documents qui ont déjà été présentés au Tribunal et dont il ressort que les rapports sur les voitures à gaz ont été ultérieurement adressés à Rauff. C’est le document que je vous présente en ce moment et qui a déjà été déposé. Je ne vous le donne que pour vous le rappeler. Je vous demanderai, témoin, de regarder le cercle qui entoure le mot « Einsatzkommandos », au bas de la page. Connaissez-vous les noms qui y sont indiqués ?
Je ne sais pas du tout de quels noms vous parlez.
Je parlais des cercles du bas : Einsatzkommandos 2, 3, 8, 9, etc. Avez-vous trouvé ?
Est-ce un autre document ?
Non, c’est le même.
Sur le document manuscrit que j’ai entre les mains, il n’y a rien de semblable ; il s’agit d’un autre document qui figure dans une autre lettre ?
Je vous prie de regarder un peu ces Einsatzkommandos. Connaissez-vous des noms qui figurent dans ces cercles ?
Le document qui est attaché à la lettre est signé ’de l’Obersturmfùhrer Scheidier.
Connaissez-vous ce nom ? Et en particulier celui de Gottschalk ?
Non.
Dr Lehmann ?
Non.
Schuize ?
Je suppose qu’il y a une erreur de nom et que c’est sans doute Schulz ?
Oui, c’est exact, Schulz.
Mais ici il y a Schuize.
C’est une faute d’impression.
Je connais Schulz.
Faisait-il partie du SD ?
Il était chef de la Police d’État quelque part en Allemagne du Nord.
Connaissez-vous Biermami ?
Non, pas personnellement, mais. j’ai entendu son nom.
Qui était-il ?
Vous dites ? Je crois qu’il a d’abord été chef de la Police d’État, puis inspecteur de la Police de sûreté et du SD.
Connaissez-vous Höhnscheid ?
Je ne connais pas le Dr Heinrich.
Non, Höhnscheid ?
De l’EK 10 ? De l’Einsatzkommando 10 ?
Non, il était de l’Einsatzkommando 4, Hôhnscheid ?
Je ne le connais pas.
Hofmann ?
Non.
Et Stahlecker ? Je suppose que vous le connaissez ?
Je connaissais son nom, mais je ne le connaissais pas personnellement.
Quelles étaient ses fonctions ?
Je crois qu’il était inspecteur de la Police de sécurité ou chef d’état-major de la police ou chef d’un arrondissement, mais je ne me rappelle pas très exactement.
Et Günther ? Qui était-il ?
Si je me rappelle bien, il était à ce moment-là inspecteur à Berlin.
Inspecteur du SD, n’est-ce pas ?
Il n’y avait pas d’inspecteurs du SD à ce moment-là ; il n’y avait que des inspecteurs de la Police de sûreté.
Je n’ai pas ’d’autres questions à poser à ce témoin au sujet de ce tableau. Monsieur le Président, puis-je passer au document suivant ?
Un instant. Ces initiales « EK » dans le cercle, au bas de la page, veulent dire, je suppose, Einsatzkommando ? Voudriez-vous dire au Tribunal quel est le but de ce schéma ? Quelle est l’organisation qu’il supposait représenter ?
Pardonnez-moi, mais la traduction ne m’est pas parvenue.
Quelle est l’organisation que ce schéma est supposé démontrer ?
Je suppose que ce sont là les préparatifs d’un plan du Gruppenfùhrer Heydrich pour mettre éventuellement en œuvre les services de la Police de sûreté et ’du SD qui lui étaient subordonnés, pour le cas où il y aurait des complications avec la Tchécoslovaquie et pour envisager ce qu’il y aurait à faire. « EK » veut dire Einsatzkommando. Effectivement, plus tard, lorsque nous sommes entrés en Tchécoslovaquie, il y a eu des unités de la Police de sûreté et du SD qui ont fait leur entrée dans ce pays. De même que les Einsatzkommandos et Einsatzgruppen à l’Est, c’étaient des unités mobiles qui avaient été nouvellement créées et qui avaient des tâches nouvelles ; elles ont été dissoutes par la suite lorsqu’on installa à Prague une Police d’État et un service du SD...
Je ne m’occupe pas de savoir si elles ont été dissoutes plus tard. Heydrich, je suppose, était le commandant de tout le SD ?
Heydrich était chef du service principal du SD et, en même temps, chef de la Police de sûreté.
Est-ce que Stahlecker était membre du service de renseignements du SD dont vous parlez en ce moment ?
Je ne peux pas vous le dire d’une façon très sûre. Si je me souviens bien, Stahlecker avait alors une fonction quelconque en Prusse orientale.
Il me semble que vous avez dit tout à l’heure que Stahlecker était à Berlin ?
En Prusse orientale à l’époque. A Berlin, je crois qu’il y avait Gùnther dont on a ’diéjà mentionné le nom.
Oui. Était-il membre du service de renseignements du SD ?
Oui, mais je crois qu’il était chef d’un secteur principal du SD à Berlin. Je ne peux pas le dire d’une façon certaine.
Ehriinger était-il aussi membre du service de renseignements du SD ?
Je ne connais pas les fonctions qu’il occupait alors. Je ne l’ai connu que plus tard, lorsqu’il a dirigé le service I.
Et Rauff ?
Il s’occupait des voitures du service principal du SD. Mais ici encore je ne puis pas vous l’affirmer avec certitude...
Le service de renseignements faisait-il partie du SD ? Rauff était-il membre du service de renseignements du SD ?
