Histoire culturelle de l'Europe

Maria Hansson

Hygge, horreur et folklore dans la série Lutins : Une critique du style d’interactions sociales danois

Article

Résumé

Lutins (Nisser) est une série d’horreur fantastique danoise diffusée le 28 novembre 2021 sur Netflix. Une famille quitte le stress de Noël en ville et prévoit des vacances de Noël farniente : le hygge danois, en famille dans un chalet sur une petite île isolée, mais la douce oisiveté est de courte durée. La série semble être une sorte de parodie du traditionnel calendrier de Noël télévisé (julkalendern) danois, véritable institution télévisuelle et lieu de rencontre entre les traditions et les créatures des croyances populaires, depuis les années 1960. Nous étudierons ce que la série Netflix Nisser hérite du genre et en quoi elle en diffère, notamment comment la figure du lutin, chère aux traditions de Noël, est utilisée pour critiquer un aspect très célèbre du peuple danois : le hygge.

Abstract

Elfs (Nisser) is a Danish fantasy horror series that premiered on Netflix on 28 November 2021. A family leaves the stress of Christmas in the city and plans a lazy Christmas vacation, the Danish hygge, with the family in a cabin on a small remote island, but the sweet farniente is short-lived. The series seems to be a sort of irony of the traditional Danish TV Christmas calendars (julkalendern), a veritable institution of Danish television and a meeting place between traditions and the creatures of popular beliefs since the 1960s. This paper aims to study what the Netflix series Elfs inherits from the genre and how it differs, in particular how the figure of the elf, dear to Christmas tradition, is used to criticize a very famous aspect of the Danish people: the hygge.

Texte intégral

Introduction

Lutins (Nisser) est une série d’horreur fantastique danoise créée par Stefan Jaworski. La première saison, composée de six épisodes, durant chacun une vingtaine de minutes, a été diffusée le 28 novembre 2021 sur Netflix. L’action se déroule sur une petite île danoise isolée nommée Årmandsø, un lieu fictif, où domine une nature sauvage. Mettant en vedette le lutin (nisse), une figure emblématique de la culture nordique, aujourd’hui associée à la fête de Noël, la série s’est pourtant hissée tout de suite à la troisième place des programmes les plus visionnés de la plateforme1. Le lutin, issu des croyances populaires et présenté originellement comme un personnage malin, est réinterprété dans la culture scandinave contemporaine actuelle comme une figure sympathique qui annonce l’arrivée des fêtes de Noël et cela depuis les illustrations de la suédoise Jenny Nyström (1854-1946) et du danois Peter Nikolai Møller (1838-1910). Cependant, l’ancien lutin a, selon les ethnologues, des similitudes avec des petits êtres qui sont mentionnés dans la littérature norroise ainsi que dans les anciennes lois de l’Église nordique2. L’Église considérait de fait le nisse comme l’un des suppôts de Satan. Cette série permettrait donc une reviviscence de l’image du lutin. Le lutin fascine donc toujours autant, mais le créateur de la série semble viser d’autres objectifs qu’une mise en scène de la bonne ambiance des fêtes de fin d’année. Au-delà des similitudes narratives qui existent entre cette série et d’autres films fantastiques comme Gremlins et E.T., nous verrons que la figure du lutin, chère aux traditions de Noël, semble ici utilisée pour critiquer un aspect bien précis de la culture danois : le hygge.

Hygge est un adjectif danois et norvégien qui signifie « sympathique », « confortable ». À partir du XVIIIe siècle, son sens s’élargit jusqu’à qualifier un mode de vie fondé sur le confort, la sécurité et l’intimité au sein du foyer. Les éléments associés spontanément au hygge sont la tasse de thé devant la cheminée, un livre, des bougies. C’est aussi une orientation bienveillante, par exemple envers les enfants, et un comportement qui les apaise et les rassure dans un foyer qui, sans être trop élégant, est respectablement propre et bien entretenu3. Ajoutant que la série comporte des similitudes avec l’un des emblèmes du hygge danois, c’est-à-dire le calendrier de Noël (julekalenderen), genre auquel la série Netflix peut en effet s’apparenter. Le calendrier de Noël est un programme télévisé très populaire diffusé par les chaînes scandinaves en décembre. Le choix du sujet du calendrier donne lieu à des discussions passionnées dans la presse danoise qui se demande si « [les séries] transmettent à un degré satisfaisant la célébration tant attendue ou l’atmosphère hygge de Noël »4, ou si elles correspondent plutôt aux sensations d’effroi et d’étrangeté que Freud désigne par le terme unheimlich5. Nous pourrions dès lors nous demander, par l’étude de la réinterprétation de la figure du nisse, comment cette série – relevant à la fois de l’horreur et d’une véritable institution danoise, les calendriers de Noël – propose un récit d’émancipation à travers une critique du hygge.

Une série d’horreur

Les inspirations

C’est sur le chemin qui les mène vers leur chalet sut l’île que la famille Svane, arrivant de Copenhague en voiture pour fêter Noël loin de l’effervescence de décembre, heurte un objet inconnu. Plus tard dans la soirée, la fille cadette, Sosefine (Sonja Sofie Engberg Steen) découvre qu’il s’agissait d’un bébé lutin et décide de ramener cette créature à la maison pour le soigner. Elle ignore que la famille de celle-ci est enfermée par les habitants de l’île derrière une grande palissade électrifiée. Après l’avoir découvert, elle ouvre la grille. Tandis que la famille du bébé lutin commence à massacrer les habitants de l’île, la famille Svane lutte pour survivre.

