Sociétés – Espaces ruraux (2015-2015)

  • Dernière modification de la publication :19 juin 2023
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Pouvoirs publics et sociétés rurales

Date : 17/05/2016

Responsable(s) scientifique(s) : Philippe MADELINE et Jean-Marc MORICEAU

  • Grégory HANLON, University Research Professor, Dalhousie University, Halifax, Canada
    « L’infanticide de routine en Italie rurale,  XVIe –XVIIIe siècles»
    Phenomène courant, l’infanticide est largement invisible aux pouvoirs publics laïcs et ecclésiastiques. L’etude porte sur les sex-ratio bases sur le baptême et sur les recensements ecclésiastiques des petites villes de Cortemaggiore et de Fiorenzuola en Emilie, avec leur district rural. Les registres de baptême permettent de suivre le sex-ratio pour chaque année récolte depuis le XVIe jusqu’au XVIIIe siecle. Le recensement ecclésiastique (status animarum) nous permet de tracer, à plusieurs reprises, le sexe des enfants en bas âge par le statut social, et par la résidence “urbaine” ou rurale.
  • Elise ROULLAUD, docteure en sciences politiques de l’Université Lyon 2
    « La Confédération Paysanne face aux réformes de la Politique Agricole Commune (1990-2007) »

Date : 19/04/2016

Responsable(s) scientifique(s) : Philippe MADELINE et Jean-Marc MORICEAU

  • Cyril GUESNON, ancien ingénieur d’études au Pôle rural
    « L’éradication du loup en Franche-Comté et en Lorraine (XVIIIe –XXe siècles) »
    Dans une dynamique d’ampleur nationale, Canis lupus disparaît des écosystèmes français au début du XXe siècle. Depuis des millénaires en concurrence avec les sociétés humaines en prétendant aux mêmes proies qu’elles, les loups sont chassés sans relâche. Leur destruction massive est encouragée par l’État au moyen d’une politique de gratifications accordées pour chaque animal détruit, documents dont les Archives départementales de Franche-Comté et de Lorraine regorgent. L’étude de près de 4000 primes octroyées entre 1775 et 1907 dans ces deux régions permet d’observer les différents aspects d’un phénomène sans équivalent : comment l’homme s’est rendu maître de son espace aux dépens des animaux.
  • Johann VORNIÈRES, Ingénieur d’études au Pôle rural
    « Les derniers loups exterminés en France : 1880-1930 »
    C’est en 1882 que le loup est véritablement mis au ban de la République par une loi qui accroît considérablement les primes de destruction tout en se donnant les moyens de cette politique publique sécuritaire en instaurant un budget spécifique, à l’échelon national, au sein du Ministère de l’Agriculture. L’élan suscité par cette détermination, qui raccourcit en même temps les délais de règlement des gratifications, stimule les chasseurs et condamne le loup qui devient une espèce en voie de disparition passé 1900. L’intervention proposée entend éclairer les racines, les modalités et les conséquences de ce choix.
     
  • Jean-Marc MORICEAU, Professeur d’histoire moderne à l’Université de Caen
    « Un problème de sécurité publique ? La gestion du loup de l’Antiquité au XXIe siècle »
    Longtemps la lutte contre le loup a été vécue comme un baro­mètre du progrès de la civilisation. Le loup a été le seul animal sauvage à susciter chez l’homme autant d’énergie pour le réguler. Depuis les lois de Solon au vie siècle avant J-C, les sociétés ont forgé une réglemen­tation spécifique pour le contenir, le pour­chasser, puis l’exterminer. Pour s’en pro­téger les pouvoirs publics ont mis en place un arsenal ré­pressif sans équivalent. Ils lui ont même dédié une insti­tution, qui pré­tend remonter à Charlemagne, et qui subsiste toujours : la louveterie. Alors que la chasse était l’attribut des privi­légiés, le danger causé par le canidé a occa­sionné des exceptions à l’interdiction du port d’armes. Il a suscité des réquisitions à des battues collectives encouragées même par les auto­rités à l’échelon national depuis 1583. Et surtout il a suscité une politique de primes de destruction dont on peut mesurer les modulations et la généralisation selon de multiples facteurs : le degré de vulnérabilité ressenti à l’égard du loup ; l’état de la sécurité publique ; les capacités financières des autorités compétentes ; l’importance de la centralisation administrative ; les choix des dirigeants. Autour du loup se sont cristallisées des rancœurs so­ciales et des conflits de compétence, résultant des anta­gonismes dans les styles de vie, les modes d’occupation de l’espace et les singularités de gestion administrative. Passé la loi de 1882, la IIIe République a mis en place une politique d’éradication qui, de point de vue des sociétés humaines, a réussi dans l’Entre-deux-guerres. Après un combat mené depuis  plus de deux mille ans, l’homme a eu raison du canidé sauvage jusqu’à une inversion des options idéologiques qui ont été les siennes et du statut de l’animal dans la seconde moitié du XXe siècle.

