L’Homme content. Pour n’aver rien, je n’ay rien qui me nuise
David Ferrand
Éléments contextuels
1647
xviie siècle
Rouen
Non localisé
Édition du texte
L’Homme content.
Cant rial « Chant royal ».
Dieu nous depart par une prescience
Tous biens en terre, et non pas tous les maux ;
Aux bons esprits il donne la science,
Et l’artisan « artizan ». par se n’experience
Rechet en fin le frit « le fruict ». de ses travaux.
Je devisions d’aintieulle destinée,
Rolin et may, souz « sous ». notte queminée
Où tous les sairs je devisons « devison ». souvent,
Quand y me fit un discours que je prise ;
Et tel estet sen premier argument :
« Pour n’aver rien, je n’ay rien qui me nuise.
« Je ne sens point le ver de conscience,
Qui va rongeant l’esprit des mangeriaux,
Et va ruynant le povre qu’il offence,
Happe sen bien, oppresse l’innocence,
Masquant la loy de preceptes « des Preceptes ». nouviaux.
L’astre benin d’où pend ma destinée
Ne permet point d’aller la matinée
Presser un juge ; et par faux argument
Qu’un chemin tors dans un dret me conduise,
Je creverais « creverois ». dans cét aveuglement :
Pour n’aver rien, je n’ay rien qui me nuise « nuyse »..
« Je ne veux point tumber « tomber ». dans l’impudence
Des bancroutiers que no feint larronniaux « laronniaux ».,
Qui ayant fait une grande despence
Et se sentant tomber en decadence,
Estant nantis prennent des « de ». verds capiaux.
Leu femme « femmes ». apres paressent crestelées « cretelées ».,
Lestes d’habits et par tout dentelées,
Ayant cauché leu brais prumierement « premierement »..
Je ne crais point ichy qui mieux leu duise
Qu’un biau licos ; may, vivant franchement,
Pour n’aver rien, je n’ay rien qui me nuyse « nuise »..
« Ces gens ayant fait tieulle « telle ». connivence
Sont les prumiers « premiers ». à prendre des Buriaux,
Usant par tout de ce mot de Deffence.
J’accorde bien avecques reverence
Qui « Qu’il ». no faut tous poyer les draits « drets ». royaux.
Mais, pour aver une somme donnée,
Un Partisan en une seulle année
Outre ses frais la trouve doublement.
Que Dieu me gard’ d’une tieulle entremise « d’une aintelle entreprise ». !
Vivant en ly, je dis asseurement :
Pour n’aver rien, je n’ay rien qui me nuise.
« Je ne veux point tomber dans l’inclemence
De ces gripeux « gripeurs ». de hardes et joyaux « et de joyaux ».,
Qui pour aver la double recompence « recompense ».
De l’affligé, sans user de clemence,
Va l’obligeant corps, tripes et boyaux.
L’on ne verra ma maison soubçonnée
D’aucun larchin « l’arcin »., ny voys desordonnée « D’aucun larchin, c’est la reigle ordonnée ». ;
J’acheté et vens tout équitablement ;
Je n’ay l’orgueil qu’aux grandeurs no m’éluyse « m’éluise ». ;
Qui me fait dire aveuq « avec ». contentement :
Pour n’aver rien, je n’ay rien qui me nuise. »
Commentaire sur l’édition
Édition faite sur l’édition Héron.
Source ou édition princeps
La XXIII. partie de la Muse normande, ou Recueil de Plusieurs ouvrages Facecieux en langue Purinique, ou gros Normand, 1647, Rouen, David Ferrand.
David Ferrand, Inventaire general de la Muse normande, divisée en XXVIII. parties. Où sont descrites plusieurs batailles, assauts, prises de villes, guerres estrangeres, victoires de la France, histoires comiques, esmotions populaires, grabuges, & choses remarquables arrivées à Roüen depuis quarante années, 1655, Rouen, David Ferrand.
Édition critique
A. Héron, La Muse normande de David Ferrand, publiée d’après les Livrets originaux, 1625-1653 et l’Inventaire général de 1655, t. III, 1892, Rouen, Espérance Cagniard, p. 86-88.
Études
Catherine Bougy, La Langue de David Ferrand : poète dialectal rouennais du xviième siècle, auteur de La Muse normande, 1992, thèse soutenue à l’Université de Caen sous la direction de René Lepelley.
Commentaire historique et contextuel
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Commentaire linguistique
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