De Stokholm, le 20 Octobre 1683.
Le 14 de ce mois, le
Roy
donna la premiére audiance aux Ambassadeurs de Moscovie, dans la grande Sale du Palais, avec les mesmes honneurs que les Czars font rendre en pareille occasion, aux Ambassadeurs de
Sa Majesté
. Ces Ambassadeurs partirent sur le midi de leur Hôtel : les présens qu’ils devoient faire au
Roy
et à la
Reyne
au nom de leurs Maistres, étant portez devant eux par quarante vn Soldats du Régiment des Gardes qui étoit sous les armes avec les Compagnies des Bourgeois. Ils consistoient en vingt six Timmers ou Quarantaines de Martes-Zibelines, en deux couvertures de peau de lapin et deux de soye brodées, en diverses piéces de damas et de satin de dix ou douze aunes chacune, et en d’autres étoffes de soye de toutes sortes de couleurs. Quarante quatre personnes du train des Ambassadeurs, marchoient à cheval, deux à deux apres ceux qui portoient les présens : et derriére eux estoient vingt et vn carrosses des Sénateurs, dans lesquels étoient les principaux de la suite des Ambassadeurs. Ils estoient dans vn carosse du
Roy
, à six chevaux, précédé d’vn autre de
Sa Majesté
, avec vn pareil attelage. Ils avoient aupres deux les Gouverneurs Wrede et Falkemberg, avec les deux Interprétes : et le Secrétaire de l’Ambassade alloit à cheval immédiatement devant le carosse, tenant dans ses mains vne lettre des
Czars
au
Roy
. Le Lieutenant Général Bielke et le Gouverneur Charles Guldenstiern les reçeurent à la porte de la grande sale : et les condüisirent jusqu’au Thrône où estoit Sa
Majesté
. Le
premier de ces Ambassadeurs fit la harangue : et le Comte Bengt Oxenstiern y répondit de la part du
Roy
. Apres cette fonction, Sa
Majesté
demanda aux Ambassadeurs comment se portoient les
Czars
: puis les présens furent donnez. Il y avoit quinze Timmers de Martes-Zibelines pour le Roy : et cinq Timmers, avec vne grande partie des autres choses, pour la
Reyne
. Quand les présens eurent esté reçeus, les Ambassadeurs baiserent la main du
Roy
, avec vingt-deux des principaux de leur suite : et ils retournérent en leur Hôtel au même ordre qu’ils en étoient venus. Ils y furent magnifiquement traitez : et le festin dura toute la nuit, avec la musique et au brüit des Trompettes et des Tymbales de Sa
Majesté
. Ils ont esté aujourd’huy, au Palais en cérémonie, remercier le
Roy
du bon traitement qui leur a esté fait : et ils se sont ensuite rendus à la Sale de la conférence, pour commencer leurs négociations avec les Sénateurs Bengt et Gustave Oxenstiern, Ernest Jean Creutz, et le sieur Klingstedt Conseiller de la Chancellerie.