Le spectateur fait face à des scènes horrifiques dès les premières minutes de la série, lorsqu’il voit un habitant de l’île, Møller (Rasmus Hammeric) conduire une vache au milieu de la forêt, l’attacher à unpieu avant qu’elle ne soit dévorée vivante par les lutins, un sacrifice qui n’est pas sans rappeler la scène au cours de laquelle une chèvre est offerte en pâture aux dinosaures dans Jurassic Park, réalisé par Steven Spielberg en 1993.

De nombreux points communs peuvent d’ailleurs être relevés entre différents films et séries mêlant l’horreur et le surnaturel. Ces productions très populaires mettent souvent en scène des enfants solitaires. Dans E.T., réalisé par Steven Spielberg en 1982, Elliott (Henry Thomas) est un petit garçon renfermé comme Josefine dans Lutins. Quant à Billy (Zach Galligan) dans Gremlins, réalisé par Joe Dante et sorti en 1984, il ne semble pas non plus avoir beaucoup d’amis, mais se plaît dans la compagnie du petit mogwaï Gizmo. Dans ces fictions, les enfants se lient d’amitié avec une créature surnaturelle pour combler le même manque affectif. On retrouve d’ailleurs dans Lutins le même schéma que dans Gremlins : le spécimen recueilli est un être adorable avec qui le héros va pouvoir nouer une relation consolatoire, tandis que les autres créatures de la même espèce sont d’une grande agressivité. Dans Lutins, seul le petit nisse est gentil, dans Gremlins, c’est Gizmo qui joue ce rôle. Cependant, quand on renverse un verre d'eau sur Gizmo, celui-ci se multiplie aussitôt en cinq terribles gremlins.

D’autres rapprochements peuvent être opérés. Ainsi, afin de prendre soin de ces personnages surnaturels, les enfants inventent différents scénarios. Dans E.T., Elliott fait semblant d’être malade pour ne pas aller à l'école, alors que Josefine prétexte la nécessité de lire un livre pour ne pas participer aux préparatifs de Noël. Dans les trois films, l’enfant laisse pourtant entrer d’autres jeunes gens dans la confidence. Dans E.T., le frère aîné d’Elliott et leur petite sœur découvrent à leur tour l'extraterrestre, ce qui déclenche des scènes comiques de frayeurs réciproques, alors que dans Lutins, le frère de Josefine trouve le bébé Kee-Ko très laid.

Enfin, les péripéties dans les trois films prennent la forme de poursuites. Dans E.T., c’est d’abord les agents du gouvernement américain et ensuite des scientifiques qui sont sur les traces de l’extraterrestre, alors que dans Lutins et Gremlins, les spectateurs sont témoins de véritables massacres, d’autant plus réjouissants que les assassins sont de petites créatures d’abord assez mignonnes.

L’écologie

La préoccupation écologique rapproche aussi E.T. et Lutins. D’ailleurs l’association des lutins à la question environnementale n’est pas un phénomène nouveau en Scandinavie6. Cependant, Emilie Semiramoth regrette que la série danoise passe à côté de son véritable sujet, qui pour elle est l’écologie : « Il y a un soupçon de commentaire environnemental sur l'incapacité parfois exaspérante – et disons-le la bêtise – des Svane à respecter l’environnement, tandis que la série oppose sans nuances ruraux et citadins comme deux populations incompatibles7. »

En réalité, la question de l’écologie est bien présente dans la série danoise comme dans d’autres séries mêlant l’horreur et le folklore8. Rappelons que la série se déroule dans une île imaginaire loin de toute civilisation où les habitants vivent en harmonie avec la nature, à l’instar de la population décrite dans le roman d’Ernest Callenbach, Ecotopia (1975). Déterminés à protéger la communauté à tout prix, la population a décidé d’enfermer les créatures autour d’une ancienne scierie. Jadis, les lutins ont tué tous les ouvriers de cette fabrique. Pietari Kääpä voit dans certains films nordiques un écotope où s’affrontent l’humain et le surhumain9. Il propose alors une nouvelle définition de ce terme au cinéma, que nous pouvons appliquer à la série danoise : « l’écotope est le lieu de rencontre où les points de vue anthropocentriques sont confrontés à des réalités écosystémiques quand, littéralement, les humains se retrouvent face aux autres et réalisent les limites de leurs visions du monde10 ». Le surnaturel, le refus de l’anthropocentrisme et l’altérité sont, aux yeux de Pietari Kääpä, les trois mythèmes qui constituent les écotopes nordiques. La valeur identitaire de la nature est en effet bien plus forte en Scandinavie qu’ailleurs. « La nature est […] une source commune de mythes et de croyances dans le monde entier [...] mais pour les Scandinaves et pour la vie en Scandinavie, la nature a une signification particulière. La nature sauvage, ses bois et ses lacs sont notamment considérés comme une utopie d’abondance et de puissance11 ». L’île d'Årmandsø serait ainsi une terre échappant à toute emprise nationale dans « un no man’s land transcendant inculte12 ».

