D’un viez collet ne bonne serviette


David Ferrand

Éléments contextuels

1634

xviie siècle

Rouen

Non localisé

Édition du texte

Cant rial

Pay, Chabrenaux ! qu’on fache un grand silenche,

Jerquez vo bien dessu vos erigots,

Drechez l’oreille et baillez audianche

A chez monsieux qui sont aux Palinods,

Ou autrement je vo rompray le cos.

Su thieme ichi, su biau chant, su colloque

Que je vo prosne, est faict, par notre doque,

Affin de rire en tarelarigault,

Car je luisis essair dans la Gazette

Qu’on a lorgné quieu me n’oncle Briffault

D’un viez collet ne bonne serviette.


Tete à poulets ! je voudrais qu’en la Franche

Dessus la teile il y eut chent impos,

Car cheux qui n’ont que de l’iau por pitanche,

Qui n’ont iamais cauchai que des chabots,

Veulent plaquer des nappes sus leu dos.

Ch’est un malhur que de vais chenneloque,

Car « Cer ». su Robin, qui cassit note cloque,

En farfoüillant par tout dans ses reniaux,

Depis qu’il eut relenqui sa broüette,

Trouvit chen fais parmi de vies drapiaux

D’un viez collet une bonne serviette.


Il y a chinq ans que les bateux à granche,

Blastiers, machons et lieurs de fagots,

Portaist ainchin des voiles sur leu panche

Et escrivant leu grans pieds dans les bos

Se pavanest « pavanent » tout ainchin que des coqs.

Mais astheurchi on vait par rechiproque

Que cheux qui ont le milleur vin en broque

Sont faicts ainchin que pelerins nouviaux.

Mais che n’est rien, car aveu leu chivette

Ils font eux mesme aveucque des ciziaux

D’un viez collet une bonne serviette.


J’ay queuquefais me n’esprit en balanche,

M’eschervelant tout seul dedans man clos,

Pour ratroquer aveuque prevoyanche

Les grands proffits qui sont par gros billots

Dedans ste mode entravais et enclos,

Qui ne nuict point, qui douchement baloque

Soubs un capel, un bonnet, une toque,

Sert de moucheux pour niquer les morviaux,

Sert de pigneux, d’escrin, de bavarette,

Et pis on faict por torcher les muziaux

D’un viez collet une bonne serviette.


Dessu su quay no vait en abondanche

De gros Flamans, Basques et matelos,

Qui gras à lard n’ont point de doulianche

De leu colets larges comme chibots,

Mais bien de vais les Franchais qui sont fos.

Quand queuqun d’eux barragoüine menoque,

Il se gaudit, il se rit et machoque

De gros brocards nos petits galuriaux,

Et desgrinant leu téte de giroüette

Dit qu’il fraint bien o fond de leu vaissiaux

D’un viez collet une bonne serviette.


Envay

Grands, gros et gras, qui m’escoutais iloque,

N’oubliais pas une ptite freloque

De ma lichon : boutais dans vos buriaux

Sus vo drecheux, dedans votte pouquette

Chez mots fiquais dans de gros escritiaux,

D’un viez collet une bonne serviette.

Commentaire sur l’édition

Édition faite sur l’édition Héron.

Source ou édition princeps

Neuviesme partie de la Muse normande, ou Recueil de plusieurs ouvrages Facetieux en langue Purinique, ou gros Normand, presenté aux Palinots, 1634, Rouen, David Ferrand.

David Ferrand, Inventaire general de la Muse normande, divisée en XXVIII. parties. Où sont descrites plusieurs batailles, assauts, prises de villes, guerres estrangeres, victoires de la France, histoires comiques, esmotions populaires, grabuges, & choses remarquables arrivées à Roüen depuis quarante années, 1655, Rouen, David Ferrand.

Édition critique

A. Héron, La Muse normande de David Ferrand, publiée d’après les Livrets originaux, 1625-1653 et l’Inventaire général de 1655, t. II, 1891, Rouen, Espérance Cagniard, p. 58-60.

Études

Catherine Bougy, La Langue de David Ferrand : poète dialectal rouennais du xviième siècle, auteur de La Muse normande, 1992, thèse soutenue à l’Université de Caen sous la direction de René Lepelley.

Commentaire historique et contextuel

Commentaire linguistique