Les pretenduz grippez par la Soudrille
David Ferrand
Éléments contextuels
1644
xviie siècle
Rouen
Non localisé
Édition du texte
Le sujet est sur le grabuge advenu Jeudi dernier par une troupe de Gens d’armes qui
rencontrant fortuitement Messieurs de la Pretendüe Reformée au chemin, qui revenoient
du Presche, leur firent beaucoup de choses qui ne sont à faire.
Cant rial « ryal »..
Il semble à voir en guerre declarée
Que le soudart tritre et malicieux
S’en doive aller toute à bride avallée,
Et yengloutir d’une seule goulée
Chen qui ravit de la main et de z’ieux.
Mais su bon Dieu, dessous qui notte vie
Par la raison se trouve assujettie,
Qui sait, qui vait qu’on fait journellement,
Et qui deffend qu’on violle et qu’on pille,
Par des meschans a veu prés de Roüen
Les Pretenduz grippez par la Soudrille.
Mes bonnes gens, je vo dis ste serée
Que me n’esprit n’est si capricieux
De me moquer de la loy Reformée ;
Biaucoup d’Edicts m’en ostent la pensée ;
Chla n’appartient qu’o z’esprits « que zesprits ». captieux.
Je dierray donc qu’une Gendermerie,
Qui ne dait « doit ». point user d’effronterie,
En ces quartiez passant dernierement,
Happest tous ceux qui venest dans la ville,
Sans espergner, je dis à bon escient,
Les Pretenduz grippez par la Soudrille.
Che n’est point chy un cas de grand risée,
Car sans mentir ses Roulants furieux
Baillirent à tous une tieulle vezée,
Qui l’y en a qui ont si grand trenchée
Qu’un lavement ne leu « leur ». feret pas mieux.
Misericorde ! un chacun d’eux s’écrie,
S’imaginant estre en une tu’rie ;
L’un en courant perdit sen Testament,
L’autre sen Siaume et maint autre guenille ;
Là sans raison fut veu impudemment
Les Pretenduz grippez par la Soudrille.
Quand des guerriers fut la troupe entinchée,
No n’aleguet le dire du prescheux
Que pour souffrir l’ame est de Dieu touchée ;
Femme et mary, coume la fianchée,
Pour se sauver quitest leu z’amoureux.
En s’enfiant ocun n’avet envie
De discourir de l’eternelle vie ;
Sainct Pol estet en alieurquissement ;
No ne palet de Bible en Apostille ;
Qui en eut palé, quand fut en un moment
Les Pretenduz grippez par la Soudrille ?
Le milleur fut quand la troupe enrengée
Fut o fauxbourgs, hors de lieu perilleux ;
Car tel n’estet o combat qu’un Pigmée
Qui se diset, o milieu de st’ermée,
S’estre monstré un géant orgueilleux.
Les femme « femmes ». ossi disest : « Ma sœur, m’amie,
De tout su brit je sis toute espaumie ;
Petit troupiau « troupeau »., que tu as de tourment
Pour suporter le faix de l’Evangile !
Souffrira-t-on qu’on vaye impudemment,
Les Pretenduz grippez par la Soudrille ? »
Envay
Mes bonnes gens, y faut que je vo die
Que par engain je n’ay fait ste poüesie ;
La nouviauté l’a causé seulement ;
Su malur peut venir o pus habille.
Je n’ay pensé offencer nullement
Les Pretenduz grippez par la Soudrille.
Commentaire sur l’édition
Édition faite sur l’édition Héron.
Source ou édition princeps
La vingtieme partie de la Muse normande, ou Recueil de plusieurs ouvrages Facetieux en langue Purinique, ou gros Normand. Contenant les œuvres jovialles qui ont esté presentées cette année aux Palinots, 1644, Rouen, David Ferrand.
David Ferrand, Inventaire general de la Muse normande, divisée en XXVIII. parties. Où sont descrites plusieurs batailles, assauts, prises de villes, guerres estrangeres, victoires de la France, histoires comiques, esmotions populaires, grabuges, & choses remarquables arrivées à Roüen depuis quarante années, 1655, Rouen, David Ferrand.
Édition critique
A. Héron, La Muse normande de David Ferrand, publiée d’après les Livrets originaux, 1625-1653 et l’Inventaire général de 1655, t. III, 1892, Rouen, Espérance Cagniard, p. 11-13.
Études
Catherine Bougy, La Langue de David Ferrand : poète dialectal rouennais du xviième siècle, auteur de La Muse normande, 1992, thèse soutenue à l’Université de Caen sous la direction de René Lepelley.
Commentaire historique et contextuel
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Commentaire linguistique
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