De Ratisbone, le 31 Ianvier 1683.
La Commission Impériale qui estoit chargée de communiquer la conclusion des Estats de l’Empire au
Comte de Crécy
Plénipotentiaire de France, a trouvé de grandes difficultez à l’exécuter. L’Evesque d’Eichstet Chef de la Commission, n’ayant pas le pouvoir nécessaire,
voulut faire porter cette déclaration au
Plénipotentiaire de France
par le second Commissaire. Mais il s’excusa sur ce qu’il n’avoit pas encore rendu visite à ce
Ministre
, et sur les difficultez touchant le lieu et les circonstances de l’entrevûë. Ainsi ils firent porter la déclaration par le Maréchal de la Cour de l’Evesque d’Eichstet, qui témoigna de la part de ce Prince, comme Chef de la Commission Impériale à la Diéte, que les Estats estoient disposez à traiter icy, avec luy : et que les négociations se fissent par écrit. Le
Comte de Crécy
témoigna que cette déclaration ne regardant que les questions préliminaires, sans contenir aucune offre touchant les propositions du
Roy Tres-Chrétien
, il ne paroissoit pas nécessaire de luy en donner avis par vn Courier expres, d’autant plus que le terme prescript par
Sa Majesté
expireroit dans dix jours. Il témoigna aussi, qu’il avoit attendu que la déclaration luy eût esté portée par vn des Commissaires Impériaux, selon qu’il avoit esté résolu dans le Collége Electoral et dans le Collége des Princes. Cette réponse du
Comte de Crécy
a esté mise en délibération dans les trois Colléges, avec le décret de la Commission Impériale du 15 de ce mois. Ce décret porte, que si les Estats de l’Empire, ainsi qu’ils avoient conclu par leur dernier résultat, jugeoient à propos d’entrer en négociation avec le
Plénipotentiaire de France
, l’
Empereur
consentoit que cette négociation fût continüée selon la forme ordinaire. Ainsi les Colléges ont esté d’avis que puisque le
Comte de Crécy
n’avoit pas esté satisfait de ce que la
déclaration de la résolution de la Diéte luy avoit esté faite par vn particulier sans caractére
, le second Commissaire luy feroit vne nouvelle déclaration de ce mesme résultat des délibérations de l’Empire : et luy témoignenoit le désir qu’ils avoient d’entrer au plûtost en négociation, et de prévenir les fâcheuses suites que pourroit avoir le retardement d’un ouvrage si nécessaire pour la seureté de l’Empire, et pour le repos de toute la Chrestienté. Il fut aussi résolu que si les Commissaires de l’
Empereur
persistoient à refuser de faire cette déclaration au Comtede
Crécy
, elle seroit faite au nom de l’Empire par le Ministre de Mayence. Cette résolution détermina la Commission Impériale à faire la déclaration. Le second Commissaire en fut chargé : et il se rendit le 23, au logis du
Comte de Crécy
. Il luy dit selon le mémoire qui avoit esté dressé par la Diéte, que l’Empereur, les Electeurs, les Princes et les Estats de l’Empire estans convenus de continüer ici les négociations de la paix et qu’elles se fassent par écrit, ils avoient jugé à propos de le luy faire sçavoir et de le prier en mesme temps, d’en donner part au
Roy Tres Chrestien
son Maistre, et de tâcher d’obtenir de
Sa Majesté
vn pouvoir suffisant pour le temps nécessaire à cette négociation : et qu’ils l’asseuroient en mesme temps, que cette négociation seroit au plustost commencée. Depuis cette déclaration, les Colléges ont délibéré sur deux points principaux. Le premier, si on continüeroit la Rélation et Corrélation des conclusions publiées le 12 de Décembre, ou si l’on commenceroit à traiter avec le
Plénipotentiaire de France
, en reprenant la suite de la négociation commencée à Francfort en l’estat où elle estoit au départ des Ambassadeurs de France. Le Collége Electoral a suivi le premier avis : et le Collége des Princes excité par les Ministres d’Austriche, a suivi le second. Cette diversité d’avis n’ayant pû jusqu’à présent estre terminée, le Collége Electoral, apres avoir considéré que le terme fixé par le
Roy Tres-Chrestien
, estoit prest d’expirer, a voulu donner vn témoignage public qu’il persistoit dans sa conclusion du 12 Décembre, qui est de conclure la Paix suivant les conditions proposées par
Sa Majesté Tres Chrestienne
. C’est pourquoy il l’a fait déclarer au
Comte de Crécy
par le Directoire de Mayence : qui a mis en mesme temps, entre les mains de ce Ministre vne copie authentique de cette mesme conclusion.