La Gazette de Renaudot

De Ratisbone, le 14 Ianvier 1683.

Le 9 de ce mois, le Collége des Princes s’assembla pour délibérer sur la question préliminaire si on entrera ici en négociation avec le Comte de Crécy Plénipotentiaire de France. Les Ministres d’Austriche ne firent pas la proposition : mais elle fut faite par le Député de Saltzbourg. Il proposa d’abord en général au Collége des Princes, de délibérer sur le Decret Impérial du 29 Décembre dernier : et il fit voir ensuite par vn discours fort éloquent, que le Collége devoit particuliérement délibérer sur deux points. Le premier, si on devoit négocier ici avec le Plénipotentiaire de France : et le second, de quelle maniére on devoit traiter. Il déclara sur le premier point, que l’Archevesque de Saltzbourg son Maistre estoit de mesme sentiment que le plus grand nombre des Estats de l’Empire, qui estoient disposez à négocier avec la France. Il dit sur le second point, qu’il croyoit que la Diéte devoit suivre en cette négociation la forme ordinaire, qui estoit de délibérer, de conclure et de porter le résultat des délibérations à la Commission Impériale, pour le communiquer ensüite par écrit, au Plénipotentiaire de France , qui donneroit aussi ses réponses par écrit. Tout le Collége, à l’exception du Député du Cercle de Bourgogne, conclut vnanimement sur le premier point, qu’il falloit incessamment entrer en négociation avec le Plénipotentiaire de France , qui avoit tous les pouvoirs nécessaires pour écouter les propositions des Estats de l’Empire. Tous les Députez furent de mesme avis sur le second point de la proposition : et ils conclurent qu’il falloit délibérer par Colléges et traiter par écrit. Il y eut néantmoins quelque différence dans les opinions touchant la maniére de s’abboucher avec le Comte de Crécy . On fut aussi généralement d’avis que la Diéte délibéreroit seulement sur ces deux points : qu’on en dresseroit vne conclusion générale : et qu’elle seroit envoyée à l’ Empereur . La délibération estant finie, le Député de Saltzbourg déclara qu’il dresseroit vne conclusion conforme à ce qui avoit esté résolu : et qu’il en donneroit part au Collége le 13 du mois, parce que le 11 estoit le 1r jour de l’an des Protestants, auquel on ne s’assembloit pas. Mais le Ministre d’Austriche fit connoistre aux Estats que le temps estoit trop précieux pour differer vne conclusion de laquelle dépendoit le repos et la seureté de l’Empire, et il conclut qu’il falloit s’assembler le 12, quoy que ce ne fust pas jour d’assemblée : que par ce moyen, on auroit le temps de faire la Rélation et Corrélation avec le Collége des Electeurs et avec le Collége des Villes, pour communiquer ensüite, la conclusion générale aux Commissaires de l’ Empereur . Le 12, le Collége des Princes s’assembla : et apres avoir mis en délibération le Décret Impérial du 29 Décembre, conclut qu’on devoit remercier l’ Empereur des soins qu’il témoignoit pour procurer la seureté de l’Empire dans l’occasion pressante du péril dont il est menacé. Sur la question préliminaire, le Collége conclut : que le Roy Tres Chrestien ayant donné pouvoir au Comte de Crécy son Plénipotentiaire de traiter et de conclure, et que ce Ministre l’ayant communiqué à la Diéte dans la forme requise, il falloit entrer incessamment en négociation avec luy, dans l’espérance que Sa Majesté Tres Chrestienne laissera le cours libre à cette négociation. Sur le second point qui régarde la maniére de traiter, il fut conclu à la pluralité des voix, qu’il falloit délibérer sur les matiéres dans les Colléges, en dresser vn résultat selon la coûtume, le communiquer à la Commission Impériale : et qu’apres l’approbation de l’ Empereur , ce mesme résultat seroit communiqué par écrit, au Plénipotentiaire de France , qui donneroit aussi ses réponses par écrit. Il fut enfin résolu que la Diéte remettroit à délibérer sur les autres matiéres contenües dans le Décret Impérial, et particuliérement sur le point de la seureté publique : et que le résultat des délibérations seroit pareillement envoyé à l’ Empereur . La Conclusion générale de l’Empire est entiérement conforme à celle du Collége des Princes.