Dans E.T., on trouvait déjà cette sensibilité écologique. Les extra-terrestres sont d’étranges petits visiteurs, botanistes, envoyés sur terre en mission d’exploration. C’est quand l’un d’eux s’éloigne du groupe et explore la forêt avant de découvrir, fasciné, les lumières de la ville au loin que les autres l’oublient sur terre. Les lutins, quant à eux, veillent sur la nature de leur île, prêts à dévorer ceux qui ne la respectent pas.

La thématique de Noël

Comment se fait-il que la période de Noël paraisse toujours propice au surgissement de l’horreur dans ces films à destination d’adolescents ? La famille Svane aspire à un Noël au calme quand elle se fait attaquer par la figure la plus représentative de cette fête au Danemark, c’est-à-dire le nisse. Dans Gremlins, rappelons la scène où Kate (Phoebe Cates) raconte à Billy et au mogwai Gizmo comment son père est mort lorsqu’il a essayé de se glisser dans une cheminée imitant le Père Noël pour les surprendre.

L’horreur de Noël est donc un oxymore qui joue sur les mêmes ressorts que le clown terrifiant. Cette forme d’horreur est d’autant plus efficace qu’on ne veut pas associer les joies de l’enfance au grotesque. Rappelons cependant qu’au Danemark, il existe parmi toute sorte de calendriers de Noël télévisés une veine parodique.

Une institution : Le calendrier de Noël danois

L’apparition des calendriers de Noël est liée à la marchandisation de la fête chrétienne de la nativité. Ils firent de leur apparition en papier carton en Allemagne dès 1903. Dans les pays scandinaves, du 1er jusqu’au 24 décembre, la télévision diffuse une série ayant pour sujet Noël, pour faire patienter les enfants jusqu’à l’arrivée des fêtes le 24 au soir.

La tradition

Le modèle du Noël scandinave que l’on connaît aujourd’hui s’impose au XIXe siècle et à pour emblème le sapin et ses décorations, les chansons traditionnelles, les cadeaux et le Père Noël, mais il a aussi été façonné par l’histoire culturelle danoise, ses contes, ses chansons et ses pratiques. Gunhild Agger souligne l’importance des contes de Hans Christian Andersen Le Petit Sapin (Grantraet, 1844) et La Petite Fille aux allumettes (Den lille pige med svolstikkerne, 1845) ainsi que des psaumes danois popularisées par Nikolaj F. S. Grundvig :

Ces trois traditions – l’almanach, la tradition folklorique et l’histoire culturelle – sont les éléments constitutifs essentiels de la tradition du calendrier de Noël de al télévision danoise. Combinés aux genres de la comédie et de la comédie musicale, ils apparaissent dans une grande variété de mélanges avec des décors et des préoccupations modernes13.

Le calendrier de Noël télévisé

Lancé en 1960 en Suède sur la chaîne de télévision publique SVT, l’idée est reprise rapidement, d’abord au Danemark et ensuite en Norvège en 1970. Ces séries annuelles, de 24 épisodes ont rang de véritable tradition de Noël. Or, contrairement à la Suède, où ces calendriers sont destinés aux enfants, le Danemark produit des feuilletons aussi bien pour les enfants que pour les adultes. Gunhild Agger rappelle qu’au Danemark, le calendrier télévisé de Noël « a pris le statut d’institution, attirant des audiences élevées et de nombreuses mentions et critiques dans les médias, y compris Internet. DR et TV2, les deux principales chaînes de télévision, diffuseront inévitablement un calendrier de Noël pour toute la famille14 ». La série Lutins n’est pas à proprement parler un calendrier de Noël, même si on y retrouve une structure épisodique. Traditionnellement, dans les calendriers danois, les mésaventures sont résolues pour que l’on puisse, au dernier épisode, fêter Noël en famille. Dans la série diffusée sur Netflix, on se trouve aux antipodes d’une véritable fin heureuse autour du sapin. En effet, quand la famille Svane se retrouve enfin, sur le chemin du retour, elle renonce au contraire à Noël et aux cadeaux, heureuse d’avoir tout simplement survécu. « Tu ne sauras jamais ce que tu allais avoir comme cadeau de Noël », dit la mère Charlotte (Lila Nobel) et Josefine répond qu’elle s’en moque. Heureux ou malheureux, Noël fixe un terme définitif à la narration.

Remarquons en outre que la bande originale, souvent très entraînante des calendriers de Noël danois trouve ses échos dans la bande originale de Lutins. Cette dernière n’est d’ailleurs pas sans rappeler la musique de Julefeber en 2020 écrite et chantée par l’artiste Oh land (Nanna Øland Fabricius) pour le calendrier de Noël de cette année-là, une mélodie douce et mystérieuse.

Le succès du genre du calendrier danois tient à sa façon de mêler le folklore, les mythes et l’histoire culturelle à la vie contemporaine. Ceci est vrai pour Lutins également, série qui mêle, comme on l’a rappelé, les problématiques écologiques au mal-être adolescent.

