Histoire culturelle de l'Europe

Lise Philippe

Les êtres dotés de pouvoirs surnaturels dans la musique néofolk européenne : inspirations mythologiques nordiques

Article

Résumé

Le genre musical appelé néofolk est peu connu du grand public. Cependant, depuis les années 2010, il apporte régulièrement une dimension sonore aux univers télévisuels ou vidéoludiques populaires s’inspirant du Moyen Âge scandinave et islandais. Afin de mieux comprendre comment la musique contribue à cette forme contemporaine d’imaginaire, cet article se focalise les représentations de trois êtres dotés de pouvoirs surnaturels. Dans cet objectif, les paroles, les musiques, les vidéos et la marchandise promotionnelle des groupes Heilung et Wardruna sont étudiés. Les observations sont comparées à des travaux de champs recherche variés pour situer le rapport entre les groupes d’un côté et les sources historiques ainsi que le contexte spirituel et culturel dans lequel ces figures sont produites.

Abstract

The musical genre called neofolk is not rarely known to the public. However, it frequently brings a sound dimension to popular televisual or videogaming universes dealing with Norse Middle Ages. To understand how this music contributes to this contemporary form of imagery, this paper focuses on representations of three beings endowed with supernatural powers. For that purpose, the two bands’ Heilung’s and Wardrunas lyrics, music, videos and merchandising are studied. The resulting observations are then compared to works from a varied range of research fields as a way to ascertain the connection existing between the bands on one side and historical sources as well as the spiritual and cultural context in which those figures are created on the other.

Texte intégral

Introduction

Depuis la seconde moitié des années 2010, l’imaginaire viking est alimenté en majeure partie par des séries et des jeux vidéo. Il existe par ailleurs un autre support culturel qui constitue également un pont entre les mondes télévisuels et vidéoludiques : la musique. En effet, des membres du groupe Wardruna ont à l’origine de certaines musiques de la série Vikings1 et du jeu Assassin’s Creed Valhalla2, le groupe Heilung a participé à la bande son du second volet du jeu Hellblade3 et l’artiste Eivør a co-composé, joué et chanté pour la série The Last Kingdom4 et le jeu God of War5.

En considérant ces groupes au-delà de leur simple intérêt sonore, l’objectif premier de cet article est d’analyser les mentions du Moyen Âge nordique au sein du genre musical auquel Wardruna ou Heilung sont rattachés, couramment appelé neofolk6 ou neopagan7. Nous nous intéressons plus spécifiquement aux mentions de figures emblématiques incarnées par les êtres dotés de pouvoirs surnaturels8 afin d’identifier les symboliques créées et les idéaux construits à travers elles. Par souci d’intelligibilité, seul sera utilisé le nom de « neofolk » puisqu’il ne semble pas exister de distinction claire entre « neofolk » et « neopagan ». Nous concevons ce genre comme une musique populaire, principalement créée et transmise par des enregistrements9. Né entre le milieu des années 1970 et le milieu des années 1980, le néofolk est considéré comme le résultat de la fusion expérimentale des genres industriel, à la base sonore majoritairement électronique, et folk10. Bien que majoritairement jouée à l’aide d’instruments acoustiques, traditionnels, et de sons « naturels » dont des bruits d’eau, de feu, de vent dans les arbres etc., cette musique reste amplifiée11. Le néofolk est chanté par une ou plusieurs voix et a pour thèmes principaux un passé lointain, des sujets issus de cultures et de croyances païennes, des mythes ou des récits folkloriques, ce qui n’empêche pas l’emploi courant de sons électroniques ou synthétisés12.

Pour mener à bien cette étude, nous souhaitons nous focaliser sur deux groupes : Wardruna et Heilung. D’une part, la discographie d’Eivør, que nous avons citée plus haut, lorsqu’elle n’est pas créée en collaboration avec les séries ou jeux vidéo ne concerne pas directement les figures médiévales scandinaves ou nordiques. D’autre part, ajouter davantage de groupes ou artistes nécessiterait une étude plus étendue dans le temps ainsi que dans les moyens mobilisés13 en raison de la richesse de la masse textuelle rassemblée14. Le choix de Wardruna et Heilung s’appuie sur leur place significative au sein et en dehors de la scène neofolk, comme le montrent les reprises d’un des titres les plus célèbres du premier groupe par d’autres artistes15, leur invitation à participer à des bandes sons de films et de jeux vidéo, ainsi que l’ampleur de leurs tournées internationales16. Wardruna est basé en Norvège tandis que les membres d’Heilung sont principalement établis au Danemark. Tous deux mettent régulièrement en scène des figures emblématiques de cette aire géographique et de cette période et la dimension surnaturelle joue un rôle important dans leurs créations.

Les figures analysées dans cet article ont été sélectionnées d’après la lecture des paroles, l’écoute des musiques, le visionnage de clips et de captations vidéo. Les différents êtres dotés de pouvoirs surnaturels ont été répertoriés et leurs mentions comptabilisées. Nous avons utilisé comme critère limitant de ne retenir que les mentions faites dans des cadres narratifs précis, excluant les citations de noms dans des listes dénuées de mise en contexte précise. Parce que certains personnages des mythes nordiques portent plusieurs noms, nous avons également recherché des informations complémentaires dans les bases de données collaboratives en ligne qui répertorient des paroles de chanson et offrent la possibilité au public d’annoter ou de traduire les paroles17. Après vérification des données collectées, nous avons déterminé que les trois figures ayant des pouvoirs surnaturels qui reviennent le plus régulièrement dans notre corpus sont le dieu Odin, les Nornes et la völva18.

Notre analyse s’articule par conséquent d’abord autour de l’identification du contexte artistique de la mention de ces figures puis des références historiques et culturelles sur lesquelles elles reposent. Nous comparons également nos observations avec celles de travaux de recherche sur la Scandinavie médiévale et sur sa réception dans la culture populaire contemporaine. Nous montrons ainsi dans une première partie comment ces figures incarnent des symboles de puissance et de pouvoir puis nous exposons dans une seconde partie le rôle que les groupes font jouer à ces figures dans le monde contemporain.

