Histoire culturelle de l'Europe

Olivier Jouffroy

Claude Clément et son combat contre les détracteurs de l’Espagne dans El Machiavelismo degollado

Article

Résumé

Cet article s’intéresse à un traité de Claude Clément, El machiavelismo degollado, rédigé sous le règne de Philippe IV d’Espagne. On tentera de démontrer que ce traité, écrit par un jésuite de culture francophone, mais bourguignon de patrie, peut être vu en partie comme une réponse aux attaques lancées par les ennemis de la monarchie espagnole depuis le xvie siècle, et s’attache à défendre l’unité religieuse et politique de la monarchie en construisant une identité “supranationale”. S’il s’inscrit dans le très vaste courant de réfutation de Machiavel, cet ouvrage participe aussi à un mouvement de justification de la politique espagnole, depuis l’instauration de l’Inquisition jusqu’à l’engagement aux côtés des troupes impériales contre l’hérésie protestante.

Texte intégral

1Claude Clément naît en 1596 en Franche-Comté, région alors sous l’autorité du roi d’Espagne. Entré dans la Compagnie de Jésus en 1612, il devient enseignant à Lyon, à Dole, puis est appelé en 1630 à occuper une chaire d’érudition au Collège Impérial de Madrid, un poste qu’il détiendra jusqu’à sa mort en 1642. L’œuvre qui nous intéresse a été publiée en latin en 1636 puis rééditée dans une version augmentée l’année suivante. La traduction en espagnol de la main de l’auteur, El machiavelismo degollado1, parue en 1637, peut être considérée comme la version finale du texte. Mais si cette œuvre n’est pas inconnue, peu d’articles lui ont été consacrés. Le plus complet est celui de Jaime Brufau Prats2 qui, après une longue introduction sur le contexte historique et la biographie de l’auteur, présente les principaux thèmes abordés. Francisco Elías de Tejada3 lui consacre également quelques pages ; il est l’un des seuls critiques à citer, même si ce n’est que succinctement, les autres œuvres de Claude Clément. Citons enfin un très court mais très riche article de Hugues Didier4 qui donne un nombre considérable d’informations précises sur l’auteur, provenant de ses recherches dans l’Archivum Romanum Societatis Iesu. Malheureusement, exception faite de ces travaux, l’œuvre de Clément est le plus souvent mentionnée pour son seul titre ou fait l’objet de jugements très tranchés, produits d’une lecture souvent rapide5.

2Notre objectif est d’étudier la légende noire anti-espagnole depuis « un positionnement imagologique qui écarte la relation entre ethnotype et réalité et se concentre sur l’analyse des stéréotypes en soi6 ». Notre positionnement n’est donc pas celui d’un historien : Claude Clément s’intéresse davantage à l’image de l’Espagne, à la définition des caractères propres aux Espagnols ou à leurs choix politiques qu’aux réalités historiques. Cet article doit être envisagé comme une réponse à une série de questions simples : pourquoi l’auteur cherche-t-il tant à faire l’éloge de Philippe II7 ? Pourquoi attaque-t-il si violemment la liberté de culte et défend-t-il si ardemment l’Inquisition ? Pourquoi met-il en exergue la fidélité exemplaire des Franc-Comtois et l’obéissance des Flandres ? Pourquoi enfin insiste-t-il tant sur les dépenses qu’occasionnent les conquêtes outre-mer et si peu sur les revenus que la Couronne reçoit en retour ? Même si Claude Clément ne cite pas les grands textes anti-espagnols comme l’Apologie de Guillaume d’Orange ou les Relaciones d’Antonio Pérez, un lecteur de 1637 pouvait difficilement ne pas comprendre les allusions. Si Clément ne formule pas leurs questions, il apporte pourtant bien une réponse aux détracteurs de l’Espagne.

3Et il la formule à un moment charnière de la guerre de Trente Ans : la France catholique de Richelieu se rapproche des puissances protestantes afin de lutter plus efficacement contre l’Espagne et l’Autriche qui l’encerclent et, quelques semaines après la publication de la première version latine de l’œuvre, de mai à août 1636, est lancée la première attaque française directe contre un territoire de la couronne d’Espagne : le prince de Condé assiège Dole, la capitale comtoise. Cet événement est très probablement ce qui pousse notre auteur à publier une nouvelle version du texte dès 1637 dans laquelle il intègre, bien évidemment, le récit de la résistance et de la victoire des Dolois. Une preuve de fidélité si brillante que Clément va s’en inspirer pour construire une identité « espagnole » qui, au-delà des particularismes, permet de fédérer autour de Philippe IV, auquel l’œuvre est adressée, tous les défenseurs de la foi catholique.

Vérité et faux-semblants dans El Machiavelismo degollado

… il convient d’étudier la légende anti espagnole et d’opposer la vérité historique aux apparences de vérité8 ;

… pour réfuter, condamner et abhorrer ces mystères politiques, le moyen le plus juste est de les porter au jour9.

4Malgré la distance qui les sépare, Juderías et Clément ont en commun un goût pour la vérité historique et le besoin de la rétablir lorsque celle-ci est favorable à l’Espagne. Ils mettent leur érudition au service d’une cause : faire le procès d’une représentation partiale de l’Espagne que Juderías formalise sous le nom de « légende noire » et qui leur semble d’autant plus fausse qu’elle a été utilisée comme un outil politique par ses ennemis pour tenter de briser sa puissance. Julián Juderías développe une pensée qui prend souvent l’apparence d’une revendication patriotique. Clément, quant à lui, n’est pas « espagnol » au sens où on l’entend à l’époque contemporaine ni un « patriote » au sens strict ; pourtant sa démarche est très proche de la précédente. Ils cherchent tous deux à dévoiler les mystères, à rétablir ce qu’ils estiment être la vérité historique en révélant les enjeux politiques et finalement tout le machiavélisme qui se cache derrière la construction de cette représentation négative de l’Espagne.

5La première révélation que Clément fait à son lecteur est celle du mal : il cherche à identifier les ennemis de l’Espagne. Selon lui, ils se reconnaissent à leur pragmatisme athée, à leur manière de privilégier l’intérêt de l’État, plutôt que la défense de la foi catholique. Ces adorateurs du pouvoir « consacrés au culte et à l’adoration de l’État10 » sont ceux qui inversent le fonctionnement de la croyance chrétienne : « ils accordent moins de prix aux choses divines qu’aux choses humaines ; aux lois de la Religion, qu’aux raisons d’État11 ».

6Dans un jeu complexe de faux-semblants, Clément décrit au début de son traité la cérémonie d’intronisation – qui a toutes les apparences d’une messe – d’un jeune prétendant dans la « secte des Politiques12 » à l’intérieur d’un temple où les tableaux des saints sont remplacés par des portraits des maîtres de l’art politique comme Tacite et, bien sûr, Machiavel. Les adeptes s’agenouillent devant deux statues, « la première de la Déesse Politique, et la seconde du Monarque13 » ; ils lisent un livre saint : « un livre qui n’était pas relié comme nous le faisons de nos jours, mais plutôt à la mode ancienne, c’était un parchemin enroulé autour d’un bâton de bois comme on enroule habituellement les marchandises14 » et leur « Fête de la Naissance de l’Empire15 » ressemble à s’y méprendre à un Noël païen. Il serait cependant faux de voir cette cérémonie comme une simple messe noire où les adeptes remplaceraient un dieu par un autre. L’inversion des valeurs se situe à un autre niveau : au lieu de resserrer le lien entre Dieu et les hommes, cette cérémonie a pour but de le dissoudre. Elle libère les hommes de leur foi et prône l’athéisme comme le montre le serment final du jeune initié : « pour savoir s’il faut croire qu’il y a un Dieu, observer les lois de la Religion, préserver la justice ; ou au contraire, se résoudre à commettre n’importe quelle mauvaise action, il ne faut prêter attention qu’aux intérêts de la vie, et au bien de l’État16 ».

7Cet ennemi – il ne l’a pas encore défini comme ennemi de l’Espagne mais il le fera quelques pages plus loin – a quelques ressemblances avec le cardinal de Richelieu : il joue sur les apparences pour jouer avec sa foi, qu’il professe ou renie au gré des nécessités politiques. Il dissocie le religieux du politique et s’affranchit ainsi des lois de la religion tout en maintenant ceux qu’il gouverne dans leur observance. Le pouvoir de cet Autre vient de sa capacité à dissimuler ses intentions et à remplacer le vrai Dieu par une idole qu’il manipule : « pour mettre au jour des malignités cachées, un homme ingénieux avait inventé des Dieux pour les contrecarrer, comme le font les lois pour les malignités visibles17 ». Il appartient à un monde inversé et diabolique et le roi Gustave-Adolphe de Suède fait figure d’exemple de cet anti-prince chrétien, cet antéchrist « restaurateur du nouvel Évangile18 » qui cherche à se placer sur le trône de l’empereur et du pape. Dans un style qui reprend celui de la mort de Goliath, Clément représente celle du roi protestant à la bataille de Lützen comme un sacrifice expiatoire :

Ta main insolente à qui la conjuration des hérétiques avait déjà donné par anticipation et en espérance le sceptre de l’Empire Romain […] gît maintenant, inerte ; et détachée de son bras, on peut l’emporter par toute la Chrétienté comme les restes, et le principal membre de quelque monstre cruel19.

8Clément veut montrer à son lecteur la fracture profonde qui existe entre l’Espagne et ses détracteurs : ce que certains pourraient prendre pour une confrontation naturelle entre deux propagandes, entre deux pratiques politiques20, est pour lui une rupture fondamentale, ontologique entre deux modèles de civilisation : d’une part le modèle catholique incarné par l’alliance du roi d’Espagne et de l’empereur et d’autre part le modèle pragmatique machiavélien de ceux qu’il nomme globalement políticos. Au moment où Clément rédige son texte, en 1635 puis en 1636, cet antagonisme a pris la forme d’une guerre religieuse meurtrière qui exacerbe les tensions et dessine la frontière entre deux camps irréconciliables. Il est donc naturel qu’il traite en premier lieu une question fondamentale dans ce contexte et tellement débattue : celle de la liberté de culte dans les territoires placés sous domination espagnole.

