Dieu donne o povre, et le riche l’afflige
David Ferrand
Éléments contextuels
1642
xviie siècle
Rouen
Non localisé
Édition du texte
L’Autheur continue sur le malheur, et monstre que le Riche foule tousjours aux pieds
la Pauvreté.
Cant ryal
Le Tout-puissant dont la gloire infinie
Est de sey-mesme et à sey-mesme unie
Sans qu’il emprunte autres relations,
Lors qu’il creït de ce Tout l’ermonie « l’armonie ».
Y le remplit de benedictions.
Et neaumains « neantmoins ». cette Toute puissance
Lors que sen Verbe print ichite « ichyte print ». naissance,
Pour nous instruire il nasquit povrement ;
Instruction que le riche neglige,
Et ch’est pourquay est que journellement
Dieu donne o povre, et le riche l’afflige.
Il le conserve en temps « tant ». de maladie,
A ses tourmens soudain il remedie,
Il le console en ses afflictions ;
Si par le temps sa gaigne « gagne ». est refraidie « refreidie ».,
Dieu ly « luy ». accreist par ses « des ». inventions.
Tout au rebours le riche le devanche,
Tasche d’aver ses biens et sa pitanche,
Et sen labeur rechûche « Tout sen labeurs recheuche ». à se n’escient,
Le rend esclave, et fait mourir « languir ». sa tige.
Qui ne diret, selon men jugement :
Dieu donne o povre, et le riche l’afflige ?
Si se z’ayeuls aveq leu z’industrie
Ly ont laissé un coin de meterie « mesterie ».,
Et du labeur en fait les functions « Si du labour y faict les fonctions ».,
Y souffrira par ceux de sa patrie
Comme un nabot mille yeuxtorsions « extorsions »..
Si Dieu ly veut, reparant sa souffranche « souffrance ».,
Fiquer queu ly ste corne d’abondanche,
Les rebiots y l’era doublement « doublelment ». ;
O mesme taux du riche on le redige :
Ne tinte pas « point »., bon « pauvre ». homme, et veis comment
Dieu donne o povre, et le riche l’afflige.
Pis renversé par fraude et par envie,
S’il « Si ». veut chevir, pour achever sa vie,
De leu signer queuque obligations,
Ces fiers bourriaux « tyrans ». usant de tyrannie
Le front mourir de faim dans les prisons.
Souvienne-tey « toy »., Riche plain d’arroganche « arrogance ».,
Qu’ainchin que tu és « est ». ch’est l’image et semblanche « Qu’ainchin que tu ès l’image et la semblance ».,
Du Dieu vivant qui te donne aliment.
Si tu és « est ». sauvé ce sera un prodige.
Veis t’on pas bien qu’en te n’aveuglement
Dieu donne o povre, et le riche l’afflige ?
Su monde ichy n’est qu’une comedie,
Où chaque jour un checun s’estudie « checun estudie ».
De s’illustrer dedans se z’actions « ses actions »..
Tel fait le rey « Roy ». qui demain par folie
Sra un valet hors de conditions « pretentions »..
Avare, aprens aveuque « aveucq ». ta finanche « finance ».
Que tu ne l’as sinon que par avanche « advanche », « avance ». ;
Tu en rendras le conte exactement ;
Dieu est benin, pourveu qu’on se corrige.
Pour tay yeuxpres « tey euxpres ». j’ay pris pour argument
Dieu donne o povre, et le riche l’afflige.
Commentaire sur l’édition
Édition faite sur l’édition Héron.
Source ou édition princeps
La xvii. et xviii. partie de la Muse normande, ou Recueil de Plusieurs Ouvrages Facecieux en langue Purinique, ou gros Normand. Contenant les œuvres jovialles qui ont esté presentées cette année aux Palinots, 1642, Rouen, David Ferrand.
David Ferrand, Inventaire general de la Muse normande, divisée en XXVIII. parties. Où sont descrites plusieurs batailles, assauts, prises de villes, guerres estrangeres, victoires de la France, histoires comiques, esmotions populaires, grabuges, & choses remarquables arrivées à Roüen depuis quarante années, 1655, Rouen, David Ferrand.
Édition critique
A. Héron, La Muse normande de David Ferrand, publiée d’après les Livrets originaux, 1625-1653 et l’Inventaire général de 1655, t. II, 1891, Rouen, Espérance Cagniard, p. 240-242.
Études
Catherine Bougy, La Langue de David Ferrand : poète dialectal rouennais du xviième siècle, auteur de La Muse normande, 1992, thèse soutenue à l’Université de Caen sous la direction de René Lepelley.
Commentaire historique et contextuel
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Commentaire linguistique
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