Des figures incarnant des formes de pouvoir

La fonction symbolique la plus fréquemment attribuée à Odin, à une völva ou aux Nornes dans notre corpus est celle d’expression d’une forme de pouvoir, en tant que capacité à agir sur et pour sa vie. Chacune des trois figures est mise en avant dans l’une des sections suivantes. Pour autant, elles sont toutes utilisées comme symboles de pouvoir, de cohabitation avec un destin inéluctable et d’un lien entre les mondes humains et non humains.

Symbole de pouvoir incommensurable

Odin est une divinité notamment liée à la guerre, la sagesse et la poésie19. En ce qui concerne les groupes de musique neofolk européenne, il est une, si ce n’est « la », figure emblématique du passé païen scandinave. En effet, il est mentionné dans au moins quatorze chansons de Wardruna et Heilung20, et ce plus d’une cinquantaine de fois21. De plus, une référence visuelle y est faite dans un clip de Wardruna où le chanteur est filmé pendant plusieurs plans22, seulement accompagné de deux loups, rappelant ainsi les deux loups d’Odin, Geri et Freki. Le dieu est également représenté sur de la marchandise promotionnelle, ou merchandising23, notamment identifiable, malgré l’aspect stylisé du dessin, par son œil manquant.

La chanson « Alfadhirhaiti24 » de Heilung montre l’étendue et la grandeur du pouvoir d’Odin, tant du point de vue textuel que sonore. Le titre, qui signifie « Noms du Père de Tout », est d’ailleurs tout à fait évocateur : ce n’est pas n’importe lequel des nombreux surnoms d’Odin qui a été choisi, mais celui marquant son statut supérieur et antérieur à toute chose. Cette chanson de 6 minutes et 48 secondes énumère les attributs et les différents noms d’Odin. Les paroles débutent par les mentions de Draupnir, un anneau d’or magique25 offert au dieu, de Geri et Freki, ses loups qui sont également représentés par des voix humaines imitant des hurlements lupins, Sleipnir, son cheval à huit pattes26, puis Gugnir, sa lance27, et enfin Hugin et Munin, ses corbeaux28, eux aussi illustrés dans la musique par des croassements qui suivent le rythme de la composition. S’ouvre ensuite la liste de trente et un noms d’Odin, évoquant chacun des particularités du dieu mais surtout l’étendue de son pouvoir. Par exemple, le premier nom donné est « Fimbulthulur », nom traduit par Régis Boyer par « le sage suprême29 » et la liste se referme sur « Yggr et Yungir ». Le premier mot est traduit par Boyer avec l’expression « très farouche30 » tandis que Carolyne Larrington, professeure de littérature médiévale européenne, opte pour une proposition plus explicite : « le Terrible31 ». Le second nom pourrait signifier, selon Elena Gurevich, spécialiste de la poésie scaldique, « sauvage, violent32 ». Ainsi, le groupe montre Odin comme étant puissant, à la fois du point de vue cognitif et du point de vue physique. Ses noms évoquent tant une grande connaissance et une grande sagesse qu’une capacité incoercible de nuire à qui lui ferait obstacle. Cette puissance est également mise à l’honneur du point de vue sonore puisque l’intensité de l’instrumentation et des voix va crescendo, atteignant, après plusieurs énonciations de la liste des noms d’Odin, une saturation de l’espace sonore. Ce procédé est d’ailleurs plus prononcé encore lors des concerts, comme nous pouvons l’entendre dans l’une des captations mises en ligne par le groupe, où de la lumière vive et des flashs viennent s’ajouter, entre 5mn37 et 6mn4433, au reste de la mise en scène.

Ainsi, Odin devient un symbole incontestable de pouvoir. Par ses nombreux attributs, il a tout, par ses connaissances et son impétuosité, il sait tout et peut tout. Se confronter à ses multiples facettes devient, selon la mise en scène d’Heilung, à peine supportable. Cette représentation complexe d’Odin semble correspondre en grande partie à l’imagerie véhiculée dans la documentation scandinave médiévale, bien que celles-ci prennent davantage de précautions sur le rôle d’Odin dans les pratiques religieuses de la période païenne34 contrairement à ce qu’inspire l’omniprésence de cette divinité dans notre corpus. Le nom « Père de tout » semble jouer un rôle important pour les deux groupes étudiés. Il constitue en effet le titre de la chanson dédiée à Odin chez Heilung et il incarne aussi la première mention explicite du dieu dans la discographie de Wardruna dans la chanson « Rotlaust Tre Fell35 », ‘L’Arbre Sans Racines Tombe’. Le groupe y invoque ses « racines spirituelles », pour reprendre la métaphore du titre, à travers le nom d’êtres liés aux croyances scandinaves païennes et la première divinité appelée est « père de tout Odin36 ». Ainsi, un terme qui porterait une influence chrétienne dans les écrits scandinaves médiévaux37, apparaît comme approprié par les groupes de néofolk pour replacer cette divinité, son pouvoir indubitable et sa position originelle au cœur des leurs. Les sous-chapitres suivants montrent successivement comment le pouvoir est aussi associé aux Nornes et à la völva.

Symbole d’un destin inéluctable avec lequel on apprend à vivre

Ce sont, de toute évidence, les Nornes qui incarnent le plus distinctement le destin et sa qualité inéluctable dans notre corpus. Ces êtres qui « tissent le destin des hommes38 », selon l’historien Pierre Bauduin, sont souvent pensées en tant que trio et sont décrits comme suit par Régis Boyer, professeur de littératures et civilisation scandinaves : « Urdr (‘Passé’), Verdandi (‘Présent’) et Skuld (‘Futur’), installées sous l’arbre du destin du Monde (Yggdrasil), à la source de tout savoir (Urdabrunnr: le ‘puits’ ou ‘la source d’Urdr’), décidant sans appel du sort des humains et, notons-le bien, de celui des dieux aussi39. » Dans notre corpus, elles apparaissent presque aussi souvent que la völva, mais sont plus explicitement mentionnées et c’est principalement Urdr qui est directement nommée, tant dans les textes de Wardruna que ceux de Heilung. La figure de la Norne en tant que tisseuse de destin est également représentée dans un clip de Wardruna40, par une personne au visage dissimulé derrière un voile, filant une matière textile à l’aide d’un fuseau dont des plans s’intercalent avec le reste de l’histoire exposée dans cette vidéo.

