De Paris, le 24 Iuillet 1683.
Le
Marquis du Quesne
Lieutenant Général des armées navales du
Roy
, arriva le 4 du mois dernier, aux Isles Fromentiéres, où les galiotes servant aux bateries de mortiers arrivérent le 9e : et apres avoir attendu les galéres jusqu’au 15e, il fit voile et arriva devant Alger le 18. Il y trouva l’escadre des vaisseaux du
Roy
commandée par le Marquis d’Amfreville Chef d’escadre. Il donna ses ordres pour préparer tout ce qui estoit nécessaire pour l’attaque : et le 26, apres minüit on commença à tirer des bombes. On en jetta quatre vingt dix qui tombérent la pluspart sur le Mole, dans le port et dans les maisons les plus avancées. Les ennemis tirérent cependant, plus de six cens coups de canon sans faire aucun dommage. Le 27, le
Marquis du Quesne
fit tirer cent dix bombes qui firent vn grand effet : et les ennemis tirérent plus de six cens coups de canon. Le Sieur de Choiseul Enseigne du Prudent, et deux soldats furent tüez d’vn mesme coup dans vne chaloupe. Le 28, Baba Hassan envoya dés le matin, vn Député pour demander la paix au nom du Divan. Le
Marquis du Quesne
luy répondit qu’il ne vouloit écouter aucune proposition qu’apres que ceux d’Alger luy auroient renvoyé tous les
esclaves François
et tous ceux des autres Nations
qui avoient esté pris sous la Baniére de France. Baba Hassan deux heures apres, envoya le mesme Député que le
Marquis du Quesne
ne voulut point écouter. Il revint sur le soir : il promit qu’on renvoyeroit tous les
esclaves François
: et il supplia le
Marquis du Quesne
de ne point faire tirer la nüit süivante : ce qu’il luy accorda. Le 29, ceux d’Alger amenérent
cent quarante vn esclaves
: entre lesquels estoit le sieur de Beaujeu Capitaine d’vn vaisseau du Roy, qui avoit esté vendu onze mille deux cens piastres : et on sçeut que les bombes avoient causé vn tres grand desordre et vne
consternation générale
dans la ville. Le 30, les Algériens amenérent en core
cent vingt quatre esclaves
. Le 1r de ce mois, ils en amenérent cent cinquante deux : et ils priérent le
Marquis du Quesne
de la part de Baba Hassan, de leur accorder la liberté des Algériens qui avoient esté pris sur vne Caravelle dont le Chevalier de Léry se rendit maistre il y a quelque temps. Mais cela ne luy fut pas accordé. Le 2, ils amenérent
quatre vingt deux esclaves
. Ils ont continüé de-depuis, à en amener d’autres : et ils en avoient rendu jusqu’au 5e de ce mois, cinq cens quarante six, avant que le
Marquis du Quesne
eût écouté aucune proposition de paix. Ces Préliminaires dont on ne trouve aucun exemple, font espérer qu’ils seront süivis d’vn succez aussi avantageux pour la gloire du
Roy
que pour la seureté du commerce de ses sujets. Le
Roy
reçeut à la Ferté Sous-Ioüare ces nouvelles, qui avoient esté apportées par le sieur le Moteux.
On en donnera vne Rélation exacte au public, au commencement de la semaine prochaine.