L’intolérance et le fanatisme religieux

De même que l’univers est soumis à l’autorité de Dieu, ainsi le despotisme religieux prétend asservir le monde politique ; alors tout rebelle est hérétique, et les hérétiques sont toujours traités sur le pied des rebelles. […] La monarchie religieuse est donc la plus dangereuse de toutes ; c’étoit celle que vouloit établir Philippe II21.

9Ce que certains « historiens » critiques reprochent à l’Espagne, et à Philippe II en particulier, n’est pas tant de vouloir conserver une unité religieuse que de confondre la sujétion politique avec la soumission religieuse ; une confusion qui fait potentiellement de chaque catholique un soutien au « despotisme » espagnol et un traître à son « pays ». Dans l’Apologie22, le texte qui prend la défense de Guillaume I d’Orange contre Philippe II, l’on peut lire justement que « ceuls qui en faisoient profession, au moins les prebstres, avoient un serment au Pape (comme ils ont par tout) lequel ils preferoient à celui qu’ils avoient au païs23 ». On ne peut s’empêcher d’y voir un parallèle avec la critique que Clément adresse précisément aux políticos, ennemis de l’Espagne : « Les Politiques tiennent avec plus de rigueur un serment fait sur la vie du Prince, que sur la Majesté de Dieu24. » Les deux textes posent très clairement la question du primat du politique sur le religieux qui fait de toute guerre religieuse, une guerre civile : doit-on obéir à son roi si cela contredit sa propre foi ? En d’autres termes, doit-on obéir à Dieu plutôt qu’au prince ?

10Or cette question se pose avec plus de force encore dans un système impérial qui regroupe des territoires divers. Le mot de pays utilisé dans l’extrait de l’Apologie est fondamental et à la fois difficile à interpréter. Il désigne – nous en aurons confirmation un peu plus loin – les territoires favorables à la liberté de culte qui formeront plus tard les Provinces Unies. Le texte met en avant un attachement au « pays », à un particularisme régional donc, qui peut in fine être un danger pour l’unité de l’Empire, ce que les faits confirmeront bien. Il faut donc comprendre que les trois textes cités, celui de Claude Clément comme ceux des détracteurs de l’Espagne cherchent un équilibre entre trois niveaux de sujétion : la soumission au « pays », au suzerain et enfin à Dieu. Et c’est dans ce schéma que Clément pense la question de la liberté de culte.

11Pour étayer sa théorie, il prend pour exemple sa patrie de Franche-Comté (à l’époque Comté de Bourgogne) où la religion catholique sert de ciment identitaire et garantit la soumission au seigneur naturel, le roi d’Espagne : « [Charles Quint] l’a placée sous la tutelle de la Religion Catholique et entoura cette même Religion du mur inexpugnable de saintes lois25. » Dans ce cas paradigmatique, l’union par la foi permet de confondre l’attachement au « pays », la soumission au prince et celle à Dieu : voilà donc ce qui devrait être une parfaite tyrannie religieuse. Or le jésuite franc-comtois fait remarquer que sa patrie est en paix alors que là où la liberté de culte a été permise, « les terres alentour se consument dans la guerre26 ». Pour les détracteurs de l’Espagne, c’est l’intransigeance et le refus obstiné des rois d’Espagne d’accorder la liberté religieuse qui cause la guerre ; pour Clément c’est ce qui garantit justement la paix, et la Franche-Comté en est la preuve éclatante. Selon lui, si la soumission supérieure à Dieu et, par là même, à l’Église catholique est remise en cause, la soumission au prince peut entrer en conflit avec l’attachement au « pays ». Et c’est le schéma qui sous-tend le conflit entre Guillaume I d’Orange et Philippe II.

12En outre, si le système politique repose sur l’intégrité de la foi catholique, il faut un organe religieux qui la garantisse, chez les plus humbles sujets comme chez le roi : c’est le tribunal de l’Inquisition. Il est donc parfaitement logique qu’il soit la cible des critiques des ennemis de l’Espagne et un objet de louange pour Clément. Celui-ci présente son instauration comme l’une des actions politiques majeures de Ferdinand II d’Aragon : « Il a institué le Saint Tribunal de l’Inquisition auquel […] il a aussi souhaité être lui-même soumis27. » Les deux principales accusations contre l’Inquisition concernent d’abord la purification religieuse par la violence (« le Duc d’Alve traictoit des moiens pour exterminer touts les suspects de la religion en France, en ce païs et par toute la Chrestienté28 », lit-on dans l’Apologie), puis l’utilisation de cette violence à des fins politiques, pour soumettre les territoires de l’empire à l’autorité espagnole : « c’estoient des filets tendus pour surprendre les Seigneurs mesmes du païs aussi bien que le peuple, de façon que ceus que les Espaignols et leurs adherens n’avoient peu supplanter par aultre voie, fussent tombez par ce moien en leurs mains29 ».

13Claude Clément ne va en aucune façon contester cela : pour lui, l’Inquisition est bien un moyen de contrôler les peuples, d’unifier politiquement l’empire et de pacifier les provinces : « un petit nombre de Prêtres font autant pour l’intégrité de la Foi, et pour la sécurité et la paix de l’Espagne, que ne pourraient le faire deux cents mille soldats constamment en armes30 ». Il défend l’efficacité politique de l’Inquisition tout en mettant en avant son économie de moyens, un argument qui tiendra jusqu’au xxsiècle et que l’on retrouve presque intact sous la plume de ceux qui veulent précisément lutter contre la légende noire : « Pourquoi les guerres de religion qui ont ensanglanté l’Allemagne et la France voisine ne se sont pas reproduites chez nous ? Quelques gouttes de sang versé lors des autodafés de Valladolid et de Séville ont suffi à étouffer cette secte dans l’œuf31. » Néanmoins rien chez Clément n’apparaît au sujet des tortures, des faux témoignages, des dénonciations ou de la spoliation des biens32. Certainement parce qu’il n’est pas question pour lui d’entrer dans un débat sur les moyens dès lors que la primauté du religieux sur le politique est garantie. Mais aussi parce que l’efficacité de cette poignée de prêtres vient justement du fait qu’ils soient capables d’être aussi contraignants et aussi effrayants qu’une armée d’occupation. L’image terrible de l’Inquisition fait en grande partie sa force, et Clément ne cherche absolument pas à l’adoucir.

14La question de la « pureté de sang » ou limpieza de sangre, très liée à celle de l’unification religieuse, fait partie de ces images de l’Espagne qui fonctionnent encore comme un repoussoir pour les nations prônant la liberté de conscience. Les différentes catégorisations de l’Autre comme confeso, converso, marrano montrent que, même si, dans la pensée chrétienne, l’esprit est supposé l’emporter sur le corps, « le sang Juif ou Musulman était inférieur au sang Chrétien ; posséder un peu de ce sang vous rendait suspect d’hérésie et de corruption morale33 ». Et il est impossible de penser cette question hors du contexte particulier de l’année 1492. Clément, comme tant d’autres avant lui, trouve dans la concomitance des événements un plan de la divine Providence :

… afin que soit plus visible le soutien mutuel avec lequel la Religion veillait sur les conquêtes temporelles de Don Fernando, pour l’avoir vu si loyal et dévoué à la protection et à l’amplification de la foi Catholique, il reprit le Royaume de Grenade avec le plus grand courage et pour le plus grand bien de l’Espagne ; il fit des Royaumes de Naples et de la Navarre, des Provinces. Il découvrit le nouveau monde […] et, plus qu’à lui-même, le soumit à l’Évangile34.

15Il était évidemment impossible, et Julián Juderías le souligne35, que les Espagnols n’envisagent pas la découverte du Nouveau Monde comme la récompense que Dieu leur accordait pour avoir achevé la reconquête de la péninsule. Le jésuite franc-comtois trouve cet argument sous la plume de Gilbert Génébrard : « L’année (dit-il) où s’est terminée la guerre des Espagnols contre les Maures, cette année leurs flottes sont arrivées aux Indes Occidentales, car il semble qu’ils ont pour caractéristique propre de conquérir les infidèles et les Païens36. » Comme si, après 1492, les Espagnols devaient se conformer à cette image de champions de la foi catholique et n’avaient d’autre choix que de remplir la mission de purification religieuse que Dieu leur avait confiée. C’est encore dans le cadre de ce mandat que Clément envisage l’expulsion des Morisques et la décision de Philippe III qui, « méprisant les nombreux bénéfices qu’apportaient à ses Royaumes leur diligent travail et la culture des champs, malgré tout cela, sans tenir aucun cas du défaut qu’ils devaient faire pour ce genre de travail, il expulsa de toute l’Espagne neuf cents mille morisques37 ». Pour Claude Clément, le devoir envers la foi catholique est toujours le plus fort et Philippe III préfère nuire à son royaume plutôt que nuire à la réputation que lui et ses sujets ont acquise en 1492. Alors que les políticos sont précisément ceux qui servent leurs intérêts, Clément donne à cette décision politique fort critiquée une valeur de sacrifice : les pertes financières en deviennent des offrandes à Dieu.