Heilung reprend, dans sa chanson « Traust41 », ‘Confiance’, plusieurs strophes du poème « Incantation de Gróa42 » afin de créer une forme d’incantation attirant le bien sur l’être à qui elle est destinée. Le poème source est composé de 16 strophes et il est rattaché à l’ensemble de poèmes intitulé Edda Poétique, malgré une datation incertaine43. Le texte montre comment Gróa, à la demande de son fils, veut attirer le bien et la réussite sur lui et sur ses entreprises44. Dans la 7e strophe, constituant le troisième couplet de la chanson, est fait mention des « verrous d’Urdr45 » ou « sorts d’Urdr46 », le mot original étant porteur d’ambiguïté47, que la personne chantant ou déclamant le vers souhaite favorables à sa ou son destinataire. Urdr représente donc le passé, ce qui « a dû être48 », et la source de tout savoir, « Urdabrunnr », est également liée à son nom49. Elle est donc une figure importante de savoir et de pouvoir, puisque l’on souhaite avoir ses faveurs pour rester en sécurité, comme s’il était impossible d’aller à l’encontre du destin qu’elle a choisi pour chaque personne.

Cette idée se retrouve également dans la chanson « Andvevarljod50 », ‘Chant des Esprits Tisseurs51’ où un parent ne peut que faire des offrandes pour obtenir les bonnes grâces de neuf Nornes en train de tisser le destin de son enfant52. Cette chanson, dans laquelle le destin est lié au vent qui le porte et le garde, insiste, dans ses derniers vers, sur le fait de vivre en paix avec ce destin que l’on peut à peine influencer, en allant jusqu’à souligner que celui-ci, à travers le vent, apporte courage, volonté ou encore liberté53.

Les représentations des Nornes, du destin et de leur importance dans la vie humaine semblent correspondre aux descriptions de ces sujets dans la recherche. Régis Boyer fait ainsi état du rôle crucial joué par le « Destin » dans la spiritualité germanique préchrétienne : « le sacré chez les anciens Germains, c’est le Destin, le sens du Destin, les innombrables figurations que prend le Destin […] nul ne saurait se soustraire aux arrêts des Nornes54 ». Cette constatation est également partagée par l’historien Pierre Bauduin :

L’homme peut connaître par avance son destin – par les rêves ou les prophéties par exemple –, mais il ne peut y échapper et la dignité de l’individu réside dans l’accomplissement volontaire de sa destinée : non pas subir le destin, mais l’accepter et le prendre en charge, en accomplissant des actions qui assureront à jamais le renom de celui qui les réalise55.

Ces figures des Nornes et du destin offrent donc un contrepoids à la puissance du « Père de Tout », Odin, puisque personne, pas même les divinités, ne peut échapper à son destin, comme le montre notamment le mythe du Ragnarök56.

Les groupes de notre corpus ont donc conscience du rôle joué par les Nornes et par le destin dans leurs conceptions spirituelles et artistiques empruntes de néopaganisme. Pour autant, leur expression d’un certain fatalisme ne s’accommode pas d’un simple défaitisme face à leur trajectoire de vie inéluctable. Au contraire, les paroles aspirent à mettre les Nornes de leur côté et encouragent l’auditoire à embrasser sa destinée, notamment en recherchant une connaissance et une maîtrise plus grande de ce qui les entoure, principalement à travers le motif de la völva.

Symbole d’un lien entre monde humain, magie et mondes non humains

Tandis qu’Odin et ses agissements ainsi que les Nornes et le destin échappent au contrôle humain, la völva, en tant que figure humaine capable d’interagir avec les mondes des humains et ceux des non-humains, permet d’offrir un personnage auquel l’auditoire et les membres de notre corpus peuvent s’identifier plus aisément. La völva, « une sibylle ou une voyante »57 ou « une de ces voyantes-prophétesses-magiciennes58 » est, à égalité avec les Nornes, le second être aux pouvoirs surnaturels le plus mentionné dans notre corpus, bien que très lointaine derrière Odin. Elle est majoritairement évoquée par Wardruna et se fait plus difficile à identifier dans les textes de Heilung. Elle est notamment beaucoup représentée par les citations de la « Völuspá », ‘Prédiction de la Prophétesse’, un poème qui rapporterait les paroles d’une völva narrant la création, la fin et le renouveau du monde. Il est également contenu dans l’Edda Poétique59. Ainsi, c’est par des citations de ce poème que nous pouvons la retrouver dans l’album Futha60 de Heilung, décrit de la manière suivante par le groupe : « À l’opposé d’Ofnir, [l’album précédent,] le nouvel album est la contrepartie, le point d’équilibre, le côté féminin. Ici, les paroles viennent de la poésie islandaise ancienne. Ainsi, les voix féminines sont plus proéminentes sur Futha61. » L’utilisation de la völva dans cet album contribue donc à donner une voix et une identité aux figures féminines du passé scandinave.

Heilung utilise deux strophes du poème « Völuspá62 » dans sa chanson « Galgaldr63 », ‘Chant de Sortilège’, respectivement la strophe numéro 45 et la strophe numéro 59 de la traduction de Régis Boyer. Le rôle de la völva est ici de décrire ce qu’elle sait concernant l’avenir funeste et le renouveau du monde.

