DEUX CENT QUATRIÈME JOURNÉE.
Jeudi 15 août 1946.
Audience du matin.
(Le témoin Jüttner est à la barre.)Sir David, j’ai une ou deux déclarations à faire. Le Tribunal siégera cet après-midi en chambre du conseil ; il n’y aura pas d’audience publique après 13 heures aujourd’hui. Le Tribunal ne siégera pas en audience publique samedi.
La déclaration sous serment du prêtre polonais qui a été déposée l’autre jour est admise.
Le Tribunal a reçu une requête demandant que le rapport du colonel Neave soit mis à la disposition de l’avocat des SS. Le Tribunal a demandé au colonel Neave de préparer, à cet effet, les résumés des déclarations des témoins entendus devant la commission, ainsi qu’un rapport groupant les déclarations des témoins devant la commission, compte tenu des points sur lesquels ils ont déposé. Ces résumés et le rapport susmentionné ne font pas partie du procès-verbal final et le Tribunal ne leur accorde aucune valeur de témoignage. Le Tribunal a devant lui et prendra en considération les procès-verbaux de la totalité des témoignages entendus devant la commission. L’avocat des organisations et le Ministère Public pourront voir ces documents et pourront en faire des commentaires dans la mesure du temps qui leur a été imparti. Le Tribunal n’accordera aucun délai supplémentaire ou aucun temps excédentaire pour leurs explications.
Le Tribunal a également reçu une requête demandant que le Dr Klefisch puisse exposer la situation juridique des organisations. Une plaidoirie écrite a été déposée devant le Tribunal au nom du Dr Klefisch. Le Tribunal n’a pas l’intention d’entendre une plaidoirie supplémentaire pour les organisations, mais il prendra en considération le discours écrit qui est entre ses mains et qui a été déposé par le Dr Klefisch.
J’en viens maintenant à un sujet totalement différent. Le Tribunal a été informé que certains des accusés ont transmis de longues déclarations pour traduction à la section de traduction. Il n’y a pas lieu de faire traduire les déclarations des accusés et elles ne seront pas traduites par la section de traduction. Le Tribunal attire l’attention des accusés et de leurs avocats sur la décision du 23 juillet 1946 qui était ainsi libellée : « Étant donné les déclarations complètes qui ont déjà été faites par les accusés et leurs défenseurs, le Tribunal suppose que si tel est le désir des accusés de faire de nouvelles déclarations, ce ne sera que pour des questions qui ont été précédemment omises. Les accusés n’auront pas la permission de faire de nouvelles déclarations ou de répéter ce qui a déjà été dit par eux ou par leurs avocats, mais seront limités à de brèves déclarations de quelques minutes pour chacun, pour des questions non encore traitées dans leurs dépositions ou dans l’argumentation de leurs avocats ». Le Tribunal s’en tiendra strictement à l’application de cette décision et les accusés n’auront pas l’autorisation de faire des déclarations dépassant, comme le stipule la décision, « quelques minutes ». Ces déclarations seront faites par les accusés eux-mêmes, de leur place, au banc des accusés.
C’est tout ce que j’avais à dire.
Monsieur le Président, la déclaration sous serment du prêtre polonais dont Votre Honneur a parlé, est le document PS-4043 qui devient maintenant le document GB-606.
Témoin, avant que le Tribunal ne lève son audience, vous avez fait un commentaire sur une note du chef d’État-Major Röhm au sujet du document PS-2822 qui était un rapport du général von Reichenau au Commandant suprême des SA.
Monsieur le Président, c’est dans le livre de documents « Y », le livre des documents originaux. (Au témoin.) Vous voyez ce que représente ce document ; von Reichenau écrit qu’on lui a transmis le désir du service de défense du Parti d’être représenté également au sein du Conseil de défense du Reich et il continue : « Je voudrais soumettre à votre considération la possibilité de réunir sur la même personne votre représentation avec celle du Commandant suprême des SA. Peut-être une personne qualifiée pourrait-elle être chargée des deux représentations ».
Voulez-vous regarder ces mots que vous avez mentionnés vous-même hier, qui indiquaient qu’il n’y avait rien de militaire dans les SA. Est-ce que ce sont là les termes exacts ? Suivez et dites-moi si c’est exact : « An Krüger. Nein. Mit Reichenau am... », (A Krüger. Non. Avec Reichenau...) et alors les chiffres 16 et 11, « Vereinbart als Vertreter der Ob-SA F. Krüger » (Chef suprême SA Krüger). Est-ce que cela ne signifie pas que les deux parties de la représentation devaient être réunies, d’accord avec Reichenau, le 16 novembre, en la personne du Commandant suprême des SA, Krüger ? Autrement dit que Krüger devait être le représentant du commandement des SA au sein du Conseil de défense du Reich. Est-ce que ce n’est pas là ce que Röhm a écrit ?
Krüger était le chef du service d’entraînement et d’éducation et, en tant que tel...
Avant tout, répondez à ma question. Est-ce que ce qui est indiqué dans ce document, à savoir que Krüger sera le représentant du commandement des SA au sein du Conseil de défense du Reich, n’est pas exact ?
D’après cette remarque, oui.
C’était la remarque à laquelle vous vouliez faire dire hier que les SA n’avaient rien de commun avec les affaires militaires. Elle montre, au contraire, qu’elles étaient directement représentées au sein du Conseil de défense du Reich, n’est-ce pas ?
Hier, j’ai donné les raisons pour lesquelles il en était ainsi. Il s’agissait de retirer les hommes qui se trouvaient sur la rive gauche du Rhin ; c’était un retrait de la population masculine qui n’avait rien de militaire.
Monsieur le Président, pour gagner du temps, je voudrais demander au Tribunal d’être d’accord pour suivre la procédure suivante : j’ai un certain nombre de nouveaux documents qui sont d’un caractère public ; je serais d’avis de les déposer sans en référer au témoin, à moins que le Tribunal n’estime qu’il y ait certains points qui doivent être signalés à son attention. Quand nous en viendrons alors à des documents sur lesquels le témoin peut aider le Tribunal, je le contre-interrogerai là-dessus. Monsieur le Président, je crois que nous gagnerions du temps. Et j’espère que le Tribunal y consentira.
Bien entendu.
Comme il vous plaira, Monsieur le Président ; si le Tribunal veut bien consulter le livre de document 16-B, à la page 53, le...
Les avocats ont bien ce document ou vont l’avoir ?
Certainement, Monsieur le Président, on va le leur remettre pendant que nous continuons.
Monsieur le Président, je n’ai pas ces documents.
Vous allez les avoir à l’instant, je pense.
Monsieur le Président, on leur donnera ces documents pendant que nous continuons. On va vous le remettre, pendant que je le lis.
Certainement, c’était ce que je demandais.
Monsieur le Président, c’est le document D-951 ; c’est de ma faute, je n’avais pas donné le numéro ; il devient le document GB-607. C’est une lettre. Il commence par une lettre de Röhm, alors chef d’État-Major des SA, à laquelle est jointe une lettre de Blomberg à Hitler. C’est la lettre jointe qui est importante. Elle est datée de Berlin, du 2 mars 1934, et adressée au Chancelier du Reich :
« Je sens qu’il est de mon devoir d’attirer l’attention une fois de plus sur l’importance des gardes d’État-Major des SA. Conformément à l’ordre du chef d’État-Major, chaque Obergruppe et Gruppe devra constituer une garde armée d’État-Major avec une compagnie de mitrailleuses lourdes. Cette formation est actuellement en cours de réalisation. Selon le rapport de la 6e région militaire, les Brigadeführer SA doivent être considérés comme envisageant de former une telle garde d’État-Major et doivent engager des SA pour accomplir un an ou un an et demi de service dans ce but. La sélection et l’entraînement devront avoir pour but de paraître en public. Numériquement, l’effectif sera de 6.000 ou 8.000 SA armés, de façon permanente, de fusils et de mitrailleuses, dans le secteur de la 6e région militaire. Un élément particulièrement gênant est constitué par le fait que la création de ces gardes repose sur ce qu’on appelle les camps auxiliaires de SA qui sont constitués principalement dans les grandes villes. Aujourd’hui, j’ai reçu la nouvelle qu’à Höchst-sur-le-Main, c’est-à-dire dans la zone neutre, la création d’une telle garde armée d’État-Major a actuellement lieu. Une telle conduite rend illusoires tous les soins de la Wehrmacht et celui des dépôts Krüger à l’intérieur de la zone neutre qui subissent son influence. Étant donné que le chef d’État-Major est absent de Berlin, j’envoie ce rapport directement au chancelier. Signé : von Blomberg. »
Vous vous rendez compte que ces faits se passaient deux ans avant l’occupation de la zone neutre de la Rhénanie. Et ensuite, Monsieur le Président, si vous voulez avoir la bonté de vous reporter à la page 129, au document PS-4013 qui devient GB-608, vous trouverez une lettre de l’accusé Rosenberg, du bureau de presse local à Berlin au bureau de presse de Munich, vraisemblablement du Völkischer Beobachter .
« Le bureau de presse de Munich devra faire suivre immédiatement, dans une enveloppe bien fermée, la communication suivante destinée au chef d’État-Major. Les autorités d’ici ont appris que les Autrichiens à Berlin ont informé Vienne » — Monsieur le Président, vous remarquerez que c’est le 3 février 1934 et que le putsch de Dolfuss a eu lieu en juillet 1934 — « que les SA projettent de faire entrer en Autriche les formations autrichiennes de Bavière vers le 8 ou le 9 février. Ensuite, on proclamerait une dictature militaire. Ce matin, des milieux anglais très importants m’ont demandé s’il pouvait être possible que dans le dos de Hitler et de Habicht les Autrichiens d’Allemagne pussent envahir l’Autriche. Mon informateur a ajouté que les attaques autrichiennes avaient été écartées, mais que cette information venait d’une source tellement digne de foi qu’il se sentait absolument obligé de se mettre en rapport avec nous. Je crains une provocation possible par des éléments payés susceptibles, si l’on annonce cela au monde, de produire des conflits. J’ai expliqué que le Führer ne poursuivait pas une politique de paix avec la Pologne pour entamer en même temps des conflits militaires avec l’Autriche. Je vous rapporte cette affaire, afin que si l’occasion le demande, le Commandement suprême des SA puisse prendre les mesures nécessaires ».
