De Cologne, le 8 Iuin 1683.
Les Corps des Métiers dont toute la Bourgeoisie de cette ville est composée, se rassemblérent le 30 du mois dernier, dans leurs maisons de Communauté : et ils continüérent
avec plus de chaleur qu’auparavant, à demander satisfaction
sur leurs griefs. Le Magistrat qui ne se crût pas en seureté dans l’Hostel de Ville, y fit
venir la soldatesque
: mais ces Communes encore plus irritées par cette précaution du Magistrat qui leur fit juger qu’il n’avoit aucune intention de les satisfaire, firent le 2 de ce mois,
déployer leurs drapeaux aux fenestres des maisons de Communauté
: et ils envoyérent quelques vnes de leurs compagnies les mieux armées vers la Maison de Ville, avec ordre de s’en faire ouvrir les portes. Le Colonel qui commande la garnison, voulut se mettre en défense : mais les soldats refusérent d’obeïr à ses ordres, disans qu’ils ne devoient point agir contre les Communes, desquelles ils recevoient leur subsistance. Ils abandonnérent en mesme temps, les portes à leurs compagnies, qui entrérent ainsi dans la Maison de Ville sans qu’il y eût aucun coup tiré de part ni d’autre. Les soldats furent renvoyez à leurs quartiers : et le Colonel fut arresté et condüit à la maison de Communauté des Chaudronniers. Les Communes se saisirent des portes de la Maison de Ville, de l’Arsenal et des magasins : et elles
s’asseurérent aussi des autres postes de la Ville.
Ensüite, elles firent arrester le Syndic Iudendonck et le sieur Hesselman Secrétaire de la Chancellerie, qui furent menez à leurs maisons de Communauté. Ils ont déposé plusieurs choses contre quelques vns de nos Bourgmestres et contre quelques Membres du Magistrat : et trois de ces Bourgmestres ont esté citez le 6 et le 7 de ce mois, à comparoir devant des Commissaires nommez par les Bourgeois pour examiner l’estat des Finances, les Registres de la Maison de Ville, et la condüite du Magistrat. Ces Commissaires doivent aussi travailler à l’exécution sursise depuis trois ans, des jugements rendus contre les principaux de la ville. Le Magistrat s’assemble cependant, tous les jours pour prendre les résolutions nécessaires en vne occasion si pressante. L’
Empereur
avoit nommé dés le mois de Mars, l’
Electeur de Tréves
pour accommoder ces différents : mais le Baron de Leyen qui estoit venu ici de la part de son
Altesse Electorale
, ne présenta sa commission que le jour que le desordre arriva. Ainsi, il fut obligé de s’en retourner le lendemain à Coblentz, sans avoir pû rien obtenir. Le Député du Duc de
Neubourg
s’en retourna aussi le mesme jour. L’
Evesque de Strasbourg
revint ici le 15, de son voyage de Westphalie : et les Bourgeois qui estoient en garde aux portes le laissérent entrer avec sa süite, en luy rendant tous les honneurs qui luy estoient dûs. On écrit de Neuhaus, que l’
Evesque de Munster
est toûjours fort malade de la pierre : et qu’il se disposoit à se faire tailler. Le sieur Conrad Guillaume de Wertenau Doyen de la Cathédrale de Wirtzbourg, a esté élû Evesque de la mesme Eglise.