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AUDIGÉ Pierre, Jean, Jacques
Né le 15 août 1908 à Toulouse (Haute-Garonne) ; domicilié à Caen (Calvados) ; exécuté sommairement le 6 juin 1944 à Caen.
AUDIGÉ Pierre, Jean, Jacques // Naissance : 15-8-1908 à Toulouse (Haute-Garonne) ; Domicile : Nantes Loire-Inférieure () ; Repression : Exécuté le 6-6-1944 à Caen (Calvados) ; Décédé
Fils cadet d’un préparateur à la Faculté des Sciences de Toulouse, Pierre Audigé, âgé seulement d’un an, perd sa mère, décédée subitement à Toulouse, le 29 août 1909. Elève brillant, il passe son bac avec succès au lycée Malherbe à Caen. En 1930, à l’issue de trois années d’études, il sort diplômé de l’Ecole dentaire de Paris. Le 19 octobre 1933, il se marie avec Simone Martin, qu’il connaît depuis ses années de lycée à Caen. Après son service militaire effectué à Rouen, l’année suivante, il part s’installer, avec sa femme et leur petite fille, au Havre. Trois ans plus tard, Pierre Audigé rachète un cabinet dentaire, en grande difficulté, 9, Rue Boileau, en plein centre-ville de Nantes.
Août 1939, Pierre Audigé est mobilisé. Sans rien maîtriser de son affectation, il est envoyé au Liban, rejoindre l’Armée d’Orient, et son épouse Simone reste sans nouvelle durant de longs mois. Ce n’est qu’en janvier 1941 qu’il peut enfin, de retour de Syrie, retrouver sa famille. Une discussion avec Jean Cavaillès, alors membre du comité directeur du mouvement Libération-Nord, le convainc de se lancer dans la Résistance organisée. Au printemps 1942, il devient le bras droit de Marcel Doutreligne, agent d’assurances, chef du réseau de renseignement Cohors pour la région Basse-Loire. Le domicile familial voit passer de nombreux agents qui effectuent la liaison entre Paris et la région nantaise. L’année suivante, le dentiste renoue avec son ami d’enfance, Alexis Lelièvre, et créé une antenne locale de Cohors-Asturies, en recrutant dans divers milieux de Caen et des environs. Commence alors pour le couple Audigé et leurs deux enfants (un garçon est né en 1942), une fuite angoissante de neuf mois qui les mène, de cache en cache, dans le Calvados, à Audrieu, Meslay, Mutrécy, puis au domicile des époux Lelièvre, rue Saint-Manvieu à Caen. Le résistant poursuit son activité clandestine, malgré la traque incessante dont il fait l’objet, jusqu’au 17 avril, jour de son arrestation dans un café-épicerie de la rue Saint-Martin à Caen. Après chaque interrogatoire, au siège de la Gestapo, rue des Jacobins, où il est torturé, le chef de Cohors-Asturies retrouve la cellule n° 25 au 3e étage du quartier allemand de la maison d’arrêt, sans avoir parlé. Le 6 juin 1944, Pierre Audigé meurt sous les balles allemandes, exécuté dans une des courettes-promenoirs du quartier allemand de la maison d’arrêt, comme 72 autres prisonniers.
Depuis 1944, plusieurs lieux de mémoire liés au massacre de la prison ont été créés dans la ville de Caen. Une plaque commémorative a été apposée le 6 juin 1945, à droite du portail d’entrée de la maison d’arrêt, par le syndicat des agents des services pénitentiaires des prisons de Caen, le 6 juin 1945. Des plaques de rue dédiées à plusieurs victimes, membres de la Résistance, ont été dévoilées dans les quartiers Saint-Paul, Saint-Gabriel, Maladrerie au cours des décennies 1950 et 1960. Un rond-point devant l’entrée de la maison d’arrêt a été inauguré le 12 janvier 1951 avec l’inscription « Rond-point des 87 fusillés ». Ce chiffre, pourtant erroné, a été repris sur le monument dédié aux « Résistants abattus à la prison de Caen le 6 juin 1944 » dans les jardins du Mémorial de Caen. Son inauguration date du 6 juin 1989.
Ces supports de mémoire basés sur des sources fragmentaires et fragiles témoignent, durant toutes ces années, de la méconnaissance des faits. Le nombre des victimes est aujourd’hui établi à 73. Par ailleurs, le terme de fusillés, s’il peut être utilisé par commodité de langage, ne correspond pas à la réalité. Les victimes de la barbarie nazie, 71 hommes et 2 femmes, n’ont pas été fusillées au terme d’un jugement prononcé par un tribunal militaire allemand, mais exécutées sur décision du chef de la SIPO-SD de Caen (Gestapo), avec l’aval de ses supérieurs du siège régional de la Gestapo à Rouen.
En 2025, les corps des suppliciés du 6 juin 1944 n’ont toujours pas été retrouvés. Cependant la connaissance des faits progresse grâce à de nouveaux éléments documentaires, aux sondages et aux fouilles archéologiques des services du département du Calvados, de la DRAC Normandie et des services de l’Etat. L’espoir demeure parmi les descendants des victimes de les retrouver un jour.
Sources : SHD-Caen : 21P699937 : EC (Toulouse) : 1 E/638, 1908, Naissances ; Archives de Paris : 20M 393/A, 1933, Mariages, acte n° 1889 ; AD14 : Luc-sur-Mer, Recensements, 1926-1946 ; AP Audigé ; S.Audigé, La baleine allaite ses petits, 1990 ; Vico Jacques et Quellien Jean, Massacres nazis en Normandie, 1994 et 2004
Gérard Fournier
Mots-clés :
- 15-8-1908
- Toulouse, Haute-Garonne
- Nantes, Loire-Inférieure
- 17-4-1944
- Calvados
- Maison d'arrêt, Calvados
- 6-6-1944
- Caen, Calvados