Monsieur le Président, ensuite vient la Tchécoslovaquie, et si vous voulez bien vous reporter à la page 65 du livre, c’est le document EC-366-1, soit GB-609. C’est un rapport daté du 11 octobre 1938 qui traite de la situation du corps franc des Sudètes en septembre 1938. Il est établi par le lieutenant-colonel Köchling, qui était le délégué spécial de l’OKW auprès du chef des Jeunesses du Reich allemand. Je vais donner un extrait très bref, à la première page, à peu près à six lignes du bas :
« On estimait qu’il y avait de 10.000 à 15.000 hommes dans les camps de réception et dans les villages le long du front. Une faible part de ces hommes seulement était armés. »
Si vous voulez maintenant vous reporter à la page 66, à la ligne 2, il est dit que ces groupes, à leur tour, étaient constitués en bataillons, etc. A la ligne 6 : « Le ravitaillement avait été organisé par les SA, en collaboration avec le NSV, et marcha facilement dès le début. Une très petite quantité d’armes constituée par des carabines autrichiennes avait été fournie par les SA autrichiennes ».
Quatre lignes plus loin :
« Avec une camaraderie et un dévouement magnifique, le Commandement suprême des SA s’est occupé matériellement du Freikorps. »
Et dix lignes plus bas :
« L’équipement et la nourriture furent confiés aux SA et au NSV. »
A la page 67, quatrième ligne :
« Ici encore, les SA ont aidé en partie avec du matériel de transmission dont ils disposaient. »
Six lignes plus loin :
« La constitution des groupes et états-majors de la façon qui avait été ordonnée ne fut possible que grâce à l’aide effective des officiers de liaison délégués à chaque groupe par l’OKH ».
Ensuite, quatre lignes plus bas :
« En cela, les officiers de liaison furent particulièrement bien soutenus ou assistés par les chefs SA allemands du Reich qui avaient été versés dans les bataillons du Freikorps par les SA. Sans leur camaraderie et leur disposition à accomplir leur devoir, le Freikorps n’aurait pas pu accomplir sa tâche. Les chefs suprêmes affectés aux Freikorps par le Commandement suprême des SA ont également contribué de façon essentielle à la constitution du Freikorps et à son succès. »
Et ensuite, Monsieur le Président, à la page suivante il y a une certaine discussion sur la façon dont le travail s’est poursuivi et sur la façon dont les SA ont continué à aider. Je crois que maintenant, Monsieur le Président, vous pouvez vous reporter à la page 71 pour voir ce que faisait ce Freikorps, ou corps franc, sous la conduite des SA.
Le dernier paragraphe dit :
« Cette force a effectué plus de 200 opérations mineures, dans lesquelles elle a eu près de cent morts et plus de cinquante blessés, et capturé plus de 2.000 prisonniers et une grande quantité de butin de toute sorte — voir l’annexe 1 — si bien que la tâche que le Führer a exigée comme fondement de ses négociations de politique étrangère peut être considérée comme achevée. »
Dans l’annexe 1, Monsieur le Président, vous verrez une liste des prisonniers, des pertes, des fusils et des équipements saisis par le Freikorps. Le Tribunal se souviendra naturellement que ces faits se sont passés à une époque de paix, pendant laquelle, tous les accusés ont été tellement désireux de nous le montrer, aucune guerre n’avait éclaté. C’était avant Munich.
Monsieur le Président, vous vous souviendrez que j’ai demandé au témoin, hier, si l’entraînement des SA, au milieu de la guerre en 1941, était différent de l’entraînement auquel ils étaient soumis en temps de paix. Monsieur le Président, je vais vous donner seulement les différents documents où il est question de l’entraînement. Je ne les prendrai pas en détail, mais indiquerai juste ce qu’ils contiennent.
Le premier document est un mémorandum au sujet de l’entraînement, daté du 23 février 1934. C’est le document PS-1849 et vous le trouverez, Monsieur le Président, à la page 82 du livre de documents. Il prend le numéro GB-610. Vous trouverez aux pages 89 à 104 ce programme d’entraînement.
Le document suivant, par ordre de date, est le document PS-2354 (USA-430). Il se trouve dans le vieux livre de documents des SA. C’est le livre d’organisation de 1938, qui comprend l’entraînement des SA, y compris l’entraînement militaire, lancement de la grenade, etc. Ensuite, ce que j’ai l’intention de faire, c’est de résumer les points de similitude à la fin, et je pense que le Tribunal voudra bien vérifier pour s’assurer que mon résumé est exact.
Le document suivant est le D-925, qui devient GB-611, que le Tribunal trouvera à la page 32 du livre de documents 16-B. C’est une liste du contenu du manuel des SA. Ce doit être postérieur à 1937, parce qu’il y est fait allusion, à la page 36, aux masques à gaz individuels modèle 1937. Je ne sais pas la date exacte. Si Votre Honneur voulait noter les sections, il y a 8, 9, 10 sous la lettre « E ». Le 8, c’est le tir, le 9 c’est l’entraînement sur le terrain et le 10 l’entraînement pour l’attaque.
Vient ensuite un discours de Lutze qui a été fait en 1938. C’est le document PS-3050 qui contient une grande quantité d’extraits du SA Mann. Il se trouve dans une pile spéciale de documents dont nous avons fait traduire certains articles ; il porte le numéro K-3050. Comme je l’ai déjà dit, ce document est un discours de Lutze du 14 mai 1938 dont le témoin a beaucoup parlé.
Ensuite, vient un document que le commandant Barrington a déposé hier- C’est le document D-918, à la page 1 du livre de documents 16-B. Ce sont les directives d’entraînement pour 1939. Il va de la page 1 à la page 21.
Monsieur le Président, en dehors de l’entraînement dont on s’occupe longuement et que je vais résumer, il y a un point, page 21, sur lequel je désirerais attirer l’attention du Tribunal. C’est en dehors de l’entraînement, mais je ne veux pas revenir sur le document.
Page 21, le Tribunal verra sous la lettre « H » : « Aides pour la préparation et l’exécution de l’entraînement », et sous le numéro 4 :
« L’homme SA ». Je voulais simplement signaler cela.
Le dernier document de cette série se trouve à la page 108 du livre de documents 16-B. C’est le document PS-3993, qui devient GB-612. C’est une lettre de Lutze à l’accusé Rosenberg, datée du 30 janvier 1939.
« Veuillez accepter mes remerciements pour vos félicitations à la suite du décret du Führer qui ordonne aux SA tout l’entraînement prémilitaire et post-militaire. »
Nous trouvons clairement dans tous ces documents des facteurs communs : tout d’abord, les exercices de tirs, maniement général des armes et toutes affaires qui y touchent. En second lieu, l’usage...
Sir David, nous aimerions que l’on présente au témoin le dernier document dont nous nous sommes occupés, PS-3993.
Certainement, Monsieur le Président. (Le document est remis au témoin.)
Témoin, avez-vous vu ce document, la lettre de Lutze à Rosenberg, du 30 janvier 1939 ?
Oui, je l’ai ici.
Est-il exact que le Führer avait décrété, peu avant cette lettre, que l’entraînement prémilitaire et post-militaire serait assigné aux SA ?
Le 19 janvier 1939, le Führer l’a ordonné, mais ce décret n’a pratiquement jamais été appliqué.
Je suppose que vous avez effectué l’entraînement qui est contenu dans ces directives de 1934 à 1939, n’est-ce pas ?
A propos de ce reproche adressé aux SA, je voudrais donner de plus amples détails, particulièrement du fait que le droit de se justifier a été accordé expressément par le Procureur Général américain. M. Jackson, aux organisations ; Je voudrais donc revenir, en détail, sur les accusations portées ici...
Je ne pense pas que vous ayez à vous soucier de cela.
... et donner mon opinion...
Attendez un instant...
Je n’en ai pas terminé.
Ne tergiversez pas, je vous prie, répondez à la question.
Est-ce que vous constatez que ces directives dont j’ai fait mention contenaient l’entraînement au tir, l’entraînement au maniement des armes, les services en campagne, c’est-à-dire l’utilisation du terrain, le camouflage, les transmissions, les méthodes d’attaque, les opérations de reconnaissance ; et toutes choses, excepté la première... non, toutes sont des entraînements à l’usage des grenades à main et, d’une façon générale, l’entraînement à l’attaque, à la bataille et à la façon de combattre une attaque ou une offensive par des troupes blindées, par des avions. En fait, ces directives contiennent toutes les premières étapes ’de l’entraînement militaire que chaque soldat doit suivre avant de devenir un véritable soldat ? Témoin, avant de répondre, vous pouvez être certain que 90% des hommes présents dans cette salle d’audience ont effectué un entraînement militaire et le connaissent d’un point de vue pratique. Est-ce que vous affirmez que ces directives d’entraînement ne contiennent pas les étapes ordinaires, initiales, de l’entraînement militaire ?
Tout d’abord, je ne le nie pas, et puis c’est un entraînement qui était fait dans les Forces armées ; mais non dans les SA. Par exemple, nous n’avons jamais fait de lancers de grenades, d’entraînement aérien, d’entraînement à l’usage des armes. On ne peut pas répondre par oui ou par non à ces questions, mais il me faut aller dans le détail, pour donner une réponse véridique et complète.
Témoin, je veux entendre votre réponse à une question et le Tribunal vous laissera sans aucun doute donner votre explication ; est-ce que vous dites au Tribunal que ces directives d’entraînement ont été émises l’une après l’autre, pendant cinq ans, de 1934 à 1939 et que cet entraînement n’a pas été réalisé ? Dites-le-moi, vous pouvez répondre à cela par oui ou non. Est-ce que cet entraînement a été réalisé, oui ou non ?
Nous pratiquions un entraînement par le sport et des exercices de défense en vue du développement physique. Je dois voir des directives pour être apte à déterminer si nous travaillions en accord avec elles ou non.
Je n’ai pas l’intention d’entrer dans les détails. Le Dr Böhm va le faire.
