Du Camp de Bossu, le 30 Aoust 1689.
Le 25 de ce mois, l’armée du
Roy
commandée par le Mareschal de
Humiéres
décampa de Hantes pour venir icy à vne lieüe du camp des ennemis. On trouva leurs fourrageurs soûtenus par six ou sept cents hommes de pied qui avoient occupé vne forge dans vn fond, où on ne pouvoit aller que par vn défilé. Quelques escadrons commandez pour les charger les obligérent à se retirer en desordre. Ils furent poursuivis si vivement, qu’apres vne premiere décharge, ils gagnérent les bois. Plusieurs escadrons Hollandois qui estoient sur vne hauteur pour favoriser leur retraite, ayant voulu faire ferme, furent attaquez par les nostres l’épée à la main, renversez et poussez jusqu’à Valcourt. Le peu de résistance des ennemis fit croire qu’on pouvoit aisément insulter la place. Les batail--lons des régiments des Gardes Françoises et Suisses, de la Brigade de Champagne, et d’autres avec des dragons furent commandez pour l’attaque, qui se fit par trois endroits. Mais comme il y avoit vn grand corps d’infanterie dans la place, qu’elle estoit à la queüe du camp des ennemis, qu’ils pouvoient y jetter du secours sans aucun obstacle, et qu’il n’y avoit pas de bréche, la résistance y fut tres-grande, et l’ardeur des troupes fit qu’elles essüyérent durant long temps, vn grand feu des ennemis, avant que de se retirer. Il y eut trois cents soldats tüez et presque autant de blessez. Les sieurs de Laage, Chamillard, d’Attignac et de Roinville Capitaines au régiment des Gardes, et douze officiers de divers corps furent tüez et quarante-deux blessez. Le Marquis de S. Gelais Mareschal de Camp et le sieur du Metz-Tiercelin Commissaire d’Artillerie furent tüez d’vn coup de fauconneau. Le Bailly Colbert Colonel du régiment de Champagne fut blessé à la teste : s’estant avancé jusqu’à la porte de Valcourt. La perte des ennemis ce jour là, a esté encore plus grande : la pluspart de ceux qui avoient esté postez dans des hayes ayant esté tüez, ainsi que leur Major Général, qui est fort regretté. Hier, on alla reconnoistre leur camp. Ils envoyérent vn tambour pour demander l’échange des prisonniers faits sur eux en cette derniere occasion, au nombre de plus de quatre vingt : et ils en ont envoyé quinze des nostres, la pluspart blessez. Hier, ils allérent camper entre Gerpines et Charleroy le long de la Sambre, et l’armée du Roy doit camper aujourdhuy à Florennes.