Son rôle est plus important encore dans les textes de Wardruna puisqu’une chanson entière lui est dédiée. Elle porte le même titre, à l’exception d’un signe diacritique, que le poème de l’Edda Poétique, « Völuspa64 ». Elle se compose également de plusieurs strophes de ce texte. Ces dernières sont réorganisées de manière à offrir un résumé de l’original, montrant ainsi l’étendue des savoirs de la völva, à qui Odin, lui-même, a demandé de partager ce qu’elle sait65. Ces savoirs font d’ailleurs l’objet d’une attention particulière dans plusieurs chansons du groupe. En effet, l’énoncé « Je sais tout, Odin66 », issu de la strophe 2867, est présent dans la chanson « Ein Sat Hon Uti68 », ‘Seule, elle était assise dehors69’, autre adaptation de la « Völuspá », et dans la chanson la plus populaire du groupe, « Helvegen70 », ‘Le chemin de Hel’.

La völva, cet être humain incarné par les chanteurs et chanteuses de chaque groupe, a donc un savoir immense puisqu’elle connaît le passé et l’avenir du monde et qu’elle est même consultée par un dieu également porteur d’une connaissance étendue. De plus, elle apparaît comme une médiatrice entre le monde humain et le monde surnaturel. En étant incarnée par les membres des groupes de notre corpus, sa connaissance devient également accessible au public qui peut lui-même énoncer ses prédictions et s’adresser à Odin. Nous assistons donc, à travers ce processus, à une construction d’empouvoirement71.

Rôles dans le monde contemporain

Afin d’apporter une dimension supplémentaire à cette analyse, nous adoptons dans ce chapitre un point de vue plus général sur l’utilisation des figures païennes dans notre corpus. Nous souhaitons pour ce faire développer la question de l’uniformisation des modèles proposés à travers ces figures et la question du lien entre ces représentations et des tendances spirituelles et morales dépassant le cadre musical.

Des modèles uniformisés

Le fait de retrouver une certaine cohérence dans les représentations de figures comme Odin, les Nornes ou la völva nous incitent à constater l’uniformisation qui se dégage des textes étudiés. Ce phénomène va à l’encontre des analyses des pratiques religieuses médiévales et antérieures qui sont hétérogènes et varient selon les régions et les périodes72. Cette nuance est d’ailleurs transmise au grand public, comme l’a fait par exemple Laurent Di Filippo, chercheur spécialisé notamment dans la mythologie nordique et sa réception contemporaine, dans l’ouvrage de vulgarisation sur les vikings qu’il a dirigé73.

Ainsi, bien que cet état de fait soit connu dans les sources scientifiques, textes que les groupes sont aussi amenés à consulter74, les artistes sont pris dans un écueil pouvant en partie être causé par la rareté des sources dont ils souhaitent s’inspirer. Pour autant, parce que les groupes se cantonnent à un panel restreint de références, au sein même d’un corpus limité, nous pouvons en déduire que les artistes ont une idée précise de la manière dont ils veulent présenter et incarner les figures qui les intéressent. Ils suivent par conséquent une démarche que nous pouvons retrouver dans d’autres domaines culturels populaires où des choix sont effectués concernant les figures mises en lumière75. Comme le souligne la chercheuse spécialiste de la littérature de jeunesse scandinave, Annelie Jarl Ireman, à propos de son sujet, l’« ère viking se prête bien malgré tout à des relectures, car la réalité historique demeure peu connue76 ». De la même manière, cette forme de « liberté par défaut », semble également accommoder notre corpus, créant, de ce fait, une limite supplémentaire à la volonté générale de se reconnecter directement avec le passé.

Une inscription dans une tendance spirituelle et morale plus générale

Le lien existant entre l’utilisation de figures scandinaves médiévales dans cette musique et des courants spirituels ou religieux s’inscrit dans ce que Frédérique Harry, spécialiste de l’histoire des mouvements religieux en Scandinavie, résume et commente concernant l’attrait pour les spiritualités néopaïennes contemporaines :

Selon l’anthropologue Tanya Marie Luhrmann, néopaganisme et néochamanisme exprimeraient une modalité particulière de l’expérience divine, réelle, immédiate et résolument intime […] Ce type de religiosité apparaîtrait spécifiquement dans un contexte de sécularisation avancée. Il résulterait d’une tentative de reconnexion entre le sacré et le monde dans lequel le surnaturel ferait son retour. L’individu mène individuellement cette démarche sensible, spiritualiste et résolument expérimentale77.

Plusieurs éléments de cette description nous semblent correspondre à l’utilisation des êtres aux pouvoirs surnaturels dans la musique neofolk. Il est tout d’abord simple de retrouver des formes d’expériences divines, notamment à travers des citations de paroles prêtées à Odin dans notre corpus. C’est par exemple le cas des citations du poème intitulé « Dits du Très-Haut », présent dans l’Edda Poétique78, qui rapporterait les paroles de la divinité. Cette expérience est par ailleurs présentée au moyen de l’identification à la völva qui interagit avec Odin.

De plus, la dimension de reconnexion avec le sacré par les groupes de notre corpus ainsi que par leur public est documentée dans la recherche :

Heilung et Wardruna représentent une performance musicale sur scène comme un événement distinctement orienté vers le folklore nordique, chargé spirituellement, [et] qui peut être porteur d’un sens religieux pour le public. En puisant dans des pratiques folkloriques préservées et une histoire préchrétienne idéalisée du Nord de l’Europe, les groupes prétendent faire disparaître le temps entre le passé lointain et « l’instant présent » dans leurs performances. L’auditoire aligné avec le néopaganisme nordique participe à un temps ancien imaginé, cultivant des expériences qui réalisent dans le présent des concepts et des pratiques passées nordiques et germaniques. De cette manière, les néopaïens et néopaïennes nordiques forment et reforment continuellement des identités spirituelles et vivent une connexion avec une culture distante dans l’espace et le temps79.