Le rôle des lutins dans les calendriers danois

Quoi qu’il en soit, le lien le plus évident entre Nisser et le calendrier télévisé est bien la présence du lutin, cette créature scandinave si étroitement associée à Noël dans la culture contemporaine. Signalons que le lutin est au centre des calendriers danois, plus que dans ceux des autres pays nordiques. En Suède, parmi les émissions les plus populaires, il faut mentionner Gumman som blev liten som en tesked (La Bonne Femme qui est devenue aussi petite qu’une cuillère à café, 1967) et Trolltider (Au Temps des trolls, 1979) où le lutin traditionnel de la ferme (tomte) vit en bonne compagnie avec de petits trolls. Mais d’autres, comme Ture Sventon privatdetektiv (Le Détective privé Ture Sventon, 1989), Mysteriet på Greveholm (Le Mystère au Château de Greveholm, 1996) ne sont pas consacrés à cette créature. Au Danemark en revanche, le lutin est la figure favorite de cette tradition télévisée : Nisserne Tim og Tam (Les Lutins Tim et Tom, 1963, DR), Noget om nisser (Quelque chose sur les lutins, DR, 1972), Nissebanden (Le Gang des lutins, DR, 1984), Nissebanden i Grønland (Le Gang des lutins au Groenland, DR, 1989), Alletiders jul (Le Noël fantastique, TV2, 1994), Alletiders nisse (Le Lutin fantastique, TV2, 1995), Nissernes ø (L’Ile des lutins, 2003 (DR1).

Les lutins, des créatures empruntant leurs caractères aux trolls

En visionnant notre série, on peut en effet s’interroger sur la figure du lutin. Pour les ethnologues, le nisse danois ou le tomte suédois, est une petite créature humanoïde légendaire du folklore scandinave comparable au lutin français. Celui-ci s'occupe des animaux de la ferme, et les protège contre la mauvaise fortune, en particulier la nuit, pendant que les habitants sont endormis. Le lutin nordique est souvent représenté comme un petit homme âgé, dont la taille varie de quelques dizaines de centimètres à la moitié de la taille d’un homme adulte. Il porte souvent une grosse barbe et est vêtu d’une tenue de travail de paysan, coiffé d’un bonnet rouge ou gris.

Dans Nissens historie (L’Histoire du lutin)15, un ouvrage danois classique écrit dès 1918, Henning Frederik Feilberg distingue plusieurs types de lutin : vandvætte, skovvætter, jordvætter, c’est-à-dire vivant dans l’eau, dans la forêt ou dans la terre – dans Lutins on voit les créatures dans la forêt sortir de la terre. Mais ils peuvent aussi vivre dans les greniers ou dans les étables16. Le lutin traditionnel aide les hommes dans leurs occupations quotidiennes, mais si ces derniers sont méchants ou ne payent pas ses services, il peut se venger, inoculer des maladies ou même provoquer la mort. Souvent, il est récompensé par un bol de riz au lait à Noël, ce dont il se contente, mais il est pourtant très taquin17.

Les premières attestations du lutin

Les traits de cette créature sont recueillis partout en Scandinavie et dans le nord de l’Europe à la fin du XIXe siècle. Au Danemark, c’est par Evald Tang Kristensen (1843-1929), l’un des premiers folkloristes du pays. L’éthologue suédois Ebbe Schön quant à lui, rappelle que leurs traces remontent jusqu’à Olaus Magnus, qui a publié son Histoire des peuples nordiques en 1555. Celui-ci est consterné, en tant que chrétien, de voir les hommes invoquer des créatures qui les aideraient dans leur travail. En effet, les lutins travaillent la nuit et s’occupent des chevaux et du bétail. Mais après s'être installés parmi le peuple, ces êtres, dit Olaus Magnus, font un grand mal, car ils « renversent les maisons, détruisent le bétail, ravagent les champs et les cours d'eau18 ». L’avènement de la Réforme a entraîné une persécution puritaine plus dure encore à l’encontre des croyances populaires. Ebbe Schön rappelle à cet égard que « dans une édition du catéchisme de 1689, l’évêque Olaus Svebilius met en garde contre l’idolâtrie, qui peut prendre plusieurs formes, notamment en recherchant l’aide de suppôts du Satan […]19 » comme le lutin. Ainsi, « l’ancien lutin scandinave a des racines profondes dans notre antiquité païenne. Le lutin moderne, quant à lui, est un immigré chrétien, héritier du bienveillant saint Nicolas20. »

Ce n’est pas ce dernier qui est représenté dans la série. Il relève plutôt de ceux des histoires tardives dans lesquelles nous pouvons remarquer des jugements plus contrastés : parfois le lutin est mentionné comme un être fondamentalement diabolique, loin de celui, qui est aujourd’hui associé au Père Noël et qui l’aide à fabriquer les cadeaux. En effet, ce lutin des fermes est devenu le porteur des cadeaux, mis en avant dans la seconde moitié du XIXe siècle dans les différents magazines de Noël.

En outre, il existe des histoires folkloriques où il est décrit comme un métamorphe, capable de prendre une taille bien plus grande que celle d’un homme adulte. Dans d'autres contes, le lutin serait doté d’un œil cyclopéen. Puisque le lutin est censé produire des illusions et se rendre lui-même invisible, les anciennes descriptions étaient en général peu susceptibles de fournir des précisions et détails sur son apparence.