Le Tribunal vous a demandé de présenter ce document au témoin, car il désirait savoir comment le témoin peut expliquer la réponse qu’il a donnée hier et que j’ai notée ainsi : « Lutze n’a rien écrit au sujet de l’entraînement militaire ». C’est la réponse que vous avez donnée hier au sujet du document PS-3215. Maintenant, nous avons devant nous une lettre de Lutze à l’accusé Rosenberg qui le remercie de ses félicitations pour le décret du Führer qui assigne aux SA tout l’entraînement post-militaire et prémilitaire. Pourquoi avez-vous dit hier que Lutze n’avait rien écrit au sujet de l’entraînement militaire ?
Monsieur le Président, on parlait hier d’un article de journal sur l’éducation militaire. Cet article de journal concerne le travail fait par les SA, et c’est un travail de pur entraînement défensif. Dans le décret du Führer, si je me souviens bien, il s’agit d’éducation prémilitaire et post-militaire, mais il est possible aussi que cela signifie « entraînement » ; je ne puis le dire avec certitude ; mais ce qu’on veut dire par là, c’est entraînement défensif. Et plus tard, au cours des délibérations pour l’exécution de ce décret qui se sont poursuivies jusqu’à la déclaration de guerre, cette conception d’entraînement ou d’éducation prémilitaire ou post-militaire fut déformée en « entraînement ou éducation en dehors des sphères militaires », c’est-à-dire que tout ce que faisaient les Forces armées n’était pas à faire par les SA. Les SA devaient préparer le corps et l’esprit, de sorte que tous ceux qui allaient dans les écoles de SA pouvaient devenir des hommes capables au point de vue physique et au point de vue moral. C’étaient le but et le sens du décret et le sens profond de l’insigne de défense des SA. Mais une instruction avec des armes n’était pas prévue dans l’entraînement.
Est-ce que vous dites qu’entre le décret du Führer de janvier et le début de la guerre il n’y a pas eu d’entraînement prémilitaire ? Quand l’avez-vous repris ?
Cela devait commencer avec la libération de la classe qui servait en 1939, en octobre ou novembre. C’était justement au moment où le décret devenait applicable. Le commencement de la guerre en a suspendu l’application. C’est spécialement mentionné dans un ordre du général von Brauchitsch, dans les premiers jours de novembre, ainsi que dans une lettre du Reichsleiter Bormann adressée au chef d’État-Major, où il était dit que...
Je voudrais que cela fût tout à fait clair. Quand avez-vous dit qu’il devait entrer en vigueur ? Avez-vous dit en octobre ? Quand cet entraînement prémilitaire devait-il commencer ? En 1939 ? Quand ?
Cet entraînement devait commencer après le début de la guerre, c’est-à-dire en novembre ou en octobre, je ne me souviens plus très bien. On a fait à ce moment-là des travaux de préparation pour déterminer sa mise en pratique.
Est-ce que vous prétendez devant le Tribunal que cet entraînement n’a pas commencé ?
Je dis au Tribunal que l’exécution de ce décret devait commencer en automne 1939.
Alors pourquoi avez-vous écrit un si grossier mensonge dans votre rapport de juin 1941 ? Le Tribunal le trouvera à la page 118 :
« L’entraînement pré-militaire, effectué par les SA depuis le commencement de la guerre, sur base volontaire, dans les groupes de défense des SA, a déjà été expliqué en détail dans les rapports 1 et 2. »
Ce sont vos premiers rapports sur l’activité des SA durant la guerre. Puis vous poursuivez en expliquant l’instruction et la pratique du maniement et nettoyage des armes, le tir sur cibles et en campagne et, plus loin, le lancer des grenades, en rapport avec les conditions de combat. Pourquoi avez-vous mis un si grossier mensonge dans ce rapport, si, comme vous le dites aujourd’hui au Tribunal, vous n’avez pas commencé cet entraînement ?
Dans ce rapport je n’ai pas dit de mensonge, pas plus qu’ici. Puis-je demander si ce rapport se réfère à la période de guerre ? Je ne sais pas si je vous ai très bien compris en disant qu’il ne se réfère pas au temps de guerre ? Hier, j’ai expliqué au Tribunal que les SA, au moment du début de la guerre, ont tout fait pour renforcer la force armée de l’Allemagne. C’était notre devoir de patriotes. Nous avons porté notre plus grande attention à l’entraînement physique militaire, c’est-à-dire, non plus à l’athlétisme ou aux autres exercices d’éducation physique, mais particulièrement aux exercices militaires. Mais ce n’était pas du service armé. Si le nettoyage des armes est mentionné, c’est que nous l’avons expliqué à nos hommes avec nos armes de petit calibre.
Le rapport est là, et il fait état de l’entraînement radio. L’entraînement prémilitaire comprend tous les hommes au-dessus de dix-huit ans. Monsieur le Président, vous avez le document.
Le groupe suivant de documents que je demanderai au Tribunal de prendre en considération a trait à la déclaration faite devant la commission que le SA Mann, qui fait partie du matériel de preuve utilisé par le Ministère Public, était une publication officieuse qui avait un tirage de 200.000 exemplaires. C’est ce qui a été dit devant la commission, aux pages 212 et 213. Si le Tribunal veut bien d’abord regarder la page 111 du livre de documents 16-B, il y verra le document PS-4010, qui deviendra GB-613. Oui, c’est à la page 117 — excusez-moi — du livre allemand.
Quelle page de notre livre ?
Monsieur le Président, c’est la page 111 du livre qui est sous vos yeux, c’est une lettre du rédacteur du SA Mann à l’accusé Rosenberg. Le Tribunal verra, c’est indiqué dans l’en-tête de la lettre, « Organe du Commandement suprême des SA de la NSDAP ». On voit que la lettre est adressée à Rosenberg et lui demande un article afin de commémorer les cinq années de publication indépendante du périodique et les huit années de publication au titre de supplément du Völkischer Beobachter .
Dans le milieu du second paragraphe, le Tribunal verra la phrase « Une liste d’abonnés de 500.000 montre clairement l’importance des SA. ». C’était le 13 août 1936.
Vous avez dit « l’importance des SA », c’est « l’importance du SA Mann ».
Certainement, je vous demande pardon, « l’importance du SA Mann ».
Lisez les deux premières lignes.
-« Dans quelques semaines, le SA Mann, publication de combat et organe officiel du Commandement suprême des SA, pourra jeter un regard en arrière sur une existence respectivement longue de huit et cinq ans. »
Ensuite, à la page 110, page 116 du livre de documents allemand, il y a une lettre de l’État-Major de l’accusé Rosenberg :
« Le Reichsleiter Rosenberg confirme, avec tous ses remerciements, qu’il a bien reçu votre lettre du 13 août et vous envoie ci-inclus la préface que vous demandez ».
Et ensuite, si le Tribunal veut bien se référer maintenant à la page 109, qui est la page 115 du livre de documents allemand (GB-614), on y voit une nouvelle lettre de l’éditeur du SA Mann adressée à l’accusé Rosenberg, et vous verrez sur l’en-tête de la lettre, cette fois-ci, « Bureau de presse du Commandement suprême des SA, Bureau central de l’éditeur du SA Mann ». C’était le 21 avril 1938. Il y a maintenant dix ans. On demande encore une fois à l’accusé Rosenberg d’écrire un article traitant « d’idéologie et de combat » ou de quelque chose de similaire.
Au paragraphe suivant :
« J’espère que vous accéderez à notre désir et je suis convaincu qu’une contribution, spécialement de votre plume, sera accueillie avec un enthousiasme tout particulier par nos 750.000 abonnés. »
Monsieur le Président, si vous voulez bien vous rappeler le témoignage donné par ce témoin quelques mois plus tard en 1939, au cours duquel il déclarait que les abonnés se montaient au nombre de 1.500.000, vous verrez qu’un SA sur deux était abonné au SA Mann .
J’ai déjà attiré l’attention du Tribunal sur le fait que le chef d’État-Major Lutze avait, dans ses directives sur la formation (D-918), recommandé le SA Mann . Ces articles figurent dans le document PS-3050 (USA-414). Ce document contient une foule d’articles militaires, antisémites et anti-religieux que mon ami le colonel Storey a déjà déposés devant le Tribunal. Je n’ai pas l’intention d’y revenir.
Le document suivant que je vous demanderai de considérer constitue un des cas de perversion du Droit dans l’intérêt des SA. C’est le document D-923, page 22 du livre de documents 16-B. Il devient le document GB-615. C’est un long document, mais je vais passer dessus très rapidement et ne m’attacherai qu’à quelques détails. La page allemande est 22 également. C’est un rapport qui se trouve en haut de la page 22. Il y a cinq chapitres qui sont récapitulés dans un sixième.
Le premier est un rapport du Ministère Public du tribunal de Nuremberg-Fürth, au Procureur Général de la Cour de Nuremberg, daté du 21 août 1933, établissant que des coups mortels ont été infligés à un certain Pflaumer par les SA. Ensuite, il y a le rapport d’autopsie de Pflaumer. Puis un rapport du Ministère Public disant que la Police refusait de déposer sur le cas ci-dessus, car « ces renseignements pourraient nuire au Reich ».
Le rapport émanant du Procureur Général signale que « le directeur de la Police avait refusé la permission aux fonctionnaires de la Police de rompre le secret professionnel » et dans la dernière phrase du chapitre 5, qui est un peu naïve : « La direction de la Police a refusé la permission aux fonctionnaires de rompre le secret professionnel pour leur audition. Elle a également besoin des accusés » — - il s’agit des deux hommes accusés d’avoir frappé Pflaumer à mort — « car il est impossible de s’en priver pour le congrès du Parti, sans quoi elle ne serait pas en état d’y assurer la sécurité. »
Le document suivant, n° 6, est un rapport de l’accusé Frank au ministre de l’Intérieur. Il montre que Konrad Pflaumer, mécanicien de vingt-neuf ans, marié, fut frappé dans un poste de garde en août 1933 et qu’il fut ensuite emmené au poste de police principal par les SA où il mourut.
A la page 23, en haut de la page, le Tribunal verra que « le médecin du tribunal a également déclaré que, suivant ses constatations, Pflaumer avait été frappé jusqu’à la mort de la façon la plus cruelle et la plus ignoble avec des objets contondants ». Ensuite, après avoir traité du résultat de la bastonnade : « La conclusion à tirer est que les coupables n’ont pas causé les blessures à l’homme qu’ils ont maltraité, alors qu’ils étaient en état de légitime défense ».
