RELATION
DE CE QVI S’EST PASSÉ
à l’attaque de la ville d’Alger, par l’Armée navale du Roy, sous le commandement du Marquis du Quesne Lieutenant Général des Armées navales de Sa Majesté.
Le
Marquis du Quesne
Lieutenant Général des armées Navales du Roy, partit de Toulon le 6 de May, avec six vaisseaux de guerre : et il donna ordre aux autres vaisseaux, aux galéres, aux galiotes à bateries de mortiers, aux chaloupes armées, et aux autres bâtiments, de se rendre aux Isles Fromentiéres pres d’Yviça. La tempeste l’obligea de relâcher peu de jours apres : et d’employer quelque temps à réparer le dommage qu’elle avoit fait à la flote. Le 18 du mesme mois, il remit à la voile : et il arriva le 4 de Iuin aux Isles, Fromentiéres apres avoir rangé les costes de Catalogne. Le Chevalier de Lhéry Chef d’Escadre, rencontra vn vaisseau Corsaire d’Alger de 18 piéces de canon, monté de cent cinquante hommes d’équipage. Il le combattit, s’en rendit maistre et mit en liberté trente esclaves Chrestiens qui estoient sur ce vaisseau.
Le 9 du mesme mois de Iuin, le reste des vaisseaux, les galiotes et les chaloupes arrivérent aux Isles Fromentiéres. Le
Marquis du Quesne
pour employer vtilement le temps qu’il demeura à cette rade à attendre les galéres qui estoient arrestées au port de Cette, fit préparer tout ce qui estoit nécessaire pour commencer d’agir aussitost que l’armée seroit arrivée devant Alger.
Le 15, quoy que les galéres ne fussent pas encore arrivées, le
Marquis du Quesne
ne laissa pas de faire appareiller : jugeant qu’vn plus long retardement pourroit faire perdre la saison des calmes, hors de laquelle il est impossible de rien entreprendre contre cette place, sans exposer les vaisseaux au risque de donner à la coste qui est tres dangereuse, particuliérement lors que le vent souffle du costé du Nord.
Le 18, il arriva heureusement à la rade d’Alger. Il y trouva le Marquis d’Amfreville, qui avoit depuis peu repris vn bâtiment Anglois sur vn Corsaire qui se disoit de Tétoüan, mais qui avoit vne commission d’Alger. On prit vingt cinq Algériens sur son bord. Les Sieurs de Septemme, de Villette, du Méné et de Saint Mars-Colbert estoient aussi arrivez à la rade d’Alger avec les vaisseaux qu’ils commandent.
Le
Marquis du Quesne
n’ayant encore aucune nouvelle des galéres, jugea à propos de disposer toutes choses pour l’attaque, et de mettre les galiotes à mortiers en estat de jetter des bombes contre la ville. Il fit d’abord moüiller les vaisseaux plus pres du port : mais hors de la portée du canon. Il commanda ensüite neuf vaisseaux pour se poster à égale distance sur vne ligne courbe, à peu pres semblable à la figure du Mole, et pour moüiller aussi hors de la portée du canon. Ces vaisseaux estoient le Fleuron, le Ferme, la Siréne, le Prudent, l’Aimable, le Vigilant, le Laurier, le Cheval Marin et l’Etoile, commandez par le Comte d’Estrées, le Chevalier de Tourville, le Comte de Sebville, le Chevalier de Lhéry, le sieur de Septemme, le Marquis d’Amfreville et le Marquis du Quesne le fils, le sieur de Belle-Isle, et le Commandeur des Goutes. Les sept premiers de ces vaisseaux eurent ordre de porter chacun vne anchre à toüer, avec des toües ou moyens cables pour servir à haller ou condüire les galiotes au poste qu’elles devoient prendre pour tirer contre la ville. Ils devoient aussi porter ces anchres à six cens toises pres du Mole, vis-à-vis du mesme poste : les bouts des toües ou cordages estant frapez ou attachez sur les vaisseaux. Le Cheval Marin et l’Etoile curent ordre de se poster sur les deux aisles, et de porter leurs anchres à toüer plus pres de la ville que les sept autres, afin qu’estant avancez dessus, ils pûssent estre sur les deux aîles des galiotes, les flanquer et les soûtenir, en cas que les ennemis sortissent dessus, lors qu’elles seroient en place pour jetter des bombes.
