Séance du Séminaire Ville et Sciences sociales

Dans son très beau roman, “les saisons de la nuit” (1998), Colum Mac Cann, embrasse la construction de New York, rendant hommage aux générations cosmopolites de ses bâtisseurs de gratte-ciels, mais aussi et surtout de ses terrassiers, creusant dans les profondeurs les entrailles du métro. Sous la plume de l’écrivain, la ville, en se réalisant, conquiert les profondeurs telluriques autant qu’elle aspire au zénith. Cette vision poétique dévoile alors un sol urbain qui est à la fois matière et artéfact, sédimentation et stratification concrète de l’histoire urbaine.

Ce dévoilement du “sol” urbain  interroge le regard ordinaire qu’on lui porte. N’est-il qu’un dessous de la ville édifiée? Une strate obscure, coulisse technique, où dans l’invisibilité circulent les grands flux qui alimentent l’espace urbain et où s’évacuent les excretas? N’est-ce qu’un foncier? une surface? La subtile variation sémantique de l’usage du mot  entre les vocables “droit des sols” et” artificialisation des sols” traduit bien cette ambiguïté du sens. Elle révèle le  caractère multidimensionnel et paradoxal de cet objet sous le regard des urbanistes. Cette séance de séminaire vise à explorer cette polysémie en confrontant trois regards de chercheur.e.s et professionnel.le.s .

Nous entendrons Patrick Henry, Professeur d’urbanisme à l’ENSA Paris-Belleville  qui a  récemment publié un ouvrage intitulé Des “tracés aux traces, pour un urbanisme des sols urbains“. Il fait de la polysémie de la notion de sol le fil directeur d’une relecture de l’histoire de l’urbanisme contemporain, dans son rapport au foncier,  à la mémoire et au patrimoine, mais aussi interroge sa dimension technique et sa place dans le projet urbain à l’aune de l’objectif  ZAN (Zéro Artificialisation Net). Nous écouterons ensuite Jean-Christophe Le Coustumer, Professeur de Droit de l’environnement et de Droit de l’urbanisme, qui nous parlera de la multi dimensionnalité du sol urbain au prisme des sciences juridiques. Enfin, Sophie Raous, coordinatrice de l’Association Française d’Etude des Sols et membre de la Mission Régionale d’Autorité Environnementale de Normandie, nous invitera à rendre au sol vivant toute son épaisseur, y compris dans la conception et la réalisation du projet urbain.

Responsable(s) scientifique(s) : Alice Rouyer