Les caractéristiques du troll

Bien qu’elles conservent le pouvoir malfaisant du lutin traditionnel, les créatures féroces de la série ne semblent se rapprocher du nisse que par le fait qu’elles surgissent lors des fêtes de Noël. En effet, le bébé Kee-Ko, s’apparente surtout à la figure du troll danois de Thomas Dam (1915-1989) dont DreamWorks Animation s’est inspiré pour sa trilogie Trolls21. Les frontières entre les différents êtres sont floues dès l’origine. Les caractères des uns s’attachent souvent aux autres et un flottement persiste entre les géants, les trolls, les lutins et les vætter : ceux qui vivent dans la forêt sous terre. Toutes ces créatures se caractérisent principalement par leur opposition aux hommes et aux dieux, et incarnent les forces naturelles ou magiques. Néanmoins, les lutins sont plus souvent associés à la ferme et les trolls aux milieux naturels hostiles comme les mers, les montagnes et les forêts. De plus, traditionnellement, le lutin vit seul et les trolls en groupes. Notons que dans la série de Netflix, les créatures appelées lutins vivent en groupe et dans la forêt, ceci ne gêne pas les créateurs de la série qui les appellent skovnisser (les lutins des forêts).

Qu’est-ce donc que les trolls ? Peu amicaux ou dangereux pour l'homme, diabolisée par le christianisme, les trolls perdurent néanmoins dans les croyances populaires jusqu'au XIXe siècle. Celles-ci se transmettaient de génération en génération, principalement par voie orale, par les contes, les ballades, et les rites. Les trolls sont l'Autre auquel le lecteur ne peut jamais s'identifier.22 Pour une série d’horreur fantastique, il a fallu une créature maléfique, mais comme l’action se déroule pendant la fête de Noël, on choisit le lutin. Notons toutefois que dans les anciennes croyances, le troll aussi pouvait être associé à Noël :

À un moment de l’année, il était particulièrement difficile de traiter avec les trolls, et c’était à Noël, la période où l’obscurité est la plus profonde et où beaucoup de choses surnaturelles peuvent se produire. À cette période, de nombreuses fermes tremblaient à cause de tous les trolls qui envahissaient les maisons23.

En affectant à la figure du lutin l’agressivité du troll, l’auteur de la série crée donc une créature parfaitement adaptée à la dénonciation des faux-semblants de hygge, mieux adaptée aux fêtes familiales de Noël, fêtes où triomphe le hygge.

Un récit d’apprentissage

En effet, la série illustre bien sur le style d'interactions sociales connu sous le nom de hygge. Même les calendriers de Noël traditionnels, et surtout ceux qui les parodient, font une large place à ce style de vie typiquement scandinave et particulièrement danois. Le genre spécifique des calendriers de Noël pour adultes est généralement conçu comme une parodie de toutes les traditions hygge accompagnant Noël, apportant un moment de détente à son public 24.

Mais que critique-t-on dans le hygge, ce mode de vie que le monde entier envie aux Scandinaves ? Quand Claus Nygaard Petersen rend compte de la série dans la presse danoise, il commence son article avec cette imagerie : « Les rues sont déjà infestées par toutes sortes de décorations de Noël : guirlandes, cœurs, pères Noël et petits diables rouges – les lutins […] Je ne déteste pas Noël – juste le prélude de plus en plus grotesque25. » Il résout ainsi le paradoxe entre l’horreur et la fête la plus célébrée au monde et particulièrement dans les pays scandinaves. En dehors de son mercantilisme, ne peut-on pas reprocher à cette fête familiale le repli sur soi et voir dans le hygge une façon de fermer les yeux aux problèmes qui nous entourent ?

La fête de Noël et le hygge

Le marketing joue à plein pour offrir de belles images des pays du nord. Depuis quelques années, le Danemark s’est fait connaître, aussi, comme le pays le plus heureux du monde et suscite la curiosité générale. En témoigne les multiples traductions du livre sur le hygge écrit par Meik Wiking en 201626.

Les emblèmes du hygge sont très présents dans la série. La famille Svane souhaite se retrouver dans le chalet, seuls, pour prépare Noël au coin du feu, avec une tasse de thé. Ils disent précisément vouloir « chercher le confort », « la convivialité » et « ralentir [leur] rythme », autant d’aspirations exprimées par le guide de Meik Wiking. Cependant, la série semble traiter avec beaucoup d’ironie de cet art de vivre pour tracer les contours d’un pays où le hygge dissimule une problématique sociale et où les lutins seraient l’image d’une minorité qu’on enferme. Dans la série, Josefine est la seule à éprouver de la sympathie pour la créature qu’elle trouve et qu’elle refuse de croire méchante. Les lutins menaçants qui vivent enfermés par les habitants de l’île derrière une grande clôture électrifiée sont renvoient à des réalités très actuelles. En effet, les trolls et les lutins, par l’altérité qu’ils incarnent, nous rappellent que le Danemark a déplacé les migrants dans des camps à l’extérieur de ses villes. Cette mesure, espérait le parti nationaliste (Dansk Folkeparti) devait conduire au rapatriement plutôt qu’à l'intégration des populations étrangères. Depuis, il y a bien eu deux camps (en Jutland et en Sjælland) où sont retenus des étrangers qui sont sur le point de quitter le Danemark après un refus d’asile.