Nous pouvons constater que, dans cet extrait, Fitzgerald et Nordvig évoquent surtout une dimension collective de la spiritualité, là où Harry fait état d’une pratique intime. Pour autant, plus loin dans l’article, ils soulignent l’importance de l’individu et de son « auto-narration » dans le monde musical lié au néopaganisme80. L’utilisation des figures participe à cette dimension intime puisqu’en les nommant, en s’adressant à elles, le groupe puis le public qui s’approprie les paroles, a l’opportunité de créer cette relation avec celles-ci.

Enfin, il est intéressant de comparer la notion d’expérimentation avec l’expérience que des groupes comme Heilung cherchent à provoquer chez leur auditoire. Maria Franz, la chanteuse, décrit la musique dans une interview comme « un voyage turbulent qui est sensé vous laisser soulagé à la fin. Parce que ça peut être super intense à écouter […] Et après vous vous sentez mieux81. » Si nous ajoutons à cette expérience physique, sensorielle, le fait d’appeler des concerts des rituels, il est alors aisé d’établir un lien avec les rites initiatiques entrepris par Odin afin d’acquérir de nouveaux savoirs, notamment magiques, et ceux accomplis par le groupe et son auditoire lors de l’écoute des chansons ou en concert. Nous tenons tout de même à préciser que cette démarche visant à reproduire ces expériences comparables, dans une certaine mesure, aux accomplissements d’Odin ne se cantonne pas qu’aux domaines religieux. Par exemple, Yohann Guffroy écrit à propos du jeu de rôle Warhammer82 et du livre de règles publié pour une édition d’inspiration scandinave :

De son côté, la rune permanente n’est maîtrisée que par les plus grands artisans et demande le plus souvent un ingrédient extrêmement rare (sang de dragon ou eau d’une provenance particulière) qui pousse le forgeron à partir en quête de ce dernier pendant une longue période. On retrouve ici l’idée de l’épreuve, de l’expérience corporelle de la recherche de la connaissance, comme Odin pendu à Yggdrasil83.

Cette observation nous permet de mettre en lumière la position double de notre corpus. Il participe en effet d’une part à la propagation de spiritualités en partie issue de la sécularisation des sociétés dans lesquelles elles se développent et d’autre part à une représentation culturelle ludique des figures scandinaves.

Conclusion

En analysant les textes culturels produits par Heilung et Wardruna, nous avons d’abord indiqué que les trois types de figures emblématiques du Moyen Âge scandinave, voire nordiques, les plus régulièrement évoquées sont Odin, les Nornes et la völva.

Les modes de représentations varient en fonction des figures. Les trois sont identifiables, voire directement nommés dans les paroles. Les groupes puisent alors dans les écrits nordiques médiévaux ou imaginent des histoires inspirées des informations disponibles dans cette littérature. Nous n’avons pas de représentation visuelle tout à fait explicite de la völva et son incarnation sonore passe uniquement par le chant des artistes qui citent ses dires. Une seule Norne est reconnaissable dans une seule vidéo et leur représentation auditive se limite au son du vent qui est, d’après Wardruna, lié au destin. Odin, lui, est représenté visuellement, de manière certes subtile, dans un clip de Wardruna et sur l’une des pièces de marchandise promotionnelle. Du point de vue sonore, outre ses paroles rapportées dans les écrits médiévaux et chantées par les groupes, ce sont ses « attributs » animaliers qui sont présents, avec des sons enregistrés ou des imitations humaines de corvidés et de loups. Ainsi, que ce soit en termes de quantité ou de variété, c’est Odin qui est le plus présent, de très loin, devant les autres êtres cités par les groupes.

Les représentations du dieu se font régulièrement en lien avec les Nornes ou la völva et chacun apporte une nuance différente aux thèmes les plus couramment évoqués que sont le pouvoir, la connaissance, l’empouvoirement, la relation au destin, le surnaturel et la magie. Ces trois figures incarnent en effet des formes de pouvoirs, de puissance, qu’elle soit cognitive ou physique. Ils constituent donc des outils d’empouvoirement, tant pour les artistes qui créent en s’en inspirant et qui les incarnent dans leurs créations que pour le public qui consomme ces créations. Ces figures servent ainsi de personnifications de valeurs telles que l’individualisme, le courage, la volonté, la liberté et témoignent de l’importance donnée par les groupes à la quête de savoirs spirituels et de leurs expériences physiques.

Vis-à-vis des connaissances historiques que nous avons d’elles, ces représentations d’Odin, les Nornes et la völva tiennent une place ambigüe. En effet, elles sont fidèles par plusieurs aspects aux sources et à certaines de leurs caractérisations dans la recherche, tout en s’en tenant éloignées car très uniformisées et adaptées à leurs visées artistiques. Par leur utilisation dans ce genre musical spécifique qu’est le néofolk, leur rôle est double car ce sont à la fois des sujets d’une culture populaire associée au loisir et des sujets de constructions de spiritualités, ce qui rend leur analyse complexe.

Il pourrait donc être intéressant de voir si ces représentations se retrouvent dans les créations d’autres groupes de néofolk, notamment non nordiques mais qui évoquent parfois aussi le paganisme de cette région. Nous pourrions aussi élargir cette recherche au public et à la réception de ces figures telles que présentées par les groupes. Cela pourrait par exemple permettre de mieux appréhender l’importance de ces figures et de leurs représentations musicales dans les sociétés contemporaines.

Notes

1Michael Hirst (créateur), Vikings [série télévisée], diffusion originale : 3 mars 2013 – 30 décembre 2020.

2Ubisoft Montréal (développeur), Assassin’s Creed Valhalla [jeu vidéo], Ubisoft (éditeur), 2020.

3Ninja Theory (développeur et éditeur), Hellblade: Senua’s Sacrifice [jeu vidéo], 2017. Ninja Theory (développeur), Senua’s Saga: Hellblade II, Xbox Game Studios (éditeur), 2024.

4Nick Murphy, Anthony Byrne, Ben Chanan et al. (réalisateurs), The Last Kingdom [série télévisée], diffusion originale : 10 octobre 2015 – 9 mars 2022.