Le
Marquis du Quesne
disposa ainsi ses vaisseaux, parce qu’il estoit averty que les Algériens avoient préparé deux galéres armées, et d’autres bâtiments legers pour attaquer les galiotes. Il ordonna que les anchres fussent portées plus pres les vnes des autres que n’estoientles vaisseaux, afin que les galiotes ne fissent pas vn si grand front et qu’elles pussent estre plus aisément soûtenües par les vaisse aux postez aux deux aîles, et afin que les vaisseaux pûssente éviter sans danger les changements des vents et des marées.
Les galiotes estoient la Fulminante, la Foudroyante, la Brulame, la Bombarde, la Crüelle, la Menaçante et l’Ardente commandées par les sieurs de Chevigny, de Piaudiére, la Mothe d’Eran, de Combes, de Poincti, Goëston et du Quesne-Monier.
Le
Marquis du Quesne
fit embarquer sur chaque galiote, outre l’équipage ordinaire, dix gardes de Marine, dix Grenadiers et dix soldats choisis : et il ordonna deux chaloupes armées pour servir d’escorte à chaque galiote, et deux corps de garde de chaloupes pour les soûtenir.
Le 21, les choses estant ainsi ordonnées, les neuf vaisseaux prirent les postes qui leur avoient esté marquez.
Le 22, fut employé à préparer les toües des galiotes et celles des deux vaisseaux des aîles.
Le 23, les Commandants des vaisseaux portérent les anchres à toüer. Le Chevalier de Tourville porta l’anchre du vaisseau qui devoit estre posté vers le Nord : le Marquis d’Amfreville porta celle qui devoit estre postée du costé du Sud : et ces deux anchres furent portées le plus prez de la ville. Le Chevalier de Lhéry porta l’anchre du milieu : et celles des intervalles furent portées chacune par le Commandant du vaisseau qui soûtenoit les haussiéres ou toües. Cette manœuvre se fit à dix heures du matin, sans que les Algériens fissent aucun feu de leurs batteries : croyant comme on l’a appris par les esclaves, que ces mouvements ne se faisoient que pour observer le Mole, et pour sçavoir la portée de leur canon, parce que l’ordre fut exécuté avec tant de justesse qu’ils ne virent ni les anchres ni les cordages. Le Duc de Mortemar estoit dans le canot du Marquis de Tourville avec le Marquis de la Porte : et plusieurs officiers et volontaires de qualité estoient dans d’autres canots. Le reste du jour fut employé à préparer les bombes et les mortiers : et le soir, le sieur Raimondi Major eut ordre de mener des chaloupes armées en garde, afin d’empescher les ennemis de draguer ou lever les anchres pendant la nüit. Mais ils ne sortirent point de leur port.
Le 24, la mer fut fort grosse : et on ne put rien entreprendre. Les chaloupes firent la garde comme la nüit précédente : et la marée les ayant portées assez pres de la ville, les ennemis firent vn grand feu de leur mousqueterie, dont néantmoins les nostres ne reçeurent aucun dommage.