Il dirigeait un service technique au service principal du SD et ce service du SD, à ce moment-là, s’occupait aussi bien du service d’informations extérieures qu’intérieures. A cette époque, il y avait au service central 1 des formations techniques qui étaient à la disposition du service entier.
Que faisait-il ? Une de ses fonctions consistait à travailler au service de renseignements du SD, au service de renseignements de l’intérieur ?
Il s’est occupé aussi de la question des voitures pour le service de renseignements de l’intérieur.
Pouvez-vous répondre à cette question par oui ou non : une partie de son activité consistait à travailler pour le service de renseignements de l’intérieur du SD, n’est-ce pas ?
Dans le service d’informations intérieur ? Autant que je m’en souvienne, non...
Voulez-vous dire qu’il n’avait rien à faire avec le service de renseignements de l’intérieur du SD ?
Autant que je m’en souvienne, il s’occupait de la question des voitures qu’il mettait à la disposition du service principal du SD et également du service de renseignements intérieur.
Est-ce que ce tableau ne démontre pas que le SD avait des moyens de transport communs avec la Gestapo ?
A mon avis, ce tableau montre simplement que le chef des deux organisations, dans le cas où nous entrerions en Tchécoslovaquie, avait envisagé la mise en œuvre de personnel appartenant aux deux organismes.
Ces documents ne démontrent-ils pas que votre commentaire sur le premier document était faux ? Et que ce document de Schellenberg a été utilisé au cours du mois de-septembre 1938 dans le but d’organiser le SD en Tchécoslovaqie ?
Je pense qu’il est absolument exclu que l’on ait utilisé ce document car : 1° il porterait une date, et 2° le chiffre romain qui figure en bas du document aurait été paraphé.
J’ignore si plus tard on a fait un autre projet qui a été présenté à Schellenberg.
Vous voyez que le premier document porte l’indication III/225. La lettre au Dr Best porte aussi l’indication III/225, et elle se rapporte au projet qui est sans aucun doute contenu dans ce document. Et le tableau aussi porte la même indication III/225.
Je suppose qu’on a dû faire un autre projet qui a pu être établi des mois plus tard. Il est à peu près certain que ce projet n’a pas vu le jour, sans quoi les chiffres romains qui figurent au bas du document seraient paraphés ; du reste, à l’époque, cette désignation III n’a aucun rapport avec le service III qui a existé plus tard, car le service qui a donné naissance à l’Amt III actuellement accusé était le service central 11/2.
Monsieur le Président, à propos de la réponse du témoin qui ne sait pas si les hommes de confiance du SD établissaient des listes de personnes qui devaient être exterminées ou mobilisées de force ou encore internées dans un camp de concentration, je vous demanderai la permission de présenter un autre court document qui concerne la Pologne et qui expose les instructions du Blockstellenleiter du SD en Pologne à ses hommes de confiance. Je vous demanderai la permission ’die lire ce document.
Puis-je ajouter un mot ? Il n’y a rien dans mon document sur l’extermination ou les camps de concentration.
On va vous remettre le document. Permettez-moi de lire ce document, Monsieur le Président. Il l’agit du document URSS-522. Je cite :
« Service de sécurité du Reichsfùhrer SS, section de Mogiino. Mogiino, le 24 août 1943. Aux hommes de confiance ; objet : Désignation de Polonais.
« J’ai déjà indiqué à plus d’une reprise la nécessité de porter une attention toute spéciale aux Polonais. C’est pourquoi je cite plus bas le discours du Reichsfùhrer SS Himmler, prononcé le 15 mars 1940 à la réunion des commandants de camp de l’ancienne Pologne et, conformément à ces indications, vous invite à me présenter une liste nominale de tous les Polonais.
« Extraits du discours du Reichsführer SS :
« C’est pourquoi il est indispensable que tous nos collaborateurs et collaboratrices considèrent comme leur tâche principale d’établir l’identité des chefs polonais déloyaux, afin de les rendre inoffensifs. Vous autres, commandants de camp, savez mieux que quiconque comment remplir cette tâche.
« Tous les ouvriers qualifiés d’origine polonaise doivent être utilisés dans notre industrie de guerre ; après quoi, tous les Polonais disparaîtront de la terre.
« En accomplissant ce travail plein de responsabilité, vous devrez bientôt, au cours des étapes fixées, exterminer les Polonais. Je donne les pleins pouvoirs à tous les commandants de camp.
« L’heure approche où chaque Allemand pourra donner sa mesure ; c’est pourquoi il est indispensable que la grande nation allemande considère comme sa principale tâche l’extermination de tous les Polonais.
« J’attends de tous mes hommes de confiance qu’ils me rendent compte immédiatement de tous les Polonais rabat-joie et défaitistes. Il faudra utiliser dans ce but des enfants et des vieillards qui pourront jouer un rôle important, car ils ont une attitude amicale envers les Polonais.
« Extraits du discours de Himmler du 15 mars 1940 ; Heil Hitler. SS-Hauptsturmfuhrer. » (Signature illisible.)
Il est intéressant que vous niez que les collaborateurs du SD, dans les territoires occupés, avaient été directement avisés de dresser des listes nominatives de personnes qui devaient être exterminées ?
Oui, je le nie tout particulièrement, parce que je ne peux pas donner d’éclaircissements au sujet de l’authenticité de ce document.
Ce document a été saisi par l’Armée polonaise à Mo’giino, dans les archives du SD.