Pour preuve, dans une étude récente qui examine la façon dont les réfugiés, installés dans les régions rurales de la Norvège et du Danemark, vivent et interagissent dans leurs nouveaux lieux de résidence27, les émigrés au Danemark témoignent de la prééminence du hygge qui interdirait, selon eux, toute discussion sur les véritables problèmes sociétaux.

Le hygge, un outil de contrôle social

Le hygge est lié à des valeurs culturelles qui idéalisent la notion d’« espace intérieur » et à d'autres normes égalitaires de la vie quotidienne dans les sociétés scandinaves. Bien que communément vécu comme une involution agréable dans un intérieur social et spatial, le hygge peut également être vu comme un moyen de se mettre en retrait des conditions aliénantes de la modernité. Ainsi, Jeppe Trolle Linnet voit dans ce modèle de vie, malgré sa vocation égalitaire, un outil de contrôle social qui établit sa propre hiérarchie des attitudes et crée un stéréotype négatif des groupes sociaux qui sont perçus comme incapables de créer du hygge28. Selon lui, les Danois ont une conception clairement stratifiée des modes de vie existant autour d’eux auxquels ils affectent des différences morales. Ainsi, tout le monde répugne à s’identifier à autre chose qu’à la classe moyenne et un certain nombre de Danois ne veulent pas reconnaitre une société de classes. L’imaginaire social du entre-deux, demeure omniprésent et se répète à tous les niveaux sociaux29. Selon Jeppe Trolle Linnet, le hygge agit ainsi comme une condamnation des modes de vie minoritaires.

L’anthropologue prend justement comme exemple primordial l'interaction familiale qui se crée pendant la période de Noël. Dire des cadres sociaux et des expressions rituelles qu’ils n’ont pas été hyggelig (sympathiques) constitue un désaveu cinglant. Les vertus du hygge constituent la clef de voûte de la famille moderne, dans le sens où elle offrira un havre d’intimité qui « guérira » chaque membre de la famille de ses heurts continus avec le monde. La maison familiale devient ainsi un véritable asile en vertu d’un type particulier de convivialité qui fait défaut dans la sphère publique moderne30.

Selon Linnet, les normes autour du hygge cadrent parfaitement avec les stéréotypes définissant la classe moyenne. Elles témoignent d’ailleurs d’une certaine continuité structurelle avec la bataille culturelle qui opposa la bourgeoisie et l'aristocratie au XVIIIe siècle, période au cours de laquelle la culture élitiste était décrite comme superficielle tandis que la bourgeoisie valorisait une nouvelle intimité familiale.

Le concept permet de comprendre pourquoi, dans le monde scandinave, la remise en cause des normes égalitaristes expose à de lourdes sanctions sociales. La tendance au contrôle social est forte dans l'imaginaire actuel de la classe moyenne danoise. Ainsi donc, les accusations de prétention et de froideur se retrouvent à tous les niveaux de la société danoise, chacun reprochant aux couches sociales supérieures de ne pas être hyggelige31. Mais cet outil de contrôle social de la classe moyenne agit à la fois contre l’aristocratie et contre tout ce qui est extérieur au foyer. Personne ne prétendra que l’ancienne reine Margrethe II soit adepte de hygge.

Le hygge, un frein à l’émancipation

Le hygge apparaîtrait donc comme un frein à l’émancipation de l’héroïne. Si elle a pu être vue comme « l’archétype de l’ado insupportable », enfermée dans ses « préoccupations égocentriques » 32, nous pensons que ce n’est pas par égoïsme que la jeune fille s’éloigne de sa famille, mais pour mieux se construire dans une autonomie lui permettant une vision critique du monde.

Arrivée sur l’île, cette jeune fille va renoncer à chaque moment de hygge avec le reste de la famille pour s’occuper du bébé lutin en secret. En effet, elle refuse constamment de passer du temps avec les autres membres de la famille auprès du feu de cheminée alors que la mère essaie de l’associer à la traditionnelle confection des décorations de Noël en papier, et des gâteaux. Quand la jeune fille refuse, la mère lui propose de se pelotonner à ses côtés dans le canapé, l’activité phare du hygge, avec une tasse de thé et le livre que Josefine prétend devoir lire. Or, ce livre est en vérité le prétexte de Josefine pour ne pas être avec sa famille et construire son autonomie.

Une série d’émancipation

Dans le refus du hygge, nous lisons une envie grandissante chez la jeune fille de se libérer de l’emprise familiale et de se montrer apte à affronter la vie et ses exigences. Dans cette série initiatique, les spectateurs sont témoins de l’émancipation de la jeune fille, mais aussi de son frère, Kasper (Milo Campanale) qui tombe amoureux de Liv (Vivelill Søgaard Holm), une fille originaire de l’île, et qui fuit lui aussi les efforts des parents, Charlotte (Lila Nobel) et Mads (Peder Thomas Pedersen) pour créer l’ambiance propice au hygge dans le chalet.

Protégés par leurs parents de tout danger, les jeunes n’ont pas la possibilité de se confronter aux épreuves qui feront d’eux des adultes accomplis. Ne serait-ce pas la raison pour laquelle Josefine va ainsi se forger progressivement sa propre conception de la vie, en cherchant le danger sous la forme d’une créature folklorique, représentation de l’altérité ?

