De Londres, le 29 Aoust 1689.
Le 25 de ce mois, les Seigneurs passerent l’Acte qui leur avoit esté envoyé par les Communes pour établir vn fond de six cent mille livres sterlin, et vn autre de soixante mille livres : le premier pour dédommager les Hollandois de la dépense qu’ils ont faite pour l’entreprise du
Prince d’Orange
: l’autre doit estre employé à payer les pensions qui estoient encore dües aux officiers du
feu Roy
. La Chambre-Basse travailla ensüite, au projet d’Acte pour prévenir les conspirations contre le gouvernement présent, et apres quelques additions, il fut résolu de le mettre au net.
Le 26, elle fut occupée à examiner diverses plaintes, contre le Gouverneur de Hull, sur ce que de son autorité particuliére il a imposé des droits sur les vaisseaux qui entrent et qui sortent, sous prétexte de payer la chaîne qui défend l’entrée du port.
Il fut cité à comparoistre le lendemain à la Chambre, qui a déclaré que cette exaction estoit contre la liberté publique et contre les loix, aussi bien que les violences qui ont esté faites en plusieurs endroits par les officiers des troupes, en ouvrant les lettres des particuliers, mesme de quelques Députez de la Chambre. Le tumulte arrivé à l’occasion de la défense des manufactures de soye fut mis en délibération : et il fut résolu d’en rechercher les auteurs, dont quelques-vns ont esté emprisonnez. L’Acte pour prévenir les conspirations contre le gouvernement present fut lû pour la derniére fois, et envoyé aux Seigneurs avec cette clause : que les biens confisquez du Comte de Salisbury seroient employez en partie à entretenir vn de ses fréres qui est Protestant : et que sur le surplus on prendroit des sommes pour marier ses sœurs. Le 27, les interessez à la Compagnie de Hambourg, de Russie, et de Turquie, qui n’avoient pû obtenir des Communesque leurs Advocats fussent entendus pour expliquer les raisons qu’ils avoient de se plaindre du nouvel Acte pour le transport des laines, furent admis à la Chambre des Seigneurs. Leurs remonstrances n’empeschérent pas la troisiéme et derniére lecture de l’Acte : mais on y ajoûta qu’il ne pourroit faire aucun préjudice aux priviléges de ces Compagnies : et que la ville de Southampton pourroit nonobstant le mesme Acte, négocier tous les ans vne certaine quantité de laines avec les Isles de Iersey et de Guernsey, d’Aldernay et de Sark. Le 29, la Chambre-Basse reçeut vn Acte envoyé par les Seigneurs, touchant vn réglement pour la levée des petites dixmes. Elle y fit quelques changements : et rejetta la clause par laquelle il estoit déclaré que cet Acte ne pourroit porter préjudice aux droits des Evesques, des Archidiacres et de tout le Clergé. Vn Committé fut chargé de mettre par écrit les raisons de cette contrarieté : et la Chambre persista dans son premier avis, sans vouloir de conférence sur ce sujet avec les Seigneurs. Le 30, il y eut de semblables contestations sur l’Acte envoyé par les Seigneurs, pour traiter comme criminels de Haute-Trahison ceux qui sont en armes en Irlande, avec
le Roy
. Mais les clauses ajoûtées à celuy par lequel tout commerce est défendu avec la France furent approuvées. Il fut résolu de demander au
Prince d’Orange
qu’il fasse expédier vne Commission d’Oyer et Terminer pour faire le procez à ceux qui demeurent fidéles au
Roy
, et qu’il établisse vne pension à Titus
Oats
, dont l’affaire n’a pû estre terminée, à cause de l’opposition des Seigneurs. Le grand Huissier vint le jour mesme avertir les Communes de se rendre à la Chambre Haute, où
le Prince d’Orange
revestu des habits Royaux, approuva plusieurs Actes. Le premier pour ordonner que les deniers provenants de certains droits nouvellement imposez seront destinez à payer six cents mille livres sterlin aux Estats Généraux des Provinces-Vnies. Le second pour défendre tout commerce avec la France. Le troisiéme pour défendre le transport des laines hors du Royaume, et pour en favoriser les manufactures. Le quatriéme pour établir des Commissairesà la recepte du droit de douze sols par livre sterlin accordé durant vn an pour la défense du Royaume. Le cinquiéme pour assister le Clergé Protestant d’Irlande. Le sixiéme pour révoquer vne loy de Henry IV, touchant la multiplication de l’or et de l’argent : et trois autres pour des affaires particuliéres. Ensüite, le Marquis d’
Hallifax
Garde du Seau Privé, declara aux deux Chambres que
le Prince d’Orange
vouloit qu’ils se séparassent jusqu’au 30 de Septembre : qu’alors mesme son intention estoit de remettre les séances jusqu’à l’hyver : et que s’il arrivoit quelque affaire importante qui obligeât de les rassembler plustost, il leur feroit sçavoir sa volonté par vne proclamation. Les Chambres se sont séparées en exécution de cet ordre. Le 26,
le Prince d’Orange
fit la reveüe des troupes campées à Honslowheat : et elles se séparérent le 29. Vn courier dépesché par le Maréchal de
Schomberg
, arriva icy le 29 : et il rapporta qu’il estoit arrivé le 23 à Bangor dans la Comté de Down en Irlande, et qu’il commençoit à y faire débarquer les troupes. , avec le Lieutenant Général
Macartie
. Les régiments du Comte de Meath et du Comte de Roscommon se sont embarquez à Chester pour passer en Irlande.