L’expression « réunion des commandants de camp » me paraît absolument impossible, parce que je ne sais pas ce qu’elle signifie. Je ne m’explique pas ce que sont ces « Polonais rabat-joie et défaitistes », car il était absolument logique pour les Polonais de souhaiter que les Allemands perdissent la guerre.
Je ne vous demande pas de nous faire un discours de propagande contre la Pologne. Je vous pose une question. Persistez-vous à nier que le SD donnait des instructions à ses hommes de confiance pour qu’ils dressent des listes de personnel à exterminer ?
Oui. Je le nie.
Qu’est-ce qui démontre que ce document a été trouvé à l’État-Major du SD ?
Il n’a pas été trouvé au Quartier Général du SD. La traduction a été défectueuse. Ce document a été trouvé par l’Armée polonaise. ..
J’ai obtenu la traduction suivante : ces document ont été trouvés par l’Armée polonaise au Quartier Général du SD. Est-ce exact ?
C’est exact. A l’État-Major du SD. Mais il ne s’agissait pas du Quartier Général principal, mais de l’État-Major de Mogiino, en Pologne.
Je n’ai pas parlé du Quartier Général principal et voulais simplement savoir ce qui prouve que ce document a été trouvé dans un état-major du SD.
Permettez-moi de lire une déclaration de la Délégation polonaise à ce sujet. Elle dit :
« Nous attestons par la présente que le document ci-joint en langue allemande, en date du 24 août 1943, contient des instructions du Reichsführer SS à la Police de sûreté à Mogitno, et un extrait du discours de Himmler. Ce document représente une photocopie exacte et complète de l’original qui a été remis à la commission principale de recherche de crimes de guerre allemands en Pologne. L’original se trouvait dans une enveloppe avec une inscription dans l’angle supérieur gauche : « Landrat du Kreis de « Mogiino. Regierungsbezirk d’Hohensalza ». Il y avait en outre une étiquette : « Recommandé, Mogiino, Wartheland 272 » avec le cachet postal du 24 août 1943. »
Colonel Smirnov, excusez-moi, mais je n’ai pas entendu le début ; que disiez-vous ?
Je lis, Monsieur le Président, le certificat d’origine de ce document remis par la Délégation polonaise. Ce document nous a été donné par la Délégation polonaise.
Comment identifiez-vous ce document ? Nous avons un document sous les yeux qui semble n’avoir rien qui le rapproche de ce certificat. Comment faites-vous le rapprochement entre le certificat d’origine et le document ?
Monsieur le Président, on vient de me remettre une note de la section de documentation qui me signale que ce document original est déjà déposé, mais sans le certificat d’origine que j’ai actuellement entre les mains. Je vous demande d’excuser cette méprise. Ce certificat va vous être remis.
Ah, très bien. Et ce certificat que vous avez authentifie la traduction russe ? Il garantit que la traduction du document est exacte, n’est-ce pas ?
Monsieur le Président, j’ai vérifié moi-même ces documents hier. Ils sont certifiés exacts.
Colonel Smimov, vous devez déposer ce certificat devant le Tribunal afin de faire bien comprendre que ce document a été trouvé à l’État-Major du SD à Mogimo. Le certificat devra être joint au document. Avez-vous donné un numéro de dépôt à cette pièce ? 522, je crois ?
Oui, URSS-522, Monsieur le Président.
Nous devons avoir le certificat attaché à la pièce afin que nous puissions la prendre en considératïon.
Oui. Je n’ai plus d’autres questions à poser, Monsieur le Président.
L’audience est suspendue.
Monsieur le Président, à propos d’un point sur lequel mon collègue américain a attiré mon attention, je me permets de vous demander de poser encore au témoin une question sur le premier document que j’ai présenté.
Quel était le premier ?
C’est le document URSS-509, le tableau.
Oui.
Je vous remercie.
Dites-moi, témoin, si vous contestez que Gengenbach qui, d’après ce schéma, appartenait à l’Einsatzstab L, était un collaborateur du SD ?
Oui, il était collaborateur du SD.
Il était donc membre du SD.
Oui. Il était Gruppenleiter dans le service III-A. C’était mon supérieur direct.
N’est-ce pas vous qui l’avez directement remplacé ensuite dans ses fonctions ?
J’ai été le successeur de Gengenbach mais non son représentant. Lorsque je suis arrivé au RSHA à Berlin, Gengenbach venait de mourir. Au reste, à cette époque, Gengenbach n’était pas à Berlin mais il était, pour autant que je puisse m’en souvenir aujourd’hui, par des récits que j’ai entendus plus tard, à Munich. Personnellement, je n’ai fait sa connaissance que pendant la guerre.
En tout cas, c’est vous qui avez occupé au SD le poste qui était le sien ?
Oui, c’est moi qui ai succédé à Gengen-bafch dans le service qu’il a pris à Berlin, plus tard. Il était Gruppen-leiter du groupe III-A, comme moi.
Je vous. remercie. Le Ministère Public américain, Monsieur le Président, m’a prié d’ajouter les documents USA-174 et USA-175. A l’endroit qui est souligné, il est indiqué que le chef du groupe III-A était Gengenbach. Monsieur le Président, je n’-ai plus de question à poser au témoin.
Est-ce que le discours de Himmler daté du 15 mars 1940 a déjà été déposé comme preuve ?
Pour autant que je le sache, non, Monsieur le Président.En tout cas, je n’ai pas connaissance de ce discours.