5SIE Santa Monica Studio (développeur), God of War [jeu vidéo], Sony Interactive Entertainment (éditeur), 2018.

6Voir Kennet Granholm, « ‘Sons of Northern Darkness’: Heathen Influences in Black Metal and Neofolk Music », in Numen, n° 58-4, 2011, pp. 514-544. Caroline Olsson, « ‘Le Sang, le Feu, la Mort !’ : la popularité de la matière viking dans la scène metal et néofolk », in Jean-Marie Levesque (dir.), Des Vikings et des Normands : imaginaires et représentations [livre publié à l’occasion de l’exposition « Des Vikings et des Normands Imaginaires et représentations », Caen, Musée de Normandie, 1er avril- 1er octobre 2023], Rennes, Éditions Ouest France, 2023, p. 190 – 191.

7Voir Padraic M. Fitzgerald, Til Valhall: The Formation of Nordic Neopagan Identity, Religiosity, and Community at a Norwegian Heavy Metal Festival, Denver, University of Denver, 2023, https://digitalcommons.du.edu/etd/2251 (consulté le 01/02/2024).

8« Ce qui est surnaturel, c’est ce qui est perçu comme illogique, impossible, proprement anormal. L’impression de surnaturel procède d’une transgression de l’ordre de la nature, d’une contravention à ses lois les mieux reconnues, et suggère de ce fait l’existence d’autres lois, nécessairement supérieures aux premières puisqu’elles s’imposent à elles. » Christian Chelebourg, Le Surnaturel, Paris, Armand Colin, 2006, p. 8.

9Nous nous appuyons ici sur la distinction notamment utilisée par le musicologue Bérenger Hainaut dans son travail sur le style musical black metal. Bérenger Hainaut, Le style Black Metal, Château-Gontier, Aedam Musicae, 2017, p. 271 – 272.

10Peter Webb, Exploring the Networked Worlds of Popular Music : Milieu Cultures, New York & Londres, Routledge, 2007, p. 61, 81, 89, 91. Kennet Granholm, op. cit., p. 531-533. Stefanie von Schnurbein, Norse Revival : Transformation of Germanic Neopaganism, Leiden, Boston, Brill, 2016, p.  41-343.

11Comme le souligne d’ailleurs le terme « amplified history » qu’utilise Heilung pour qualifier ses productions. « Heilung », Spotify, https://open.spotify.com/intl-fr/artist/7sTKZr30LqC928DZ5P9mNQ (page consultée le 20/09/2024). « Heilung », Facebook, https://www.facebook.com/amplifiedhistory (page consultée le 20/09/2024).

12Ce sont d’ailleurs ces éléments sonores et thématiques qui sont utilisés par Simon Théodore et Nadège Bénard-Goutouly pour distinguer le « folk metal » d’autres genres de heavy metal apparentés. Le lien entre neofolk et metal est par ailleurs attesté par Kenneth Granholm et Stefanie von Schnurbein. Simon Théodore, « Le viking metal et la presse musicale : le ‘Nord métallique’ sous la plume des journalistes », in Deshima, n° 13, 2019, p. 131. Nadège Bénard-Goutouly, Le Métal folklorique. Entre tradition et modernité, Rosières-en-Haye, Camion Blanc, 2013, pp. 29-30. Kennet Granholm, op. cit., p. 538. Stefanie von Schnurbein, op. cit., p. 343.

13Nous pouvons penser ici à l’emploi d’un programme informatique, comme dans la méthode conceptualisée et par Thomas Mohnike : « Narrating the North : Towards a theory of mythemes of social knowledge in cultural circulation », in Deshima, n° 14, 2020, p. 9-36.

14Beaucoup de groupes et artistes de néofolk sensibles aux cultures nord-européennes sont d’ailleurs originaires des pays nordiques (Danheim, Garmarna, Gjallahorn) mais il existe un vivier important également en Allemagne (Faun, Corvus Corax) et nous trouvons aussi des représentants en France (Skáld) ou en Espagne (Trobar de Morte).

15Voir Kalandra, « Helvegen », By Norse Music, 2020. Trobar de Morte, « Helvegen », The Book of Shadows, autoproduction, 2020.

16Entre 2022 et 2025, Heillung est programmé pour une une dizaine de dates aux États-Unis, une vingtaine en Europe et une dizaine en Océanie. Amplified History Tour [site officiel du groupe répertoriant les dates à venir], https://www.amplifiedhistorytour.com/ (page consultée le 20/09/2024). « Heilung Announce U.S. Tour », Season of Mist [site officiel de la maison de disques du groupe], https://www.season-of-mist.com/news/heilung-2023-06-14/ (page consultée le 20/09/2024). Entre 2022 et 2025, Wardruna joue en Amérique du Nord, en Amérique du Sud, en Europe ainsi qu’en Océanie. « Tour Dates », Wardruna [site officiel du groupe], https://www.wardruna.com/tour-dates/ (page consultée le 20/09/2024).

17Genius, https://genius.com/ (consulté le 14/02/2024). Lyricstranslate.com, https://lyricstranslate.com/ (consulté le 14/02/2024).

18Nous avons ainsi identifié une cinquantaine de mentions textuelles ou visuelles d’Odin, très loin devant les Nornes et la völva mentionnées cinq fois.

19Pierre Bauduin, Les Vikings, Paris, Presses universitaires de France, 2004, p. 32; Jens Peter Schjødt, « Óðinn », in Jens Peter Schjødt, John Lindow, Anders Andrén (éditeurs), The Pre-Christian Religions of the North: History and Structures, Volume iii: Conceptual Frameworks : The Cosmos and Collective Supernatural Beings, Turnhout, Brepols, 2020, p. 1138 – 1140, 1145 – 1146, 1151, 1155, DOI : 10.1484/M.PCRN-EB.5.112891.

20À la date de délimitation du corpus, en décembre 2022.

21Il est cependant difficile de proposer un nombre précis puisque les groupes utilisent également les surnoms d’Odin et des doutes subsistent quant au lien entre le dieu et certains noms cités dans les paroles.