Et ensuite, apparemment, il déclare qu’il y a un certain, doute, mais le Tribunal verra d’après les preuves qu’il n’y avait aucun doute que ces gens’ étaient coupables.
Ensuite, les deux paragraphes suivants concernent la pression politique exercée sur la procédure. Puis vient un cas à peu près analogue dans la section II. Je n’ai pas l’intention de compliquer l’affaire. C’est le cas de trois Juifs frappés par les SS. A la page 24, l’accusé Frank, à la section 3, dit que « les événements décrits dans les sections 1 et 2 provoquent en moi une grande appréhension ». Il dit que les gens se livrent toujours à des actes de brutalité, que des membres de SA (c’est au milieu du paragraphe suivant) continuent de se livrer à des sévices inadmissibles sur leurs adversaires. Et, ensuite, au début du paragraphe qui suit : « Les événements montrent, de plus, que malheureusement on continue à tenter d’intervenir dans le cours légal de la Justice ».
L’accusé mentionne ensuite la question de l’amnistie et dit au début du paragraphe suivant :
« Spécialement dans le cas de Pflaumer, je considère qu’il est d’une nécessité urgente, dans l’intérêt de la sauvegarde de l’autorité de l’État et pour le bon renom de la justice et de la Police, d’éviter même la moindre apparence qui veuille que la Police ait projeté ces crimes. »
Et il dit pour finir :
« Les doutes et les appréhension du chef de la section politique de la direction de la Police de Nuremberg-Fürth doivent être pris en considération en excluant le public pendant le jugement. Le déroulement d’un procès ne peut guère être empêché par le refus de permettre de témoigner, car, eu égard aux aveux des accusés Korn et Stark, à cette date, ainsi qu’au résultat de l’autopsie officielle, le procès devra être intenté à nouveau contre eux et mené quelles qu’e soient les circonstances. »
Puis il demande, ainsi que le Procureur au Premier ministre, de soumettre l’affaire à la discussion de la prochaine réunion du Conseil des ministres et d’y inviter Röhm et Himmler ; ensuite, ce qui a été fait, une demande très significative de Bormann figure à la page 26 : il s’informe de l’état de l’affaire.
Page 27 (page 27 également du document allemand ), c’est le document 13. Le Ministère Public du tribunal de Nuremberg-Fürth fait un rapport au Procureur Général de Nuremberg disant que l’enquête préliminaire est achevée le 19 mars 1934. La direction de la Police de Nuremberg-Fürth a l’intention de demander qu’une décision de non-lieu intervienne.
Ensuite, le document 14 discute de cette affaire ; c’est à la page 27 et à la page 28. En bas de la page 28 de la version allemande, vous verrez un paragraphe intitulé : « Avis d’expert ».
« Après avoir mûrement réfléchi, je suis d’accord sur la proposition de la direction de la Police. En premier lieu, il y avait lieu de voir si on ne pourrait pas mettre fin à la procédure en prenant une décision de non-lieu en faveur des accusés. Suivant les résultats de l’enquête préliminaire seule, Korn peut être accusé dans tous les cas tandis que Stark pourrait bénéficier d’un non-lieu. Mais, en outre, une enquête ou une extension de cette enquête contre les personnes qui ont pris part à cette affaire à titre d’instigateurs, de co-auteurs ou de complices, et finalement contre ceux qui ont aidé les coupables, pourrait être provoquée sur la base de tel et tel article. Mais si la procédure devait être suivie de cette façon, il serait inévitable, même si le public n’était pas autorisé à assister au procès, qu’il eût vent de ces événements, ce qui nuirait sérieusement et ébranlerait la réputation des SA, du Parti, de la Police et même de l’État national-socialiste. »
Monsieur le Président, si vous voulez bien regarder le bas de la page 29, il est dit au dernier paragraphe...
Mais vous devriez lire également l’avant-dernier paragraphe de la page 27 qui commence à la seconde phrase de ce paragraphe.
Page 27 ? La phrase qui commence...
Oui, la deuxième phrase,
« Comme les forces de Police disponibles étaient loin d’être suffisantes, le Sturm SA pour missions spéciales qui était stationné à Nuremberg, dans la vieille Samariterwache Hallplatz n° 4, fut désigné pour assister la Police dans ses tâches. C’est dans ce corps de garde qu’avaient lieu les confrontations et les interrogatoires nécessaires de communistes arrêtés. Le chef de ce Sturm SA était alors le Sturmbannführer Eugen Korn, vingt-cinq ans, célibataire, employé de commerce à Nuremberg. Son adjoint était Stark, âgé de trente-quatre ans, etc. »
Je vous remercie, Monsieur le Président. Nous en étions arrivés au dernier paragraphe de la page 29 (également 29 du texte allemand ) :
« Enfin, on fait ressortir également que cette action avait été commise relativement peu de temps après la mise en vigueur du décret d’amnistie du 2 août 1933. Si elle avait été commise avant le 26 juillet 1933, seulement trois semaines plus tôt, elle aurait bénéficié d’une amnistie, comme un certain nombre d’autres excès politiques. Comme cet acte n’a pas été commis pour un motif ignoble, mais qu’il a plutôt servi à réaliser un but excessivement patriotique et le développement de l’État national-socialiste, l’arrêt d’e la procédure — également en considération de la relation sus-indiquée entre l’époque de l’action et l’amnistie — ne semble pas incompatible avec l’administration régulière de la justice criminelle.
« Pour toutes ces raisons, il est proposé — sur la demande de la direction de la Police — que les procédures relatives aux blessures ayant entraîné la mort du mécanicien Oskar Pflaumer, ainsi qu’aux actes de participation criminelle qui en ont résulté, soient classées. »
A la page suivante, page 30 et en haut de la page 31, dans un ordre de l’accusé Frank, il est indiqué que le Reichsstatthalter von Epp a dit : « J’ordonne le classement de la procédure criminelle... »
Frank envoya la nouvelle au Procureur Général près la Cour d’appel.
Il est intéressant de signaler, Monsieur le Président, compte tenu du fait que nous avons entendu parler de quelques cas isolés qui n’avaient rien à voir avec la direction des SA, que ce Korn, ce Sturmbannführer Korn, appartenait à l’État-Major de la haute direction des SA.
Maintenant, je n’ai pas l’intention de m’occuper des autres documents. J’espère abréger encore, mais il y a malgré tout deux autres documents qui montrent cette même perversion du Droit et qui, à mon avis, sont importants.
Le .document suivant est le D-936, que vous trouverez aux pages 51 et 52. C’est le document GB-616. Ce document se rapporte aux neufs membres des SA accusés d’avoir frappé l’éditeur du journal Le Paysan de Basse-Bavière. C’était un certain Dr Schlögl, et je crois que Le Paysan de Basse-Bavière était un journal du parti populaire bavarois, une sorte de journal du parti catholique et vous verrez que la procédure contre ces hommes a été menée pour tomber sous le coup de l’amnistie. Mais il est intéressant à nouveau de voir le motif invoqué et la liaison avec le Gouvernement. Si vous voulez voir au deuxième paragraphe les raisons de l’Amtsgerichtsrat, il n’y a aucun doute, toutefois, que les faits sont dus à des raisons politiques ; ils furent également commis pour assurer le succès de l’État national-socialiste. Il est possible que la destruction des meubles ait été destinée à servir à la fouille d’une maison et que l’alcool bu au préalable ait joué un rôle néfaste dans ; la manière d’exécuter cette décision. Il également possible que, par la destruction des meubles et certainement par les mauvais traitements infligés, on a eu l’intention d’empêcher le Dr Schlögl de poursuivre son activité politique ; on ne peut trouver d’autres motifs à ces faits.
Et veuillez noter :
« Le Commandement suprême des SA a également examiné ces questions. Dans la lettre du 14 septembre 1933, il annonce que les SA en question avaient été forcés de voir, et avaient vu, en effet, dans la possibilité qu’avait le Dr Schlögl de se frayer un chemin dans le mouvement national-socialiste, un danger pour le mouvement et, ainsi pour la nation elle-même. Et les actes n’ont pas été commis non plus dans un but de profit personnel ou pour d’autres bas motifs. Le Commandement suprême des SA déclare, sur ce point, que les actions et les intentions des SA ne visaient qu’au bien-être du mouvement national-socialiste. La raison politique et la pureté de l’intention se trouvent ainsi hors de doute. »
Je vous demande à nouveau de noter que c’est le Commandement suprême SA qui intervient ici.
J’espère pouvoir passer très brièvement sur le seul autre document qui me reste. Vous le trouverez dans le livre de documents 16-A, page 9. Le Tribunal se souviendra peut-être que le commandant Barrington a mentionné la question du châtiment de ces membres des SA — ils se montent, je crois, à quelque trente — qui s’étaient livrés à des cruautés dans le camp de concentration de Hohnstein. C’est un rapport qui traite du châtiment infligé à ces SA. Le Tribunal remarquera — et c’est à mon avis intéressant — que ce document est daté du 5 juin 1935 et qu’il s’occupe de la procédure pénale intentée contre le commerçant et SA-Obersturmbannführer Jähnichen et vingt-deux de ses compagnons — j’ai dit trente, mais je crois qu’ils étaient vingt-trois en tout — pour avoir causé des blessures pendant qu’ils étaient en fonctions dans le camp de détention de protection de Hohnstein, en Saxe.
C’est une lettre du Dr Gürtner à l’accusé Hess, c’est-à-dire une lettre du ministre de la Justice à l’adjoint du Führer. C’est le document PS-784, qui devient GB-617. Le Dr Gürtner dit tout d’abord quelles sont les peines demandées par le procureur et indique ensuite les peines prononcées par la Cour d’appel de Dresde. J’ai oublié de vous dire que cette lettre figure à la page 9 anglaise et aux pages 9 à 15 du livre allemand également. Si nous nous reportons à la page 10 de ce document (page 10 et 11 du texte allemand), le Tribunal verra que le ministre de la Justice écrit :
« Après le réquisitoire, toutefois avant le prononcé de l’arrêt, le président de la 12e Chambre » — c’est-à-dire le magistrat — « a reçu la lettre suivante du Reichsstatthalter de Saxe... »
Je vous demande pardon, Monsieur le Président, mais le document que j’ai reçu n’a ni page 9 ni page 10, tout au plus une page 7, et, par conséquent, je ne suis pas en mensure de suivre l’exposé.