Je vous remercie. Docteur Gawlik, vous avez la parole.
Est-ce que vous avez encore le document URSS-509 ?
Je n’ai plus de document du tout. (Le document est remis au témoin.)
Monsieur le témoin, voulez-vous, je vous prie, regarder la feuille n° 1. Quelles étaient les tâches de ces Einsatzgruppen qui devaient être engagés en Tchécoslovaquie ?
Je ne le sais pas, car je n’étais pas chargé de la préparation de ce travail .
Je vous demandais de regarder la feuille n° 1.
« Assurer le fonctionnement de la vie politique, assurer le fonctionnement de l’économie » ; c’est ce qu’indique la feuille n° 1.
Était-ce là une tâche totalement différente de celle qui, plus tard, en 1941, a été dévolue aux Einsatzgruppen A, B, C, D, à l’Est ?
Je’ ne connais pas non plus les tâches à l’Est parce que je n’y ai jamais participé. Mais pourtant, je crois savoir que les Einsatzgruppen à l’Est n’avaient rien à voir avec les mesures à prendre pour assurer le fonctionnement de l’économie. Les Einsatzgruppen, à l’Est avaient à assurer la sécurité sur les arrières de l’Armée.
Voulez-vous regarder la carte, je vous prie, qui montre l’emplacement de ces différents Einsatzgruppen.
La carte manuscrite ou l’autre ? 248
La seconde. Pouvez-vous, avec cette carte, répondre à la question de savoir si ces Einsatzgruppen faisaient partie de l’organisation du SD ?
Vous voulez parler de la carte qui porte au haut la mention : État-Major du SS-Gruppenführer Heydrich ?
Oui, c’est bien de cette carte-là qu’il s’agit.
Non, ce n’était pas une organisation du SD. Il s’agissait là de quelque chose d’entièrement nouveau.
Est-ce que les tâches qu’avaient ces Einsatzgruppen et Einsatzs’tàben faisaient partie des tâches du SD ?
Je ne connais pas les tâches qu’avaient à exécuter à ce moment-là ces Einsatzgruppen. En tout cas, la tâche indiquée à la page 1 et consistant à assurer le fonctionnement de l’économie ne constitue pas une tâche du SD, car ce n’est pas une tâche du service de renseignements, de même que la tâche qui consiste à assurer le fonctionnement de la vie politique n’est pas non plus une tâche du service de renseignements.
Est-ce que des parties de l’organisation du SD ont été utilisées dians ces Einsatzgruppen ? Pouvez-vous répondre à la question par le moyen de la carte ?
D’après ce que je vois sur la carte, on n’a pas utilisé des parties de l’organisation mais seulement certains membres individuels du SD, de même qu’on a utilisé des membres de la Police d’État à titre individuel. Il doit en avoir été de même plus tard lorsqu’il s’est agi des Einsatzgruppen à l’Est. On peut comparer cette situation à la mobilisation des individus appelés dans la Wehrmacht.
Est-ce que les membres individuels du SD, par le fait qu’ils recevaient l’ordre d’aller dans les Einsatzstàbe, quittaient définitivement leur activité dans le SD ?
Mais évidemment, car à partir de ce moment-là, ils avaient une activité totalement différente. Là encore, je ne puis donner qu’une comparaison avec les fonctionnaires. Lorsqu’un juge est mobilisé dans la Wehrmacht, il abandonne son activité de juge pour toute la durée de sa mobilisation.
Est-ce que les membres du SD et, en particulier, les membres des services subalternes dans les services extérieurs, connaissaient le détail de l’activité et des tâches des Einsatzstàben ?
En aucune manière.
J’en viens maintenant au second document. Il s’agit là de la lettre expédiée par la Blockstelle de Mogiino (URSS-522). (On remet le document au témoin.)
Qu’était-ce qu’une Blockstelle ?
Dans la structure du SD, on ne connaissait pas ce terme. Il est possible que des services extérieurs se soient subdivisés et aient utilisé ce terme dans leurs subdivisions. En général, on appelait « Beobachter » les services subordonnés à une Aussenstelle.
Quel était le personnel qui composait une Aussenstelle en général ?
C’était variable suivant les époques et l’importance dé ce service extérieur. Généralement, vers 1943 ou 1944, il y avait dans une Aussenstelle un ou deux fonctionnaires principaux et permanents et un grand état-major d’hommes de confiance et d’employés à titre honorifique. Le chef de l’Aussenstelle lui-même était parfois un fonctionnaire permanent et parfois il n’était là qu’à titre honorifique.
Est-ce que la Blockstelle était un service supérieur à l’Aussenstelle ou bien un service subordonné ?
C’est l’Abschnitt qui était placé au-dessus de l’Aussenstelle, et certainement pas la Blockstelle. Et pour les services subordonnés, j’ai déjà dit tout à l’heure que l’Aussenstelle choisissait des désignations qui n’étaient pas des termes très précis. Les « Beobachter » étaient administrativement connus.
Est-ce que l’Amt III a donné des instructions quelconques dans le genre de celles qui sont reproduites dans ce document ?
Non, en aucune manière.
En conséquence, s’agit-il en l’occurrence d’un acte arbitraire du chef de l’Aussenstelle de Mogiino ?
Le chef d’une Aussenstelle...
Pardon, je me suis trompé, je parle du chef d’une Blockstelle.