Date : 08/03/2016

Responsable(s) scientifique(s) : Philippe MADELINE et Jean-Marc MORICEAU

  • Rémi LUGLIA, Docteur en histoire
    « Gérer et protéger la nature. Les relations entre naturalistes, pouvoirs publics et agriculture. France, XIXe –XXIe siècles »
    Comment la protection de la nature, c’est-à-dire la protection des espèces et des espaces naturels, est née d’une évolution du regard de certains savants, qui ont su convaincre des pouvoirs publics souvent dans l’attente d’expertise naturaliste, d’abord au profit de l’agriculture puis, d’une certaine façon, contre elle ? Le regard se focalisera sur trois études de cas : les poissons et la question du “dépeuplement des cours d’eau”, plutôt XIXe ; les oiseaux, la question de leur utilité/nuisibilité et celle de l’évolution des mesures de protection (charnière XIXe-XXe) ; et le castor qui permettra d’étirer la perspective jusqu’à nos jours.

     
  • Antoine BERNARD DE RAYMOND, Chargé de recherche en sociologie économique, INRA, Laboratoire RITME, Ivry-sur-Seine
    «Les transports, technologies politiques. Comment la distribution a révolutionné les rapports entre agriculture et alimentation »
    Comment aborder les transformations des modèles agricoles et alimentaires au 20e siècle ? Alors que les questions de production et de consommation sont souvent abordées séparément, cette présentation étudie les transformations de leur mise en relation, à partir de l’émergence de la catégorie de « distribution » comme rationalité économique. Elle montre que cette notion renvoie d’abord à des transformations dans le domaine des transports et de la logistique – plutôt qu’à des innovations dans la sphère de la vente au détail (supermarchés, etc.) – consistant à stabiliser des produits afin de massifier des flux et rendre le circuit entre le producteur et le consommateur à la fois le plus extensible et le moins coûteux possible. La distribution apparaît alors comme une rationalité visant à optimiser et sécuriser des flux de marchandises, en rendant connaissable et calculable leur schéma global de circulation. Ceci invite à voir les transports non comme une simple extension des besoins de l’offre ou de la demande, mais comme des « technologies politiques » qui contribuent à ordonner l’économie. Ceci permet de comprendre les ressorts de la critique contemporaine du capitalisme, qui ne vise pas seulement le « productivisme » mais aussi de manière spécifique les contraintes liées au circuit de distribution.

Date : 19/01/2016

Responsable(s) scientifique(s) : Philippe MADELINE et Jean-Marc MORICEAU

10h-12h

  • David HOPKIN, University of Oxford Professor, UK
    « Mémoire du féodalisme et émancipation paysanne dans la France du XIXe siècle »
    AbstractHistorians of rural politicisation have followed nineteenth-century observers of the French countryside to argue that the memory of feudalism had a large influence on rural political choices.  The influence of local memories, they claim, helps explain why rural voters did not behave according to the expectations of modern politics.  But what memories? Neither nineteenth-century observers nor historians have provided much detail.  In order to discover the contents of these memories we need to turn from the administrative archives towards the archives of oral literature. Nineteenth-century folklorists collected hundreds of legends about lords and the seigneurial regime told in rural communities.  Some of these were of purely local distribution and can be related to precise historical events and persons.  But many form part of a much larger, indeed international repertoire consisting of archetypal stories and motifs that could be adapted to local circumstances.  In this sense it seems that peasants in many parts of France, and far beyond, shared a common, albeit ‘legendary’ history of feudalism: a common history in that they agreed on what happened in the past and also how those events should be interpreted.  It is possible that this common history helped peasants to articulate a common identity, and that this common identity may explain peasants’ ability to mobilize in order to surmount the challenges posed to small-scale family-run agriculture in a globalising world.