22Wardruna, Wardruna - Voluspá (Official music video), 11 octobre 2018, 4mn20 – 6mn16, https://youtu.be/8UPUPDo20nM?t=260 (consulté le 10/02/2024).

23Wardruna Online Shop - AISAmusic GmbH, « Wardruna - Odin Women’s White T-Shirt », https://wardrunashop.com/collections/clothing/products/wardruna-odin-womens-white-t-shirt (consulté le 10/02/2024).

24Heilung, « Alfadhihaiti », Ofnir, autoproduction, 2015. Genius, « Alfadhirhaiti », https://genius.com/Heilung-alfadhirhaiti-lyrics (consulté le 11/02/2024).

25L’Edda poétique, textes présentés et traduits par Régis Boyer, Paris, Fayard, 1992, p. 131, 498.

26Ibid., p. 111.

27Ibid., p. 470.

28Ibid., p. 639.

29Ibid., p. 197.

30Ibid., p.  39.

31« the Terrible One ». Carolyne Larrington (éditrice, traductrice), The poetic Edda, Oxford, Oxford University Press, 2014, p. 7.

32Elena Gurevich (éditrice scientifique), « Anonymous Þulur, Óðins nǫfn 8 », in Kari Ellen Gade, Edith Marold (éditrices), Poetry from Treatises on Poetics, Turnhout, Brepols, 2017, p. 751.Heilung, Heilung | LIFA - Alfadhirhaiti LIVE, 1er novembre 2017, https://youtu.be/2wy-W-pYlds?t=337 (consulté le 11/02/2024).

33Heilung, Heilung | LIFA - Alfadhirhaiti LIVE, 1er novembre 2017, https://youtu.be/2wy-W-pYlds?t=337 (consulté le 11/02/2024).

34Pierre Bauduin, Histoire des Vikings : des invasions à la diaspora, Paris, Tallandier, 2019, p. 141 – 143. Anders Winroth, Au temps des Vikings, traduit de l’anglais par Philippe Pignarre, Paris, La Découverte, 2018, p. 230.

35Wardruna, « Rotlaust Tre Fell », Runaljod – Yggdrasil, Indie Recordings, 2013.

36« allfader Odin ». Genius, « Rotlaust Tre Fell », https://genius.com/Wardruna-rotlaust-tre-fell-lyrics (consulté le 11/02/2024).

37John Lindow, « Groups, Lists, Features: Snorri’s Ásynjur », in Stefan Brink, Lisa Collinson (éditeurs), Theorizing Old Norse Myth, série « Acta Scandinavica », vol. 7, Turnhout, Brepols Publishers, 2018, p. 137, DOI : 10.1484/M.AS-EB.5.105743. Terry Gunnell, « How high Was the high One? The roles of Oðinn and Þórr in Pre-Christian Icelandic Society », in Stefan Brink, Lisa Collinson (éditeurs), Theorizing Old Norse Myth, série « Acta Scandinavica », vol. 7, Turnhout, Brepols Publishers, 2018, p. 105 – 129, DOI : 10.1484/M.AS-EB.5.105743. Annette Lassen, Odin’s Ways: A Guide to the Pagan God in Medieval Literature, traduit du danois par Helen F. Leslie-Jacobsen et Margaret Cormack, New York & Londres, Routledge, 2022, p. 185 – 187, DOI : 10.4324/9781003187981.

38Pierre Bauduin, op. cit., p. 139.

39L’Edda poétique, op. cit., p. 550.

40Wardruna, Wardruna - Voluspá (Official music video), op. cit.

41Heilung, « Traust », Futha, Season of Mist, 2018.

42L’Edda poétique, op. cit., p. 583 – 587.

43Ibid., p. 584. John Lindow, Jens Peter Schjødt, « Minor Gods and Goddesses », in Jens Peter Schjødt, John Lindow, Anders Andrén (éditeurs), The Pre-Christian Religions of the North: History and Structures, Volume iii: Conceptual Frameworks: The Cosmos and Collective Supernatural Beings, Turnhout, Brepols, 2020, p. 1439, DOI : 10.1484/M.PCRN-EB.5.112891.

44Régis Boyer, op. cit., p. 583 – 584.

45« Urðar lokur », Genius, « Traust », https://genius.com/Heilung-traust-lyrics (consulté le 12/02/2024). Traduction issue de Régis Boyer, L’Edda poétique, op. cit., p. 586.

46« Urd’s charms », Carolyne Larrington, op. cit., p. 257.

47Neil Price, The Viking Way: Magic and Mind in Late Iron Age Scandinavia, Oxford & Philadelphia, Oxbow Books, 2019, p. 170.

48« Had to Be », Ibid., p. 28.

49L’Edda poétique, op. cit., p. 550.

50Wardruna, « Andvevarljod », Kvitravn, By Norse Music, 2021.

51Traduction personnelle depuis la traduction en anglais donnée par le chanteur dans une vidéo : wardruna, Andvevarljod - Song of the Spirit-weavers (Skaldic version), https://youtu.be/99N6XWUeKdg (consulté le 12/02/2024).

52Genius, « Andvevarljod », https://genius.com/Wardruna-andvevarljod-lyrics (consulté le 12/02/2024).

53Ibid.

54L’Edda poétique, op. cit., p. 13.

55Pierre Bauduin, op. cit., p. 150.

56Neil Price, op. cit., p. 170.

57Anders Winroth, op. cit., p. 221.

58L’Edda poétique, op. cit., p. 531.

59Ibid., p. 529 – 530.

60Heilung, Futha, Season of Mist, 2018.

61« At the opposite to "Ofnir", the new album is the counterpart, the balance point, the feminine side. Here, the lyrics originate from old Icelandic poetry. Hence, female voices are more prominent on "Futha". » Official Heilung Merch, « Futha - CD DIGIPAK + Digital », https://heilung.travelling-merchant.com/cd/heilung-futha-cd-digipak-digital (consulté le 10/02/2024).

