Restoupés, car je n'en veil plus


Anonyme

Éléments contextuels

xve siècle

Non localisé

Non localisé

Édition du texte

BNF FR 1719, f°180v°-181

La Chasse et le depart damours, vues 191 de la version numérisée par la BNF



Ung compaignon galin gallant

A une fillete jollye

Trouvay en ung celier parlant —

Et si ne ly est queroye mye.

Ne sçay que font, je vous affye.

Mais le compains disoit : « Sus, sus,

[Vostre] tonneau ne sent que lye :

[Resto]upés, car je n’en veil plus. »


« [Le] treu du tonneau est trop grant,

Dit le compains, pour une fye.

Quy le vous percha sy avant

Petit vous fist de courtoisie.

— Hé, laissés me en paix, je vous prye, »

Dit-elle, « je vous ai vaincu :

Quy m'ameroit ne diroit mye :

Restoupés, car je n'en veil plus. »


Elle respond, ainsi disant :

« Che avez fait, je vous affye,

Quy l'avés troublé en holchant.

Actendés qu’il se raclerchye.

Se en tirés pinte et demye

Maintenant et jà le sourplus.

— Non feray, par Saincte Marie ;

Restoupés, car je n’en veil plus. »


Prinche, regardés rusterie

Du galin gallant et reff[us],

Disant : « Le baril sent [la lye],

Restoupés, car je n’en [veil plus.] »

Ballade d’ung gaudisseur amoureux


L’autre jour ung gentil gallant

Et une fillette jollye

Trouve en ung cellier parlant

Sans penser en nulle follye

Mais le gallant en chiere fye

Disoit a la fille sans plus

Vostre tonneau sent trop la lye

Retoupez le je n’en vueil plus.


Le trou du tonneau est relant

Et trop avant perse mamye

Qui vous persa est vray allant

Et peu vous fist de courtoisie

Laissez moy en paix je vous prye

Dist el car estes rue jus

Qui m’aymeroit ne diroit mye

Retoupez le je n’en vueil plus.


Elle respond mot excellent

Ce coup avez a l’estourdye

Tout trouble en trop le soullant

Actendez qu’il se reclarcye

Vous en aurez pinte et demye

Maintenant et puis le surplus

Puis je luy dis Saincte Marie

Retoupez le je n’en vueil plus.


Prince pensez s’el fut marrye

Quant le gallant en fist reffus

Disant le baril sent la lye

Retoupez le je n’en vueil plus.

Commentaire sur l’édition

Édition faite sur le manuscrit.

Source ou édition princeps

BNF FR 1719, f°180v°-181

La Chasse et le depart damours, faict et composé par reverend pere en Dieu messire Octovien de Sainct Gelaiz evesque Dangoulesme et par noble homme Blaise Dauriol bachelier en chascun droit demourant a Toulouze, 1509, Paris, Anthoyne Vérard, vues 191 de la version numérisée par la BNF.

Édition critique

Études

Commentaire historique et contextuel

Le manuscrit Français 1719 de la BNF a été écrit par plusieurs mains. Il contient un grand nombre de poésies issues de la cour de Charles d’Orléans, et donc tout naturellement des œuvres de François Villon. Une partie cependant inclut des œuvres anonymes – des rondeaux et ballades paillardes –, qui ont largement servi de base à la publication du Parnasse satyrique du quinzième siècle de Marchel Schwob en 1905. Le présent texte, ainsi qu’une bonne part des autres ballades et rondeaux du même manuscrit, ont été plagiés par le Toulousain Blaize d’Auriol, qui les a mis sous son nom dans sa Départie d’Amour. Cet auteur a, au passage, ajouté un titre aux ballades : ici Ballade d’ung gaudisseur amoureux. Le texte du manuscrit 1719 est bien souvent très défectueux.

Commentaire linguistique

Seul le manuscrit BNF FR 1719 présente des formes dialectales, qui correspondent toutes au même phénomène phonétique. Il s’agit du traitement du [k] latin devant un [e] ou un [i], et de -ti- entre consonne et voyelle : Che pour ce ; raclerchye pour *raclaircir, forme verbale dérivée du latin clarus, a, um ; Prinche pour prince, réflexe du latin princeps, cĭpis. Ces formes peuvent être picardes comme normandes.