La seule qui la comprenne est la grand-mère de Liv, Karen (Ann Eleonora Jørgensen), la matriarche et propriétaire de la petite épicerie de l’île qui y voit le moyen – machiavélique – de rendre la jeune fille responsable des dégâts qu’elle a causés en ouvrant la grille qui enferme les lutins. Selon la vielle femme, Josefine doit expier sa faute par son sacrifice. Aussi, elle l’attache à l’intérieur de l’enclos pour l’offrir en pâture aux lutins, ce qui fait dire à une journaliste française, que « le plus drôle, c’est que l'habitant le plus terrifiant d'Årmandsø n’est pas l’un de ces êtres surnaturels mais plutôt une grand-mère […]. Déterminée à protéger sa communauté à tout prix, et les lutins, elle passe pour une illuminée un peu trop proche de la nature33. » Elle est surtout celle dont l’acte permet à la jeune fille, si celle-ci survit à l’épreuve suprême, de se surpasser et de devenir un personnage mature. Les monstres, ici les lutins, représentent ainsi la prise d’autonomie de la jeune fille. Selon Yvonne Leffler : « La rencontre avec l’Autre est le résultat de la tentative de l’individu d’enfreindre ou de se révolter contre les lois physiques, sociales ou morales34 ». C’est ainsi grâce à cette confrontation horrifique que Josefine se libère du hygge familial.

Conclusion

Bien qu’elle en conteste les fondements, la série d’horreur Lutins témoignent de la capacité des pays scandinaves à exporter leurs modèles par le biais de la production télévisée. Dans la série Lutins, Josefine est la seule à s’inquiéter d’autrui, alors que sa famille s’enferme dans le hygge. La critique du hygge est d’ailleurs contemporaine de son avènement. Ainsi le célèbre poète danois Jeppe Aakjær (1866-1930), comparait le Danemark pendant la Première Guerre mondiale à un petit enfant qui se blottit et profite du hygge sous les couvertures, « pendant que le monde entier brûle autour de [son] berceau » 35. Josefine agit comme le poète l’avait souhaité et montre que la véritable menace n’est pas le lutin.

Notes

1Lutins figurait du classement des dix séries les plus vues sur Netflix en décembre 2021.

2Ebbe Schön, Vår svenske tomte : Sägner och folktro, Stockholm : Hjalmarson & Högberg, 2006, p. 9-11.

3Cf. Jeppe Trolle Linnet, « Money Can’t Buy Me Hygge. Danish Middle-Class Consumption, Egalitarianism, and The Sancity of Inner Space », Social Analysis, Volume 55, Issue 2, Summer 2011, 21–44, Berghahn Journals, DOI :10.3167/sa.2011.550202, p. 22-23. Toutes les traductions sont de nous.

4Ibid. « Do they convey the much-longed-for celebration of hearts or ‘hygge’-atmosphere of Christmas to a satisfactory degree? »

5Le concept freudien Das Unheimliche peut être traduit en français par l’« inquiétante étrangeté », faute d'équivalent. Le lien avec le hygge résiderait dans intimité du foyer car, unheimlich venant de Heim, signifiant « le foyer », « la maison » et le hygge renvoie au sentiment de bien-être intime et chaleureuse au sein du foyer.

6Regina Synnøve Nørstrud Lindhjem, Venstresidens eventyr i blått? Marx, miljøvern, fremmedfrykt og nisser - En ideologikritisk analyse av Jul i Blåfjell, Bacheloroppgave i Filmvitenskap, NTNU, 2020.

7Emilie Semiramoth, « Lutins : stupide, sanglante et réjouissante, la série d’horreur cartonne sur Netflix ! », AlloCiné, 2 déc. 2021.

8Maria Hansson, « L’écotopie du polar nordique. Zone blanche et Jordskott », L’imaginaire du Nord dans les arts/Nordic Noir, Strasbourg, Deshima n 16, 2022, p. 165-180.

9La notion de l’écotopie naît d’une contraction d’« écologie » et de « topos » (« lieu » en grec) et s’inspire évidemment de l’Utopia de Thomas More.

10Pietari Kääpä, Ecology and Contemporary Nordic Cinemas. From Nation-building to Ecocosmopolitanism, Ecology and Contemporary, London, Bloomsbury, 2014, p. 84. Texte original : « the ecotope is the meeting place where humancentric views are confronted by ecosystemic realities as, literally, the humans come face to face with their others and realize the limitations of their worldviews. »

11Soila, Söderbergh, Widding & Iversen, 1998, Nordic National Cinemas, London, Routledge, p. 32. Texte original : « Nature is […] a common source for myths and beliefs all over the world […] but for Scandinavian people and for life in Scandinavia nature has a special meaning. The wilderness and its woods and lakes are in particular regarded as a utopia of abundance and power. »

12Pietari Kääpä, op.cit., p. 83. Texte original : « a transcendent uncultivated no-man’s-land ».