62Traduction de Régis Boyer du titre « Völuspá », L’Edda poétique, op. cit., p. 532.

63Heilung, « Galgaldr », Futha, Season of Mist, 2018.

64Wardruna, « Voluspá [sic] – Skaldic Version », Skald, By Norse Music, 2018.

65Genius, « Voluspá », https://genius.com/Wardruna-voluspa-skaldic-version-lyrics (consulté le 12/02/2024).

66« Alt veit eg Odin », Genius, « Ein Sat Hon Uti », https://genius.com/Wardruna-ein-sat-hon-uti-lyrics (consulté le 12/02/2024).

67Selon la traduction de Boyer, « Je sais bien, Ódinn », qui est cependant moins littérale, L’Edda poétique, op. cit., p. 539.

68Wardruna, « Ein Sat Hon Uti », Skald, By Norse Music, 2018.

69L’Edda poétique, op. cit., p. 539.

70Wardruna, « Helvegen », Runaljod – Yggdrasil, Indie Recordings, 2013. Genius, « Helvegen », https://genius.com/Wardruna-helvegen-lyrics (consulté le 12/02/2024).

71Calque de l’anglais empowerment, mécanisme utilisé dans différents genres de musiques populaires, tels que le heavy metal. Keith Kahn-Harris, Extreme Metal: Music and Culture on the Edge, Oxford / New York, Berg, 2007, p. 10. Deena Weinstein, « Playing with gender in the key of metal », in Florian Heesch, Niall Scott (éditeurs), Heavy Metal, Gender, and Sexuality: Interdisciplinary Approaches, New York, Routledge, 2016, p. 19.

72Pierre Bauduin, op. cit., p. 137 – 138. Annette Lassen, op. cit., p. 1 – 2, DOI : 10.4324/9781003187981.

73Laurent, Di filippo, « Les mythes nordiques : sources et savoirs », in Laurent, Di filippo (dir.), Vikings !, Bordeaux, Les moutons électriques, 2022, p. 46.

74Wardruna, « About », https://wardruna.com/about/ (page consultée le 15/11/2023). Bandcamp, « Skald par Wardruna », https://wardruna.bandcamp.com/album/skald (page consultée le 14/02/2024).

75Laurent, Di filippo, « Le retour des dieux », in Laurent, Di filippo (dir.), op. cit., p.  9 – 80, 95.

76Annelie, Jarl Ireman, « Quand la littérature de jeunesse scandinave se met à l’heure viking : La reconstruction d’un mythe. », Nordiques, 39, 2020, p. 11, DOI : 10.4000/nordiques.583.

77Frédérique, Harry, « Le néopaganisme, une religion de la sécularisation », Nordiques, n° 29, 2015, p. 108 – 109, DOI : 10.4000/nordiques.5445.

78Traduction par Régis Boyer de « Hávamál », L’Edda poétique, op. cit., p. 166 – 202. 

79« Heilung and Wardruna represent live musical performance as a distinctly Nordic folk oriented, spiritually charged event, which may carry religious import to the audience. Drawing on preserved folk practices and idealized pre-Christian history of Northern Europe, the bands claim to collapse time between the distant past and the present “now” in their performances. Nordic Neopagan-aligned listeners participate in an imagined ancient time, cultivating experiences that realize past Nordic-Germanic concepts and practices in the present. In that way, Nordic Neopagans continually form and reform spiritual identities and experience connectedness with a culture distant in space and time. » Padraic Fitzgerald, Mathias Nordvig, « Spellbinding Skalds Music as Ritual in Nordic Neopaganism », in Sravana Borkataky-Varma, Aaron Michael Ullrey, Living Folk Religions, London & New York, Routledge, 2023, p. 192, DOI : 10.4324/9781003257462.

80Ibid., p. 192.

81« a turbulent journey, that is supposed to leave you relieved in the end. Because it can be super intense to listen to […] And then you feel better. » Resonator, Heilung | Resonator Talks, 2mn07- 2mn35, 12 septembre 2019, https://youtu.be/2vvWTzpDHEI (consulté le 09/02/2024).

82Un jeu de rôle créé par l’entreprise Games Workshop.

83Yohann Guffroy, « Les runes, de l’écriture d’hier à la magie d’aujourd’hui », in Laurent Di filippo (dir.), op. cit, p. 187.

Pour citer ce document

Lise Philippe , « Les êtres dotés de pouvoirs surnaturels dans la musique néofolk européenne : inspirations mythologiques nordiques », Histoire culturelle de l'Europe [En ligne], n° 6, « Figures mythiques dans les cultures contemporaines : récits du passé et réinterprétations », 2024, URL : https://mrsh.unicaen.fr/hce/index.php_id_2505.html

Quelques mots à propos de : Lise Philippe

Docteure en langues et littératures étrangères, sa thèse a pour sujet les constructions d’identités nationales dans la musique heavy metal finlandaise de 1990 à 2020. Son travail se concentre sur les constructions identitaires dans la musique populaire des pays nordiques. Elle a notamment publié sous sons ancien nom, Lise Vigier  « At the Crossroads of Nordic Traditions and Languages : The Representation of the Swedish-Speaking Finn Community in Finnish Heavy Metal » dans VÄLIJÄRVI, Riitta-Liisa, DOESBURG, Charlotte, DIGIOIA, Amanda (éds.), Multilingual metal music: Sociocultural, Linguistic and Literary Perspectives on Heavy Metal Lyrics, Londres, Emerald Publishing Limited, 2021, p. 79-93; « Les sirènes du Nord : analyse des constructions de la féminité dans les œuvres de metal nordique », dans Deshima, n° 13, 2019, p. 109-124 ; Billet de blog : « Wardruna et Heilung : de nouveaux ambassadeurs de l’histoire nordique préchrétienne ? », blog Vue du Nord, mis en ligne le 15/10/2018, URL : http://vuedunord.blogspot.com/2018/10/wardruna-et-heilung-de-nouveaux.html