Le 25, le mauvais temps continüa : et il dura mesme le lendemain 26, pendant tout le jour. Mais vers le soir, le vent s’abattit entiérement : et le
Marquis du Quesne
vint aussitost faire marcher les galiotes selon l’ordre qu’il avoit prescrit, les vaisseaux des aîles estant à leur poste. Le Major fit poster süivant ses ordres, vne partie des chaloupes armées vers le vaisseau du Nord, et le reste vers le vaisseau du Sud. Chaque galiote estoit accompagnée de deux chaloupes : et deux autres furent postées pres de l’entrée du port, avec quelques canots legers de rame, pour brûler des amorces, en cas que les ennemis fissent quelque sortie, afin qu’à ce signal toutes les chaloupes des aîles marchassent vers les galiotes pour les soûtenir. Les galiotes ne commencérent à tirer qu’à vne heure apres minüit, parce que la mer estoit assez grosse : ce qui avoit fait retarder leur marche pendant vn temps considérable, et donna de la peine à les poster. Elles tirérent durant deux heures quatre vingt dix bombes à douze et quinze livres de poudre, qui tombérent presque toutes sur le Mole dans le port, ou dans la ville. Les Chevaliers de Tourville et de Lhéry, avec les principaux officiers, donnoient cependant, les ordres dans leurs canots, avec vne bravoure et vne vigilance singuliére. Les ennemis aussitost qu’ils virent les mortiers en baterie, firent vn feu prodigieux de leur artillerie : et ils tirérent plus de six cens coups de canon. Ils avoient allumé de grands feux sur le Mole pour découvrir les galiotes et les chaloupes : et lors qu’ils voyoient mettre le feu aux mortiers, ils faisoient des décharges de tout leur canon. On n’en reçeut néantmoins aucun dommage. L’effet des bombes fut prodigieux, ainsi qu’on l’a appris depuis par des esclaves. Celles qui tombérent dans le Mole y firent vn grand desordre. Quelques barques armées qui estoient dans le port furent enfoncées en vn moment. Il en tomba dans les bateries, qui mirent plusieurs piéces de canon hors d’estat de servir. Celles qui tombérent dans la ville, y tüérent vn grand nombre de personnes : plusieurs maisons furent renversées : et vn grand nombre de peuple fut ensévely sous les rüines. Apres que les galiotes eurent tiré pendant deux heures, avec tant de succez, le
Marquis du Quesne
fit donner le signal de la retraite par deux coups de canon, à cause qu’il survint vn vent de terre qui auroit incommodé les galiotes.
Le 27, la mer estant calme vers le soir, le
Marquis du Quesne
fit avancer les galiotes dans le mesme ordre que le soir précédent. Elles tirérent environ six vingt bombes encore avec vn grand succez. Les ennemis faisoient cependant, vn feu continüel de tout leur canon : et le sieur de Choiseul d’Ambouville Enseigne sur le Prudent, fut tüé d’vn mesme coup, avec deux soldats, dans vn canot. Quelques coups portérent dans les galiotes : et l’Ardente commandée par le Sieur du Quesne-Monier, qui estoit la plus pres du Mole, en reçeut plusieurs. Mais comme elles sont bâties avec vn artifice singulier, elles n’en furent point endommagées : et les Algériens furent fort surpris de voir à la clarté de leurs feux, tous les bâtiments de l’armée se retirer en bon ordre. A vne heure apres minüit, il s’éleva vn vent de terre si furieux et la mer devint si grosse, que les galiotes furent obligées de retourner en diligence aupres de leurs vaisseaux, parce que la tempeste fit chasser toutes les anchres à toüer. Le Chevalier de Tourville qui avoit dans son canot le Duc de Mortemar, le Chevalier de Gesvres, et plusieurs autres officiers et personnes de qualité, fut présent à tout, ainsi que le Marquis d’Amfreville, quoy que malade de la fiévre, le Chevalier de Gesvres et les principaux Officiers, chacun dans son canot.
L’effet des bombes qui furent tirées cette nüit fut encore plus grand qu’il n’avoit esté la nüit précédente. Il en tomba vne sur le haut de la tour du Fanal, qui roulant en bas, mit les batteries en desordre, et tüa plusieurs officiers d’artillerie. La pluspart des autres tombérent dans la ville ou sur le Mole : et elles y firent beaucoup de dommage.