16Dans son argumentation générale au sujet de l’intransigeance des rois d’Espagne en matière de religion, Clément développe une courte analyse au sujet du schisme anglais. Son point de vue est alors différent : il n’exalte plus les vertus espagnoles étant donné que Philippe II a échoué à rétablir la foi catholique romaine dans le royaume d’Angleterre. Pour le jésuite, ce roi n’est pas un conquérant belliqueux lançant sa flotte contre un royaume ennemi mais plutôt un hospitalier venant en aide aux catholiques anglais persécutés. En effet, « ce très fameux Roi ne leur fit jamais défaut, et de même les Rois qui l’ont suivi, avec le même sentiment et la même ferveur ont magnifiquement reçu sur leurs terres et redonné courage à un nombre incalculable d’Anglais, qui […] avaient été expulsés en raison de leur Foi Catholique38 ». Comme un contrepoint aux persécutions religieuses dont on accuse les Espagnols, Clément insiste sur celles qu’ont subies les religieux catholiques lors de la Réforme anglaise.

17Et selon lui, c’est par là que viendra la victoire, mieux que par une expédition maritime puisque les catholiques formés dans les royaumes d’Espagne et en Flandres sont autant de soldats qui n’ont d’autre but que celui « d’introduire dans leur Patrie après leur exil, la doctrine et la piété dont ils ont été abreuvés […] dans ces provinces39 ». Le Franc-Comtois construit une identité catholique au sens large, qui dépasse l’appartenance à une « nation ». Le caractère catholique espagnol peut en quelque sorte s’acquérir et, comme dans une mission évangélisatrice, l’Église est capable de convertir des hommes à la cause espagnole. L’intolérance religieuse des Espagnols et le fanatisme qu’on leur prête sont au contraire leur force et leur manière de rendre grâce à Dieu pour les bienfaits qu’ils reçoivent.

La tyrannie politique

18Bien sûr, la politique expansionniste de la couronne d’Espagne ne va pas sans provoquer des critiques, qui s’appuient souvent sur l’attitude des Espagnols lors de la conquête des Indes occidentales. Le réquisitoire de Bartolomé de Las Casas contre la violence des colons est au cœur de cette contestation, une critique que Joseph Pérez résume en ces termes : « ce que propose Las Casas, c’est de montrer la contradiction entre la fin – l’évangélisation des Indiens – et les moyens utilisés – la guerre de conquête, l’esclavage, le travail forcé, les mauvais traitements40 ». Cette distinction mérite peut-être d’être nuancée. On remarque que l’auteur de la Brevissima relación41 reproche aux Espagnols42 dans un premier temps les massacres de populations innocentes dans le but d’asseoir leur autorité ; dans un second leur soif de richesses qui les pousse à chercher par tous les moyens des matières précieuses, ou à vendre les Indiens comme esclaves voire à faire commerce d’idoles. En résumé, Las Casas pose plutôt une contradiction entre la fin réelle de la colonisation – l’enrichissement individuel des colons – et sa fin supposée : la conquête au nom du roi d’Espagne et l’évangélisation des peuples. Certes, Clément n’écrit rien sur les exactions commises outre-mer, cependant il présente à son lecteur un étonnant bilan comptable qui pourrait bien être une sorte de réponse :

Depuis l’année mille six cents quinze seulement, et jusqu’à celle de mille six cents trente-cinq, se sont embarqués pour [les Philippines] aux frais de V. Majesté cinq cents cinquante-deux Religieux, et si nous leur ajoutons ceux qui, ce Printemps dernier, ont été emmenés sur les mêmes Îles, trois Pères Procureurs de trois Ordres qui ont obtenu cette aide de V[otre] Royale et Catholique Majesté pour ces escadrons sacrés, cela fera près de six cents. Et la dépense qui incombe à V. Majesté étant ordinairement de cinq cents ducats au moins pour chacun […] je trouve selon mes calculs, que ces vingt dernières années ont été retirés de votre trésor Royal trois cents mille ducats, pour envoyer des missionnaires Evangéliques aux Philippines43.

19Clément semble opposer une réalité à une autre : le roi dépense des sommes considérables pour évangéliser ses lointains sujets et non pour organiser le pillage de ses propres terres. Et il le fait avec force puisqu’un sous-chapitre de près de huit pages est consacré aux campagnes d’évangélisation dans les colonies américaines. Il le conclut par ces paroles attribuées à Philippe II : « Je dépenserais avec plaisir et de bon gré les trésors, non seulement des Indes, mais aussi des Espagnes […] pour le baptême d’un seul Chrétien, et une terre qui ne porte pas de fruit ne sera jamais stérile pour moi, si elle porte des Chrétiens44. » Le Franc-Comtois déclare s’être inspiré, pour citer ces paroles de l’œuvre de Indiarum iure de Juan de Solórzano Pereira qui lui sert généralement de référence lorsqu’il est question des Indes. Ces paroles du roi étaient déjà présentes dans la biographie de Philippe II de Luís Cabrera de Córdoba45 sous une forme assez différente de la citation que fait notre auteur. Une étude rapide permet de comprendre que Clément s’est plutôt inspiré du texte le plus récent, de Solórzano Pereira donc, dont la citation est très proche de celle que donne Clément en latin46. En complément, il évoque également un panégyrique du pape Clément VIII au défunt roi cité par José de Sigüenza47. D’une manière générale, ces trois textes lui permettent de présenter Philippe II comme le paradigme du roi pieux qui soumet systématiquement la question politique à la question religieuse au risque de perdre ses États. Les nombreux comptoirs africains et orientaux et tout l’empire portugais sont cependant les compensations que : « lui a données la toute-puissance de Dieu pour réparer très largement le tort de la perte des Flandres48 ». Il faut remarquer que cette manière dont Philippe II pratique la politique est largement commentée et publiée : on la retrouve par exemple dans sa biographie rédigée par Balthasar Porreño49.

20Au-delà de la conquête des Indes et de l’image de Philippe II, ce discours donne toute sa place à l’individu, ou plutôt au chrétien, dans le système politique espagnol quand l’auteur de l’Apologie accusait précisément ce roi d’être de la race des « tyrans, mangeurs de peuples, ennemis de leurs subiects50 ». Il n’est donc certainement pas fortuit que Clément en fasse le portrait inverse, celui d’un souverain soucieux de ses sujets, les plaçant, même les plus lointains, au centre de ses préoccupations. C’est une façon de répondre aux accusations de fanatisme religieux par une sorte d’humanisme chrétien qui place, si ce n’est l’homme, au moins le catholique au cœur du système politique espagnol.

21En ce qui concerne justement la répression organisée par le duc d’Albe pour mater la rébellion des Pays-Bas, les critiques à l’encontre de Philippe II se concentrent sur sa cruauté et son non-respect du droit coutumier. On peut lire à son sujet dans l’Apologie : « comme s’il eust esté par-dessus toutes lois, privileges et libertez du païs […] a rompu touts liens pour se desborder en toute sorte de haine irréconciliable et de cruaulté51 ». Dans son propre texte, Clément ne répond pas directement à ces accusations mais on en retrouve certains échos. Il prend en effet la peine de consacrer plusieurs pages à la question de la liberté de culte dans ce qu’il nomme les « États de Flandres52 » et, évoquant les événements des années 1635 et 163653, il met en exergue « l’obéissance des Flamands [envers Philippe IV] si rapide, si ponctuelle, si exacte au moindre signe de son désir54 ».

22Comme au sujet de la conquête des Philippines, il dresse de Philippe II le portrait d’un roi pour qui la défense de la foi catholique l’emporte sur toute considération matérielle et sur tout calcul politique, ce qui est par essence le comportement du prince chrétien opposé aux pragmatiques políticos. Il a en effet « eu si saintement soin du bien des autres Royaumes, et Domaines appartenant à sa couronne, qu’il n’y permit jamais, ce qu’on appelle liberté de conscience, même si cela devait nuire grandement à ses intérêts et à ses rentes55 ». En contrepoint à cette image du rey prudente, Clément définit le político, par un effet de miroir, comme un tyran qui trouve sa perte en recherchant son intérêt : « Car, obnubilés par les choses temporelles, ils ne se sont pas souciés des choses éternelles et ont perdu les deux56. »

23Les bons rois, en revanche, sont toujours récompensés par des contrats tacites avec Dieu « que la Théologie appelle Innommés ; […] lorsque l’on donne ou fait quelque chose, pour que l’autre fasse ou donne autre chose en récompense de ce qui a été fait57 ». Philippe II est même le roi qui porte le plus haut ce refus des bénéfices terrestres puisqu’il : « tenait pour une chose établie […] qu’il ne devait jamais accepter qu’il y ait le moindre changement en matière de Religion et de Foi même si pour cela, il devait mourir mille fois58 ». Claude Clément finit par inverser les rôles : il place le roi en position de martyr quand on l’accusait d’être bourreau. Dans son échelle de valeurs, la mort du roi et, a fortiori celle de tous ses sujets, compte moins que la défense de l’Église catholique, ce qui, exprimé de la sorte peut passer pour une justification des exécutions pour motif religieux de la part d’un auteur qui, vers la fin du traité, appellera au massacre des hérétiques dans une guerre religieuse impitoyable. Sur le thème de la tyrannie, la position du Franc-Comtois est donc absolument religieuse en ce sens que la soumission à la doctrine catholique romaine reste un préalable à toute négociation. Rien ne saurait prévaloir contre la défense de la foi : ni les libertés des sujets, ni même leurs vies. Pour Clément, la question n’est pas de savoir si le roi se considère au-dessus des lois puisque, dans son rôle de défenseur de la foi catholique, il doit s’y placer en effet. Tout comme l’Inquisition peut, pour la même raison, se placer au-dessus de lui.

