De Hambourg, le 25 Octobre 1689.
Il y a sujet d’apprehender que la succession du Duc de Saxe-Lawembourg n’attire la guerre en ce païs. Nous avions esperé que le sequestre ordonné par
l’Empereur
, suspendroit toutes choses pendant quelque temps : mais com--me les pretendus heritiers ont esté informez que
l’Empereur
croyoit que la disposition de ce fief luy fust devoluë, ils n’ont point voulu admettre ledit sequestre s’estant declarez que puis que
l’Empereur
estoit partie en cette affaire, il n’estoit pas en estat d’en estre le juge : et comme
l’Electeur de Brandebourg
est protegé par
le Roy de Danemark
et que la Süede paroist favorable à la maison de Lunebourg, on craint bien que cette affaire ne se termine pas sans effusion de sang. Quelques troupes Süedoises sorties de Bremen avoient essayé de s’emparer de Attelen : mais elles ont esté repoussées par les troupes Saxones. Hier, les Magistrats de cette ville envoyerent des Deputez au Baron de Goedents Envoyé Extraordinaire de
l’Empereur
sur le sujet des Avocatoires contre la France. Il leur fit entendre que
Sa Majesté Impériale
desiroit qu’ils en fissent incessamment la publication, et qu’ils congediassent tous les Ministres François. Mais ils luy representerent fortement que cette publication estoit entierement contraire aux interests et à l’ancienne liberté de cette ville, et mesme tres préjudiciable à l’Empire, qui feroit vne perte considerable dans la rüine du commerce de nos marchands, qui estant privez de celuy de France, ne pourroient pas continüer celuy qu’ils ont en Espagne et dans la Mediterranée : que d’ailleurs, on ne pourroit tirer aucun avantage de ces Avocatoires si
le Roy de Danemark
ne les faisoit aussi publier dans le Holstein, parce que les negocians passeroient à Altena ou à Gluckstadt, pour avoir la protection de
Sa Majesté Danoise
: que les Ministres de France et les autres sujets de cette nation s’y retireroient pareillement : et que l’Empire ne pouvoit esperer aucune vtilité de la cessation du commerce de cette ville avec les François, pendant qu’il y auroit d’autres lieux où ils auroient la liberté de porter leurs marchandises : qu’il estoit donc necessaire que tous les Alliez fissent executer les Avocatoires, et mesme que les Estats voisins fissent de pareilles défenses : et qu’on ne pouvoit autrement se déterminer à les faire observer icy. Les sept mille Danois qui devoient partir de Ripen le 21 de ce mois, y sont encore : et on ne dit pas quand ils doivent partir.