Stanches


David Ferrand

Éléments contextuels

1634

xviie siècle

Rouen

Non localisé

Édition du texte

Stanches

Gargoüilleux enfumez, avaleurs d’iau de vie,

Qui venez en su lieu por fere du sabat,

Retournez en vo creux, o bien à la Turquie

Aveu ches « chec ». boucaniez qui chuchest su tabac.


Mais quay ! n’y allez pas sans aver esperanche

D’aver chen qu’o pays ont tous les petuniez ;

Car les trouvant asteure y l’ont la mesme dance

Qu’en plusieurs lieux ont z’v messieux les chavetiers.


Chez tuteux de tabac, boute-feux manifestes,

Se firent bien prosner ésair o Palinots.

J’en estais élugé, et plaignant tieux poüettes

Je disais : « Y ne faut tant de quiens su z’un os. »


Ste nuit, en y songeant, je pensez le z’entendre

Et y estre entrevesqué dans ses feux et ses cris

Que tou les Palinots estest reduits en chendre

Et que dessu le Prinche on jugeret les prix.


Mais je vais autrement sans aver de lunettes,

Et juge à men chervel que pour estre yeuxstimé

Y ne faut maintenant que luire des gazettes

Et y en faire un escrit bien peint et bien rimé.


Ch’est là le vray ceron ; prenon don la gazette,

Et pour aver le prix seul par may pretendu,

Chen qu’a la dit ennuit y faut que je le trette,

Et chen que i’ay encor en ste ville entendu.


Ch’est bien poussé, Talbot, j’entreprends trop d’affaires ;

Quand erais-je tretté l’entrée de Crequi,

La guerre du Persan contre les Janissaires,

Chelle du Polonois et d’Allemagne ossi ?


Quand erais-je depeint le corps mort de l’Infante

Dans sen biau lict d’honneur, quatre roys d’erme o coins ?

Quand erais-je palay de l’ermée pissante

Que notte Roy envaye o pays pu lointains.


O ba ! tou chennela je ne m’en mets en peine ;

Y ne faut ennuyer le monde en che lieu chy.

Qui m’y plaist dedans, ch’est que le Roy et la Reine

Beivent et mangent bien, en santé, Dieu mercy.


Quand por les faits plaisants qui peuve faire rire,

No pourra ces gras jours bien mieux le z’eplucher ;

Ces lieux saints ne sont pas criez pou les z’ecrire ;

Pis, coume o dit esair, le papier est trop cher.


Finissons sur fratel par vous, buveurs de biere,

Pour qui j’ay commenché o jourdy su discours :

Si vo faites du brit, gardez le z’etriviere ;

Comme o ne pleure point, no ne rit pas tousjours.

Commentaire sur l’édition

Édition faite sur l’édition Héron.

Source ou édition princeps

Neuviesme partie de la Muse normande, ou Recueil de plusieurs ouvrages Facetieux en langue Purinique, ou gros Normand, presenté aux Palinots, 1634, Rouen, David Ferrand.

David Ferrand, Inventaire general de la Muse normande, divisée en XXVIII. parties. Où sont descrites plusieurs batailles, assauts, prises de villes, guerres estrangeres, victoires de la France, histoires comiques, esmotions populaires, grabuges, & choses remarquables arrivées à Roüen depuis quarante années, 1655, Rouen, David Ferrand.

Édition critique

A. Héron, La Muse normande de David Ferrand, publiée d’après les Livrets originaux, 1625-1653 et l’Inventaire général de 1655, t. II, 1891, Rouen, Espérance Cagniard, p. 63-64.

Études

Catherine Bougy, La Langue de David Ferrand : poète dialectal rouennais du xviième siècle, auteur de La Muse normande, 1992, thèse soutenue à l’Université de Caen sous la direction de René Lepelley.

Commentaire historique et contextuel

Commentaire linguistique