24Ce faisant, Clément révèle ce qui, dans les attaques contre l’Espagne, peut constituer à ses yeux un motif de fierté : la « cruauté » de Philippe II devient ici la preuve de son engagement dans une défense inconditionnelle de la foi. Cette façon de retourner les représentations dépréciatives pour en faire des éloges de la sagesse chrétienne espagnole est assez caractéristique de sa pensée. Il a probablement compris que la guerre de Trente Ans est aussi une guerre de la représentation et qu’il est indispensable de donner aux Espagnols une image positive d’eux-mêmes, de leurs rois et de leur action politique. Clément consacre d’ailleurs trois chapitres, sur les douze que compte son traité, à défendre précisément l’image des souverains espagnols face à l’histoire. Il s’attache d’abord à montrer que, contrairement à ce qui a pu être écrit par d’autres, les provinces conquises l’ont été pour leur plus grand bonheur. Et la première preuve est d’ordre religieux :

Personne, qui ait eu quelque information sur les histoires de ce siècle et des siècles passés, ne pourra nier que ce fut par un plan singulier de la divine providence pour la parfaite et sûre conservation de l’Italie contre les hérésies que les très riches et très heureux Royaumes de Sicile et de Naples ainsi que le Duché de Milan aient été des possessions des Rois d’Espagne59.

25La puissance espagnole et l’expansion impériale deviennent de ce point de vue la manifestation de l’autorité de Dieu dans le monde et le moyen par lequel il protège les hommes. La seconde preuve est plus politique : les souverains espagnols sont des libérateurs et ils rétablissent les choses publiques dans leur position naturelle, comme le fit Charles Quint :

Toi, très Auguste Charles, tu as étendu ton Patrimoine, en y ajoutant à nouveau le Duché de Milan et tu as repris celui de Luxembourg. Tu as libéré les Flandres de tout vasselage. Toi, avec ta puissante armée, tu as restitué à leurs Royaumes et à leurs Fiefs de nombreux Princes et Rois qui en avaient été chassés60.

26Clément pose ici très clairement la question de la domination du roi d’Espagne sur des territoires acquis ou hérités. Pour lui, l’expansion impériale n’est pas un asservissement tant qu’elle garantit le respect de la foi, la liberté des peuples et même l’autorité des princes, à l’image de la domination bienveillante de Dieu. Il présente aussi, de façon indirecte, les possibles raisons pour lesquelles certains pays souhaitent s’opposer à cette domination. Les territoires italiens sont riches et attirent les convoitises, la politique de Charles Quint a freiné les élans expansionnistes français, toutes choses qui peuvent expliquer de façon très simple pourquoi des puissances étrangères souhaitent jeter le discrédit sur l’Espagne et rompre le bel ordonnancement qu’elle s’était efforcée de faire naitre.

27La troisième preuve de ce bonheur espagnol est donnée par l’amour du peuple pour son prince. On peut difficilement ignorer la référence à la pensée largement débattue de Juan de Mariana concernant la résistance au tyran61 voire le tyrannicide. Clément fait figurer Mariana et son œuvre dans la liste de ses sources mais ne le cite jamais, probablement parce que ce texte est à manier avec précautions. On observe cependant de nombreuses similitudes entre les deux œuvres et, par exemple, nombre de tyrans « à qui il advint de perdre leur Empire, en même temps que leur vie62 » dont Clément dresse la liste, faisaient déjà l’objet d’une analyse dans l’œuvre de Mariana, mais aussi dans le Principe Cristiano de Pedro de Ribadeneyra63. L’on peut encore mettre en parallèle le récit de l’assassinat d’Henri III de France qui permet à Mariana d’affirmer : « Le pouvoir des princes s’étiole si le respect et l’amour de leurs sujets viennent à les abandonner64 » et le récit, sous la plume de Clément, de l’assassinat d’Albrecht von Wallenstein65 qui « fut tué par ses propres Lieutenants et Capitaines66 ». Le meurtre de la main des sujets ou des proches collaborateurs, c’est-à-dire l’inversion du rapport social naturel devient une preuve de la nature tyrannique ou de l’impiété de la victime. Comme si un tel crime, qui bouleverse l’ordre social, ne pouvait être qu’inspiré par la Providence.

28Mais surtout, comment ne pas comparer ces textes avec un autre passage où Clément s’étonne que Philippe IV puisse circuler à pied dans Madrid avec « autant de sécurité autour de la personne du Roi, dans une Ville aussi peuplée, tellement sans crainte du danger qu’il n’a pas besoin de soldats pour sa protection67 » ? Si les rois d’Espagne étaient en effet d’épouvantables tyrans, ils ne pourraient pas circuler aussi librement parmi la foule, alors même que les Pays-Bas et la France, d’où proviennent les voix qui les accusent, ont justement vu leurs princes assassinés. Chez le jésuite franc-comtois, il est souvent question de l’amour et du respect du roi pour ses sujets. Pour ses sujets bourguignons, par exemple, à qui il témoigne de « l’amour qu’[il] leur porte68 ». Il est question également de l’amour des sujets milanais pour le Cardinal Infant : « tous avec leurs gémissements et leurs soupirs donnaient des témoignages de l’amour avec lequel il avait dérobé leurs cœurs69 » ; de Philippe IV pour ses frères : « tant d’affection et d’amour de sa Majesté pour ses frères70 » ou encore du Cardinal Infant pour le roi71. La politique espagnole telle que la voit, ou la rêve, Claude Clément – et c’est aussi la vision d’un homme guidé par sa foi chrétienne – est irradiée d’amour. Selon lui, les autres cours d’Europe se déchirent en querelles intestines quand le roi d’Espagne reçoit : « tant d’obéissance des grands Seigneurs dans les régions les plus éloignées, jusqu’aux antipodes-mêmes, qui au moindre geste de la volonté du Roi abandonnent promptement tout pouvoir, tant de loyauté chez toutes sortes de vassaux, même chez les gens de la plus basse condition, qui après Dieu ne tiennent rien pour plus sacré que le nom du Roi72 ». Malgré tout, ce portrait est tellement idyllique qu’il est difficile de ne pas y voir peut-être une pointe d’ironie.

Espagnols et Anti espagnols

29Avant d’étudier la construction identitaire que propose le jésuite, il convient d’apporter quelques précisions terminologiques. Il utilise le mot « nación » pour désigner un peuple uni par une culture et une langue communes. En ce sens, il parle de nation portugaise, de nation allemande ou de nation espagnole dans laquelle il ne s’intègre pas puisqu’il se dit de la nation bourguignonne, mais surtout pas de la nation française. Il rassemble les peuples germaniques sous le terme de nation allemande, alors qu’il sépare la nation française et la nation bourguignonne, toutes deux de culture proche mais obéissant à deux princes différents. Ce qui montre que les critères culturels se combinent avec des critères politiques. Le terme « patria » est beaucoup moins utilisé et signifie invariablement un territoire et, plus précisément, la terre d’où l’on vient. Clément, qui écrit depuis Madrid, utilise ce mot pour désigner la Franche-Comté. Le terme « país » n’apparaît que deux fois, et seulement dans la réponse des assiégés de Dole au prince de Condé, pour désigner la Franche-Comté. Dans le cas de l’Italie, les territoires sous domination espagnole sont appelés « posesiones ». Dans le cas des Pays-Bas, il utilise plutôt les termes « Holanda » ou « Estados de Flandes ». Il emploie enfin assez peu le mot « Espagnes » au pluriel et préfère le terme au singulier ou les expressions « Reinos de España » pour désigner les royaumes de la péninsule et « corona de España » pour l’ensemble des possessions espagnoles. Il utilise également l’expression « imperio español » mais le terme « imperio » se trouve aussi dans des expressions comme « imperio romano », et même « imperio de la Iglesia ».

30Nous l’avons vu, Clément rédige son texte en situation de guerre ; il est donc assez naturel qu’au moment de définir l’Autre, il l’associe facilement aux ennemis de l’Espagne. La première étape consiste à trouver un nom à cet anti espagnol qui ne provient pas d’une nation précise, au contraire : « il a de multiples couleurs, de multiples aspects et il est plus changeant qu’un Protée73 ». Le jésuite termine son raisonnement en le nommant simplement político.

31Il faut remarquer que Pedro de Ribadeneyra associait déjà l’adjectif políticos à une secte satanique : « la pire et la plus abominable des sectes que Satan ait inventées, est celle de ceux que l’on nomme Politiques74 » ; il y intégrait ensuite les défenseurs de la raison d’État et des théories de Machiavel : « Les Politiques et disciples de Machiavel n’ont aucune religion75 » pour y inclure enfin la notion d’hérésie : « les hérétiques éliminent une partie de la religion, et les Politiques toute la religion76 ». Mais les points de concordance sont si nombreux que l’œuvre de Clément pourrait presque être considérée comme un résumé du premier livre de l’œuvre de Ribadeneyra. Avec un positionnement radicalement différent cependant : ce dernier rédige une somme politique encore très inspirée par la forme des traités d’éducation des princes alors que Clément fait une analyse politique précise et très clairement orientée. Mais ce sujet, s’il est passionnant, nous éloigne un peu de notre propos et exigerait qu’on y consacre une autre étude.

32La deuxième étape consiste à identifier la pensée de ce político. Pour ce faire, il classe un certain nombre d’œuvres et d’auteurs en deux catégories, l’une désignée évidemment comme política et l’autre comme cristiana. Ceci constitue la première dichotomie sur laquelle il va construire son jeu de miroir. Pour les auteurs antiques, c’est généralement leur religion qui les distingue : Tertullien ou Ambroise de Milan sont dans le camp des cristianos alors que Sénèque ou Tacite se trouvent dans celui des políticos. Pour les auteurs médiévaux et modernes, les distinctions sont plus fines : on trouve dans le premier groupe essentiellement des auteurs jésuites comme Bellarmin, Possevino, Ribadeneyra ou Mariana, et dans le second des réformés comme Duplessis-Mornay ou Charles Dumoulin, mais aussi des catholiques ouverts à la tolérance religieuse tel Bodin, ou encore des figures de l’opposition au pouvoir de l’Église ou à celui du pape comme Pierre de Cuignières ou Arnaud de Brescia.

