De Lintz, le 19 Iuillet 1683.
Leurs
Majestez Impériales
sont parties d’ici avec toute la Cour, pour se retirer à Passau, sur l’avis que les Turcs ayant quitté le Camp de Kitzée le 15 de ce mois, estoient venus se poster devant les faux-bourgs de Vienne :qu’ils avoient investi la ville : et qu’on ne doutoit plus qu’ils n’en fissent le siége. On a depuis sçeu qu’ils l’avoient formé avec cent cinquante mille hommes. Une partie de l’Infanterie qui s’est sauvée de l’Isle de Schut, est entrée dans la ville : le reste ayant esté distribüé dans Raab, dans Comorre, dans Léopolstadt et dans Neustadt. Mais on
manque dans Vienne de munitions de bouche
et de plusieurs autres choses nécessaires. Cette ville est aussi presque toute ouverte du côté des nouvelles fortifications qui n’ont pas esté achevées : de sorte qu’il y a sujet d’appréhender que les Infidéles ne s’en rendent maîtres. Le plat Païs des environs a esté
ravagé
par les Tartares, qui ont exercé par tout des crüautez inoüïes. Un grand nombre des Habitans se sont sauvez avec leurs enfans, sans pouvoir rien emporter pour leur subsistance : et tous les jours on en void arriver ici, dans vn état digne de compassion. Un parti de Mécontents et de Tartares, condüit par vn Seigneur Hongrois, a fait vne course jusqu’à Molck, à douze lieuës en deçà de Vienne, à dessein d’enlever la Couronne de Hongrie, avec les archives du Royaume : mais on les avoit transportées par eau de Presbourg à Vienne, et de Vienne icy. Le
Comte de Staremberg
commande dans Vienne : et le Comte de Capliers est Chef du Conseil de guerre. Un Courier de Pologne passa hier icy, allant trouver l’
Empereur
. Il a dit que les Troupes que le
Roy
a fait lever, doivent se mettre en marche le 15 de ce mois, pour venir au secours de la Hongrie : mais on apprend par les derniéres lettres de Pologne, que le
Roy
ne se mettra en campagne que vers le 15 du mois d’Aoust.