D’un chavetier un mouqueux de candelle


David Ferrand

Éléments contextuels

1634

xviie siècle

Rouen

Non localisé

Édition du texte

L’Autheur descrit la posture d’un savatier nommé Naudin, qui mouche la chandelle au Puy de la Conception.

Cant rial

J’estions siechais, may et me n’oncle Jaque,

Sus su biau banc qui est à nos quartiais,

Ste belle boise où ch’est que no se plaque

Por cresteler, quand on a cault à piais,

De chennela qui touche nos mestiais :

Quand Jean Robin, su pesqueux de crevette,

Hagant sen pain aveuque une gambette,

Me dit : « Micault, pren ten pié à ten cos,

Tu apprendras un mouchel de nouvelles

Quand tu verras su sair au Palinos « Pallinos ».

D’un chavetier un mouqueux de candelle. »


May aussi tost je happis ma casaque

De burel gris qui estait sus un ais,

Que j’achetis pour la fête de Paque,

Mis à men cos un de mes biaux collets,

Qui me deschend quasi jusque o garets.

Et pis j’allis, en maquant ma galette,

Dedans les Querme, ainchin qu’un autre poüette « poëte ».,

Où chent caleux roumanchaint coume « comme ». fos.

Mais j’avisis, parmy « Mais en vayant parmy ». tant d’attivelles,

Soubs la clerté « clarté ». de pu de chent fallots,

D’un chavetier un mouqueux de candelle.


Le vla qui beze ainchin coume « comme ». une vaque,

Dessu su Pis, autour les candeliais.

La téte nuë, il broüit, il attaque

De biaux tapis encontre les parais,

Et abat cheux qui sont trop haut jerquais.

Pis il fourgonne au fond de sa pouquette,

Et, en saquant un paire de mouquette,

Va douchement en gaiteux « guaiteux ». de mulos,

Baissant tou bas l’estuy « estui ». de sa chervelle.

Ainchin vait-on parmy tant d’agios « parmi tant d’agyos ».

D’un chavetier un mouqueux de candelle.


Men pere grand, qui avet une taque

De feu gregeois « gregois ». qui tumbit su sen nais,

Dont le capel estait faict en bourraque,

Soulait proner dans la cour des Corais

Que les carleux estaist « estais ». par tou fiquais.

Deslors, vayant qu’on leu chantait goguette,

Quittis men maistre et happis ma navette.

Je renonchis au ligneul et chigros,

Au tirepiai « tirepied »., à la pois, aux sumelles,

De peur qu’un jour on me dit tieux prepos :

D’un chavetier un mouqueux de candelle.


Foin ! qu’esche ichy ? morgoy ! no s’entrémaque.

Oüiche le dos, gare les piais mollets !

On est tassé comme harans en caque ;

J’ay les gibons si bien haquebutais

Que je crains bien qui ne saist bresillais.

J’ayme bien mieux bauffrer une amelette

A me n’ostel avec de la trempette,

Qu’estre en che lieu jusque o bec dans le ros.

Car cacun an ichy on s’amouchelle,

Pour contempler comme un autre Minos

D’un chavetier un mouqueux de candelle.

Commentaire sur l’édition

Édition faite sur l’édition Héron.

Source ou édition princeps

Neuviesme partie de la Muse normande, ou Recueil de plusieurs ouvrages Facetieux en langue Purinique, ou gros Normand, presenté aux Palinots, 1634, Rouen, David Ferrand.

David Ferrand, Inventaire general de la Muse normande, divisée en XXVIII. parties. Où sont descrites plusieurs batailles, assauts, prises de villes, guerres estrangeres, victoires de la France, histoires comiques, esmotions populaires, grabuges, & choses remarquables arrivées à Roüen depuis quarante années, 1655, Rouen, David Ferrand.

Édition critique

A. Héron, La Muse normande de David Ferrand, publiée d’après les Livrets originaux, 1625-1653 et l’Inventaire général de 1655, t. II, 1891, Rouen, Espérance Cagniard, p. 60-62.

Études

Catherine Bougy, La Langue de David Ferrand : poète dialectal rouennais du xviième siècle, auteur de La Muse normande, 1992, thèse soutenue à l’Université de Caen sous la direction de René Lepelley.

Commentaire historique et contextuel

Commentaire linguistique