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4° région du Nord-Ouest ou des herbages (suite)

La Normandie jouit des avantages que possèdent le Boulonais, le Ponthieu et le Vimeux. Les vallées y sont toutes remarquables, mais les plus intéressantes à parcourir sont : la vallée de Neufchâtel, où l’on rencontre de belles vaches normandes, de grandes laiteries dans lesquelles on fabrique le beurre de Gournay et le fromage de Neufchâtel ; la vallée de Corbon, la vallée de Pont-l’Évêque, la vallée d’Auge, qui est regardée comme la vallée classique de l’herbe, et la vallée de la Touque, où l’on engraisse annuellement des milliers de bœufs achetés dans le Maine, la Bretagne, l’Anjou et la Vendée, où l’on fabrique le fromage de Livarot, le fromage de Pont-l’Evêque, le fromage de Mignot, le fromage de Camenbert ; les vallées de la Dive et de la Vire, où de magnifiques vaches cotentines, de beaux chevaux normands ou chevaux carrossiers vivent une grande partie de l’année ; les vallées d’Orbec, de Bernay et de Serquigny, dans lesquelles les irrigations rivalisent avec celles pratiquées par les Vosgiens. Toutes ces vallées sont couvertes de riches herbages, de verdoyantes prairies naturelles.

Toutes les terres de la Normandie ne sont pas couvertes de gras pâturages. On observe sur les plateaux des terres arables qu’on laboure en planches ou billons plus ou moins larges, avec de grandes charrues à roues traînées par des chevaux ou des bœufs, et auxquelles on demande annuellement ou des récoltes alimentaires ou des récoltes industrielles : lin, colza et betterave à sucre. La plaine de Caen avec son assolement quatriennal est remarquable à plus d’un titre, et présente un agréable tableau. Les riches champs de trèfle, de sainfoin ou de farouch qu’on y admire sont consommés sur place par des chevaux fixés à des piquets. Ce pâturage spécial est aussi suivi dans le pays de Caux et dans le Cotentin. On doit signaler encore les plaines du Vexin normand et du pays de Caux, la belle plaine de Neubourg, le plateau de Saint-André, la plaine du Lieuvain, etc. Ces plaines sans fin, à l’horizon desquelles apparaissent les grands bois composés de hêtres séculaires ou d’arbres résineux, qui décorent les collines, sont très-granifères ; elles produisent aussi, çà et là, du lin, du colza, de la caldère et de la gaude. Les vallées qui les limitent sont très-pittoresques ; on y rencontre de magnifiques ombrages, de belles eaux et des prairies verdoyantes, qui en forment la plus belle parure.

Non loin de cette belle contrée, où la nature est toujours vivante, où l’éducation du cheval anglo-normand est parfaitement comprise, où les bâtiments d’exploitation sont disséminés dans un pâturage garni de pommiers et entouré d’une belle haie vive et qu’on appelle une cour de ferme ; où le cultivateur récolte d’excellent cidre, le nectar de la Neustrie, et du poiré de première qualité; où les abeilles, après avoir butiné les sainfoins des plaines calcaires, produisent le beau miel d’Agence; où l’on conserve avec soin les excellentes poules de Crèvecœur et la poule de Caux ; où la race durham est conservée pure à la vacherie nationale de Sorbon ; où le jardinier apprend à cultiver en pleine terre le melon de Honfleur ; où l’on fabrique l’excellent beurre d’Irigny ou beurre du Bessin, s’étendent les terres, à la fois bocagères et herbagères, du Cotentin, de l’Avranchin et du Merlerault.

Le Cotentin offre à chaque pas des paysages très pittoresques. Les coteaux qu’il renferme sont doucement inclinés ; ils encadrent ordinairement des prairies toujours verdoyantes et émaillées de mille fleurs. Peu de contrées offrent pendant le printemps des sites aussi variés: la senteur des pommiers fleuris, les perles diamantées formées par la rosée sur l’herbe particulièrement inébriante des herbages, la verdure fraîche des prairies et les fleurs d’or des ajoncs et des genêts, autorisent à dire que le Cotentin est bien un pays enchanteur. Pendant l’été, la campagne n’est pas moins belle. A cette époque, les moissons dorées des fertiles, guérets, les pelouses vertes des herbages, la blancheur éclatante des champs de sarrasin ou blé noir, dans lesquels les abeilles bourdonnent sans cesse, les charmants coteaux décorés par les fleurs roses des bruyères, les beaux vergers avec leurs fruits rouges ou orangés, et l’ombrage que projettent les haies vives des enclos font aimer encore la Normandie.

Les côtes offrent des promontoires qui dominent les flots ou les vastes grèves sablonneuses ou mielles, sur lesquelles pâturent les moutons de prés salés, ou les anses et les baies dans lesquelles on récolte la tangue et le goëmon ou varech. Du sommet des rochers, qui sont découpés en dentelures capricieuses, on admire dans les grandes tempêtes, quand les vagues soulevées par le vent retombent en flots d’écume au pied des falaises, l’une des scènes les plus grandioses de la nature, tout en constatant l’influence que les vapeurs tièdes du grand courant océanien appelé gulf-stream exercent sur la végétation du littoral. Cette influence est telle, qu’on voit croître en pleine terre, dans la zone limitée par la mer, le laurier-tin, l’araucaria imbricata, l’aralia japonica, l’arundina falcata, etc,

Le Merlerault, pays fameux pour les chevaux qu’on y élève, est une contrée véritablement bocagère ; il renferme des coteaux élevés, des pentes onduleuses et des vallées herbagères, dans lesquelles les plantes développent avec succès la force et la vigueur chez les chevaux qui les consomment. Cette belle contrée forme un grand contraste avec la plaine d’Alençon, qui rappelle les plaines de la Beauce et de la Picardie, mais elle a de l’analogie avec le Perche, dans lequel on admire des forêts ombreuses, de fraîches prairies et d’excellents chevaux percherons.

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