14h30-18h

  • La recherche en action : séance consacrée à l’état d’avancement des travauxdes étudiants du Pôle rural (doctorats et masters)

Date : 08/12/2015

Responsable(s) scientifique(s) : Philippe MADELINE et Jean-Marc MORICEAU

  • Simon DUFOUR, Maître de conférences en géographie à l’Université Rennes 2
    « La végétation comme marqueur des changements d’activités humaines et de politiques publiques dans les hydrosystèmes fluviaux »
    Les hydrosystèmes fluviaux fournissent un bon exemple des interactions complexes qui relient les activités humaines, les politiques publiques en matière d’environnement et les écosystèmes. En effet, ils sont soumis à l’influence de nombreux facteurs sociaux, économiques et naturels qui affectent, chacun selon une géographie et une temporalité propres, leur organisation et leur fonctionnement. L’objectif de cette intervention est de discuter l’évolution de certaines de ces interactions environnement / politiques publiques / activités humaines dans les hydrosystèmes fluviaux français depuis le début du 20ème siècle. Pour cela, nous faisons l’hypothèse que la végétation alluviale peut être considérée comme un marqueur spatial et temporel de ces interactions. En effet, premièrement, la végétation enregistre des changements (de superficie, de composition, de croissance, etc.) qui reflètent directement et indirectement l’évolution des usages agricoles et industrielles des fonds de vallée. Deuxièmement, la végétation, comme objet de gestion, renseigne sur l’évolution de la prise en compte des milieux naturels dans les politiques publiques. Ce second point abordera notamment le développement, au cours des 30 dernières années, des concepts de gestion intégrée, de restauration écologique et de services écosystémiques.

     
  • Rémi DALISSON, Professeur d’histoire à l’ESPE de Rouen
    « Sociabilités festives et politisation dans la France rurale (1852-1889) »
    Il s’agira de comprendre comment une politique festive dont le modèle est urbain a pu se répandre dans le monde rural au milieu du XIXe siècle et en quoi elle a politisé le pays dans ses profondeurs. La période Second Empire/débuts de la IIIe République est à cet égard fondatrice. La fête impériale s’implante dans les campagnes (grâce au 15 août) avec un discours et des pratiques syncrétiques qui préfigurent paradoxalement les fêtes républicaines. La République approfondit et systématise l’usage civique de la fête (14 juillet, inaugurations, enterrements) notamment dans le monde rural grâce à l’école (c’est pourquoi nous irons jusqu’au centenaire de 1889). La fête génère une sociabilité propre, y compris dans le domaine de la contestation politique et religieuse. Dès lors, elle devient un rituel civique populaire souvent contesté (incidents), notamment dans les campagnes qui y font ainsi leur apprentissage politique (politisation par le bas), dès le Second Empire avant une première forme d’accomplissement lors du centenaire de 1789.

     

Date : 10/11/2015

Responsable(s) scientifique(s) : Philippe MADELINE et Jean-Marc MORICEAU

  • Xavier ARNAULD DE SARTRE, géographe, Chargé de recherche CNRS, Lab. SET UMR 5603, Université de Pau et des Pays de l’Adour
    « Penser l’agriculture au XXIe siècle : mise à l’épreuve de terrains des expertises globales »
    Changement climatique, crise de la biodiversité, augmentation de la population, changement de régimes hydriques… l’agriculture est appelée, au xxie siècle, à relever des défis d’une ampleur sans doute inégalée. Des expertises globales, aux premiers rangs desquelles celle du Millenium ecosystem assesment, ont imaginé quatre scénarios pour guider les évolutions de l’agriculture : recours aux biotechnologies, développement de l’agroécologie, libéralisation des marchés et fermeture des frontières constituent les principales caractéristiques des solutions actuellement en conflit. Ces scénarios impliquent des rapports des populations rurales et agricoles à l’espace profondément différents. Par une analyse de situations précises qui renvoient à chacun des scénarios (la Pampa argentine pour le scénario biotechnologique, l’Amazonie brésilienne pour l’agroécologie, le Gabon pour le scénario de fermeture de frontière), nous mettrons en évidence les implications de ces scénarios pour les agriculteurs.