Je m’aperçois en effet, Monsieur le Président, que la pagination est différente dans l’exemplaire du Dr Böhm.
C’est une lettre du Reichsstatthalter :
« Comme on me l’a dit, on envisage d’infliger une peine de trois ans et demi de réclusion à l’accusé Standartenführer Jähnichen. Sans vouloir me mêler de la procédure, sans avoir l’intention de vous influencer en tant que juge, de quelque façon que ce soit, avant que la décision ne soit prononcée, j’aimerais, quoi qu’il en soit, attirer une fois de plus votre attention sur le fait que les circonstances, qui ont été amenées par la révolution de 1933 et qui agissaient sans aucun doute, elles encore, au début de 1934, ne peuvent pas être laissées de côté au moment de prononcer votre décision. Il y a un autre point qui me semble digne d’être pris en considération : le fait qu’on ne peut pas accuser Jähnichen d’avoir une basse moralité et que, par-dessus tout, la lie de l’humanité devait être traitée à Hohnstein. Compte tenu de ce fait, j’aimerais vous laisser la tâche d’apprécier si les abus justifient une punition aussi sévère ou si l’on ne pouvait pas plutôt envisager un acquittement. En tant que Gauleiter de la NSDAP, je considère qu’il est de mon devoir d’attirer encore une fois l’attention sur ces circonstances particulières. »
Maintenant, Monsieur le Président, le Dr Gürtner, ministre de la Justice, continue, et le Tribunal se doute bien que c’est là la partie la plus extraordinaire et la plus sinistre de cette affaire.
« Toutefois, l’information est parvenue que les deux jurés qui étaient juges dans le principal procès : à savoir le Regierungsamtsmann Helbig et le marchand Pesler, avaient été exclus de la, NSDAP après le jugement. Je ne sais pas qui a ordonné cette expulsion. Finalement, il a été déclaré après le jugement au procureur, le Dr Walther, qui était un SA, par son Obersturmbannführer, qu’il devrait démissioner des SA. »
Et ensuite, vous pouvez bien penser que le ministre de la Justice continue en faisant quelques remarques extrêmement pertinentes sur l’impossibilité pour la justice de suivre son cours si cela continue. Il dit au milieu du paragraphe suivant, à la fin de la page 12 de la version allemande :
« Ce genre de procédure contre des jurés après la décision ferait naître naturellement le sentiment que lorsqu’ils sont en fonctions en qualité de juges, ils sont responsables vis-à vis de certain organisme, de leurs actes. De ce fait, l’indépendance judiciaire qui est la base de toute administration ordonnée de la justice, devient nulle et non avenue. »
Vous verrez, à la fin du paragraphe, qu’il parle de ces jurés et qu’il en vient à cette conclusion.
« Je me sens obligé de considérer si, en face d’un tel état de choses, les membres du Ministère Public et les juges peuvent encore rester fonctionnaires du Parti ou membres des SA. »
Le Tribunal trouvera au bas de la page 11 du livre anglais, page 3 du document et page 13 de la version allemande, une lettre adressée au chef de l’État-Major des SA de la NSDAP avec une copie jointe des accusations. Monsieur le Président, c’était Lutze, à ce moment-là, qui était chef d’État-Major des SA parce que Röhm avait été tué avant cette date. On expose au chef d’État-Major des SA de la NSDAP les mêmes points, et ensuite, l’affaire parvient à Hitler. Le Tribunal trouvera le rapport qui contient la décision de Hitler aux pages 13, 14 et 15 de la version anglaise, 16 à 33 de la version allemande. Je pense que le Dr Böhm pourra le trouver. Le Tribunal verra qu’avant tout le document PS-785 (je m’excuse, j’ai cru que c’était le même document ), au premier paragraphe, donne une description du crime commis.
« Les mauvais traitements des internés qui ont amené le jugement des accusés n’ont pas été exécutés pour un motif politique quelconque (pour obtenir un aveu, pour punir des infractions disciplinaires, etc.), ni à la suite des dommages causés par les communistes, mais tout simplement dans un esprit de tortures malicieuses ou comme manifestations d’une brutalité sadique.
« Plusieurs cas de mauvais traitements se sont produits, aussi lors d’interrogatoires d’ennemis de l’État. »
Et à la fin de ce paragraphe :
« Non seulement les accusés essayaient d’arracher des confessions aux détenus, mais ils ont agi par pur plaisir de torturer. »
Ils ont agi par pur plaisir de torturer ! C’est un document qui émane de la Chancellerie du Reich ; le Tribunal verra la critique qui en a été faite. Le document continue ensuite en disant, à la fin du paragraphe suivant, qu’il n’y avait aucune raison politique ou aucune vengeance personnelle à la base. C’est ce qui en ressort.
Au haut de la page 14, on dit :
« Si toutefois, comme je le ferai par la suite, je suggère une nouvelle réduction des peines basée sur de nouveaux témoignages, c’est parce que je crois que, selon les circonstances, les accusés, dans l’un ou l’autre cas de mauvais traitement, peuvent avoir été mus en partie par des motifs révolutionnaires. »
Je répète : « ... peuvent avoir été mus en partie par des motifs révolutionnaires. »
Ensuite il donne quelques exemples, et au bas de la page, il y a une annexe avec la décision de Hitler :
« A la demande du ministre de la Justice du Reich, j’accorde, dans la procédure menée contre Rudolf Jähnichen et autres pour mauvais traitements de personnes soumises à la détention de protection dans le camp de concentration de Hohnstein, les diminutions suivantes aux peines énumérées dans la colonne 6 ». Et ensuite, on voit que les peines sont réduites du tiers ou de moitié suivant les cas.
Monsieur le Président, j’aimerais simplement rectifier un numéro. Le premier document porte le numéro USA-732 et le second, qui devient le GB-617, porte le numéro PS-785. Je vous prie de m’excuser encore une fois, c’est une erreur. Le second document porte le numéro USA-733. Je vous prie de m’excuser.
Je pense qu’il serait bon maintenant de suspendre.
Monsieur le Président, j’ai terminé la présentation des documents. Mais j’ai trois autres questions du contre-interrogatoire que je voudrais soumettre au témoin et j’aurai fini avec mon contre-interrogatoire.
Sir David, avant que vous ne lâchiez le livre de documents 16-B, pourriez-vous regarder à la page 27 ? Le Tribunal voudrait savoir ce qu’était le Sturm SA pour missions spéciales.
Monsieur le Président, j’ai dit que le fait que Korn était à l’État-Major suprême des SA était mentionné à la dernière ligne de la page 26 ; si vous voulez lire cette dernière ligne : « Korn est à présent à Munich à l’État-Major de la haute direction des SA ». Je passe maintenant à la question.
Témoin, pouvez-vous dire au Tribunal ce qu’était le Sturm SA pour missions spéciales, qui se trouvait à Nuremberg, dans la vieille Samariterwache au numéro 4 Hallplatz ? Quelles tâches exécutait-il pour aider la Police ?
Nous avions des SA Stürme et Sturmbanne à missions spéciales dans différents endroits et également à Nuremberg. Autant que je sache, leur tâche générale consistait à se mettre à la disposition en cas de catastrophe et, en outre, à aider la Police si elle le demandait ; elles étaient utilisées par la Police comme auxiliaires. Elles ont participé également aux missions des pompiers, pendant la guerre, dans le service de la défense passive, à Hambourg, par exemple, et en Westphalie. C’était là, en général, les tâches des Sturmbanne SA à mission spéciale, qui se composaient d’hommes à qui la profession et le travail accordaient le temps nécessaire pour un tel service.
Dans l’exemple présent, ces hommes, sous le commandement de Korn qui était à l’État-Major du Commandement suprême des SA, ont frappé à mort ce communiste par bastonnade sur les pieds. Était-ce là une des missions spéciales auxquelles ces Sturm SA servaient lorsqu’elles avaient le temps ? Était-ce une de leurs tâches spéciales ? Était-ce une tâche typique et spéciale de ces Sturm, de frapper à mort les communistes, en août 1933 ?
Non. Ce n’a jamais été leur tâche, et si Korn l’a fait, il doit être puni en conséquence.
Vous avez dû connaître Korn, n’est-ce pas ? Il se trouvait dans l’État-Major du Commandement suprême des SA ?
Je connais Korn depuis 1934 environ.
Et vous avez continué à travailler avec Korn pendant des années, n’est-ce pas ?
Il a été, pendant un certain temps, employé au service du personnel. Je n’ai jamais eu connaissance auparavant des faits qui viennent d’être rapportés.
Vous n’en saviez rien avant aujourd’hui ? Vous étiez adjoint du chef d’État-Major des SA et vous dites vraiment au Tribunal que vous ne saviez pas qu’un homme de l’État-Major du Commandement suprême des SA avait commis ce meurtre brutal à Nuremberg. Vous n’en saviez rien ? Vous voulez nous raconter cette histoire ?
M. le représentant du Ministère Public me semble avoir oublié que je n’étais que depuis 1939 adjoint du chef de l’État-Major ; auparavant, j’étais chef de section au Führungsamt, puis, chef du Führungsamt.
Je n’oublie pas les premiers mots de votre témoignage : vous pourriez donner un compte rendu de tout ce qui s’était passé dans les SA depuis 1933 — toutefois, si c’est là votre réponse. Maintenant je vais passer à une autre de vos suggestions. Regardez le document PS-1721. Monsieur le Président, c’est le document qui se trouve dans le livre de documents original et qui traite des événements de novembre 1938. Vous vous rappellerez que le témoin pensait hier que le document n’était pas authentique.
Maintenant, témoin, je ne vais pas discuter avec vous. Mais je voudrais vous signaler quelques faits dans le document que je remettrai ensuite au Tribunal. Vous ne contestez pas que vous avez écrit le document du 29 novembre 1938, dont une copie forme la première pièce de ce dossier ? C’est le document qui traite de la livraison à la Gestapo des biens juifs pris par les SA. Si je vous ai bien compris hier, vous ne contestez pas que vous avez écrit ce document, dont voici une copie, n’est-ce pas ?
