Tant pu j’en pense, et mains j’en ose dire
David Ferrand
Éléments contextuels
1637
xviie siècle
Rouen
Non localisé
Édition du texte
L’Autheur faisant certaine reflexion sur le siecle malheureux, demeure tout perplez,
et sur ce point a pris sa ligne palinodialle
Cant ryal « rial ».
Fleuren
Gervais, debout ! quitte melancolie.
Que fais-tu loq à luquer tes prosniaux ?
Est-che le flair de ten pot à poriaux
Qui met ten sens ainchite en resverie,
Ou bien si ch’est pour se z’imposts nouviaux ?
Quand tu eras bien aveuque tes pinchettes
Dans tes querbons fait chen mille rélettes,
Bien grabugé, redisant doublement :
« Le temps va mal, Dieu nous garde d’un pire, »
Qu’en sera-’yl ? — Las ! men poure « mon pere ». Fleuren,
Tant pu j’en pense, et mains « moins ». j’en ose dire.
Depis que j’ay dans notte Draperie
Veu installer un tas de mangeriaux,
Qui ont voulu, coume des viperiaux,
Ronger le corps de notte « note ». Foullerie
Par leu moulins et leu enginsgorniaux,
Et que j’ay veu pu de mouque et mouquettes
Qu’à l’opital n’y a de sapinettes,
Griper les draps, et pis en Parlement
En poursessions par engain les condire,
Craignant d’en vair un grabuge autrement,
Tant pu j’en pense, et mains « moins ». j’en ose dire.
O ne vait pu que dol et tromperie ;
Les pu hupez « hupais ». nagent entre deux z’iaux ;
Du gain du povre y gressent leu muziaux,
Et semble à vair quenous et la patrie
O daive mettre à la pille miaux.
Lors que je vais ces sangsures secrettes
Leu z’etablir « Le zetablir ». o son de nos « no ». trompettes,
No deffendant d’en grongner seulement,
Et leu pissanche « pitanche ». à ses potiaux escrire,
Fesant la croix su me n’entendement,
Tant pu j’en pense, et mains « moins ». j’en ose dire.
Su ces points là, compere, je t’en prie,
Ne fezons chy coume « comme ». se z’etourniaux
Qu’o z’ost paler o travers leu barriaux,
Et ne serest yeuxpliquer leu cririe ;
Lessons chela à de pu grands cherviaux.
Mais quay ! y font en ces double rechettes
Tant de tracas et de reux de carettes
Que nostre Roy n’en a le tiers d’argent ;
Chennela met tout le monde en martyre « martire »..
Su ses sujects, couma « comme ». tay, vairement
Tant pu j’en pense, et mains « moins ». j’en ose dire.
Quand su grand Louys (dont Dieu dait bonne vie)
Era riflé tou ce z’Imperiaux,
Que no verra su leu murs nos drapiaux,
Et qu’en apres notte gendermerie
En les morguant niflera leu naziaux,
Il étriquera « Il abattra ». edicts et étiquettes ;
Lors tout checun sera à ses goguettes,
Et je verron tous ses gripeux d’argent,
Blancs coume « comme ». crais, gratter leu tirelire ;
A su bon-heur, où j’aspire souvent,
Tant pu j’en pense, et mains « moins ». j’en ose dire.
Envay
Prinche et Prelat, ces lignes ne sont fettes
Pour vo loüer, estant tel que vos z’estes ;
No l’a presché en chaire clairement.
Quant pour men fait, en reprenant ma lire,
Lors que je songe o regne d’à present,
Tant pu j’en pense, et mains « moins ». j’en ose dire.
Commentaire sur l’édition
Édition faite sur l’édition Héron.
Source ou édition princeps
Treiziesme partie de la Muse normande ou Recueil de Plusieurs ouvrages Facecieux, en langue Purinique, ou gros Normand, presentez aux Palinots, 1637, Rouen, David Ferrand.
David Ferrand, Inventaire general de la Muse normande, divisée en XXVIII. parties. Où sont descrites plusieurs batailles, assauts, prises de villes, guerres estrangeres, victoires de la France, histoires comiques, esmotions populaires, grabuges, & choses remarquables arrivées à Roüen depuis quarante années, 1655, Rouen, David Ferrand.
Édition critique
A. Héron, La Muse normande de David Ferrand, publiée d’après les Livrets originaux, 1625-1653 et l’Inventaire général de 1655, t. II, 1891, Rouen, Espérance Cagniard, p. 151-153.
Études
Catherine Bougy, La Langue de David Ferrand : poète dialectal rouennais du xviième siècle, auteur de La Muse normande, 1992, thèse soutenue à l’Université de Caen sous la direction de René Lepelley.
Commentaire historique et contextuel
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Commentaire linguistique
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