33Il est fondamental de remarquer que Clément place dans deux camps opposés des auteurs comme Juan de Mariana et Philippe Duplessis-Mornay, qui se rejoignent pourtant par bien des aspects notamment dans la justification de la résistance au tyran. Et cela parce que le premier conserve le respect de l’autorité de l’Église, alors que l’autre raisonne dans une perspective protestante prônant la liberté religieuse. Il est évident que ce ne sont pas les idées en elles-mêmes qui définissent le político, mais plutôt ses idées combinées à la liberté qu’il prend par rapport à l’autorité de l’Église et du pape tels : « Arnaud de Brescia et Pierre de Cuignières […] qui ont conseillé de s’opposer au Pontife de Rome, de très nobles libérateurs de la Politique, qui l’ont libérée du joug de la domination Ecclésiastique77 ». La dichotomie entre políticos et cristianos se double donc d’une nuance : le cristiano qui s’affranchit de la tutelle religieuse, celui qui exerce sa liberté de conscience, passe dans le camp des políticos.

34La troisième étape consiste à distribuer des nations ou des personnes dans ces deux catégories, et c’est alors la guerre de Trente Ans qui sert de révélateur. D’une manière générale, les princes et les États qui se battent aux côtés de l’Espagne et des Impériaux sont dans le camp cristiano ; c’est le cas des empereurs Ferdinand II et Ferdinand III de Habsbourg, du duc de Lorraine, du Cardinal-Infant. À l’inverse leurs ennemis sont classés dans la catégorie des políticos comme le duc de Weimar, Albrecht von Wallenstein et surtout le roi Gustave-Adolphe de Suède. Mais là encore, les frontières peuvent bouger, comme au sujet du sac de Tirlemont78 qui pousse Clément à apporter une nouvelle nuance :

Le Maréchal de Brézé Catholique, non seulement déplora les horribles cruautés et les sacrilèges que commirent les soldats lors de la prise de Tirlemont, et la peine que devaient causer au roi Très Chrétien ces débordements […] mais il pronostiqua aussi immédiatement […] la ruine et la perte qui s’abattirent peu après sur cette florissante armée dont il était le Capitaine et le chef aux côtés de l’hérétique Châtillon79.

35Les deux maréchaux de Brézé et de Châtillon sont de la même nation, font tous deux la guerre aux armées impériales et espagnoles, pourtant notre auteur ne les classe pas dans la même catégorie parce que l’un a déploré le sacrilège quand l’autre s’en est réjoui. Ce qui prouve bien sûr que le critère religieux prime sur tous les autres au moment de définir l’Autre. Cela ne signifie pas pour autant qu’il place le maréchal de Brézé dans le camp espagnol ; il faut seulement comprendre que la nation et le positionnement dans la guerre ne sont pas des critères absolus. A l’exception du cas très intéressant que nous venons de traiter, Chez Claude Clément le camp cristiano se confond avec celui des armées impériales et espagnoles. De la même façon, le camp des políticos se confond avec celui des princes réformés.

36Il serait également tentant de simplifier les choses en imaginant que Clément considère comme une seule catégorie les cristianos et les espagnols. En vérité, il ne les associe pas totalement mais il essaie de montrer que les Espagnols sont, dans la coalition avec l’empereur, les champions du camp cristiano. Il faudrait d’ailleurs, pour plus de précision encore, employer de préférence à « espagnol » l’adjectif composé « hispano-autrichien » que Clément utilise lorsqu’il veut montrer la cohérence idéologique entre les deux puissances. Cette confusion des termes devient finalement un programme politique. Tout ce qui est espagnol – ou hispano-autrichien – est nécessairement cristiano et toute perte pour les Espagnols est une perte pour Dieu, et Clément se « consume de peine chaque fois qu’[il] entend dire que les ennemis de Dieu ont pris un pouce de terre des possessions de V. Majesté, sachant que leurs gains à eux sont des pertes pour l’Église80 ». Dans cette logique, quiconque se bat pour défendre l’autorité de l’Église est espagnol. C’est dans ce sens que Clément attribue cet adjectif aux Francs-Comtois alors qu’ils ne sont ni de nation, ni de patrie espagnole, mais simplement parce qu’ils se sont battus pour défendre l’intégrité de la foi catholique et l’autorité de leur prince :

Mais ce fut une entreprise bien périlleuse d’attaquer des gens que les Français eux-mêmes appellent Espagnolissimes, et dont ils disent qu’ils sont plus Espagnols que les Espagnols eux-mêmes ; et qui n’ont rien de plus enraciné dans le cœur, qu’une Foi, et une loyauté infaillible envers Dieu, et envers leur Prince, et une grande horreur de la liberté de conscience en matière de Religion81.

37Les Francs-Comtois, bien que francophones, sont bourguignons de nation et espagnols dans la guerre et plus généralement dans leur défense de la foi catholique.

38Dans un système impérial, qui regroupe bien entendu des sujets divers, Clément propose une identité commune basée sur la foi et qui dépasse les autres définitions fondées sur l’appartenance à une nation, sur la patrie d’origine et même sur la soumission à un prince puisque des sujets de la couronne d’Angleterre, par exemple, peuvent aussi être considérés comme espagnols. Il propose une construction identitaire fédératrice qui dépasse les nations et réunit les hommes autour du roi d’Espagne dans un projet politique commun :

Toute la race humaine est concernée par cette illustre victoire ; ce sera là un glorieux triomphe pour toutes les nations de l’univers, et […] les hérétiques qui il y a peu, à l’instigation du Démon, faisaient tant de mal à l’Église, dans peu de temps, sans verser de sang, seront vaincus pour le plus grand bien de leur âme82.

39La guerre de Trente Ans, pour Clément, n’est pas un conflit entre nations ou entre souverains, mais plutôt l’affrontement de deux modèles politiques et même de deux représentations du monde ; il la pense fondamentalement comme une guerre idéologique. Et dans cette perspective globale, être espagnol, être catholique ou se battre aux côtés des troupes hispano-autrichiennes sont trois façons de s’associer au même projet. Il défend une identité religieuse supérieure : les sujets du roi d’Espagne sont « un peuple, dont le nom n’est pas tant de la nation que de la Religion Catholique83 ». Il intègre ainsi l’empereur germanique aux côtés du roi catholique dans une vaste alliance sous l’autorité supérieure du pape. Ce système politique tricéphale combat un Autre multiforme, conglomérat de tous ceux qui s’opposent à eux et à l’Église catholique ou qui, en revendiquant une indépendance religieuse, s’acheminent vers une indépendance politique annonçant le morcellement de l’empire.

Faiblesses du modèle providentialiste : la légende et la réalité.

40Il est stérile et profondément anachronique d’analyser les textes des auteurs anti machiavéliens espagnols du Siècle d’or, dont Claude Clément fait assurément partie, en référence au déclin de la puissance hispanique ; c’est finalement remplacer un providentialisme par un autre que de voir dans une réalité historique postérieure à ces écrits, un juste châtiment pour un modèle politique et un peuple qui aurait exercé sa tyrannie ad maiorem Dei gloriam84. C’est assez généralement d’ailleurs le raisonnement que reprennent les promoteurs de la légende noire, tels Sébastien Mercier :

Ainsi la superbe Maison d’Autriche perdit son antique supériorité, et la perdit pour jamais. On applaudit à cette chute, quand on considère l’ame et la polique [sic] d’un Maximilien, d’un Ferdinand, d’un Charles Quint, enfin d’un Philippe II85.

41La position la plus respectueuse de la chronologie des faits et des auteurs eux-mêmes consiste plutôt à déceler dans leur pensée des points de fracture qui, dans les années suivantes et face à la tournure que prendra la guerre, pourront pousser les Espagnols à croire que Dieu les a effectivement abandonnés. Et la faille se situe peut-être dans leur confiance dans le bonheur.

42Nous l’avons déjà pressenti, Clément peint le tableau de ce qu’on pourrait appeler le bonheur espagnol : un théâtre social idéalisé qui n’est pas si éloigné de ce que d’autres sociétés impérialistes ont pu construire au cours du xxe siècle. Dans ce tableau, la Franche-Comté fait figure de modèle de société catholique parfaite :

Cette intégrité de la Foi Catholique dont jouit cette nation actuellement doit être en grande partie attribuée après Dieu, à la sagesse Chrétienne de l’Empereur Charles Quint qui a fortifié cette Province avec des lois si utiles pour contrecarrer l’hérésie […]. Cette précaution de Charles a engendré la faveur sensible de Dieu et deux biens de grande valeur. Le premier que ceux de ce Comté, comme s’ils se trouvaient hissés dans le supérieur et serein séjour de l’Olympe […] jouissaient d’une grande paix durable […]. Le second bien bénéficie au Prince : c’est qu’il peut être pleinement assuré de leur loyauté86.

43En associant ainsi la défense de la foi, la paix pour les peuples et la loyauté des sujets, le jésuite franc-comtois montre qu’il a une analyse assez fine de la situation politique dans laquelle se trouve l’Espagne au moment où il écrit. Il a compris que la revendication de la liberté de culte est probablement une façon détournée de s’affranchir de la sujétion au prince et mène inévitablement à la guerre. De façon indirecte, il montre que les détracteurs de l’Espagne, qui l’accusent de fanatisme lorsque son roi s’obstine à ne pas accorder la liberté de culte, sont justement ceux qui génèrent les troubles, font se détourner les peuples de leur souverain naturel et provoquent la guerre pour nourrir leurs ambitions personnelles. Dans une Europe composite, dans un Empire espagnol multiple où le seul dénominateur commun est la foi catholique, elle est seule capable de rassembler autour d’une autorité commune. Clément a, semble-t-il, bien compris les mécanismes qui provoquent une guerre religieuse. Pour lui, c’est la liberté de culte qui est à l’origine de tout ; par conséquent, les violences à l’encontre des pensées qui dévient du dogme catholique protègent les peuples contre une violence beaucoup plus forte et généralisée.