J’ai déjà dit hier que je reconnaissais ce document.
Voulez-vous regarder au coin inférieur de ce document ; vous y verrez le cachet du groupe SA Kurpfalz. Le voyez-vous ?
Oui.
Et vous voyez dans ce cachet les lettres H, W et G ?
Oui, je vois quelque chose d’approchant.
Maintenant, en bas, à côté de ce cachet, vous verrez un signe : « zdA ». Ce qui veut dire « Zu den Akten » (à mettre dans le dossier). Voyez-vous ces initiales « zdA » ?
Oui, je les vois.
Maintenant, voulez-vous regarder le document que vous dites n’être pas authentique et vous verrez là le même sceau du groupe SA Kurpfalz et les mêmes lettres H, W et G. Vous les voyez ?
Oui, je les vois.
Et vous voyez — je crois que c’est en haut du deuxième document, c’est-à-dire du document du 11 — l’abréviation « zdA » de la même écriture que sur le premier document. Vous le voyez ?
Oui, je vois.
Il y a deux autres points que je voudrais vous signaler sur ce document, qui est le rapport au groupe SA Kurpfalz, qui traite d’un certain nombre de Standarten. Pourriez-vous regarder le passage sous « Standarte 145 » ? Vous voyez, on peut lire : « Synagogue de Bensheim, synagogue de Lorsch, synagogue de Heppenheim, synagogue de Birkenau ». Regardez la suite. Vous voyez la suite : « Chapelle d’Alsbach », n’est-ce pas ?
Quelle page, si je puis vous le demander ?
C’est dans la liste. Le document du 11 novembre, qui nous donne une série de Standarten, la première est 115 et la seconde 145. Vous le voyez ?
Oui.
Vous voyez qu’on indique quatre synagogues et la chapelle d’Alsbach. Le voyez-vous ?
Oui.
Je voudrais que vous tourniez la page et que vous lisiez la note pour le dossier qui mentionne l’appel téléphonique du chef de la brigade 50 à Darmstadt, le Brigadeführer Lucke ; vous le voyez ?
Oui.
Regardez au bas du même groupe ; vous verrez que « la synagogue de Bensheim a été détruite par le feu, la synagogue de Lorsch près de Bensheim a été détruite par le feu, la synagogue d’Heppenheim a été détruite par explosifs, les synagogues de Rimbach et de Birkenau ont été détruites ». Maintenant vous voyez aussi : « La chapelle d’Alsbach » a été détruite ?
Oui. La chapelle d’Alsbach.
La même distinction est faite entre une synagogue et une chapelle qui est appelée soit « Gebetshaus », soit « Bethalle ». Les autres pages contiennent des rapports sur différents Standarten. Naturellement, Monsieur le Président, je ne veux pas contester ce point, mais je voulais simplement le signaler au témoin, puisqu’il avait mis le document en doute.
Maintenant, témoin, je voudrais que vous m’aidiez sur un autre point. Vous savez qu’après ces incidents des 9 et 10 novembre 1938, quatorze SA furent déclarés coupables d’avoir tué des Juifs ? Le saviez-vous ? C’étaient des gens de différents grades des SA, qui ont été déclarés coupables d’avoir tué des Juifs. Vous acceptez ce fait ? Le document qui contient la décision du tribunal du Parti a été déposé et je ne veux pas perdre de temps. Voulez-vous admettre ce point ? Admettez-vous que quatorze SA ont été déclarés coupables, par le tribunal du Parti, après les 9 et 10 novembre, d’avoir tué des Juifs ?
J’ai eu connaissance ici, en captivité, de ce document disant que quatorze hommes des SA auraient fusillé ou frappé à mort des Juifs.
Maintenant vous avez dit, non pas une fois, mais à plusieurs reprises, que lorsque ides SA se rendaient coupables d’excès, ils étaient punis. Savez-vous que tous les SA qui avaient tué des Juifs ont été libérés et que les seuls SA qui ont été punis étaient ceux qui avaient pillé ou volé ? C’est-à-dire trois d’entre eux ? Savez-vous que ces quatorze officiers SA ont été lavés de l’accusation de meurtre ?
Je suis convaincu qu’ils ont été punis par les SA. La peine correspondant aux meurtres qui sont cités ici était affaire des tribunaux de Droit commun. Je ne sais pas si ces tribunaux réguliers les ont condamnés.
Vous pouvez me croire puisque le document est déposé devant le Tribunal. Le tribunal les a acquittés parce qu’ils faisaient partie des camarades du Parti qui n’avaient tiré qu’en raison de leur attitude et initiative profondément nationales-socialistes. Voilà pourquoi le tribunal les a acquittés, comme le montrent ses propres documents. Pouvez-vous dire que le Parti ou les SA ont puni les gens pour avoir maltraité des Juifs, lorsque ces quatorze meurtriers de femmes, d’enfants et d’hommes juifs, ont été libérés en raison de leur esprit profondément national-socialiste ? Prétendez-vous qu’ils ont été punis ?
Voudriez-vous me montrer le document ? Je ne crois pas possible que les chefs du Haut Commandement des SA aient pris de telles dispositions.
C’est le tribunal suprême du Parti ; le tribunal suprême du Parti qui était composé de Gauleiter.
Le tribunal suprême du Parti n’est pas le tribunal dies SA.
Non, mais c’est le tribunal suprême du national-socialisme et il a décidé que ces quatorze meurtriers seraient acquittés. Comment ce fait peut-il être en harmonie avec votre déclaration suivant laquelle le meurtre a été puni ?
Je vous demande de comprendre que le tribunal suprême du Parti était une institution du Reich et du Parti, alors que les SA avaient leur propre tribunal SA. C’est que le chef d’État-Major et le commandement SA avaient une influence sur le tribunal SA et non pas sur le tribunal suprême du Parti.
Saviez-vous, témoin, que le tribunal suprême du Parti avait acquitté ces quatorze SA meurtriers après 1938 ?
Je l’ai seulement appris ici, en captivité, par ce document.
Ainsi, l’adjoint du chef d’Etat-major des SA ne savait pas que quatorze hommes de sa propre organisation avaient commis des crimes sanglants et cruels ? C’est ce que vous voulez prétendre devant le Tribunal ? Je voudrais vous poser une autre question.
L’adjoint du chef d’Etat-major était convaincu et est toujours convaincu que tous les excès des 9 et 10 novembre, pour autant que des SA les aient commis et qu’ils ont été connus, ont été sanctionnés non seulement par les SA, mais également par les tribunaux réguliers. Je sais, par les paroles du chef d’État-Major Lutze, qu’il avait vigoureusement insisté là-dessus. Je ne nie pas toutefois que l’un ou l’autre délit ait été connu de lui.
II y a un autre point que je voudrais vous soumettre. Vous avez présenté le chef d’Etat-major Röhm comme un homme pacifique et croyant. Est-ce l’impression que vous voulez que ce tribunal ait du caractère du chef d’Etat-major Röhm ? C’était un homme pacifique et croyant ?
C’est une question dont on comprend difficilement le sens profond. J’ai affirmé que le chef d’État-Major Röhm appartenait à l’Église. Il ne s’est donc pas opposé à l’Église.
Il avait également des dispositions pacifiques : ce fait est : prouvé et je fus moi-même témoin qu’il déclara et souligna non seulement aux chefs SA mais également aux représentants des puissances étrangères qu’il désirait toujours entretenir des relations amicales avec ses voisins étrangers.
Bien. Je voudrais simplement que vous regardiez un extrait du discours de Hitler du 13 juillet 1934, quinze jours après le putsch. Monsieur le Président, j’ai fourni au témoin le calendrier historique de Schulthess de 1934. J’en déposerai un passage en temps utile. Page 182, voici ce que Hitler disait au Reichstag :
« Mais ici, je dois établir pour le présent et pour la postérité que ces hommes ne possédaient plus le droit d’invoquer le national-socialisme comme une idéologie. » — C’est-à-dire Röhm et ses amis — « Leur vie était devenue aussi mauvaise que celle des gens que nous avons vaincus et remplacés en 1933. La conduite de ces hommes me rendit impossible de les inviter chez moi ou d’entrer dans la maison du chef d’État-Major à Berlin, même une seule fois. Que serait-il advenu de l’Allemagne si cette secte était restée vainqueur ? Il est difficile de l’imaginer. »
Témoin, vous savez parfaitement bien, et je vous demande de le dire au Tribunal, pourquoi Hitler ne voulait pas entrer dans la maison de Röhm même une seule fois ?
C’est Hitler qui était juge ; je ne peux pas donner de renseignement à ce sujet.
Vous savez très bien que c’était l’homosexuel le plus notoire d’Allemagne ?
Qu’il ait, dans ce sens, été malade, je ne l’ignore pas ; mais j’ignore quelle a été la raison de Hitler.
Monsieur le Président, je m’excuse, j’ai encore quelque chose que j’avais oublié. Votre Honneur m’a demandé de soumettre la déclaration sous serment du Dr Högner à ce témoin. Il était premier ministre de Bavière. Si Votre Honneur se souvient, le Dr Böhm l’a mentionné, et Votre Honneur m’avait suggéré de la déposer au cours du contre-interrogatoire. Je crois que le Tribunal en a des copies. C’est le document D-930 (GB-617).
Sir David, je ne me souviens pas avoir dit que vous deviez le lui montrer. J’ai simplement dit, je crois, que si vous le lui soumettiez, le Dr Böhm aurait l’occasion de l’interroger à nouveau à ce propos. Si vous ne le déposez pas, il ne sera pas considéré comme moyen de preuve.
Monsieur le Président, je n’ai pas le désir de le déposer. J’avais pensé que vous le désiriez. C’est un des groupes de déclarations sous serment dont j’ai dit au Tribunal que je les donnerais immédiatement à la Défense. Ce sont des déclarations générales de ministres et autres personnages importants d’Allemagne qui réfutent en général les déclarations qui ont été produites par la Défense. Je suis tout à fait satisfait, comme je l’avais proposé et comme le Tribunal l’a admis, qu’ils soient lus au moment où nous nous occuperons des documents, après les documents de la Défense. Mais je le donnerai à la Défense afin qu’elle ait l’occasion de le lire au préalable. Monsieur le Président, voilà le point de vue auquel je me tiens.
