De Londres, le 28 Iuin 1683.
Le 22 de ce mois, la Cour de Iustice du Banc du Roy, apres
avoir examiné les défenses et les repliques des Avocats, sur l’action intentée au nom de Sa
Majesté
contre les priviléges et les libertez de cette ville, prononça la Sentence. Le sieur Iones vn des Iuges de la mesme Cour, présida à la place du sieur Sanders Chef de Iustice, qui estoit indisposé. Il rapporta en peu de mots, ce que l’Attorney ou Procureur Général avoit dit pour soûtenir les droits du
Roy
: et il exposa ensüite, ce que les Avocats de la ville avoient dit pour sa défense. Il dit que l’affaire se rédüisoit à deux principales questions. La premiére, si vne ville où vne Communauté faisant Corps, pouvoit perdre ses priviléges accordez par les Lettres patentes de son établissement. La deuxiéme, si le
Maire
et les Bourgeois de Londres avoient encouru cette peine en faisant des levées de deniers sur le peuple, sous prétexte de l’entretien des marchez publics, et en présentant au
Roy
vne
requeste séditieuse et injurieuse
apres la prorogation du Parlement tenu à Westminster. Le sieur Iones déclara que selon l’avis de tous les Iuges et de Mylord Chef de Iustice qu’ils avoient consulté, les priviléges et les franchises d’vne Communauté, pouvoyent estre confisquez et saisis entre les mains du
Roy
, lors qu’elle manquoit à quelqu’vne des conditions prescrites par les lettres de son établissement, ou quand elle abusoit de son pouvoir à la foule du peuple, et en quelque autre maniére préjudiciable au bien public. Que le pouvoir vsurpé par le Maire et le Corps de Ville, en
levant des deniers de leur propre autorité
, estoit à la foule du peuple, et qu’en cela ils avoient abusé du pouvoir de leurs charges : et que cette raison suffisoit pour la confiscation de leurs priviléges. Qu’ils avoient encouru la mesme peine en présentant au
Roy
vne
requeste séditieuse apres la prorogation du Parlement, et en la faisant imprimer et distribüer parmi le peuple, pour rendre odieux la personne du Roy et le gouvernement présent
. Le sieur Iones déclara ensüite que le
Quo Warranto
ou Acte présenté au nom de Sa Majesté par son Procureur Général, estoit fondé en droit : et que les plaintes contenües dans l’information donnée à la Cour de Iustice contre le Corps de Ville, estoient légitimes. Que les réponses et les défenses des Avocats de la Ville n’estoient pas suffisantes, puisque le droit du Roy estoit fondé sur la
grande Charte
, sur plusieurs Actes du Parlement, et particuliérement sur la formule des Actes de pardon général accordez par Sa
Majesté
et par les Roys ses prédécesseurs, dans lesquels les Communautez estoient comprises aussi bien que les particuliers. Qu’ainsi, comme les fautes des particuliers estoient punies par la confiscation de corps et de biens, celles des Communautez estoient punies par la confiscation de leurs priviléges. Enfin, il conclut que par toutes ces raisons, et par plusieurs autres contenües dans le procez, le
Maire
, les Bourgeois et la Communauté de cette Ville estoient décheus de leurs priviléges, franchises et libertez. Le Procureur Général demanda que l’enregistrement et l’exécution de la Sentence fussent sursis, jusqu’à ce que le
Roy
eût déclaré sa volonté. Le lendemain, Sa
Majesté
ordonna que l’enregistrement fut différé jusqu’à nouvel ordre. Le 24, le Conseil de la ville s’assembla : et il y fut résolu d’vn consentement vnanime, qu’on présenteroit vne Adresse au
Roy
, pour déclarer à
Sa Majesté
que le Corps de Ville reconnoissoit avec douleur les fautes commises par les Magistrats depuis quelques années, dans le Gouvernement de la ville, qui avoient donné lieu à la Sentence qui venoit d’estre rendüe : que la ville en demandoit pardon au
Roy
, et se soumettoit entiérement, à ce qu’il luy plairoit d’ordonner. Il fut aussi résolu que Sa
Majesté
seroit priée de recevoir les remercimens du Corps de Ville, pour avoir par son autorité, sursis l’exécution de la Sentence de la Cour de Iustice, et que
Mylord Maire
nommeroit des Députez, pour présenter sur ce sujet vne Adresse à Sa
Majesté
. Il est allé aujourd’huy, avec ces Députez trouver le Roy à
Windsor
: et Mylord Garde des Seaux, leur a déclaré que Sa
Majesté
vouloit traiter favorablement la Ville, si elle se soûmettoit à quelques réglements qui leur ont esté en mesme temps communiquez.
Mylord Maire
déclara le 17 de ce mois, süivant l’ancienne coûtume, le sieur Daniel Alderman pour vn des
Shérifs
de l’année prochaine en beuvant à sa santé. Mylord Iacques Cécil Comte de Salisbury Chevalier de la
Iartiére
mourut le mesme jour en cette ville.