De Venise, le 3 Septembre 1689.
Vn vaisseau Anglois parti de Chypre le 20 de Iuin, ayant passé à Zante, y a appris que
le Doge
continüoit le siége de Napoli de Malvasie : que cette place se trouvoit fort serrée et incommodée par les deux forts qu’il avoit cy devant fait constrüire en terre ferme, et munir de canon et de mortiers : qu’vne bombe avoit rüiné la maison du Dizdar : et que les habitans s’estoient retirez en des lieux soûterrains. Le Bacha a fait entrer dans la ville tout le bétail : et il témoignoit toûjours estre résolu à se défendre jusqu’à l’extrémité avec la garnison, qui estoit de mille hommes. Cependant, il avoit fait partir vn brigantin, pour aller demander du secours au Séraskier. Le sieur Pisani Capitaine des navires devoit aller du costé de l’Isthme de Corinthe, pour y débarquer encore des troupes, outre celles qui y sont arrivées : et ensüite croiser pour assurer le passage aux vaisseaux. Le Capitan Bacha, selon ces derniéres nouvelles, estoit à Chio avec ses galéres, quoyque ce lieu fût infecté du mal contagieux : et ses vaisseaux estoient du costé du Golfe de Volo. On a eu avis par des lettres de Malte, que l’armée Vénitienne et les galéres de la Religion faisant voile vers l’Archipel, avoient pris deux vaisseaux d’Alger, et en avoient coulé deux à fond. Vn Caïque de Dalmatie a rapporté que le sieur Molino Provéditeur Général, ayant assemblé sept mille hommes d’infanterie de troupes reglées ou de Morlaques, s’estoit embarqué pour aller attaquer la Gabelle et vn autre poste vers Narenta : et que le sieur Antonio Lorédano avoit pris la mesme route par terre, avec la cavalerie payée et d’autres Morlaques. Hier, le Cardinal Bonvisi arriva icy de Vienne en poste : et il en partit en mesme temps, pour se rendre incessamment à Rome. Les Cardinaux Barbarigo et Delfino estoient partis la semaine passée pour s’y rendre.
Le 27 du mois dernier, il s’éleva icy vne tempeste mélée de foudres, l’vn desquels tomba dans le lieu où on fait les poudres en la petite Isle de S. Angélo, à deux milles de cette ville : et y mit le feu
. On en avoit peu de temps au--paravant, tiré cinq cents barils pour les mettre sur vn convoy qui est prest à partir pour le Levant.