De Génes, le 1r Novembre 1689.
Le 27 du mois dernier, le sieur Carlos de Baçan Envoyé Extraordinaire d’Espagne, eut audience publique des Colléges. Il leur fit vn long discours par lequel il leur fit entendre que
le Roy d’Espagne
ayant appris que le
Duc de Mantoüe
faisoit fortifier Guastalla, contre les conditions spécifiées dans l’Acte de l’investiture de ce Duché, et que
Sa Majesté Catholique
ayant jugé que ce dessein pouvoit avoir des suites fâcheuses pour le repos de l’Italie, avoit ordonné au Comte de Fuensalida Gouverneur du Milanez, de faire avancer des troupes vers Casalmaggiore, pour obliger le
Duc de Mantoüe
à faire cesser les travaux de Guastalla, et l’y contraindre en cas qu’il ne se rendît pas aux raisons qui luy devoient estre alléguées. Que le Gouverneur du Milanez avant que de s’ensanglanter les mains, avoit fait avertir le
Duc de Mantoüe
de cette résolution : et qu’il attendoit sur ce sujet, vne réponse positive à Casalmaggiore, avant que d’entrer dans le Mantoüan.Cette déclaration n’a pas persüadé le public, que les Espagnols n’eussent quelque autre dessein. Les Religionnaires rebelles qui ont tenté avec peu de succez, de rentrer dans les vallées de Piémont, assurent que cet armement se fait en leur faveur, à la recommandation du
Prince d’Orange
: leurs chefs s’estant plaints qu’ils avoient esté obligez d’abandonner leur dessein, faute du secours qui leur avoit esté promis par les Espagnols. D’autres en jugent différemment : mais tous sont persüadez que quel que soit leur dessein, il ne peut estre que fort préjudiciable à la Religion Catholique, et au repos de l’Italie : et il y a lieu de craindre que les Espagnols, apres s’estre servis d’vn si foible prétexte contre le
Duc de Mantoüe
, ne fassent encore de pareilles insultes à tous les autres Princes d’Italie, qui ne voudront pas embrasser les interests de la Maison d’Austriche. Le 28, les vingthuit galéres de France qui avoient esté obligées de s’arrester à cause du mauvais temps, partirent pour retourner vers les costes de Provence.