Si vous voulez l’utiliser, je crois qu’il vaudrait mieux qu’il soit versé au dossier et qu’il soit déposé.
Je suis tout à fait d’accord, Monsieur le Président. Je le ferai très volontiers. Nous les déposerons comme affidavits. C’est seulement une question de procédure sur laquelle le Tribunal se prononcera. La Défense a déposé environ 300.000 déclarations qui ont été résumées dans un certain nombre de déclarations générales et je suggérais l’autre jour que nous déposions en même temps, pour les réfuter, ces quelques déclarations que nous avons.
En bien, faites-le ; déposez-les maintenant.
Certainement, Monsieur le Président ; c’est ce que je vais faire.
Avez-vous d’autres preuves contraires en dehors de ces déclarations sous serment ?
Monsieur le Président, il s’agit de cet ensemble. Il y a encore un supplément, mais, pour autant que je le sache, ce sont les seules preuves contraires que nous ayons.
Bien. Vous n’allez pas demander de citer d’autres témoins ?
Non, Monsieur le Président. Je ne voudrais pas parler pour mes collègues, mais pour autant que je le sache, ils n’en ont pas l’intention. Je vais vérifier immédiatement ; Monsieur le Président, le Ministère Public ne désire citer aucun autre témoin.
Très bien.
Monsieur le Président, c’est la déclaration sous serment du Dr Högner, premier ministre de Bavière et il donne son adresse. Il mentionne dans le paragraphe 2 : « Les deux pamphlets qui m’ont été soumis (parties 1 et II) ont été rédigés par mes soins : Hitler et Kahr, les deux célébrités napoléoniennes de Bavière, un scandale découvert au sein de la commission d’enquête du Landtag bavarois. A ce moment-là, j’étais rapporteur adjoint de la commission d’enquête du Landtag bavarois sur le putsch de Hitler de 1923. Tous les faits mentionnés dans ces brochures viennent des dossiers du tribunal que j’ai parcourus moi-même et dont j’ai fait des extraits. Cela vaut en particulier pour les ordres et instructions militaires rapportés mot pour mot dans ces brochures. »
Puis il donne un compte rendu de l’activité illégale et violente des SA de 1921 à 1933. C’est un long paragraphe. Puis il poursuit sur les événements de 1933 et 1934 :
« Les SA ne changèrent en rien leur conduite ultérieure. Spécialement après 1930, ils se distinguèrent dans les conflits avec leurs adversaires politiques par leur violence et leur manque de pitié. Après la prise de pouvoir du national-socialisme, les SA envahirent les domiciles de leurs adversaires politiques comme une horde puissamment armée ; ils maltraitèrent ou arrêtèrent ces derniers. Je sais aussi que les SA jouèrent un rôle double dans les persécutions contre les Juifs, en avril 1933 et dans l’occupation des maisons des syndicats le 2 mai 1933. Déjà avant cela, le président des syndicats de Munich, Gustav Schiefer, avait été attaqué à la maison des syndicats par des membres des SA et si sérieusement maltraité qu’il dût rester longtemps à l’hôpital. »
Il continue par d’autres descriptions sur les SS dans le paragraphe suivant. Enfin, dans l’avant-dernier, il dit :
« Avant mon départ de l’Allemagne, les anciens députés communistes de la Diète, Dresse et Schleffer, furent assassinés dans le camp de concentration de Dachau, probablement en mai 1933. J’ai très bien eu connaissance de cet incident puisque je m’en suis plaint au ministre de la Justice du Reich, le Dr Gürtner, à Berlin ; que cela ait été fait par les SA ou les SS, je ne me le rappelle pas. »
Puis il raconte un incident au sujet d’un meurtre par des SS et dit :
« Les grossiers excès des SA et des SS au service de la NSDAP furent commis d’une façon si publique que toute la population les connaissait. Tout homme qui adhérait à ces organisations en était informé. »
Indique-t-il à quelle date il quitta l’Allemagne ?
Je ne crois pas qu’il l’ait mentionné.
C’est assez important, n’est-ce pas ?
Je tâcherai d’éclaircir ce point. Votre Honneur a raison, nous devrions le savoir.
On peut peut-être conclure de ce document que c’était vers 1933.
Oui, Monsieur le Président. Il dit : « Après la prise du pouvoir par les nationaux-socialistes, les SA... » Puis il continue à parler des syndicats jusqu’en mai 1933. Mais, Monsieur le Président, vous avez raison, il ne mentionne aucune date après 1933. Je vérifierai ce point. Je vous remercie, Monsieur le Président.
Docteur Böhm, ne vaudrait-il pas mieux que vous attendiez pour votre interrogatoire complémentaire que le Dr Seidl ait posé ses questions, s’il désire en poser ?
Certainement, mais je voudrais tout d’abord faire une suggestion. La déclaration de M. le ministre Dr Högner a été présentée à mon instigation, ainsi qu’on vient de le dire, et je voudrais également que la déclaration du Procureur Général près la Cour d’appel de Brunswick, la déclaration du Dr Schumacher, ainsi que la déclaration du maire de la capitale provinciale de Brunswick soient également présentées ici. Ce sont là des déclarations sous la foi du serment que ont été mises dans ma case avec celle du Dr Högner.
Vous demandez que nous prenions en considération les sept autres déclarations sous serment présentées en même temps ?
Certainement. Je viens d’apprendre que la déclaration sous serment du Dr Högner avait été déposée parce que je m’y étais référé hier. Et ces autres déclarations contenant une série de preuves à décharge ont été mises à ma disposition ou déposées dans ma case. Je voudrais demander à M. le représentant du Ministère Public de produire en même temps ces déclarations qui viennent d’être mentionnées ou lues afin que j’aie l’occasion, lors de l’exposé des preuves, de donner une opinion sur le contenu de ces déclarations de témoins.
Je ne vois aucune objection, Monsieur le Président, à ce que le Dr Böhm dépose ces documents. Nous avons tout mis à sa disposition, sans considération de savoir ce que nous allions utiliser. Certains de ces documents sous serment ne se présentaient pas sous la forme d’une déclaration sous serment, et nous nous sommes, de ce fait, abstenus de les utiliser. Si le Dr Böhm croit pouvoir utiliser ces documents du Ministère Public, nous n’élevons aucune objection contre cette utilisation.
Monsieur le Président...
Docteur Böhm, vous pouvez présenter comme preuve ces déclarations sous serment ou tous autres documents si vous le désirez.
Je suis donc à même de me référer à ces déclarations sous serment dans le cadre de cet exposé des preuves ?
Oui, mais pour la rédaction du procès-verbal il faut que vous les versiez au dossier ; ensuite, on leur donnera des numéros de .documents.
Très bien.
Monsieur le Président, le Ministère Public a présenté hier un nouveau document, GB-602, lettre du commandant de la Police de sécurité du Gouvernement Général adressée à l’accusé, le Dr Frank.
Quelle est l’autre référence ? Vous avez dit GB-602. Il y a une autre référence.
D-970. C’est une lettre du commandant de la Police de sécurité du Gouvernement Général, adressée à l’accusé, le Dr Frank, le 25 septembre 1944. Vous verrez dans ce document qu’il est question d’une annexe et je demande qu’il me soit permis de lire un court extrait du journal du Dr Frank qui appartient à ce document.
Oui, s’il se réfère à ce document.
II s’agit d’une note du mardi 26 septembre 1944 :
« Conférence avec le secrétaire d’État Dr Bühler ». Dans cette conférence, on parle de l’assassinat du prieur du couvent des Carmélites de Czerna.
« Comme le rapport du Commandant de la Police de sécurité et du SD du Gouvernement Général » — c’est le rapport présenté par le Ministère Public — « manque de clarté, suivant l’opinion du Gouverneur Général, et comme le bureau de Police de Katowice voulait prendre sur lui-même la responsabilité qu’à l’avenir ce seraient non plus des SA mais des fonctionnaires de la Police qui entreprendraient de telles expéditions, le Gouverneur Général a demandé au Procureur Général Rother de faire procéder à une enquête détaillée sur cette affaire. »
Il n’est pas dit dans le journal ce qu’il advint de ces SA. Toutefois, c’est pour cela que j’ai choisi une déclaration sous serment de l’accusé Frank que je demande de produire ici comme preuve. Elle est très brève. Il en découle que les gens ont été poursuivis devant les tribunaux et ont été sévèrement punis.
Versez-vous ces affidavits au dossier ?
Je dépose cette déclaration sous le numéro Frank-25.
Est-ce que avez d’autres documents que vous voulez verser au dossier, ou est-ce le seul ?
C’est le seul nouveau document que je désire présenter.
Nous l’acceptons maintenant et vous le déposez sous le numéro Frank-25. Est-ce que vous nous avez donné la référence dans le journal de Frank du passage que vous avez lu ?
C’est une mention du 26 septembre 1944.
Je sais que c’est un passage du journal, mais a-t-il été versé au dossier ?
C’est une partie du document GB-602.
Voulez-vous répéter ? Quelle est la référence ?
GB-602.
Ce n’est pas le journal de Frank ? GB-602 ?
Non, mais la lettre écrite par le commandant de la Police de sécurité, produite par le Ministère Public.
Je sais, mais je vous demandais le numéro du journal de Frank du 26 septembre 1944, s’il a reçu un numéro de dépôt ?
C’est le numéro Frank-10, puisque j’ai produit tout le journal sous ce numéro.
Très bien.
Je ne voudrais pas m’opposer à la production de cette déclaration, mais je voudrais observer que si d’autres déclarations sont présentées par les accusés, il serait nécessaire que le Ministère Public ait le droit de les soumettre à un examen contradictoire, dans ce cas. Il se pourrait très bien qu’un examen contradictoire s’impose, s’ils sont en train, maintenant, de s’efforcer de présenter de nouveaux témoignages, ’de leur propre gré, sous le déguisement de déclarations sous serment.
Monsieur le Président, je voulais d’abord demander l’autorisation d’interroger à nouveau l’accusé Frank à la barre des témoins et de l’entendre à ce sujet. Si je produis une déclaration sous serment, c’est uniquement pour gagner du temps et non pour une autre raison. J’aurais préféré l’autre solution.
