De Londres, le 14 Octobre 1683.
Le 6 de ce mois,
Mylord Maire
et la Cour des Aldermans eurent audiance du
Roy
, sur l’affaire qui regarde les libertez et les priviléges de la Ville. Sa
Majesté
leur fit entendre qu’Elle vouloit que le Commun Conseil se déterminast promptement : et qu’il déclarast si la Ville estoit résolüe de luy remettre les Chartes de ses priviléges, ou si elle vouloit attendre l’exécution de la Sentence rendüe à la
Cour du Banc Royal
, le 1r Iuillet. Le
Roy
leur donna terme jusqu’au 13 de ce mois, pour délibérer sur cette affaire. Le 7, le Commun Conseil s’assembla, et la matiére fut mise en délibération. On y résolut que quatre Aldermans et huit Membres du Commun Conseil seroient chargez de l’examiner, et de prendre l’avis de six personnes habiles qui furent nommées. On leur ordonna d’examiner particuliérement, si cette nouvelle soûmission pouvoir s’accorder avec celle que fit le Commun Conseil apres que la Sentence eust esté prononcée : et si elle estoit nécessaire pour l’exécution des nouveaux réglements que le
Roy
avoit proposé d’établir pour le gouvernement de la Ville. Si par cette mesme soûmission
la Ville remettoit aussi entre les mains de Sa
Majesté
l’office de Maire, avec les droits et les prérogatives qui y sont attachez. Si l’exécution de la Sentence auroit des conséquences plus fâcheuses que cette soûmission volontaire. Enfin, si la Ville seroit confirmée dans ses mesmes droits et libertez, par les nouvelles Chartes que le
Roy
faisoit espérer. Le 12, les Commissaires firent leur rapport au Commun Conseil, et la pluspart déclarérent que la Ville, en se soûmettant aux ordres de
Sa Majesté
, et en acceptant les conditions qu’Elle avoit proposées, ne souffriroit pas vn si notable préjudice qu’en persistant à vouloir maintenir ses priviléges : ce qui engageroit le
Roy
a faire enregistrer la Sentence et à la faire exécuter. Le jour mesme, l’affaire fut mise en délibération dans le Commun Conseil : et on y conclut à la pluralité des voix, qu’il falloit plûtost attendre l’exécut on de la Sentence que de remettre les Chartes entre les mains du
Roy
. Les deux
Shérifs
furent chargez d’aller rendre compte à
Sa Majesté
de cette résolution : et de luy exposer les raisons que le Commun Conseil croyoit avoir pour justifier sa condüite. Le
Roy
ne voulut pas les écouter : et il signa en leur présence, l’ordre adressé à son Procureur Général pour faire enregistrer la Sentence : ce qui fut exécuté hier. Aujourd’huy, le Chevalier
Pritchard
Maire de cette Ville, et les deux
Shérifs
ont esté mandez au Conseil. Le Garde des Seaux leur a dit que leur condüite avoit obligé le
Roy
à faire enregistrer la Sentence, qui déclare la Ville décheüe de ses priviléges et libertez. Mais que
Sa Majesté
voulant avoir soin du Gouvernement et de la Police de la Ville, avoit résolu d’empescher qu’il n’y arrivast aucun desordre, en établissant des Magistrats capables de la gouverner à l’avantage du public. Que le
Roy
nommoit par cette raison, le Chevalier
Pritchard
pour exercer l’office de Maire de cette ville, en vertu d’vne Commission spéciale expédiée sous le Grand Seau d’Angleterre : et que les sieurs Daniel et Dashwood exerceroient aussi par Commission, les offices de
Shérifs
autant qu’il plairoit à
Sa Majesté
. Ces Commissions ont esté délivrées : et ils ont presté serment pour ces charges en présence du
Roy
, et devant les Officiers de l’Echiquier. Sa
Majesté
leur a dit aussi qu’Elle choisira des Aldermans, des
Iuges de Paix
et d’autres officiers : et ensüite ils se sont retirez. Le
Roy
a nommé le Comte de Scarsdale pour Premier Gentilhomme de la Chambre du
Prince Georges de Danemark
: et Mylord Cornbury pour son Premier Escüyer. Le Chevalier
Ieffreys
a esté nommé Chef de Iustice de la
Cour du Banc du Roy
: et le
Chevalier Iones
a esté fait Chef de Iustice de la Cour des Plaidoyers communs. On a appris ici, la mort de
Dom Alfonse VI
, Roy de Portugal frére de la
Reyne
: et nostre Cour se dispose à en prendre le grand deüil.