Stanches


David Ferrand

Éléments contextuels

1629

xviie siècle

Rouen

Non localisé

Édition du texte

Stanches

Dieu te daint le bon sair, men bon compere Blaise.

Et bien ! qu’est qu’on jargonne ichy à ses quartiers ?

Ne fratelle t’on point la haut, devers ste Boise,

De st’agnel qu’ont mangé chinq o six chavetiers ?


— Jens ! Drien, me n’amy, no pale tant d’affaire

Qu’o ne seret laqueulle estaller o burel.

Niomoins, si tu veux pou queuque poy te taire,

Je te desrengleray chen qui l’y a de nouvel.


La pu grand nouviauté que je te pourrez dire,

Est que, no promenant, su gros Gervais et may,

Je pensis delaquer à mes cauches de rire

De tout chen que je vis qu’o fezet su « du ». su quay.


Je cray may que ch’etet le temps des Bachanalles ;

No z’ut dit que Baqus donnet sen jus divin ;

Ossi dans chez batiaux che n’etet que triballes,

Et bref ainchin qu’o feu checun couret o vin.


Jamais Albert Duret ne fit tant de postures

Qu’o fesset su su quay (pour lors marché aux viaux).

Y s’entroquevillest les pieds dans se z’ordures

Ossi bien qui fezest su le bord des bastiaux.


Je vis un gros drapier de su Pontaritaine

Qui dessu ses battiaux sautet coume un gruriau ;

Mais en fin pied-dremont y qut dedans la Seine,

Et y eust esté nié sans un petit bastiau.


Su gros Jacque qui fait de ces galloches plates

Qui ossi bien que ly ; su porc estet si plain

Qui perdit sen mentel, sa pouque, ses chavattes

Et chinq o six sorets qui tenet à sa main.


Sa femme le vint qu’rir aveuque su gros Pierre

Qui ainchin qu’une bru le menest sous les bras

Et de pis su su quay jisqu’à la Croix de Pierre,

Bien chent fais pour guiller y mit ses brais en bas.


Ch’est une grand pitié qu’ainchin no s’i gouverne.

Ch’est pourquay no z’a fait st’edit nouvel, afin

Qu’o ne vit tels pourchiaux aller à la taverne,

A cause de z’ieuxcez « xieuxcez ». qui fesest dans le vin.


Les femme pour chela en font mainte priere,

Pour le bon Rey qui a « qu’ia ». fait st’edit tout de nouvel.

Mais adieu, men Drien, car j’ay un ptiot affaire ;

Y faut porter un drap merquer dans sus burel.

Fin.

Commentaire sur l’édition

Édition faite sur l’édition Héron.

Source ou édition princeps

Cinquiesme partie de la Muse normande ou Recueil de plusieurs ouvrages Facecieux, en langue Purinique, ou gros Normand. Recueillis de divers Autheurs, 1629, Rouen, David Ferrand.

David Ferrand, Inventaire general de la Muse normande, divisée en XXVIII. parties. Où sont descrites plusieurs batailles, assauts, prises de villes, guerres estrangeres, victoires de la France, histoires comiques, esmotions populaires, grabuges, & choses remarquables arrivées à Roüen depuis quarante années, 1655, Rouen, David Ferrand.

Édition critique

A. Héron, La Muse normande de David Ferrand, publiée d’après les Livrets originaux, 1625-1653 et l’Inventaire général de 1655, t. I, 1891, Rouen, Espérance Cagniard, p. 111-113.

Études

Catherine Bougy, La Langue de David Ferrand : poète dialectal rouennais du xviième siècle, auteur de La Muse normande, 1992, thèse soutenue à l’Université de Caen sous la direction de René Lepelley.

Commentaire historique et contextuel

Commentaire linguistique