De Francfort, le 6 Septembre 1689.
La nüit du 27 au 28 du mois dernier, on continüa de travailler à vne ligne parallelle à l’attaque des Impériaux. Il y eut cinquante ou soixante soldats tüez ou blessez : et le Colonel Schot fut dangereusement blessé. La nüit du 28, on acheva la ligne parallelle, avec perte de plusieurs soldats tüez et blessez : entre lesquels estoit vn des principaux Ingenieurs. Le mesme jour, on jetta des bombes et des grenades dans le chemin couvert : et pendant la nüit suivante, on fit vn feu continüel des deux grandes batteries contre la place. Le 29, les assiegez ayant remarqué que les mines des assiegeans estoient sous les leurs, en firent sauter vne qui étouffa quelques mineurs. Il y eut ce jour là, plusieurs soldats tüez et blessez. Le 30, les deux grandes bateries continüerent de tirer contre la place : et firent quelque dommage aux courtines et aux bastions. Le Comte de Reus General Major des Saxons eut la mesme nüit, le bras gauche cassé dans la tranchée : où il y eut plus de quarante soldats tüez et quantité de blessez. Le 31, on continua de pousser la sape pour s’approcher de la contrescarpe. Le 1r de ce mois, les assiegez firent encore joüer vne mine à la droite de l’attaque de Lunebourg. Ils en découvrirent vne des assiegeans qui estoit proche : et ils y firent des fougades qui estouferent quelques mineurs et obligerent les autres à se retirer. Le mesme jour, les assiegez travaillérent à vne nouvelle mine, à la gauche : maiselle n’eut aucun effet, les assiégeants en ayant fait joüer vn autre. Sur le soir, les assiégez jettérent dans la tranchée quantité de pierres avec des mortiers : et il y eut vn grand nombre de soldats tüez. Vn Capitaine fut tüé la nüit süivante, avec vingt soldats : et il y en eut plus de quarante blessez. Le 2, on travailla à vne batterie de cinq piéces de canon à quatre cents pas du pont des Saxons et des Bavarois, et à vne traverse pour empescher les François de descendre le Rhin et de jetter du secours dans la place. On commença aussi vne galerie à la droite de la mesme attaque : et on avança vne ligne vers les palissades, avec vne redoute à la teste. Deux Lieutenants et plusieurs soldats du régiment de Flemming furent tüez en cette occasion : et il y en eut vn plus grand nombre de blessez. On dressa à quarante pas de la redoute de S. Georges, vne batterie de quatre piéces de canon pour tâcher de rüiner le retranchement que les assiégez conservoient encore pres la Iustice. Ils sortirent la nüit suivante, armez de faulx sur les travailleurs de l’attaque des Saxons et des Bavarois : et ils y tüérent encore vn grand nombre de soldats. Le 3, on apprit par quelques transfuges, qu’ils avoient fait plusieurs coupures et retranchements derriére les bastions de Boniface et d’Aléxandre. Tout le jour se passa à faire vn grand feu de canon de part et d’autre. Le Duc Christian de Saxe-Hall Lieutenant Général des troupes de Saxe, sortant de la tranchée, reçeut à la teste vn coup d’arquebuse, dont il mourut deux heures apres. Il n’y eut cette nüit là, qu’environ vingt soldats tüez et autant de blessez. Le 4,
l’Electeur de Saxe
, sur l’avis de la mort du Duc Christian, retourna d’icy au camp : où il n’y a presque plus d’officiers en estat de commander les troupes de Saxe, le sieur Flemming qui en est Maréchal de Camp général estant toûjours malade en cette ville. Le mesme jour, on continüa de faire feu contre la place, des deux grandes batteries : et de s’avancer par la sape vers la contrescarpe. Sept mille hommes des troupes de Hanover sont arrivées dans la Wétéravie, pour venir renforcer l’armée devant Mayence. Des deserteurs
ont assuré que la garnison commençoit à manquer de poudres : ce qui reléve l’espérance des assiégeants.