Si Himmler a prononcé ce discours, alors il s’agit en effet d’un acte arbitraire. Je ne peux pas comprendre que Himmler ait pu dire qu’il s’attendait à quelque chose de la part de tous ses hommes de confiance, alors qu’il s’adressait dans son ’discours aux commandants de camp.
Je ne parle pas de Himmler, mais des instructions que le chef de la Blockstelle a données.
Oui, mais ces instructions reproduisent en quelque sorte le discours de Himmler. Voulez-vous parler dies instructions contenues dans la première phrase où il est dit qu’il faut particulièrement prêter attention à la Pologne ? De même qu’il s’occupait de la population allemande dans les différents domaines, le chef de la Blockstelle à Mogiino s’occupait aussi de la population polonaise. Il s’intéressait naturellement à l’état d’esprit en général dans la population polonaise, et c’est là-dessus également qu’il donnait des informations aux organismes ’différents, c’est-à-dire au groupe III-D.
Je vais vous présenter le document PS-3876.
Comment vient-il dans ce contre-interrogatoire ?
Monsieur le Président, j’ai encore à adresser au témoin quelques questions qui se rapportent aux questions que Monsieur le Président a posées lui-même hier.
Vous faites état de documents qui n’ont pas encore été déposés ?
Si, Monsieur le Président. Ce document a été présenté hier par le Ministère Public américain.
Je m’excuse, alors...
J’ai ici un document en langue anglaise.
Regardez page 45 les destinataires : des commandants de la Police de sûreté et du SD. Appartenaient-ils aux Einsatzgruppen A, B, C et D ?
Non. C’était différent : les Einsatzgruppen étaient des unités mobiles qui avançaient en même temps que la Wehrmacht sur les arrières du théâtre d’opérations. Et les postes de leurs commandants étaient placés dans le cadre de l’administration civile. Donc, lorsqu’un territoire passait à l’administration civile, on créait un poste de commandant.
Quelle était la structure des Einsatzgruppen A, B, C et D ?
Ils étaient formes de commandos, d’Einsatzkommandos.
Quels étaient les noms que portaient ces commandos ?
Ils ne portaient pas de noms du tout. Comme je l’ai dit hier déjà, ces commandos étaient numérotés’ de 1 à 10, pour autant que je m’en souvienne ; mais il est possible que les numéros 11 et 12 aient existé.
Voulez-vous regarder la liste des destinataires. Dans cette liste, il est dit que les chefs des Einsatzgruppen A, B, C et D reçoivent des copies pour les commandants de la Police de sûreté et du SD.
Non, c’est une mauvaise traduction. C’est pour les commandants et non pas pour les commandants en chef militaires. Il s’agit des commandants de la Police de sûreté et du SD, c’est-à-dire des chefs de commandos... Pardon, il s’agit des commandants de la Police de sûreté et du SD qui étaient sous les ordres des commandants en chef de la Police de sûreté et du SD. Pour le dire encore plus clairement, un Einsatzkommando n’était pas commandé par un commandant de la Police de sûreté et du SD, par un commandant des commandos 1, 2, 3, etc., mais dans les territoires qui dépendaient de l’administration civile, cela se passait comme en France occupée par exemple. Il y avait des services de la Police de sûreté et du SD, mais c’était quelque chose de totalement différent de ce qu’étaient les Einsatzkommandos.
Oui, mais quels étaient les services dont dépendaient les commandants ?
Quels commandants ?
Les chefs de la Police de sûreté et du SD ?
Les chefs de la Police de sûreté et du SD ?
Quels étaient leurs supérieurs ?
C’était le chef de la Police de sûreté et du SD à Berlin.
Mais qui était le chef des Einsatzgruppen A, B, C et D ?
On ne peut pas le dire en un mot. Les chefs des Einsatzgruppen avaient, pour tout dire, deux supérieurs : d’une part, ils étaient rattachés au groupe d’armées correspondant et recevaient des instructions du commandant de ce groupe d’armées. Mais, d’une autre côté, ils recevaient des instructions techniques de la Police de sûreté et du SD. Mais c’est justement la raison pour laquelle j’ai dit hier qu’il s’agissait là d’une institution d’un caractère tout à fait particulier.
Et maintenant, je vous demande encore une fois : si les commandants de la Police de sûreté et du SD ne faisaient pas partie des Einsatzgruppen A, B, C, D, pourquoi ?
Docteur Gawiik, est-ce que nous ne sommes pas déjà entrés dans ces détails ? Je veux dire que nous avons déjà le document sous les yeux. Nous avons posé un certain nombre de questions au témoin auxquelles il a donné ses réponses. Et maintenant, vous lui reposez les mêmes questions ?
Monsieur le Président, je n’ai plus qu’une seule question encore qui se rapporte aux copies.
En bien, alors, posez la question.
Pourquoi les chefs des Eins’atzgruippen A, B, C et D ont-ils reçu des copies pour les commandants de la Police de ’ sûreté et du SD s’il s’agissait d’organisations tout à fait différentes ?
Voici probablement de quoi il s’agit. C’étaient des organisations différentes mais, dans de nombreux cas, il s’agissait des mêmes personnes. Ou alors, ce que je suppose, il s’agit ici d’une expression qui prête à confusion. Hier, j’avais l’exemplaire allemand. On se servait de termes différents pour désigner le terme anglais « commander ». Une fois, il était traduit par « commandant » et, dans la ligne suivante, par « chef ». Ce sont des fonctions différentes. Hier, j’avais l’exemplaire allemand.