44La cohésion communautaire s’opère également dans l’amour des sujets pour leur roi (« le peuple commença à louer et à glorifier sa piété et sa dévotion87 ») et celui du roi pour son peuple (« ils trouvèrent toujours chez Votre Majesté l’amour et l’estime qu’elle leur doit88 »). C’est cette cohésion espagnole autour du prince qui produit ce bonheur social. Elle vient en contradiction totale avec l’image que renvoient les textes qui ont alimenté la légende noire. L’Espagne que le Franc-Comtois dépeint est un royaume riche, dominant, en paix, où le roi aidé de son frère le Cardinal-Infant dirige, en bonne intelligence avec l’empereur germanique, un peuple heureux, en paix et loyal :

Je viens de comprendre à l’instant d’où provient une telle abondance de bienfaits pour l’Espagne, d’où provient une telle paix si durable qu’on ne pourrait en imaginer de plus heureuse ni de plus tranquille, une telle obéissance des grands Seigneurs, dans les contrées les plus reculées et même jusqu’aux antipodes, qui à la moindre manifestation de la volonté du roi abandonnent tout pouvoir ; une telle loyauté chez toutes sortes de vassaux, même chez les gens de la plus basse condition89.

45Clément répond aux attaques anti espagnoles en montrant que l’Espagne est peut-être simplement victime de sa puissance : si elle est attaquée, c’est peut-être parce qu’elle est riche, dominante et en paix et que ses ennemis ont tout intérêt à l’affaiblir, par les armes ou par les textes. Et en effet, en 1637 encore, les faits historiques viennent confirmer cette idée de Clément : les victoires récentes de Lützen, et surtout de Nördlingen, le siège de Ratisbonne, la résistance de Dole, ainsi que les succès récents en Flandres et en Italie permettent encore de croire que la main de Dieu soutient toujours les armées espagnoles et impériales. Et dans ce contexte favorable, pourquoi changer d’orientation ? Pourquoi choisir une politique pragmatique proche des enseignements de Machiavel quand la défense de la foi chrétienne apporte tant de victoires ? A la suite de ce questionnement, Clément conclut son traité en défendant deux positions politiques, deux orientations pour la politique espagnole.

46La première consiste à revendiquer une continuité dans les choix diplomatiques et militaires : c’est l’essence même de la politique espagnole que d’imposer une unité religieuse et introduire une modification conduirait rapidement à l’écroulement de tout le système et n’apportera que de : « funestes et lamentables lauriers, des victoires funèbres90 ». Il va même formuler des menaces à l’encontre d’une Espagne tentée par la nouveauté et séduite par les sirènes des théories machiavéliennes : « si je te voyais suivre les folies de Machiavel, je dégainerais immédiatement contre toi le tranchant de ma plume avec une telle résolution et une telle vigueur que même s’il m’arrivait de rendre l’âme dans ce combat, il n’y aurait pas pour moi de mort plus heureuse91 ».

47La seconde orientation politique, qui dérive de la première, est un engagement dans la guerre totale contre l’hérésie au sens très large que lui donne Clément, c’est-à-dire l’hérésie religieuse comme l’hérésie pragmatique des políticos et plus généralement contre tous les ennemis de l’Espagne : tous doivent être réduit en cendres :

Que V. Majesté réduise donc cette cause à un tel point, que l’ennemi ne puisse trouver aucun repère où se réfugier pour en sortir à nouveau et perpétrer ses cruelles barbaries ; qu’il soit privé de toute protection et de tout secours, et si quelques reliques de son pouvoir perdurent, que V. Majesté finisse de les consumer par un miséricordieux châtiment, que toute plante du mal soit arrachée jusqu’à la racine et jetée afin de s’assurer qu’elle ne produise aucun vil rejet, sans qu’il n’y ait plus aucun espoir qu’elle reverdisse ; il ne faudrait pas que la racine empoisonnée de l’injustice, parce qu’elle a été coupée négligemment (ce que Dieu ne permettra pas) vienne repousser avec plus de vice encore92.

48La faiblesse de ce raisonnement est pourtant bien visible : construit sur ce « bonheur espagnol », il ne peut tenir si l’Espagne se trouve en position de faiblesse. Si les provinces se rebellent, si l’héritier du trône meurt, si les troupes espagnoles reculent, toute cette construction identitaire s’effondre. Comme les détracteurs de l’Espagne n’hésiteront pas à le proclamer, le Dieu des armées qui l’avait soutenue la châtie maintenant avec les armes de ses ennemis. Or ce modèle providentialiste heureux qui va disparaître peut se retourner facilement en un modèle providentialiste de la décadence : ceux qui voient s’échapper leur puissance vont chercher les raisons du châtiment divin. Or, ces raisons, les détracteurs de l’Espagne les tiennent déjà prêtes et à leur disposition. Probablement pour avoir trop cru aux thèses providentialistes comme celle de Clément et en avoir été amèrement déçus, les Espagnols deviendront, et pour longtemps, les relais et quelquefois les artisans de leur propre légende noire93.

Notes

1 Claude (CLEMENTE, Claudio) CLÉMENT, El machiavelismo degollado por la christiana sabiduría de España y de Austria. Discurso christiano-político a la Catholica Magestad de Philippo IV. Rey de las Españas, por el Padre Claudio Clemente de la Compañía de Iesus, natural de Ornans en el Condado de Borgoña, Cathedrático de Erudición en los Estudios Reales de Madrid. Traducido de la segunda edición latina, añadida con cosas muy particulares, y del tiempo, Alcalá, Antonio Vazquez, 1637. Le texte que nous citerons est celui de l’édition princeps dont un exemplaire est conservé à la Bibliothèque Municipale de Besançon, Fonds Ancien, cote 229957.

2 Jaime BRUFAU PRATS, « Claudio Clemente y su pensamiento político », dans Anales de la Fundación Francisco Elías de Tejada, n° 14, 2008, p. 23-71.

3 Francisco ELÍAS DE TEJADA, El pensamiento político del Franco Condado de Borgoña, Sevilla, Publicaciones de la Universidad de Sevilla, 1963.

4 Hugues DIDIER, « Un franc-comtois au service de l’Espagne Claude Clément S. I. (1594 ? – 1642) », Archivum Historicum Societatis Iesu, vol. n° 44, 1975, p. 254-264.

5 On peut en trouver un bon exemple dans la phrase de conclusion de cette étude de deux courtes pages : « Il gesuita spagnuolo offre la prova più compatta di una trista tendenza operosamente calunniatrice e opportunistica », Andrea SORRENTINO, Storia dell’antimachiavellismo europeo, Naples, Luigi Loffredo, 1936, p. 133.

6 « … una postura imagológica que olvide la relación entre etnotipo y realidad y se centre en el análisis de los estereotipos en sí », Antonio SÁNCHEZ JIMÉNEZ, « La Leyenda Negra: para un estado de la cuestión » dans España ante sus críticos: las claves de la Leyenda Negra, Yolanda RODRÍGUEZ PÉREZ, Antonio SÁNCHEZ JIMÉNEZ, HARM DE  BOER (éds.), Madrid, Iberoamericana, 2015, p. 38.

7 Clément lui consacre plusieurs pages d’éloge sous le titre : « Les Pseudo-politiques se gaussent sans raison de son gouvernement », dans le texte en castillan « Sin causa le motejan su gobierno los Pseudo politicos », Claude (CLEMENTE, Claudio) CLÉMENT, op. cit., p. 105.

8 « … conviene estudiar la leyenda antiespañola y oponer la verdad histórica a las apariencias de verdad », Julián JUDERÍAS, La leyenda negra. Estudios acerca del concepto de España en el extranjero Cuarta edición completamente refundida…, Barcelona, Araluce, 1923, p. 24.

9 « … para refutar, condenar, y aborrecer estos mysterios politicos, es el mas ajustado medio sacarlos a luz, y poner sus desvarios a la verguença », Claude (CLEMENTE, Claudio CLÉMENT, op. cit., p. 31.

10 « … dedicados al culto y reverencia del Estado », ibid., p. 4.

11 « … aprecian en menos las cosas divinas, que las humanas; y las leyes de la Religion, que las razones de Estado », ibid.

12 « secta Estadistica », ibid., p. 15.

13 « … la una de la Diosa Policia, y la otra del Monarca », ibid., p. 13.

14 « … un volumen, no de la enquadernacion que aora usamos, sino de la antigua, que era un pergamino emvuelto en un bastoncillo de madera, al modo que se suelen emvolver las mercaderias », ibid.

15 « Fiesta del Nacimiento del Imperio », ibid., p. 10.

16 « … en el creer que ay Dios, en la observancia de la Religion, en la guarda de la justicia; o por el contrario, en resolverme a qualquier mal hecho, solamente tengo de atender a los interesses de la vida, y al bien del Estado », ibid., p. 30.

17 « … para obviar maldades secretas, abia algun hombre ingenioso fingido Dioses para que las atajasse, como las leyes las maldades publicas », ibid., p. 23.

18 « restaurador del nuevo Evangelio », ibid., p. 149.

19 « Aquella tu atrevida mano a quien la conjuracion de los herejes abia ya entregado en esperança, y desseo el cetro del Romano Imperio […] aora está yerta; y cortada de su braço la pueden traer por toda la Christiandad como despojo, y principal miembro de algun monstro cruel », ibid., p. 151.

20 Voir Jesús M. USUNÁRIZ, « Envidia de la potencia del rey católico: respuestas españolas a las críticas de sus enemigos en los siglos xvi y xvii », dans España ante sus críticos: las claves de la Leyenda Negra, op. cit., p. 62-64.

21 Louis-Sébastien MERCIER, Histoire du despotisme et des cruautés horribles de Philippe II, roi d’Espagne, Amsterdam, 1786, p. 6-7.

