De Londres le 31 Mars 1689.
Le 24 de ce mois, on leut vn projet d’acte pour empescher le transport des laines : et ensüite la Chambre Basse tournéeen Committé délibéra sur la proposition faite par
le Prince d’Orange
, de rembourser aux Hollandois six cents mille livres sterlin qu’ils luy ont fournis et qu’il a dépensez pour se rendre maistre du Royaume. Apres plusieurs contestations, il fut résolu que le lendemain, vn Committé délibéreroit sur les moyens de trouver cette somme. On leut aussi vn projet d’Acte pour abolir les anciens serments d’Allégéance et de Suprémacie, et pour prester les nouveaux. Les Seigneurs en firent lire vn pour modérer les loix Pénales contre les Protestants Nonconformistes. Le 25, il fut résolu de mettre en parchemin et de donner la derniére forme à vn Acte pour faire recommencer les séances des Cours de Iustice.
Le sieur Harbort avertit les Communes, que quinze cents hommes du régiment de
Dumbarton
et des fuseliers de Darmouth qui devoient estre embarquez pour passer en Hollande, s’étoient
révoltez à Ipswich
, où ils s’estoient saisis de quatre piéces de canon, et de l’argent destiné à payer les troupes : et qu’ils avoient pris le chemin du Nord.
La Chambre sur ce message, résolut de prier
le Prince d’Orange
de remédier à ce desordre selon sa prudence, et de faire vne proclamation pour déclarer traistres tous les déserteurs : ordonnant que les officiers qui sont membres de la Chambre partiroient incessamment se rendroient à leurs quartiers. L’Adresse fut envoyée aux Seigneurs pour avoir leur approbation. Le 26, sur les plaintes faites à la Chambre Basse, de ce qu’il y avoit encore vn grand nombre de Catholiques dans la ville nonobstant les défenses, il fut résolu d’en dresser vn Acte pour les obliger de s’en éloigner. Il fut ordonné d’en dresser vn autre, pour remettre toutes les Communautez de ce Royaume en l’estat où elles estoient en 1660.
Le Prince d’Orange
se rendit à la Chambre des Seigneurs, revestu des habits Royaux : et ayant mandé les Communes, il donna son consentement à l’Acte qui luy donne pouvoir de faire arrester et tenir en prison toutes sortes de personnes qu’il soupçonnera de conspirer contre le gouvernement présent. Il approuva aussi vn autre Acte pour casser et annuller la procédure criminelle faite contre Mylord
Russel
. Ces deux nouvelles loix estoient nécessaires : la premiere, pour mettre vn nouvel obstacle à tous les sujets de rentrer dans leur devoir : et la deuxiéme, pour justifier plusieurs membres de la Convention, qui suivant les loix fondamentales, méritent le mesme supplice, que les conspirateurs dont ils prétendent justifier la mémoire. Il leur dit ensüite, qu’apres avoir approuvé ces Actes qui establissoient, comme il espéroit, leur entiére seureté, il les vouloit leur declarer vne chose qui contribüeroit à leur procurer le repos et à rompre les mesures de leurs ennemis. Qu’il pensoit à remplir le plus promtement qu’il seroit possible, toutes les charges vacantes : qu’il sçavoit, selon qu’ils le reconnoissoient eux mesmes, que tous ceux qui rempliroient ces places ne pouvoient y estre admis sans prester serment : qu’ainsi il leur recommandoit de regler promtement cette affaire : ne doutant pas qu’ils ne prissent les précautions necessaires pour exclure les Catholiques de tous emplois, et pour faciliter les moyens d’y admettre tous les Protestants qui voudroient entrer dans le service et qui en seroient capables. La veuve de Fitzharys présenta vne requeste pour faire réhabiliter la mémoire de son mary : et elle fut tres bien reçeüe.
Le mesme jour, on publia vne proclamation qui contenoit que les Seigneurs et les Communes assemblez en Parlement avoient informé
le Prince d’Orange
que plusieurs officiers et soldats rebelles travailloient à exciter la guerre contre luy : et que plusieurs personnes se joignoient à eux : que les deux Chambres l’avoient ensüite prié de déclarer traistres tous ceux qui se joindront à eux, et d’ordonner à tous les sujets de courir sus : qu’en consequence de cette priére,
le Prince d’Orange
déclare rebelles et traistres tous ces officiers et soldats : et ordonne qu’ils soient arrestez et poursuivis selon la rigueur des loix, qui jusqu’à présent n’avoient esté entendües que de ceux qui prenoient les armes contre leurs légitimes Souverains, en faveur des vsurpateurs.