Le témoin peut se retirer. Docteur Gawlik, votre témoin suivant.
Avec la permission du Tribunal, j’appelle le témoin, le Dr Rössner. (Le témoin gagne la barre.)
Donnez-nous votre nom, je vous prie.
Hans Rössner.
Levez la main droite et repétez ce serment après moi : « Je jure devant Dieu tout puissant et omniscient que je dirai la pure vérité et que je ne cèlerai ni n’ajouterai rien ». (Le témoin répète le serment.)
Vous pouvez vous asseoir.
Quand êtes-vous né ?
En 1910, à Dresde.
Décrivez brièvement votre carrière professionnelle.
Après mes études à l’école, baccalauréat en 1930, étude de la langue et de la littérature allemandes ; histoire et théologie protestante. A partir de 1936, assistant à l’université de Bonn. En 1939 et 1940, service militaire. En 1940 ; j’ai été affecté pour l’université de Bonn et, à titre exceptionnel au service III du RSHA.
Depuis quand étiez-vous membre du Parti ?
Depuis 1937.
Quelle fonction aviez-vous au RSHA ?
J’étais administrateur et suis plus tard devenu chef de section dans le groupe III-C de l’Amt III.
Connaissez-vous les tâches, les méthodes et les buts du groupe III-C ?
Oui, je les connais en détail.
Attendez un peu pour répondre. Connaissez-vous aussi les tâches, les méthodes et les buts de l’Amt III ?
Oui, je les connais également étant donné qu’il s’agissait en principe des mêmes tâches, des mêmes buts et des mêmes méthodes que celles du groupe III-C.
Quels ont été les tâches et les buts de l’Amt III depuis 1939 ?
L’Amt III était un service de renseignements pour l’intérieur de l’Allemagne. Quant à ses buts et ses tâches, il se les était posés lui-même et travaillait dans le domaine de la vie intérieure de l’Allemagne. Ce service étudiait les différents problèmes de la vie allemande dans les différents domaines, comme par exemple économie, culture, administration, droit, tout cela sur le plan d’un service de renseignements, et essayait en particulier de connaître les critiques dans la population, les évolutions défectueuses, etc., et de donner des renseignements à ce sujet.
Donnez-nous quelques exemples brefs pour rendre cela plus clair.
C’est ainsi, par exemple, qu’hebdomadairement et parfois journellement, l’Amt donnait aux services intéressés des renseignements critiques et objectifs sur la mentalité de la population allemande. C’est ainsi, par exemple, que ce service, par son matériel de renseignements a, grâce à ces renseignements, évité la fermeture des universités allemandes du fait de la guerre totale.
Le Ministère Public a présenté, à la page 11 de l’exposé des charges anglais, que l’Amt III était chargé de toutes les enquêtes policières qui se rapportaient à tous les domaines de la vie allemande. Est-ce que l’Amt III avait à procéder à des enquêtes policières ?
Depuis le début de son fonctionnement, l’Amt III n’a jamais eu de fonctions policières.
Est-ce que le SD Amt III avait pour tâche et pour but fondamental de donner, par l’intermédiaire de son service, des renseignements sur les adversaires réels et possibles de la direction nazie ? Cela se réfère à la page 17 de l’exposé des charges.
Non, l’Amt III, en principe, n’était pas un service de contre-espionnage mais un service de renseignements sur tous les domaines de la vie.
Quels étaient les buts de cette activité de l’Amt III dans le domaine des renseignements et de comptes rendus ? Est-ce qu’on poursuivait en particulier le but de soutenir les chefs du Parti et de l’État ou de les maintenir au pouvoir comme éléments d’une conspiration ?
Non, l’Amt III n’a jamais eu une tâche de ce genre et ne s’est pas non plus imposé cette tâche. La tâche de l’activité dans le domaine des renseignements de l’Amt III consistait le plus souvent en ceci : il s’agissait de donner une image aussi complète et objective que possible des questions vitales allemandes et de les présenter autant que possible sans fard.
Est-ce que les membres de l’Amt III savaient que les chefs du Parti et de l’État participaient à un plan secret dont le but était de commettre des crimes contre la Paix, des crimes de guerre et des crimes contre l’Humanité ?
A ma connaissance, les membres de l’Amt III n’en savaient rien. Toutes les nouvelles du SD ou de l’Amt III s’opposaient à une telle supposition.
Pouvez-vous répondre pour les fonctionnaires et les collaborateurs à titre honorifique des services subalternes ?
Oui.
Est-ce que les collaborateurs les plus étroits du chef de l’Amt III étaient au courant d’un tel complot ?
Non, même ces collaborateurs les plus étroits n’en savaient rien.
Sur quoi est fondée votre connaissance en ce qui concerne les réponses que vous avez données aux dernières questions ?
J’ai très souvent participé à ’des conférences de chefs de groupes organisées par le chef de l’Amt III.
Est-ce que les tâches, les buts poursuivis par les services de renseignements à l’intérieur, étaient connus de tous les collaborateurs, de ceux qui travaillaient dans les services subalternes ?
Oui. Ces tâches et ces buts étaient connus également par les collaborateurs et par les collaborateurs à titre honorifique de tous les services subalternes. Ces tâches et ces buts étaient expliqués et communiqués régulièrement dans des conférences et dans des entretiens.
Sur quoi est basée la connaissance que vous avez en ce qui concerne la réponse que vous avez donnée à ma dernière question ?