22 Apologie ou défense de très illustre prince Guillaume par la grâce de Dieu prince d’Orange : Conte de Nassau, de Catzenellenbogen, Dietz, Vianden, _c. Burchgrave d’Anvers, _ Viconte de Besançon ; Baron de Breda, Diest, Grimberge, d’Arlai, Nozeroi, _c. Seigneur de Chastel-bellin, _c. Lieutenant general es païs bas, _ Gouverneur de Brabant, Hollande, Zelande, Utrecht, et Frise : _ Admiral, _c. Contre le Ban et Edict publié par le Roi d’Espaigne, par lequel il proscript ledict Seigneur Prince ; dont apperra des calumnies _ faulses accusations contenues en ladicte Proscription. Présentée à Messieurs les Estats Generauls des Païs bas, Charles Sylvius, 1581.

23 Ibid., p. 78.

24 « Que los Estadistas guardan con mas rigor el juramento hecho por la vida del Principe; que por la Magestad de Dios », Claude (CLEMENTE, Claudio) CLÉMENT, op. cit., p. 10.

25 « [Carlos Quinto] la puso en la tutela de la Religion Catholica; y a essa misma Religion la cercó del muro inexpugnable de santas leyes », ibid., p. 82.

26 « … las tierras finitimas se estaban ardiendo en guerras », ibid., p. 81.

27 « Instituyó el Sacro Tribunal de la Inquisicion a quien […] quiso tambien el mismo estar sujeto », ibid., p. p. 68-69.

28 Apologie ou defense de tres illustre prince Guillaume par la grace de Dieu prince d’Orange…, op. cit., p. p. 53.

29 Ibid., p. 54.

30 « … un corto numero de Sacerdotes hazen tanto por la entereza de la Fé, y por la seguridad y paz de España, quanto no pudieran acabar doscientos mil soldados puestos siempre en arma », Claude (CLEMENTE, Claudio) CLÉMENT, op. cit., p. 69.

31 « ¿Por qué no se reprodujeron entre nosotros las guerras religiosas que ensangrentaron Alemania y a la vecina Francia? ¿Bastaron unas gotas de sangre derramadas en los autos de Valladolid y Sevilla para ahogar en su nacimiento aquella secta », Julián JUDERÍAS, op. cit., p. 112.

32 Voir Reginaldo GONZALEZ MONTANO, Sanctæ inquisitionis hispanicæ artes aliquot detectæ, ac palam traductæ., Heidelberg, Michael Schirat, 1567, p. 14.

33 « Jewish and Muslim blood was inferior to Christian; the possession of any amount of such blood made one liable to heresy and moral corruption », David NIRENBERG, « Race and the Middle Ages The Case of Spain and Its Jews » dans Margaret R. Greer, Walter D. Mignolo, Maureen Quilligan (éd.), Rereading the black legend. The Discourses of Religious and Racial Difference in the Renaissance Empires, Chicago, The University of Chicago Press, 2007, p. 75.

34 « … para que se echasse mas de ver la mutua correspondencia, con que miraba la Religion los augmentos temporales de Don Fernando, por aberle visto tan aficionado, y cuydadoso del amparo, y amplificacion de la piedad Catholica: recobrò el Reyno de Granada con increyble valor y bien de España; puso en forma de Provincias los Reynos de Napoles, y Navarra. Descubriò al nuevo mundo […] y hizole sujeto no tanto a si, quanto al Evangelio », Claude (CLEMENTE, Claudio) CLÉMENT, op. cit., p. 69.

35 « Eran tan extraordinarios todos aquellos sucesos y todas aquellas transformaciones, que nada tiene de extraño que el pueblo les diese un significado misterioso, providencial, y que creyese firmemente que el descubrimiento de América con sus fantásticos tesoros era la recompensa que Dios otorgaba a su tenacidad en la lucha de ocho siglos contra la morisma », Julián JUDERÍAS, op. cit., p. 67.

36 « El año (dize) que se acabó la guerra de los Españoles contra los Moros, esse año començaron sus Armadas a las Indias occidentales, que parece tienen por proprio conquistar los infieles, y Paganos. », Claude (CLEMENTE, Claudio) CLÉMENT, op. cit., p. 135-136. D’après Gilbert GÉNÉBRARD, Chronographiæ libri quatuor, Paris, Michaëlem Sonnium, 1580, p. 399.

37 « … teniendo en poco los muchos utiles que se le seguian a sus Reynos de la diligente labor, y cultura de los campos, con todo esso no haziendo caso de la falta que abian de tener de obreros para este ministerio; desterró de toda España novecientos mil moriscos », Claude (CLEMENTE, Claudio) CLÉMENT, op. cit., p. 110. Il convient de remarquer que le chiffre avancé par notre auteur est largement exagéré : il est trois fois plus élevé que le chiffre estimé par les historiens.

38 « Nunca les faltó este famosissimo Rey, a esse modo los Reyes que le siguieron con el mismo affecto y fervor recibieron y recrearon en sus tierras magnificamente a otros inumerables Ingleses que […] andaban desterrados por la causa de la Fé Catholica », ibid., p. 108-109.

39 « … de introduzir despues de su destierro en su Patria la doctrina, y piedad, que han bebido […] en estas provincias », ibid., p. 109.

40 Joseph PÉREZ, La Légende noire de l’Espagne, Paris, Fayard, 2009, p. 134.

41 Bartolomé de LAS CASAS, Brevissima relacion de la destruycion de las Indias: colegida por el Obispo don Fray Bartolome de las Casas, o Casaus, de la Orden de Santo Domingo., Séville, Sebastian Trugillo, 1552.

42 Sa façon d’utiliser l’adjectif « Espagnols » pour désigner les auteurs des violences, amène le lecteur à douter par moment qu’un Espagnol puisse être l’auteur du texte, ou à douter que Las Casas puisse se définir lui-même comme un Espagnol.

43 « Desde el año pues de mil y seiscientos y quinze no mas, hasta el de mil y seiscientos y treinta y cinco se han embarcado para [las Philipinas] a costa de V. Magestad, quinientos y cinquenta y dos Religiosos, a los quales si juntamos los que esta Primavera passada llevaron a las mismas Islas, tres Padres Procuradores de tres Religiones que alcançaron de V. Real, y Catholica Magestad este socorro para aquellos sagrados esquadrones, vendran a ser cerca de seiscientos. Y estandole a V. Magestad, no menos, que en quinientos ducados comunmente el gasto de cada uno […] vengo a hallar por mi quenta, que en estos veinte años ultimos se han sacado de su hazienda Real trecientos mil ducados, para emviar operarios Evangelicos à las Philipinas », Claude (CLEMENTE, Claudio) CLÉMENT, op. cit., p. 133-134.

44 « Yo gastare con gusto y con logros los thesoros, no solo de las Indias, sino de las Españas […] por el baptismo de un Christiano solo, ni sera para mi jamas infecunda la tierra que no llevare frutos, si llevare Christianos », ibid., p. 137.

45 Voir Luis CABRERA DE CÓRDOBA, Filipe Segundo Rey de España, Madrid, Luis Sanchez inpresor del Rey N S., 1619, p. 424.

46 Voir Juan de SOLÓRZANO PEREIRA, Disputationem de Indiarum iure sive de iusta Indiarum Occidentalium inquisitione, acquisitione, et retentione, Madrid, Francisco Martinez, 1629, p. 222.

47 Voir José de (fray) SIGÜENZA, Tercera parte de la historia de la orden de san Geronimo Doctor de la Iglesia, Madrid, Imprenta Real, 1605, p. 689.

48 « … se los diò la omnipotencia de Dios para resarcir el daño de la perdida de Flandes con crecida ganancia », Claude (CLEMENTE, Claudio) CLÉMENT, op. cit., p. 107.

49 Voir Baltasar PORREÑO, Dichos, y hechos del señor rey don Felipe Segundo el Prudente, Potentissimo, y Glorioso Monarca de las Españas, y de las Indias, Madrid, Melchor Sanchez, 1663 (première édition 1628), p. 45.

50 Apologie ou defense de tres illustre prince Guillaume par la grace de Dieu prince d’Orange…, op. cit., p. 49.

51 Ibid., p. 48. Voir également p. 99-101.

52 « Estados de Flandes », Claude (CLEMENTE, Claudio) CLÉMENT, op. cit., p. 99.

53 Entre autres, le siège de Louvain, les prises de Gennep, Trèves et du duché de Limbourg.

54 « … la obediencia de los Flamencos tan presta, tan puntual, tan exacta a la menor seña de su gusto », Claude (CLEMENTE, Claudio) CLÉMENT, op. cit., p. 168.

55 « … cuydado tan santamente del bien de los demas Reynos, y Señorios pertenecientes a su Corona, que jamas permitio en ellos, la que llaman libertad de conciencia, aunque fuesse con grande perdida de sus interesses, y rentas », ibid., p. 104.

56 « Porque embebecidos en lo temporal no tuvieron providencia de lo eterno, perdieron lo uno, y lo otro », ibid., p. 44.

57 « … que la Theologia moral llama Innominados; […] quando se da, o se haze alguna cosa, para que el otro haga, o dé otra cosa en recompensa de lo hecho », ibid., p. 63.

58 « … tenia assentado […] que jamas abia de consentir hubiesse mudança alguna en la Religion, y Fé, aunque por esta causa hubiesse de morir mil vezes », ibid., p. 101.

59 « Ninguno que tenga alguna noticia de las historias deste siglo, y de los passados negará aber sido singular traza de la divina providencia para la segura, y perfecta conservacion de Italia contra las heregias, que los opulentissimos, y felicissimos Reynos de Sicilia, y Napoles, y el Ducado de Milan sean possession de los Reyes de España », ibid., p. 130.

