De Francfort, le 30 Aoust 1689.
La nüit du 22 au 23 de ce mois, on continüa de travailler à découvrir les mines des assiegez. Le 23, les fourageurs furent chassez et poursuivis par les partis des François, jusqu’à deux lieuës du camp. Le mesme jour, douze pieces de canon qui ont esté fournies par la Regence de cette ville arriverent au quartier des Saxons. Vn assez grand nombre de mousquetaires de
l’Electeur de Baviere
qui estoient à la tranchée deserterent ce jour là : quelques vns furent arrestez et executez à mort : et les autres se jetterent dans laplace : ce qui fait juger qu’on ne croid pas mesme parmy les assiegeants qu’elle soit en estat d’estre si tost prise. Le 24, on continüa de travailler à des mines pour faire sauter les palissades plantées sur la hauteur du glacis de la contrescarpe. Le 25 au soir, on jetta de l’attaque des Imperiaux, des bombes dans la contrescarpe et dans la ville. La nüit du 25 au 26, les assiegeants firent joüer vne mine à l’angle gauche de l’attaque du chemin couvert : et y firent vn logement. Le Prince Palatin de Weldentz fut blessé à mort dans la tranchée. Le 26, les Impériaux firent plusieurs puits et découvrirent quelques mines. La nüit du 26 au 27, on continüa de pousser la sape vers le pied du glacis. Le 27, la baterie des Saxons et des Bavarois fut achevée : et on y mit quelques pieces de canon et des mortiers. Le 28, apres trois salves de toute la mousqueterie du camp, et avoir jetté à chaque salve, huit bombes dans la place, au son des trompettes, des tymbales et des tambours, on commença sur les six heures du matin, à faire feu de cette baterie. On fit aussi vn grand feu de la baterie des Impériaux et de celle de Lunebourg. Les assiegez parurent en mesme temps sur les remparts, et firent vn feu continüel au son des hauts bois : témoignant ainsi qu’ils estoient peu estonnez de tout ce grand fracas des assiegeants. Ces deux bateries tirerent tout le 28, sur les bastions de saint Iacques, de saint Martin, d’Alexandre et de Boniface ainsi que sur les courtines. La nüit du 28 au 29, on continüa les travaux des deux attaques : et il y eut vn assez grand nombre de soldats tüez et blessez. Le 29, les mineurs déouvrirent quelques mines : et on ne doute point qu’il n’y en ait encore beaucoup d’autres : ce qui met les Generaux dans vne grande irresolution. Suivant les dernieres nouvelles, les assiegeants estoient encore assez loin de la contrescarpe : et la pluspart de leurs travaux estoient enfilez par le canon de la place d’où l’on fait tousjours vn feu continüel. La dysenterie est dans l’armée : et plusieurs officiers en sont attaquez. Le sieur Muller Capitaine et Ingenieur des Impériaux mourut le 28, des blessures qu’il avoit reçeuës quelques jours auparavant.