Le mesme jour, des officiers du régiment de Mylord
Mordant
qui est en garnison à Porsmouth, presentérent vne adresse pour assurer
le Prince d’Orange
de leur attachement à son service. Ceux du régiment des Gardes commandé par le Ducde
Northumberland
en avoient peu de jours auparavant, presenté vne semblable. On publia le mesme jour, vne proclamation pour fixer le jour du couronnement au 21 du mois prochain, et pour établir des Commissaires qui régleront les prétentions de tous ceux qui par leurs charges ou par leurs fiefs, ont droit d’y faire quelques fonctions.
Le Prince d’Orange
nomma aussi de nouveaux
Gouverneurs
des Provinces de ce Royaume. Le 28, on leut dans la Chambre Basse, trois projets d’Actes : l’vn pour la levée d’vn subside de quatre cents vingt mille livres sterlin : le deuxiéme, pour casser les anciens serments : et le troisiéme, pour différer la tenüe des Assises. Ils furent approuvez et envoyez aux Seigneurs. On en leut vn autre pour punir les soldats déserteurs et les officiers qui rendroient leurs Commissions. On communiqua aux deux Chambres, vne lettre qui contenoit que Mylord
Preston
, le Major Fenwick et d’autres personnes de qualité assembloient dans le Nord, des troupes pour le service du
Roy
: et on a tâché de faire passer cette nouvelle pour suspecte.
On leut pour la premiere fois, l’acte pour abolir l’impost sur les cheminées.
Le 29, sur ce que la Chambre remarqua que le nombre des Députez diminüoit tous les jours, plusieurs s’estant retirez sous divers prétextes d’affaires particuliéres, il fut ordonné que le Greffier en dresseroit vne liste : et vne autre de ceux qui n’ont pas presté les nouveaux serments. Vn Committé fut nommé pour examiner les loix dont le temps est expiré, afin d’en renouveller quelques vnes. La Chambre en grand Committé, examina à quoy monteroit la dépense de la levée de vingt mille hommes et des équipages d’artillerie pour envoyer en Irlande : et il fut jugé à propos de charger vn Committé particulier de cette affaire.
Il fut ordonné qu’vn Bill seroit présenté pour naturaliser tous les Protestants Estrangers qui sont en Angleterre.
Le 30, on présenta vne requeste contre Mylord Chancelier. Les Seigneurs mandérent qu’ils approuvoient l’acte pour accorder au
Prince d’Orange
, vn subside extraordinaire de quatre cents vingt mille livres sterlin. La Chambre examina les revenus de la Couronne : et conclud qu’ils seroient reduits à douzecents mille livres sterlin en temps de paix. Elle establit ensuite vn Committé pour délibérer sur les moyens d’entretenir de fortes garnisons dans les villes maritimes, et de les pourvoir d’artillerie ainsi que de toutes les autres choses nécessaires pour leur défense. On leut vn projet d’acte pour rendre incapables de tous emplois et bénéfices, ceux qui refuseroient de prester les nouveaux sermens. Quelques vns proposérent d’en excepter les Evesques : mais cet avis fut rejetté à la pluralité des voix. Ceux qui ne les ont pas prestez continüent à s’absenter de la Convention. Aujourdhuy,
le Prince d’Orange
est allé à la Chambre des Seigneurs : et ayant mandé les Communes, il a approuvé l’acte du subside extraordinaire de quatre cents vingt mille livres sterlin. Le Chevalier
Sidney
a reçeu vne commission pour lever vn nouveau régiment à la place de celuy de
Grafton
qui a esté cassé : les officiers et les soldats ayant la pluspart déserté, apres avoir plusieurs fois refusé de passer en Hollande.
Le Prince d’Orange
détacha il y a quelques jours, trois régimens de cavalerie et vn de dragons avec ordre de poursuivre ceux qui se retiroient en Escosse. On dit que quatre ou cinq cents hommes ont esté surpris pres de Seaford dans la Comté de Lincoln : et que plusieurs ont esté arrestez, sur lesquels on prétend faire exécuter le nouveau réglement, pour tâcher d’empescher la désertion du reste des troupes. Les autres au nombre de plus de mille se sont retirez dans le Nord. Les nouvelles d’Escosse sont fort incertaines. On a seulement sçeu que la Convention s’estoit assemblée le 24 : que le Duc d’
Hamilton
avoit esté élû Président : et qu’on n’y avoit pris encore aucune résolution. On a affecté de publier qu’elle avoit résolu de reconnoistre
le Prince d’Orange
: mais cet avis n’a pas esté confirmé, et plusieurs espérent qu’elle prendra des résolutions conformes à son devoir.