13Gunhild Agger, « Danish TV Christmas Calendars: folklore, myth and cultural history », Journal of Scandinavian Cinema, Volume 3, Number 3, 2013, p. 271. Texte original : « These three traditions – the almanac, folklore tradition and cultural history – are crucial as constituents of the Danish TV Christmas calendar tradition. Combined with the genres of comedy and musical, they appear in a large variety of admixtures with modern settings and concerns. »

14Ibid., p. 267. Texte original : « has assumed the status of an institution, attracting high ratings and numerous mentions and reviews in the media, including the Internet. DR and TV2, the two main TV stations, will inevitably broadcast a Christmas calendar for the whole family. »

15Henning Frederik Feilberg, Nissens historie, Copenhague, Det Schønbergske forlag, 1973 (1918).

16Ibid., 1979, p. 6-9.

17Ibid., 1973, p. 87-88.

18Ebbe Schön, op. cit., p. 11.

19Ibid., p. 12. Texte original : « I en utgåva av katekesen som kom ut första gången 1689 varnar biskop Olaus Svebilius för avgudadyrkan som kan ske på åtskilliga sätt bland annat genom att man söker hjälp av djävulen hans verktyg […]. »

20Ibid., p. 9. Texte original : « Den gamle tomten har rötter djupt nere i vår hedniska forntid. Den moderna tomten däremot är en kristen invandrare, en arvtagare till det givmilda helgonet Sankt Nikolaus. » Voir aussi Annelie Jarl Ireman, « Le jultomte, une figure mythique complexe et le symbole d’un Noël traditionnel suédois », « La Fabrique de Noël », collection « Actes des colloques », revue Silène, 2024.

21Trolls, réalisé par Walt Dohrn et Mike Mitchell.

22Cf. Maria Hansson, « L’Autre et l’Ailleurs : les trolls dans le ‘Nord du Nord’ », L’écriture du Nord du Nord, Annie Bourguignon/Konrad Harrer (éd), Berlin, Franck & Timme, 2019.

23Ebbe Schön, Troll och människa, Stockholm, Natur och kultur, 1999, p. 66. Texte original : « Vid ett tillfälle på året var det särskilt svårt att ha med trollen att göra, och det var på julen, den period då mörkret är som djupast och mycket övernaturligt kan hända. Då bävade man på många gårdar för alla troll som brukade våldgästa husen. »

24Gunhild Agger, « The magic of the Danish Cristmas Calendar » CST online, 18/12/2020.

25Claus Nygaard Petersen, « Nisser: Ny dansk horrorserie på Netflix bør blive en juletradition i sig selv », Soundvenue, 25 november 2021. Texte original : « Gaderne er allerede ved at blive inficeret af alskens julegejl: Guirlander, hjerter, julemænd og de små røde sataner – nisserne […] Jeg hader skam ikke julen – kun den tiltagende groteske optakt. »

26Meik Wiking, Le Livre de Hygge, Paris, First éditions, 2016.

27Lise Herslund, Gry Paulgaard, « Refugees’ Encounter With Nordic Rural Areas – Darkness, Wind and « Hygge » ! » Frontiers in Sociology, 2021. DOI : 10.3389/fsoc.2021.623686.

28Jeppe Trolle Linnet, op. cit.

29Ibid., p. 25. Texte original : ‘in-between’

30Cf. Ibid., p. 29-30.

31Ibid., p. 32.

32Emilie Semiramoth, op. cit.

33Ibid.

34Yvonne Leffler, op. cit., p. 154-155. Texte original: « The encounter with the Other results from the individual’s attempt to break free from, or revolt against, physical, social or moral laws. »

35Jeppe Aakjær, « Historiens Sang » (1916) Samlede digte II, Copenhague, Gyldendal, 1920. Texte original : « mens hele Verden brænder om din Vugge ».

Pour citer ce document

Maria Hansson , « Hygge, horreur et folklore dans la série Lutins : Une critique du style d’interactions sociales danois », Histoire culturelle de l'Europe [En ligne], n° 6, « Figures mythiques dans les cultures contemporaines : récits du passé et réinterprétations », 2024, URL : https://mrsh.unicaen.fr/hce/index.php_id_2511.html

Quelques mots à propos de : Maria Hansson

Maria Hansson est docteure en littérature nordique à Sorbonne-Université, chercheuse à la Sorbonne REIGENN, chercheuse affiliée à l’Université d’Uppsala et de Caen (ERLIS), et chargée de cours à Bordeaux Montaigne. Ses travaux portent surtout sur la littérature scandinave de la fin du XIXe siècle et sur le fantastique. Elle a organisé des colloques à la Sorbonne, notamment sur le fantastique et la critique sociale (2018), les autrices de la Percée moderne (2019) et sur Selma Lagerlöf et la France (2022). Monographie : Osynliga band. Folktro som medel för social kritik i Victoria Benedictssons, Anne Charlotte Lefflers och Selma Lagerlöfs författarskap, Göteborg, Makadam, 2021 / « L’Ecotopie du polar nordique : Zone blanche et Jordskott » Le Polar nordique : un dispositift transmédiatique ? Deshima n° 16, Presses Universitaires de Strasbourg, 2022 (Allessandra Ballotti & Frédérique Toudoire-Surlapierre).« Folklore and Environmental Critique / A study of the Swedish TV-series Jordskott », p. 291–312, Scandinavian Exceptionalisms. Culture, Society, Discourse, Berlin, Berliner Beiträge zur Skandinavistik series, 2021. (Jens Bjerring-Hansen, Torben Jelsbak & Anna Estera Mrozewicz)