Aussitost que les galiotes se furent retirées,
le peuple s’émeut
: et vn grand nombre de femmes désolées allérent trouver le Bacha, le Day et les principaux officiers. Les vnes portoient leurs enfans estropiez : et les autres portoient les bras et les testes de leurs maris ou de leurs parents qui avoient esté tüez par les bombes. La
Milice emeüe contre Baba Hassan, luy reprocha avec menaces, qu’il estoit cause du malheur de la ville, puis qu’il l’avoit excitée à rompre témérairement la paix avec la France
. Les principaux de cette Milice dirent que si on les vouloit mener à la guerre contre les ennemis, ils estoient prests de hazarder leurs vies, mais qu’ils ne vouloient pas estre tüez dans leurs maisons, où ils n’estoient plus en seureté : et ils criérent qu’il falloit demander la paix au Général de la Flote de l’Empereur de France.
Ils allérent aussi à la maison du Bacha : et ils luy demandérent qu’il employast son autorité pour faire punir Baba Hassan, et pour conclure la paix avec la France. Le Bacha qui n’a pas vn pouvoir absolu dans la ville, se voyant appüyé des principaux de la Milice, fit assembler le Divan le lendemain 28, de grand matin. Il y parla à Baba Hassan avec vne fierté extraordinaire : et il luy demanda avec indignation, si les batteries dont il promettoit de si grands effets, avoient empesché les approches des François, et la désolation de la ville. Il dit ensüite, qu’il falloit demander la Paix au Général de la flote de l’Empereur de France : que c’estoit le seul moyen de préserver la ville d’vne entiére rüine : et que si par opiniâtreté il persistoit à empescher la paix, il estoit résolu de se retirer à Tunis et d’écrire au Grand Seigneur, que Baba Hassan estoit cause de la destruction d’Alger, et qu’il l’avoit mis hors d’estat de payer à Sa Hautesse le tribut accoûtumé. Les principaux du Divan et de la Milice firent les mesmes plaintes contre Baba Hassan : et tout le Divan résolut, pour prévenir les süites d’vn commencement si funeste, d’envoyer promptement demander la paix au
Marquis du Quesne
.
Ils envoyérent sur vne chaloupe avec le Pavillon blanc vn Député, amy particulier de Baba Hassan, et vn Interpréte : et ils obligérent le sieur le Vâcher Missionaire, qui exerce depuis quelques années, le Consulat de France à Alger, de les accompagner. Ce Député, le sieur le Vâcher et l’Interpréte arrivérent sur les neuf heures du matin, à bord de l’Amiral. Le
Marquis du Quesne
leur fit dire qu’ils n’abordassent pas : et que s’ils avoient quelque chose à dire, qu’ils allassent à la poupe de son vaisseau, et qu’on leur parleroit de la galerie. Ils y allérent, et le sieur le Vâcher dit que c’estoit vn Envoyé de Baba Hassan, du Divan et de la Milice d’Alger qui demandoit à parler au Général. Le
Marquis du Quesne
fit monter le Député et son Interpréte : et il leur demanda ce qu’ils vouloient. Le Député répondit qu’il venoit de la part de Baba Hassan, du Divan et de la Milice d’Alger pour luy demander la paix, et pour sçavoir à quelles conditions il la vouloit accorder. Le
Marquis du Quesne
qui sçait par vne longue expérience, combien les réponses fâcheuses sont peu fidélement rapportées aux Divans par leurs Députez et par leurs Interprétes, ne voulut répondre que par écrit : et il donna au Député vn écrit signé sa main, en ces termes.
“Le Général de l’armée Navale de l’Empereur de France, qui est présentement à la Rade d’Alger, dit pour réponse aux Envoyez de la part des trois Püissances et Gouverneurs du Royaume d’Alger, qu’il n’entendra à aucunes propositions de paix, que premiérement lesdites Püissances n’aient mis en liberté et renvoyé francs et quittes à bord des vaisseaux de l’armée, généralement tous les François, et autres sujets de Sa Majesté, et mesmes tous autres de quelque nation qu’ils soient, qui ont esté pris sur les vaisseaux de France, sans en excepter pas vn. Fait à bord du Vaisseau de l’Empereur de France, ce 28 Iuin 1683. Signé,
Du Quesne
.”
Le
Marquis du Quesne
déclara à l’Interpréte qu’il ne vouloit point recevoir d’autre réponse sinon vne prompte exécution de ce qu’il demandoit, sans laquelle il n’y avoit point de paix à espérer.
