D'Ausbourg, le 30 Octobre 1689.
Le 26 de ce mois,
l'Electeur de Baviere
arriva ici en poste : et il en est parti ce matin, pour se rendre à Munich. On attend dans peu de jours,
l'Electeur de Treves
. Mais les Electeurs
de Brandebourg
et
de Saxe
n'arriveront que le 16 du mois prochain : et on ne croid pas mesme que le dernier vienne si tost, à cause des différents survenus pour la succession du Duc de Saxe Lawembourg.
Le Prince Charles de Lorraine
doit arriver ce soir. Il travaillera avec les Députez des Cercles, à régler les quartiers d'hyver des troupes Imperiales et Confedérées. Les Députez du Cercle de Süabe ont déja eu sur ce sujet, plusieurs conférences avec les Commissaires de
l'Empereur
: et on assure qu'ils ont accordé vn million six cents mille florins pour l'établissement des magasins de la Campagne prochaine. On dit présentement, que la Diéte Electorale pour l'élection d'vn Roy des Romains, ne s'assemblera pas avant que tous les Electeurs soient arrivez. Le Prince Palatin Coadjuteur de cet Evesché a esté dangereusement blessé à la teste : son carosse estant versé. Il y a ici tous les jours quelque desordre entre les officiers et domestiques de
l'Empereur
, des Electeurs, et des Princes : et plusieurs de ceux de
Sa Majesté Impériale
et de l'
Electeur de Mayence
ont esté tüez et blessez. Ceux qui avoient crû que
l'Empereur
manquoit d'argent n'en sont pas bien informez, puisqu'il vient de refuser vn présent du
Duc de Savoye
d'vn million de florins que
ce Duc
luy a offerts, pour obtenir de luy les mesmes traitements qu'il reçoit du
Roy de France
, en qualité de Roy de Chypre.
Ce mesme Prince
, c'est à dire
le Duc de Savoye
, offre encore des sommes plus considérables, s'il plaist à
Sa Majesté Impériale
de luy vendre les fiefs Impériaux qui sont enclavez dans ses Estats ou dans les terres de la République de Génes : et comme les Ministres de
l'Empereur
auroient pû appréhender que
ce Prince
ne fût pas en estat de payer de si grosses sommes, celuy qui estoit chargé de la négociation, s'est offert de payer argent comptant, les sommes qu'il offroit en recevant les expéditions qu'il demandoit : ce qui confirme le brüit qui avoit couru depuis quelque temps, que
le Duc de Savoye
avoit des sommes considérables en argent comptant, dans la Citadelle de Turin.