Compliment adressé à S. A. R. Madame la duchesse de Chartres par les pêcheurs du fauxbourg du Pollet-les-Dieppe
Anonyme
Éléments contextuels
1772
xviiie siècle
Dieppe
Pays de Caux
Édition du texte
Compliment adressé à S. A. R. Madame la duchesse de Chartres par les pêcheurs du fauxbourg
du Pollet-les-Dieppe
Dialecte polletais Ma brave princesse Je sommes tretous contents quemant dé princes, d’vo vaire icite. O nos à dit tous le bien q’vos avai fait à à Forges, en conscience j’en avons pleuré de joie. Lé grands quant il aime-te lé p’tits, i sont cent fois plus grands encore. Que le bon dieu vo conserve tout quemant que vo le méritais, et qu’je le désisons, vo vivrais aussi longtems q’lé patriarsses. Aprais l’bon dieu et la bonne Ste Vierge, n’y à personne qu’jaimons mieux q’le roi et toute sa famille : Pour li, pour vous, pour mousieu vot homme, pi pour mousieu vote pére, note brave amiral ; note batiau, note vie, je sacrifierons tout. A propos du roi, javons pêqué un pesson qu’est d’aigne d’ête manjé par sa sacrée bousse ; le v’la, si vo voulai le recevai, vo no frai fermant de plaisi. | Français Illustre princesse, Nous sommes tous contents comme des princes de vous voir ici. On nous à dit tous le bien que vous avez fait à Forges, en consience nous en avons pleuré de joie. Les grands quand ils aiment les petits, sont cent fois plus grands encore. Que le bon dieu vous conserve tout comme vous le méritez et que nous le désirons vous vivrez aussi longtems que les patriarches. Après le bon dieu et la bonne Ste vierge, il n’y a personne que nous aimons mieux que le roi et toute sa famille : Pour lui, pour vous, pour Monsieur vôtre epoux, puis pour Monsieur vôtre pere, nôtre brave amiral, nôtre bateau, notre vie, nous sacrifierons tout. A propos du roi, nous avons pêché un poisson qui est digne de lui être présenté ; le voila si vous voulez le recevoir vous nous ferez beaucoup plaisir. |
Commentaire sur l’édition
Édition faite sur la copie de 1815.
Source ou éditions princeps
Compliment adressé à S. A. R. Madame la duchesse de Chartres par les pêcheurs du fauxbourg du Pollet-les-Dieppe, 1815, Arch. dép. Seine-Maritime, 6 M 1184.
Édition critique
Patrice Lajoye, « À propos du compliment des pêcheurs du Pollet adressé à la duchesse de Chartres (1772). Les compliments de poissonnières en patois normand », Les Amys du vieux Dieppe, 2021, CXXXIV, p. 73-74.
Études
Patrice Lajoye, « À propos du compliment des pêcheurs du Pollet adressé à la duchesse de Chartres (1772). Les compliments de poissonnières en patois normand », Les Amys du vieux Dieppe, 2021, CXXXIV, p. 70-77.
Commentaire historique et contextuel
Ce petit texte ne subsiste que par une copie intégrée aux vestiges de l’enquête « Coquebert de Montbret » conservés aux Archives départementales de la Seine-Maritime. Il se rapporte probablement à une visite de la duchesse de Chartres Marie-Adelaïde de Bourbon, le 6 août 1783, à Dieppe, visite durant laquelle elle reçut les honneurs militaires (Michel Claude Guibert, Mémoires pour servir à l’histoire de la ville de Dieppe, 1878, Dieppe, t. I, p. 139). Il appartient donc au même groupe de textes que le Compliment fait au Parlement de Rouen, le 19 Mars 1764, par les Poissonnieres de ladite Ville.
Ces Compliment pourraient bien s’inspirer de cas semblables survenus à Paris dans les décennies précédentes. En 1730, les Harangères de Paris adressent au roi une harangue « sur la naissance de Monseigneur le Duc d’Anjou », en style poissard. Déjà, dans le même style, étaient publiés à Paris en 1614, une Rejouissance des harangères et poissonnières des Halles de Paris sur les discours de ce temps, et en 1649, La Micaresme des harangères ou leur entretien sur les affaires de l’Estat, mais aussi, Le Caquet des poissonnières sur le departement du Roy, et de la Cour (vers 1610-1630) ; Pierre du Puy, Complot et finesse de six poissonnières et harangères pour rattraper le Tasteur (1613) ; Nouveaux compliments de la place Maubert, des Halles, Cimetière Saint-Jean, Marché-Neuf et autres places publiques, Ensemble la Resjouissance des harangères et poissonnières faite ces jours passés au gasteau de leurs reynes (1644) ; Le Caquet des marchandes poissonnières et harangères des Halles sur la maladie du Duc de Beaufort (1649) ; ou encore les Plaintes d’une fruictière et d’une harangère envoyées à la Reyne. On trouve encore, en 1791, un Compliment adressé par les dames poissonnières de Nancy à l’évêque constitutionnel Lalande lors de son arrivée en cette ville (sur les discours et compliments des poissonnières de Nancy : Ch. Courbe, Les Rues de Nancy du xvie siècle à nos jours, t. 1, 1885, Nancy, Imprimerie Lorraine, p. 244-250).
Commentaire linguistique
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