Je tiens cette connaissance de quantités de conférences de travail et de ma participation à quantités de congrès où j’ai fait moi-même part des tâches et des buts de l’Amt III.
Est-ce que, dans les rapports sur la situation, on nommait des personnes ?
Non, on ne le faisait pas habituellement étant donné que le SD ne s’intéressait pas aux individus mais s’intéressait à des exemples typiques se rapportant à des questions techniques ayant trait au domaine de la vie.
Est-ce qu’en donnant des renseignements sur des personnes on poursuivait le but de faire entrer certaines personnes dans des fonctions influentes de l’État en vue de leur permettre de réaliser un plan ayant pour but de commettre des crimes de guerre, des crimes contre la Paix et des crimes contre l’Humanité ?
Non. L’Amt III ne poursuivait pas un tel but. Tout d’abord, les renseignements du SD sur les personnes étaient séparés des rapports sur la situation. Le SD, Amt III, donnait exclusivement des renseignements sur les personnes mais n’avait pas le droit de donner des avis. C’était de la seule compétence des détenteurs de souveraineté.
Quels étaient les buts poursuivis par le SD en donnant des renseignements sur les personnes ?
Les renseignements sur les personnes donnés par le SD devaient compléter les appréciations sur le plan politique et les appréciations techniques des différents services du Parti et des différents services techniques. Ils devaient donner une image la plus complète possible de la personnalité en question en ce qui concernait ses capacités, son caractère, son attitude politique et sa conduite personnelle, indépendamment de tout point de vue touchant à des intérêts politiques.
Le Ministère Public décrit la tâche du SD de la manière suivante : cette tâche consistait à prendre dies mesures appropriées pour détruire toute opposition et pour la rendre inoffensive. Est-ce que cela correspond effectivement aux tâches idéologiques poursuivies par l’Amt III depuis 1939 ?
Nullement. J’ai déjà insisté tout à l’heure sur le fait que l’Amt III n’était pas un service de contre-espionnage.
Quand l’Amt III a-t-il abandonné cette tâche ?
Cette tâche ne s’est jamais présentée à l’Amt III.
Par ailleurs, le Ministère Public a avancé que le SD aurait disposé d’un réseau étendu d’espionnage du peuple allemand dans sa vie quotidienne, dans les rues, au travail et même sous les voûtes saintes des églises. Cela se trouve à la page 66 de l’exposé des charges anglais. Le SD disposait-il d’un tel réseau étendu d’espionnage ?
Pendant toute la durée de son existence, l’Amt III n’a jamais opéré dans le domaine de la vie intérieure de l’Allemagne avec des mouchards ou un réseau d’espionnage. Un tel réseau eût été contraire à tous les principes de fonctionnement de ce service de renseignements à l’intérieur de l’Allemagne.
Est-ce que le SD, pour ses tâches, n’utilisait que des fonctionnaires permanents ?
Non, les fonctionnaires à titre principal ne représentaient, pour autant que je le sache, que le pourcentage le plus réduit. Le travail du SD pour l’intérieur reposait ’dans l’ensemble sur le grand état-major des collaborateurs à titre honorifique issus de toutes les couches de la population et de toutes les professions.
Pouvez-vous donner ’des indications numériques à ce sujet ?
Je ne peux pas donner de chiffres absolus. Mais pendant la dernière année, nous avons estimé que le nombre des collaborateurs à titre honorifique s’élevait à environ 10.000 : ils travaillaient sur une base entièrement volontaire pour la plupart et également de leur propre initiative.
Comment étaient choisis les hommes de confiance du service de renseignements qui opérait dans le domaine de la vie intérieure de l’Allemagne ?
Un tel homme de confiance devait pouvoir fournir la garantie d’un travail exécuté en dehors de ses intérêts personnels et il devait être capable ’die donner des renseignements clairs et objectifs sur des questions se rapportant à son domaine professionnel, sur des questions se rapportant à la couche de population dont il faisait partie, ou sur tout autre souci, remarque ou critique de la population avec laquelle il entrait en contact. De plus, il fallait que ce soit un homme de caractère honorable.
Les hommes de confiance devaient-ils être membres du Parti ?
Non, nullement. Au contraire, on desirait même avoir un pourcentage aussi grand que possible ’d’hommes qui ne fussent pas membres du Parti, pour occuper ces postes, afin d’avoir ainsi une image aussi complète et indépendante que possible de la vie de l’Allemagne.
Est-ce que les hommes de confiance devaient être membres des SS ?
Non, le pourcentage des membres des SS parmi les hommes de confiance était, à mon avis, encore bien plus faible que celui des membres du Parti.
Quelles étaient les tâches des hommes de confiance ?
Ces tâches étaient variables. A l’Amt III, nous avions des hommes de confiance qui devaient donner des renseignements généraux sur l’état des esprits, l’attitude, l’opinion de la population, sur des questions urgentes, comme par exemple pendant les années de guerre. Nous avions aussi un autre type d’hommes de confiance qui devaient donner en particulier des renseignements sur leurs soucis professionnels et sur les questions touchant au domaine technique au sujet desquels ils pouvaient prendre position objectivement et sur lesquels ils avaient des vues objectives.
Quelle était la tâche des cercles de travail du SD ou Arbeitskreise ?
