De Londres, le 29 Septembre 1689.
On travaille toûjours au projet de réunion des Protestants Nonconformistes avec l’Eglise Anglicane. Plusieurs propositions ont esté faites sans aucun succez, parce que les Presbytériens n’ont pas jusqu’à présent voulu se relâcher sur aucun des points qui sont en contestation. Ils ont seulement consenti à conserver la forme de la Hiérarchie selon qu’elle est établie par les loix : la pluspart aimant mieux parvenir aux dignitez Ecclésiastiques dont ils estoient exclus, que de les détrüire comme ont fait les Presbytériens d’Escosse. Mais ils sont demeurez fermes sur plusieurs autres articles : et ils ont enfin, obtenu que la Liturgie Anglicane autorisée par tant d’Actes des Parlements, touchant l’vniformité de Religion depuis le regne d’
Elizabeth
, et particulierement par celuy de 1661, seroit reveüe par des Commissaires, afin d’en retrancher plusieurs priéres et cérémonies qui déplaisent aux Presbytériens, et sur lesquels les anciens réformateurs n’ont jamais cru devoirse relâcher. Ces Commissaires sont l’Archevesque d’York, les Evesques de
Londres
, de Winchester, de S. Asaph, de Rochester, de Carlile, d’Exeter, de Salisbury, de Bangor, et de Chester : et les Docteurs Stillingfleet,
Tillotson
, Patrick, Mégot,
Sharpe
, Aldrige, Iane, Hill, Beaumont,
Montague
, Béveridge, Bately, Alston, Tennison,
Scot
, Fowller, Grove, Williams et Ridder. On prétend faire approuver dans vne Convocation ou Assemblée du Clergé, ce qui aura esté reglé par ces Commissaires : et le faire passer au prochain Parlement. Le Conseil de ville a enfin élu de nouveaux
Shérifs
, à la place de ceux qui n’ont point voulu entrer en charge : et ceux qui ont esté choisis se sont obligez par écrit de les exercer. Il a aussi esté résolu de faire rétablir l’inscription fausse et injurieuse par laquelle les Catholiques sont déclarez auteurs du grand incendie de 1666, et que
le Roy
avoit fait oster, comme ayant esté mise sans autorité, par l’intrigue de quelques Magistrats factieux. Il a esté en mesme temps, ordonné que les assemblées de ville se tiendroient les Dimanches comme les autres jours, sans aucune distinction, et sans avoir égard aux anciennes Ordonnances civiles et Ecclésiastiques, touchant la sanctification de ce jour, que les Presbytériens ont toûjours traitées comme supersticieuses et abusives, ainsi que plusieurs vsages anciens conservez dans l’Eglise Anglicane.
Le Prince d’Orange
fait revenir des Pays-Bas Espagnols, la compagnie des Gardes du corps commandée par le Duc d’
Ormond
: et il envoye à leur place, le régiment de cavalerie du Colonel Godfrey. Le brüit court que Mylord
Sidney
partira bientost pour aller en Irlande, en qualité de Lord député Lieutenant. Des Commissaires ont esté nommez pour y regler les affaires des Provinces du Nord, reçevoir les revenus de la Couronne, instituer et destituer les officiers, saisir tous les biens des Catholiques qui sont en armes avec
le Roy
, et employer les revenus selon les ordres du
Prince d’Orange
. Les derniéres nouvelles qu’on a reçeües sont du 13 de ce mois. Elles portent que le Maréchal de
Schomberg
s’estoit avancé du costé de Nury, pour se saisir de ceposte,
gardé par quelques Irlandois qui s’estoient retirez apres avoir mis le feu à la ville
: qu’ensüite, il avoit envoyé des troupes vers Dundalke, à quinze ou seize milles de la plaine de Lurgan, où les troupes du
Roy
devoient s’assembler. Ainsi, on attend de jour à autre, les nouvelles d’vn combat entre les deux armées. Ces avis sont venus par la voye d’Escosse : et on en attend la confirmation. On écrit d’Edimbourg du 22 de ce mois, que le Général
Mackay
, le Comte d’
Argyle
, Mylord Cardrosse, et d’autres officiers y estoient revenus du Nord, avec vne partie des troupes qu’ils commandoient. Ils ont mis garnison dans le Blair d’Athol, et en quelques autres endroits. Le reste des troupes entrera en quartier d’hyver aux environs d’Edimbourg. On dit qu’ils ont eu la curiosité de faire déterrer le corps du Vicomte de
Dundie
, enterré dans vne cave du Chasteau de Blair : et qu’ils ont trouvé qu’il avoit eu deux blessures mortelles, l’vne d’vne balle dans l’œil, et l’autre d’vn coup de sabre à la teste. Le Conseil a assigné des quartiers pour les troupes Danoises qui doivent arriver à Leith dans quelques jours. Le Chevalier Lanier a ordre de passer en Irlande avec les régiments Anglois qu’il commande. Les Comtes de Callender, de Southesk, de Broadalbine, et les Lords Lévingston, Duffus, et Strathmore, qui estoient prisonniers depuis longtemps, ont esté mis en liberté ayant donné caution.
Plusieurs chefs des Highlanders ont accepté l’amnistie, et presté les nouveaux serments.
Le Colonel Canon s’est retiré vers l’Isle de Mull avec le reste des troupes du parti du
Roy
, qui ont esté jointes depuis peu par le Colonel Boughan, et quelques troupes Irlandoises, dont on ne sçait pas le nombre certainement. On dit qu’elles ont batu quelques Régiments Anglois qui s’étoient avancez de ce costé là. Les Ecclésiastiques Episcopaux d’Escosse sont fort maltraitez. Plusieurs ayant toûjours refusé de prester les nouveaux serments, ont esté privez de leurs bénéfices, en exécution du statut fait à la derniére assemblée des Estats, quoy qu’il n’ait pas encore passé en loy. D’autres qui se sont soûmis au gouvernement present, font de grandes instances pour demander à estre maintenus dans les priviléges, honneurs et prérogatives dont le Clergé Protestant a joüi sous les précédents regnes. Ils ont mesme proposé d’envoyer vne députation au
Prince d’Orange
sur ce sujet, pour s’opposer à celle que les Presbytériens ont envoyée, pour demander la suppression entiére de l’Episcopat, et des autres dignitez Ecclésiastiques qui y ont rapport. Les armateurs François continüent à faire souvent des prises sur les marchands : et croisent jusqu’à l’entrée des ports. Vn de ces armateurs prit il y a quelques jours, sous le canon du Chasteau de Pendennis, vn bâtiment de trois cents tonneaux et vne barque. Le Colonel Codrington a esté fait Général des troupes Angloises des Isles de dessous le vent en Amérique. La flote est encore à Torbay : et cinq régiments d’infanterie ont esté embarquez pour estre transportez en Irlande, et renforcer l’armée du Maréchal de
Schomberg
, qui n’est pas si nombreuse qu’on l’avoit publié, et qui se trouve fort inférieure en nombre à celle du
Roy
, sur tout en cavalerie. Les Ambassadeurs Extraordinaires de Hollande se disposent à partir : et le sieur de Citters demeurera en qualité d’Ambassadeur Ordinaire.