Frappé au Salon de l'agriculture à Paris par la beauté de « ces grands insectes de fer multicolores » que sont les machines agricoles neuves, Darius Milhaud compose en 1919 Six Pastorales en leur honneur, dont une, dédiée à Jean Cocteau, sur la moissonneuse espigadora. Aujourd’hui, cette machine est inconnue en France. Pourtant, elle hante toujours la mémoire d’une catégorie de la population : les colons d’Algérie, qui en gardent un souvenir très vivace, allant parfois jusqu’à en confectionner des maquettes, car aucun musée n’en possède sans doute d’exemplaire dans la métropole.
Suite à un appel à témoignages dans L’Algérianiste, L’Écho de l’Oranie et L’Écho de Saïda, une quinzaine de personnes nées en Algérie dans les années 1920 et ayant bien connu la moisson à l’espigadora m’ont transmis ce qu’elles savaient de cette machine en fournissant documents, schémas, cartes et photos : Gilbert Berthet, Adrien Cazorla, Antoine Fuster, Joseph Fuster, Robert Hugonnot, Chantal Robert-Hugonnot, Pierre Jarrige, Évelyne Joyaux, Louis Baylé, Guy Marin, Désiré Martinez, Norbert Richet, Serge Rodriguez, Edgar Scotti et Jacques Solari. Qu’ils soient tous ici vivement remerciés de leur gentillesse et de leur patience 1. Leurs témoignages portent essentiellement sur l’Entre-deux-guerres.
* Courriel : <jeanpaul-bourdon@orange.fr>.
1. Plusieurs autres personnes se sont piquées au jeu et m’ont transmis des photocopies d’articles ou d’ouvrages rares ou étrangers, en particulier Michel Aubineau, président de l’Association du Conservatoire du machinisme et des pratiques agricoles (COMPA) de Chartres, professeur honoraire de l’Institut national agronomique Paris-Grignon, ancien titulaire de la chaire de machinisme agricole, et Serge Volper, documentaliste au Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD), auquel on doit les articles provenant des revues coloniales. Je dois remercier aussi Émile Marco, natif de Sidi-Bel-Abbès, qui m’a mis en contact avec les cercles de pieds-noirs, Christiane Alexis, née Martin à Vialar, qui m’a prêté des documents sur le Sersou ainsi que Hayette Némouchi sur l’Algérie.