De Francfort le 19 Iuillet 1689.
Les Saxons ont continué de travailler à dresser vne baterie prés de Gustavebourg, pour rüiner vne redoute des François dans vne Isle du Rhin : et ils travaillent aussi à nettoyer le Mein où il y a quantité de bateaux enfoncez qui en empeschent la navigation. La redoute que les troupes de Hesse-Cassel constrüisoient pres de Cassel, fut achevée le 14 de ce mois : et on y a mis deux pieces de canon. Le pont de bateaux à Rudisheim sur le Rhin est aussi achevé : et les troupes de Saxe l’ont passé avec quelque infanterie de l’armée du
Prince Charles de Lorraine
dont le quartier général estoit le 14, à Nider Ingelheim et le 15, à Altzey. Le 16, il en décampa avec les régiments Impériaux de cavalerie et vne partie de ceux des Alliez. Il vint se poster de là le Rhin, fort pres de Mayence : et il fit investir cette place le lendemain. Le mesme jour, l’infanterie et le reste de l’armée Impériale passa le Rhin sur vn pont constrüit au dessus de Weissenau : estant suivie des troupes Saxones, à la réserve de quelques régiments qui sont demeurez en deçà, et dans les Isles, entre cette riviere et le Mein. La cavalerie de la place a déja fait deux vigoureuses sorties : où les Impériaux ont perdu assez de monde. Trois mille païsans sont commandez pour travailler aux lignes de circonvallation : et on fait venir vingt ou trente mille fascines.
L’Electeur de Baviére
, apres avoir envoyé vn détachement vers la Forest Noire, vient avec sept ou huit mille chevaux joindre
le Prince Charles de Lorraine
. Selon les lettres du Bas Rhin et de Cologne du 14 de ce mois, les troupes de Brandebourg et de Munster s’estoient emparées de la redoute vis à vis de Bonn, apres l’avoir bombardée pres de sept jours. Cinquante hommes qui la défendoient, apres avoir fait vne vigoureuse resistance et soûtenu deux assauts, se jettérent dans
quelques bateaux, et la pluspart se retirérent à Bonn, avec le Commandant : qui estant blessé à la teste, ne laissa pas de défendre quelque temps la bréche avec cinq soldats, et de trouver encore le moyen de se sauver. On fait passer sur le pont de Cologne, plusieurs piéces de canon, des mortiers, des bombes et toutes sortes de munitions. Le 14, l’armée qui étoit à Zons pour tenir le pays de là le Rhin, à couvert des courses de la garnison de Bonn, passa aussi le Rhin.