Le Député fut fort surpris : et il demanda avec étonnement, si on pourroit encore leur faire la guerre apres qu’ils auroient relâché les esclaves. Mais il fut obligé de retourner sans pouvoir obtenir d’autre réponse.
Deux heures apres, il revint encore avec le Pavillon blanc : et il apporta vne lettre du sieur le Vâcher. Mais le
Marquis du Quesne
ne voulut pas la recevoir : et il dit au Député qu’il pouvoit s’en retourner, puis qu’il s’agissoit d’exécuter ce qui luy avoit esté déclaré par écrit, et non pas de capituler.
Le mesme Député revint sur les sept heures du soir : et il dit au
Marquis du Quesne
, de la part de Baba Hassan et du Divan, qu’ils le supplioient de ne pas faire tirer des bombes la nüit süivante, et qu’on amassoit les esclaves François dispersez en plusieurs lieux, pour les remettre entre les mains de ceux qu’il envoyeroit pour les recevoir. Le
Marquis du Quesne
luy fit entendre qu’il vouloit qu’ils les amenassent eux mesmes : et le Député promit qu’ils seroient amenez le lendemain avant midy. Le
Marquis du Quesne
luy dit qu’on ne tireroit point de bombes la nüit suivante : et il fit à la priére du Député, tirer vn coup de canon pour faire sçavoir à ceux d’Alger qu’il leur accordoit cette grace. On ne laissa pas de travailler toute la nüit par ordre du
Marquis du Quesne
pour retirer les anchres et pour se mettre en estat d’agir, s’ils manquoient à exécuter leur promesse.
Le lendemain 29, ils amenérent cent quarante vn esclaves à l’heure qu’ils avoient promis : et entr’autres le sieur de Beaujeu Capitaine d’vn vaisseau du Roy qui avoit esté pris sur vn petit bâtiment, et qui avoit esté acheté onze mille deux cens piastres. Le mesme Député les accompagnoit, et il asseura qu’on assembloit tous les esclaves François, et tous ceux qui avoient esté pris sous la Baniére de France pour les renvoyer incessamment. Il demanda aussi au
Marquis du Quesne
de la part de Baba Hassan, la liberté du Reïs et des Algériens qui avoient esté pris sur le vaisseau que le Chevalier de Lhéry avoit enlevé sur la route.
Le 30, ils amenérent cent vingt quatre esclaves.
Le 1r Iuillet, ils en amenérent cent cinquante deux : et le Député fit de nouvelles instances au nom de Baba Hassan pour obtenir au moins la liberté du Réïs. Le
Marquis du Quesne
la luy accorda enfin, luy déclarant qu’il le relâchoit en considération de Baba Hassan, auquel il vouloit faire ce présent sans conséquence.
Le 2, ils amenérent quatre vingt trois esclaves.
Le 3, ils en amenérent plus de cinquante, et entre autres quatre femmes, l’vne Marseilloise et trois Messinoises. Ils ont continüé à amener tous ceux qui restoient à Alger : et jusqu’au, de ce mois, qu partit le sieur le Moteux qui a apporté ces nouvelles, ils en avoient amené cinq cens quarante six, et il ne restoit aucun esclave François, ou autre qui eut esté pris sous la Baniére de France.
C’est ainsi que le Roy a rabaissé en deux jours l’orgüeil de ces Corsaires, qui ne croyoient pas qu’on osast les attaquer dans leur port, apres qu’vn grand Empereur avoit esté obligé dans le siécle passé, d’abandonner vne semblable entreprise. Nous attendons la suite de ces nouvelles : et nous avons sujet d’espérer qu’elle répondra à de si grands commencements, et qu’elle ajoûtera à la gloire que le Roy a desja acquise en tant d’occasions, celle d’avoir
domté les Corsaires les plus püissans de la Méditerranée
, d’avoir asseuré le commerce de ses sujets, et d’avoir procuré la liberté à tant de Chrestiens qui gémissoient dans vne dure servitude.