Je ne suis pas très sûr que cela économisera du temps ; mais je crois au contraire que cela prolongera les débats.
Nous n’avons pas l’intention d’en entendre plus ; nous acceptons le document.
Puis-je en conclure que je suis autorisé à lire cette brève déclaration dans le procès-verbal, étant donné que le document 602 a été lu ?
Vous ne l’avez pas encore lue ? Lisez-la maintenant, si vous dites qu’elle est courte.
« Dans la deuxième quinzaine de septembre 1944, le Gouverneur von Burgsdorff m’annonça que le prieur du couvent des Carmélites à Czerna était mort d’une façon suspecte qui laissait croire à une action punissable. J’ai immédiatement demandé une enquête préliminaire et, si nécessaire, des poursuites. A la suite de cette enquête préliminaire, le commandant de la Police de sécurité du Gouvernement Général me fit un rapport le 25 septembre 1944 (qui est maintenant produit par le Ministère Public sous le numéro D-970 GB-602). Ce rapport traitait également d’une conférence avec les secrétaires d’État, Dr Bühler et Koppe, et d’autres fonctionnaires supérieurs le 26 septembre 1944 au cours de laquelle j’ai ordonné au procureur Rother de faire une enquête approfondie sur cette affaire. Les enquêtes ultérieures ont prouvé que les hommes SA cités dans le rapport du 25 septembre 1944 (GB-602) n’appartenaient pas à une unité SA du Gouvernement Général. Comme le prouve le rapport du 25 septembre 1944, le couvent de Czerna se trouvait à l’intérieur du Gouvernement Général, mais toute la région, à la suite d’un décret du Führer de l’été 1944, en ce qui concernait la Police, la douane et l’administration militaire, dépendait de la province voisine de Haute-Silésie et ainsi, du Reich.
« L’ordre du Führer avait été promulgué en raison des travaux de fortifications entrepris à l’époque à l’Est. Cela explique, ainsi que le document GB-602 le prouve, pourquoi les enquêtes ont été faites par le service de Police d’État de Katowice, c’est-à-dire par un service de la Police d’État situé en territoire allemand.
« Ilkenau n’était pas situé dans le Gouvernement Général, mais dans le Reich (Haute-Silésie). On utilisait pour ces besognes, non seulement des SA, mais aussi des membres d’autres organisations, par exemple des hommes du Volkssturm. A la suite de l’enquête du procureur Rother, il y eut une procédure pénale engagée contre plusieurs SA de Katowice et on me rapporta ultérieurement que cette procédure s’était terminée par les condamnations sévères de plusieurs des accusés. Signé : Dr Hans Frank. »
Maintenant, Docteur Böhm, voulez-vous encore interroger le témoin ?
Je ne désire pas poser d’autres questions. Mais je voudrais, au nom de l’accusé Frank, attirer l’attention du Tribunal sur un document qui a été produit aujourd’hui : GB-615, document D-923. Le rapport de l’accusé Frank du 6 septembre 1939 montre sous le chiffre 3 que l’accusé a demandé avec une extrême rigueur la poursuite du chef SA inculpé et même qu’il l’a ordonnée...
Mais, Docteur Seidl, le Tribunal a vu ce document et il n’a pas besoin que l’on attire son attention sur ce fait ; il n’est surtout pas besoin que ce soit l’avocat de l’accusé Frank qui le fasse. Le Tribunal prendra le document en considération.
Au nom de l’accusé Rudolf Hess, je demande l’autorisation de présenter une requête : que le Ministère Public soit invité à me remettre la lettre de réponse de l’adjoint du Führer au document PS-784. C’est la lettre du ministre de la Justice du Reich, adressée à l’adjoint du Führer le 5 juin 1935. Le document qui m’a été remis ne montre pas ce qui s’est passé entre cette lettre et la décision ultérieure de Hitler. Il n’en ressort pas notamment la position prise à ce moment par Hess.
N’avez-vous pas eu ce document ? Vous mentionnez le document PS-784 et vous demandez que je prenne en considération un autre document. N’avez-vous pas reçu ce document ?
Je ne l’ai pas eu mais je voudrais demander au Tribunal que le Ministère Public soit invité à me faire parvenir la réponse à ce document que l’accusé Hess avait rédigée à l’époque.
Le Tribunal demandera au Ministère Public de déposer le document, s’il l’a.
Ce sera fait. Je ne puis dire actuellement si le document est en notre possession. S’il l’est, ce sera fait.
Très bien. Docteur Böhm, avez-vous d’autres questions ? Pensez-vous que vous aurez terminé pour 15 heures ?
C’est absolument impossible, Monsieur le Président.
Aurez-vous fini peu après ?
Non, je crois que ce nouvel interrogatoire, après l’interrogatoire contradictoire, durera trois heures. Un certain nombre de nouveaux documents ont été déposés...
Très bien, continuez. Nous espérons qu’ils seront importants.
Témoin, la première question que le Ministère Public vous a posée hier était la suivante...
Docteur Böhm, le Tribunal estime qu’il est impossible d’admettre que cet interrogatoire complémentaire dure trois heures. Vous ne devez pas perdre de vue qu’il vous est impossible de poser des questions qui dictent une réponse. C’est la première règle. Il en est une seconde : au cours de cet interrogatoire complémentaire, seules peuvent être posées les questions qui découlent du contre-interrogatoire, et il est impossible de faire état de moyens de preuves qui n’ont pas été soulevés au cours du contre-interrogatoire. Vous devez vous en tenir à ces prescriptions.
Je crois que le contre-interrogatoire du Ministère Public hier et aujourd’hui a cité des faits nouveaux, spécialement des faits qui ont été nouvellement présentés aujourd’hui et hier après-midi.
Je ne veux pas d’explications, Docteur Böhm. Je vous fais part des décisions du Tribunal. Si vos questions émanent du contre-interrogatoire, elles sont recevables ; si elles n’en émanent pas, elles ne sont pas recevables. Maintenant commencez.
Témoin, la première question que vous a posée hier le Ministère Public — et je crois que dans ce cas-là on vous visait personnellement en tant que chef SA — était de savoir si vous aviez quelque chose à voir avec le traitement des individus en dehors des frontières du Reich.
Non, l’administration SA ne s’occupait pas du traitement de ces individus, à moins que ce ne fût des Allemands appartenant aux SA employés en dehors des frontières d’u Reich.
Un rapport confidentiel du Chef suprême de l’administration des SA sous la forme d’un troisième rapport sur les activités des SA dans la guerre a été présenté hier. Au sujet de ce rapport, le Ministère Public affirmait qu’il se rapportait aux dernières semaines avant le 23 juin 1941, c’est-à-dire le jour de la rédaction de ce rapport. Je voudrais vous demander maintenant s’il est exact que le début de ce rapport, sous le chiffre 1, première page, « Tout le travail des SA depuis le début de la guerre », et page 2, les quatre lignes, je cite : « Décorations des SA... »
Est-ce que vous nous avez donné la référence de ce document ?
C’est le premier document produit hier, PS-4011, page 1, première ligne et page 2, les quatre dernières lignes. Puis-je continuer ?
Certainement. Je demandais simplement la référence de ce document. Continuez.
« Décorations attribuées aux SA : vingt et une croix de chevalier de la Croix de fer et 31.125 Croix de fer de première et deuxième classe ». Est-il exact de dire qu’il en découle que l’affirmation du Ministère Public, qu’il ne s’agirait dans ce rapport que de quelques semaines avant le 23 juin 1941, est fausse ? Est-il exact d’en déduire que, dans le troisième rapport sur l’activité des SA pendant la guerre, il s’agissait d’un rapport qui avait son point de départ avec l’activité des SA le 1er septembre 1939 ?
Ces rapports ont toujours été des rapports résumés. Le troisième rapport, je crois l’avoir signé moi-même, est un résumé de l’activité des SA depuis le début des hostilités jusqu’au moment de la rédaction du rapport.
Le Ministère Public affirmait hier que dans l’activité des SA sur les arrières, il s’agissait d’une activité dans les territoires occupés. Monsieur Jüttner, si vous voulez regarder à la page 4 de ce rapport et si vous voulez lire avec moi que, lors des crues de l’Elbe, au printemps 1941 les unités de pionniers des SA ont été les premières à venir en aide avec leur équipement et à sauver des vies humaines et des animaux, peut-on admettre ainsi que ce que vous appelez « Hinterland » était à l’intérieur des frontières du Reich ?
Oui, par « Hinterland » il faut entendre le territoire de la patrie.
Alors, voyez page 5 du même rapport.
Je l’avais hier.
Alors, je vais vous la lire. A la page 5 du même rapport, je cite :
« De nombreux chefs et sous-chefs SA ont été affectés au Front allemand du Travail pour servir dans l’organisation Todt. Les SA ont exécuté également de nombreuses tâches pour les autorités, par exemple dans la surveillance des frontières. »
Est-ce que cela ne montre pas clairement que les SA ne dépendaient plus du Commandement suprême des SA, mais, ainsi que chaque autre Allemand, dépendaient d’autres autorités ou d’autres administrations ?
Lors de l’accomplissement de toutes ces prestations de service, nous avons libéré les hommes des SA. Nous ne les avons pas offerts, mais libérés. Les services compétents — organisation Todt et autres administrations — choisissaient ces hommes. Ils désiraient les engager et ils demandaient aux SA s’ils pouvaient disposer d’eux.
C’est ce qu’il a déjà dit au cours du contre-interrogatoire. Il a déjà dit que ces hommes, pour autant qu’ils étaient employés en dehors du Reich, n’opéraient pas en tant que SA dans des unités SA.
C’était vrai également à l’intérieur du Reich.
Ce que je vous ai demandé, Monsieur Jüttner, est supposé amener la question suivante. Je voudrais vous demander si les mêmes conditions n’étaient pas applicables quand vous avez fait votre rapport au sujet des vingt et un groupes des SA qui devaient garder les prisonniers ?
Mais le témoin l’a déjà dit, Docteur Böhm. Il a dit que toutes les activités dont traite votre rapport n’ont pas été exercées sous le commandement de SA, ou d’unités SA, bien que ces prestations eussent été fournies par des SA.
Très bien.
Le Tribunal va lever l’audience.