60 « Tu Carlos Augustissimo augmentaste tu Patrimonio, añadiendole de nuevo el Ducado de Milan, y volviste a cobrar el de Lucemburg. Tu libraste a Flandes de todo genero de feudo. Tu con tu poderoso exercito restituyste à sus Reynos, y Señorios a muchos Principes, y Reyes que abian sido echados dellos », ibid., p. 76.

61 Voir Juan de MARIANA, De rege et regis institutione, Tolède, Petrum Rodericum, 1599, p. 65 et suivantes, et plus généralement tout le chapitre VI du livre I.

62 « … que les vino aber perdido el Imperio, juntamente con la vida », Claude (CLEMENTE, Claudio) CLÉMENT, op. cit., p. 42. Voir plus généralement p. 42-46.

63 Pedro de RIBADENEYRA, Tratado de la religion y Virtudes que deue tener el Principe Christiano, para gouernar y conseruar sus Estados. Contra lo que Nicolas Machiauelo y los Politicos deste tiempo enseñan, Madrid, P. Madrigal, 1595. Voir les chapitres XIV et XV du premier livre.

64 « Principum potentiam imbecillam esse: si reverentia ab animis subditorum semel abscesserit. », Juan de MARIANA, op. cit., p. 66.

65 Homme de guerre au service de l’empereur germanique, Albrecht von Wallenstein (1583 – 1634) fut généralissime des armées impériales durant la guerre de Trente Ans. Retiré en Bohème, on le soupçonna de comploter contre l’empereur. Démis de ses fonctions en janvier 1634, il fut assassiné le mois suivant par les hommes envoyés pour l’arrêter.

66 « … fue muerto de sus mismos Maestres de Campo, y Capitanes », Claude (CLEMENTE, Claudio) CLÉMENT, op. cit., p. 157.

67 « … tanta seguridad de la persona Real, en una Ciudad tan populosa, tan sin temor de peligro, que no necessite de soldados para su guarda », ibid., p. 139.

68 « … el amor que les tengo », ibid., p. 98.

69 « … todos con sus suspiros, y gemidos, daban testimonio del amor con que abia robado sus coraçones », ibid., p. 161.

70 « … tanto agrado, y amor de su Magestad para con sus hermanos », ibid., p. 140.

71 Ibid.

72 « … tanta obediencia de los grandes Señores en las partes mas remotas, aun en los mismos antipodas, que a la menor seña del gusto del Rey dexan promptamente qualesquier gobiernos; tanta lealtad en todas suertes de vassallos, aun en la gente mas plebeya, que despues de Dios no tienen cosa mas sagrada, que el nombre del Rey », ibid., p. 138-139.

73 « … tiene variedad de colores, variedad de pareceres, y mas mudanças que un Proteo », ibid., p. 2.

74 « … la peor y mas abominable secta que Satanas ha inventado, es una de los que llaman Politicos », Pedro de RIBADENEYRA, op. cit., prologue « Al príncipe de España ».

75 « Los Politicos, y discipulos de Machiavelo no tiene religion alguna », ibid., prologue « Al Christiano y piadoso Lector ».

76 « … los hereges quitan parte de la religion, y los Politicos toda la religion », ibid.

77 « Arnaldo de Brixia, y Pedro Cugnerio, que dieron dictamen de atreverse contra el Romano Pontifice, y nobilissimos libertadores de la Policia, sacandola del yugo de la servidumbre Eclesiastica », Claude (CLEMENTE, Claudio) CLÉMENT, op. cit., p. 24-25.

78 En marge du siège de Louvain de 1635, des troupes françaises mirent à sac le village de Tirlemont (ou Tienen) ce qui provoqua une vive émotion sur place mais aussi en Espagne puisque les Français furent accusés, outre du massacre des habitants, d’avoir violé les religieuses et, à l’initiative de soldats huguenots, d’avoir commis le sacrilège de donner de l’hostie consacrée en pâture à leurs chevaux. Voir Francisco de QUEVEDO, « Carta al serenísimo, muy alto y muy poderoso Luis XIII, Rey Christianísimo de Francia », dans Biblioteca de autores españoles, desde la formación del lenguaje hasta nuestros días. Tomo XXIII. Obras de don Francisco de Quevedo Villegas. Tomo I, Madrid, Atlas, 1946, p. 257-269.

79 « … el Mariscal de Brezé Catholico, no solo lamentó los horrendos maleficios y sacrilegios que cometieron los soldados en la toma de Tilimont, y el sentimiento que abian de causar en el Rey Christianissimo, estos desafueros […] sino que tambien […] luego pronosticó la ruyna y perdicion, que poco despues se siguio en aquel floridissimo exercito, cuyo Capitan y caudillo el era juntamente con Xatillon hereje », Claude (CLEMENTE, Claudio) CLÉMENT, op. cit., p. 170.

80 « … me consumo de pena siempre que oigo dezir que los enemigos de Dios han cogido un palmo de tierra del dominio de V. Magestad, sabiendo que sus augmentos dellos: son decrementos, y menguas de la Yglesia », ibid., p. 143-144.

81 « Pero fue empressa muy peligrosa acometer a una gente a quien los mismos Franceses llaman Españolissimos, y dizen ser mas Españoles, que los Españoles mismos; y que no tienen otra cosa mas arraygada en su coraçon, que una Fé, y una lealtad invencible para con Dios, y para su Principe, y un horror grande a la libertad de conciencia en materia de Religion », ibid., p. 91.

82 « En esta illustre victoria es interessado todo el linage de los hombres; este será glorioso triunfo para todas las naciones del universo, y […] los herejes que poco antes por instigacion del Demonio hazian tanto destrozo en la Iglesia, dentro de poco, sin derramar sangre, seran vencidos para mucho bien de sus almas », ibid., p. 185.

83 « … una gente, cuyo nombre, no es tanto de la nacion, quanto de la Religion Catholica », ibid., p. 60.

84 « Comme l’a écrit récemment Lamberto de Echeverria, le Dieu que l’on manipulait pour imposer une politique et exploiter les hommes est mort. Mais que de victimes à son crédit avant de mourir ! », Henry MÉCHOULAN, « Constitution de l’antimachiavélisme : le Dieu des antimachiavéliens espagnols du siècle d’or », dans Alain Dierkens (éd.), L’Antimachiavélisme de la Renaissance aux Lumières, Bruxelles, Éditions de l’Université de Bruxelles, 1997, p. 93.

85 Louis-Sébastien MERCIER, op. cit., p. 28-29.

86 « Esta entereza en la Fé Catholica, qua [sic] goza esta nacion en nuestros tiempos se debe despues de Dios atribuyr en gran parte a la sabiduria Christiana del Emperador Carlos Quinto, que fortalecio aquella Provincia con leyes tan a proposito para constratar [sic] la heregia […]. Siguiose a aquella prevension de Carlos el favor sensible de Dios, y dos bienes de grande estima. El primero que los deste Condado, como si estuvieran remontados en la levantada y serena estancia del Olimpo […] estaban gozando de una continua y serenissima paz […]. El segundo bien es a favor del Principe, y es que esta tan seguro de su lealtad », Claude (CLEMENTE, Claudio) CLÉMENT, op. cit., p. 80-81.

87 « … començó el pueblo a alabar y engrandecer su piedad y devocion », ibid., p. 177.

88 « … siempre hallaran en V. M. el amor, y estimacion que les debe », ibid., p. 97.

89 « Aora acabo de entender de donde provenga a España tanta cosecha de bienes, de donde tanta, y tan continua paz, que no se puede imaginar mas feliz y tranquilla, tanta obediencia de los grandes Señores en las partes mas remotas, aun en los mismos antipodas, que a la menor seña del gusto del Rey dexan promptamente qualesquier gobiernos; tanta lealtad en todas suertes de vassallos, aun en la gente mas plebeya », ibid., p. 138-139.

90 « … fatales, y lamentables palmas, victorias funebres », ibid., p. 143.

91 « … si te viera seguir los desvarios de Machiavelo, al punto desemvaynara contra ti los filos de mi pluma, con tal resolucion y aliento; que aunque me sucediera rendir la vida en la demanda, no hubiera para mi muerte mas feliz », ibid., p. 60.

92 « Reduzga pues V. Magestad esta causa à terminos, que el enemigo no halle guarida alguna donde acogerse para salir otra vez à executar sus barbaras crueldades; quede destituido de todo presidio y socorro, y si han quedado algunas reliquias de su poder, acabelas de consumir V. Magestad misericordioso castigo, arranquese de quajo toda planta de maldad y echesela segur à todo vil renuevo, sin que quede esperança de reverdecer; no sea que la rayz venenosa de la iniquidad, por estar cortada al descuido (lo que Dios no permita) vuelva à retoñezer con mas vizio », ibid., p. 186.

93 Voir Ricardo GARCÍA CÁRCEL, La leyenda negra, historia y opinión, Madrid, Alianza, 1992, passim.

Pour citer ce document

Olivier Jouffroy, «Claude Clément et son combat contre les détracteurs de l’Espagne dans El Machiavelismo degollado», Histoire culturelle de l'Europe [En ligne], Revue d'histoire culturelle de l'Europe, Légendes noires et identités nationales en Europe, Légendes noires et identités collectives : construction, déconstruction, réfutation,mis à jour le : 09/08/2016,URL : http://www.unicaen.fr/mrsh/hce/index.php?id=459

Quelques mots à propos de : Olivier Jouffroy

Université de Franche-Comté

Olivier Jouffroy prépare une thèse de doctorat à l'université Bourgogne-Franche-Comté dans l’équipe de l’institut des sciences et techniques de l'Antiquité (ISTA). Ses recherches se portent sur l’édition de texte, les réseaux de sources et la pensée politique de la contre-réforme. Sa thèse a pour objet l’étude et l’édition de El machiavelismo degollado de Claude Clément : « El machiavelismo degollado de Claude Clément, trois textes pour une même œuvre : édition et évolution d’une pensée politique à l’âge baroque entre Espagne et Franche-Comté. »