Dans ce qu’on a appelé les Arbeitskreise, on groupait assez librement les hommes de confiance de tous les services subalternes pour des entretiens. Dans ces Arbeitskreise, on discutait en principe, sans contrainte aucune, toutes les questions se rapportant aux mesures prises par le Parti, par les services de l’État. On discutait, on parlait, et ces remarques, ces critiques, étaient groupées dans des rapports qu’on adressait à l’Amt III à Berlin. La condition essentielle du fonctionnement de ces Arbeitskreise était une objectivité absolue et une critique sans aucune retenue.
Est-ce que les hommes de confiance ou les Arbeitskreise travaillaient sous un camouflage spécial ? Cette question se réfère à la page 16 de l’exposé des charges.
Je ne vois pas très bien ce qu’on entend par camouflage. Je me permets de répondre ici que ces hommes de confiance n’ont personnellement jamais travaillé sous un camouflage spécial, c’est-à-dire qu’ils n’ont jamais caché leur activité. De même ces Arbeitskreise n’ont jamais connu l’obligation de tenir secrète leur activité. Ils étaient officiellement connus du public pour la plupart.
Est-ce qu’à côté des hommes de confiance il y avait encore d’autres collaborateurs du SD ?
Oui, et dans une mesure toujours croissante pendant les dernières années de notre activité ; il s’agissait des représentants des couches les plus diverses de la population et des professions les plus diverses, et qui, de leur propre initiative, venaient au SD avec leurs soucis, avec des remarques, des critiques, des propositions positives. Ils venaient donc au SD pour pouvoir se décharger de leurs soucis auprès de lui.
Je vous fais présenter maintenant les ’documents de l’Accusation PS-1650, D-569 et PS-1514. Il s’agit du décret Kugel, du traitement des prisonniers de guerre soviétiques et de la remise des prisonniers de guerre à la Gestapo. Ce document se réfère au chef d’accusation VI c contre le SD. Est-ce que le SD Amt III était compétent pour l’exécution de ce décret ?
Non, le SD n’était pas compétent, parce que l’Amt III, depuis sa création, n’avait pas de pouvoir d’exécution.
Pouvez-vous donner une autre justification pour chacun des documents ?
Ces documents se réfèrent tous à la Gestapo. Dans l’un de ces documents, on fait simplement mention du chef de l’Amt III à propos de la question des renseignements. Le document de la Wehrmacht également se rapporte à la Gestapo.
Est-ce que le SD, service de renseignements à l’intérieur, a été utilisé pour l’exécution de ce décret ?
Non, car cela eût été en contradiction fondamentale avec les tâches qui lui incombaient.
Est-ce que le service de renseignements à l’intérieur du SD a participé à la déportation des populations des territoires occupés en vue de leur uitilisation pour le travail forcé ?
Non, c’était encore une des tâches d’exécution pour laquelle l’Amt II du SD n’avait aucune compétence.
Est-ce que le SD avait un pouvoir disciplinaire sur les travailleurs forcés ? Cette question se rapporte à la page 1941 du procès-verbal anglais.
Non, car cela encore eût été une tâche d’exécution.
Est-ce que le SD, par les rapports qu’il faisait, a collaboré à la déportation ?
Non, bien au contraire. L’Amt III a attiré à plusieurs reprises l’attention des services intéressés sur les effets négatifs de ces mesures.
Est-ce que l’Amt III a exercé un contrôle sur les ouvriers amenés de force dans le Reich ?
Non, une tâche de contrôle eût constitué également une tâche d’exécution que n’avait pas l’Amt III.
Je vous présente maintenant le document PS-205. Il s’agit d’une note sur les principes généraux relatifs au traitement des ouvriers étrangers travaillant en Allemagne. Le SD a-t-il participé à la rédaction de cette note ?
Oui. A ma connaissance, le SD Amt III a participé à la rédaction de cette note. Il a mis toutes ses connaissances et son expérience à la disposition du traitement positif des ouvriers étrangers. Ces connaissances, qui ont été utilisées ’dans cette note, correspondent d’ailleurs à la conception fondamentale du SD de l’intérieur dans les questions de traitement de population dans l’espace européen en général.
Sur quoi se fonde votre connaissance pour la rédaction de cette note ?
Le matériel provient partiellement du groupe III-C dont j’étais moi-même chef de section.
Est-ce que le SD Amt III avait un droit de confiscation ? Cette question se rapporte au chef d’accusation VI k ’de l’exposé des charges.
Non, le SD n’avait pas le droit de confiscation parce que cela encore eût été une tâche d’exécution.
Le SD, service de renseignements à l’intérieur, a-t-il participé à la saisie et à la distribution de biens publies et privés ?
Non.
A la page 51 de l’exposé des charges, on signale à propos du document C-71 : « A propos de saisie projetée d’archives scientifiques religieuses et artistiques, un accord fut conclu entre Rosemberg et Heydrich, sur la base duquel le SD et Rosenberg devaient étroitement collaborer à la confiscation de collections privées et publiques ». Est-ce qu’une telle collaboration étroite a eu lieu entre le SD et l’État-Major de l’accusé Rosenbeaig, ou son service ou l’un de ses délégués ?
Non. Dans les termes employés dans ce document, il s’agit encore probablement d’une confusion entre la Police de sûreté et le SD. Si une telle collaboration avait existé, j’aurais dû en avoir connaissance, étant donné que le groupe III-C eut été compétent pour ce travail.
Monsieur le Président, j’en viens maintenant à mon dernier point. Dois-je l’aborder ?
Combien avez-vous encore de questions à poser ? Il me semble que vous en avez beaucoup et nous ferions mieux de lever l’audience.
Il me reste trente-quatre questions.