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Rouen
Port et quai de la ville de Rouen
En 1775, Louis Alexandre de Cessart devient ingénieur en chef de la généralité de Rouen, exerçant la fonction d’Inspecteur général des Ponts et Chaussées. Trois années avant son arrivée sur ce poste, un projet relatif à l’élargissement du quai de Rouen avait été demandé à son prédécesseur, suite à une consultation de la Chambre du commerce des Ponts et Chaussées sur les moyens d’élargir ce port.
M. Trudaine de Montigny charge Louis Alexandre de Cessart de reprendre ces investigations. Son projet, déposé au Conseil des Ponts et Chaussées le 12 mars 1776, est approuvé le 10 juin 1777. La planche XVIII illustre à la fois l’ancien mur de quai de la ville de Rouen, le projet de l’élargissement du quai, avec le positionnement des 7 caissons, les ouvrages exécutés en 1778 et 1779, ainsi que l’élévation du nouveau mur de quai. L’objectif est de faciliter le débarquement des navires et d’améliorer la communication avec les routes du Havre et de Dieppe.
« Le 4 juillet 1782, le comte du Nord, depuis Paul 1er, Empereur de Russie et la Comtesse, arrivèrent à Rouen. M. de Beuvron, Commandant, n’oubliant aucun des objets intéressans qui pouvoient satisfaire la curiosité de ces illustres voyageurs dans cette ville, eut l’attention de me présenter à leur audience, où ils me demandaient à voir les travaux du port de Rouen. Le 5, à huit heures du matin, le Prince et la Princesse se rendirent sur les travaux. Le Commandant et l’Intendant de la ci-devant Normandie les accompagnèrent, avec un grand nombre d’officiers et spectateurs. Ils virent opérer la machine à scier jusqu’à 8 pieds seulement dans l’eau ; elle coupa, en six minutes, un pilot de 16 pouces de grosseur : mais je l’avois fait receper exprès de 6 lignes plus haut que le niveau des autres pilots, en ayant prévu d’avance le Comte du Nord, pour lui faire connoître toute la perfection de cette machine, que je fis remonter ensuite au-dessus de l’eau. (tome premier, p. 240) »
Louis Alexandre de Cessart propose notamment dans son projet de former un barrage sur une première ouverture « afin d’obtenir du calme dans la partie suivante » où il faut intervenir, de construire un avant mur de quai (raccordé à une ancienne pile) doté de fondations en bon état, ainsi que de fonder sur pilotis un nouveau mur de quai. Le projet est jugé favorable pour l’amélioration du commerce de la ville de Rouen et du passage des deux grandes routes (longeant le port) de Paris au Havre et à Dieppe. Il est illustré dans la planche XVIII.
La planche XIX présente le nouveau quai du port de Rouen. « Le battage des pilots se fit au moyen d’un grand bateau, bien apponté à cet effet, pour recevoir une sonnette à déclic6 … Comme j’avois environ mille pieux à receper dans l’eau, je fis faire une nouvelle machine à scier, sur les mêmes principes de celle que j’avois faite à Saumur, mais avec des changements qui pouvoient tendre à sa perfection ; du reste, les procédés de l’opération furent absolument les mêmes. (tome premier, p. 232) »
Quant à la planche XX, elle présente la différence de niveau qu’il a fallu rectifier pour raccorder les caissons entre eux :
« Les décombres de l’ancien pont, qui se trouvaient dans le pertuis que j’avais comblé ; m’avoient empêché de receper les pilots au-delà de deux pieds, pour les deux premiers caissons, mais le troisième et les autres derniers furent fondés à 5 pieds seulement, et toujours par suite de l’économie qui me fut prescrite ; cependant la section de ces derniers pieux se trouvant de 3 pieds plus bas, il fallut procéder également au raccordement de cette différence de niveau pour celui de la maçonnerie dans les fondations. J’avois disposé à cet effet la construction d’un arceau de 7 pieds d’ouverture, exécuté en pierre de taille, traversant d’une tête à l’autre toute l’épaisseur du mur du quai, dont les deux parties isolées formoient les culées… On pratiquoit également dans le dernier caisson une culée pour recevoir la voûte de l’arceau, ainsi qu’on le voit dans la planche XX. (tome premier, p. 238) »
« Le grand escalier de débarquement a été également et solidement construit sur 16 pieds d’épaisseur, avec une plate-forme de 12 toises de longueur, pour supporter le massif des marches, le tout étabi sur des pilots recepés à des hauteurs différentes, suivant l’élévation successive et nécessaire pour se raccorder au pavé, dont la superficie générale du quai devoit être recouverte après le tassement et l’affermissement du remblai total. (tome premier, p. 239) ».
6. Une sonnette est une machine composée d'un bloc de bois ou de métal, nommé mouton, qui peut glisser entre deux coulisses verticales ; on le soulève et on le laisse retomber de son propre poids. La sonnette est employée principalement pour enfoncer les pilotis. Avec la sonnette à déclic, le mouton est soulevé au moyen d'un treuil, et un mécanisme automoteur en détermine la chute au moment opportun Cf. Le Littré, 1880.