     
  • Jacques PÉRET, Professeur en histoire moderne à l’Université de Poitiers
    « Des populations sous contrôle ? Les sociétés rurales des littoraux charentais et l’État au XVIIIe siècle »
    Les sociétés littorales d’Aunis et de Saintonge sont très majoritairement  paysannes avec leurs spécificités liées à la présence proche de la mer source d’activités complémentaires. Ces sociétés ruralo-maritimes, implantées sur des territoires stratégiques tant sur le plan militaire, fiscal qu’économique, sont soumises  à un contrôle très serré de l’Etat dans tous les domaines. On peut parler d’un véritable tour de vis à partir du règne de Louis XIV, avec une cascade législative et réglementaire en matière fiscale, militaire, administrative ou sur les usages de l’estran laissés jusque là à un large auto-contrôle par les communautés elles-mêmes. Cette  vaste mise en ordre de populations considérées jusque là comme marginales s’accompagne de la mise en place d’un réseau administratif extrêmement dense où se superposent militaires, officiers des amirautés, commissaires, inspecteurs, relayés au niveau local par un ensemble de syndics et de garde-côte, hommes clés et intermédiaires entre l’administration et les populations.
     Nous tenterons de mesurer à travers quelques exemples (les naufrages, les pêches à pied, les milices garde-côte, les travaux collectifs…) l’application concrète sur le terrain de ces contrôles étatiques, les résistances des sociétés littorales menacées dans leurs pratiques et leurs usages traditionnels.

     

Date : 13/10/2015

Responsable(s) scientifique(s) : Philippe MADELINE et Jean-Marc MORICEAU

Séance d’accueil pour les étudiants : 10 h /11h30

Philippe MADELINE et Jean-Marc MORICEAU

Ouverture du séminaire (tout public) : 14h30/18h,

  • – actualités et présentation générale
     
  • Djemila ZENEIDI, géographe, Chargée de recherche CNRS, Lab. Aménagement, Développement, Environnement, Santé et Sociétés (ADESS), Bordeaux
    « L’utilitarisme migratoire à l’échelle intercontinentale (entre U.E. et Afrique) au service de l’agriculture intensive »
    Cette intervention propose de rendre compte des liens entre agriculture et politiques migratoires à partir de l’exemple du recrutement des saisonnières agricoles marocaines temporaires dans la province de Huelva en Espagne. Longtemps pays d’émigration, ce pays est devenu dans les années 2000 un pays d’immigration. Parallèlement à ce changement, l’agriculture s’est profondément modernisée ; elle est devenue intensive, centrée sur l’exportation de certains produits phares comme la fraise cultivée dans la province de Huelva. Cette culture nécessitant une abondante main d’œuvre, emploie massivement des migrants. C’est dans ce contexte précis, que se développe la migration de travail temporaire, avec un ciblage spécifique celui des femmes. Les orientations prises par l’économie agricole et les politiques migratoires font émerger dans la province de Huelva une figure spécifique : celle de la saisonnière agricole marocaine. Il reviendra à cette contribution d’en présenter la généalogie et les significations.
  • Laurent BRASSART, Maître de conférences en histoire moderne à l’Université Lille 3
    « Prévenir la violence politique, réguler le lien politique et social en Révolution : les succès des pouvoirs publics d’un département rural »
    Bien que situé entre deux espaces de forte conflictualité politique – Paris au sud et les départements du Nord et du Pas de Calais –, le département picard de l’Aisne semble avoir connu « une révolution tranquille ». Même ce moment de violence paroxystique que fut la Terreur ne s’est accompagné d’aucuns débordements sanguinaires. Longtemps l’invocation du conformisme, si ce n’est l’atonie de la vie politique locale de ce département rural, a tenu lieu d’explication à cette anomalie géopolitique. Sauf qu’à tout bien considérer, cette situation politique – celle d’une révolution peu violente et nullement spectaculaire – fut partagée par quasiment le tiers des départements français, et ne saurait par conséquent relever de l’exceptionnel. Le recours à une analyse par « jeux d’échelles » appliquée à tous les niveaux des pouvoirs locaux, infirme l’impression de « vide politique » de ces départements léguée par l’historiographie. Les conflits politiques y furent aussi multiples que variés, et la dynamique révolutionnaire transforma parfois durablement les sociétés rurales, sans pour autant que la violence se déchaîne. Saisir et comprendre les ressorts de la capacité des pouvoirs publics en Révolution à réguler les tensions politiques et sociales, et in fine à prévenir la violence politique, sont donc au cœur de notre démarche historienne. Toute une géopolitique nuancée de la France rurale en Révolution, que l’on ne saurait plus ramener exclusivement aux modèles canoniques des campagnes blanches ou bleues, en ressort, ouvrant la voie à une reconsidération du système politico-administratif de l’État révolutionnaire constamment confronté à des dynamiques politiques et sociales mouvantes.