Séance du 20 août 1788

Assemblée du Comité tenue le mardi 20 aoust 1788.

Membres présents : MM.

  • Clavière, président,
  • Gramagnac, faisant les fonction de secrétaire
  • Cuchet
  • De Bourge,
  • De Montcloux membre de la Société
  • De Boufflers membre de la Société.

M. le président a fait lecture du procès verbal de la dernière séance du Comité. Ce procès verbal a été approuvé.

M. Cuchet a rendu compte de la mission qui lui avait été confiée par le Comité, et a dit qu’ayant présenté à M. Vidau de La Tour1
le préambule et les règlemens, et lui ayant demandé son agrément pour leur impression, celui-ci lui avait répondu qu’il avait entendu parler de la Société des Amis des Noirs, mais qu’avant de permettre de publier les motifs et les bazes de sa constitution, il se croiait obligé de consulter les ministres et principalement M. de la Luzerne2, qu’il allait envoyé aussitôt à ce dernier les manuscrits que lui remettait M. Cuchet mais qu’il pensait qu’on obtiendrait bien difficilement la permission qu’on sollicitait. M. Cuchet lui a fait observer que la Société étant tolérée, les règlemens qui formaient sa constitution, et le préambule qui rendait compte du but de son établissement devaient l’être aussi.

M. de Montcloux a dit que M. de Boufflers avait promis de parler à M. de la Luzerne des règlemens et du préambule de la Société, et comme on formait une délibération sur une lettre à écrire à M. de Boufflers, celui-ci est arrivé à l’assemblée ; étant consulté sur l’objet dont il avait promis de parler à M. de la Luzerne, il a dit qu’il ne doutait pas que ce ministre n’accueillît les démarches de la Société et ne favorisât la pureté de ses intentions, malgré les nouvelles qu’on recevait de Saint-Domingue et les réclamations des colons, qui se plaignaient que les Nègres éclairés sur les droits de leur liberté, et sur les efforts que l’on tente pour la leur rendre murmuraient dans les habitations et semblaient présager des révoltes. M. de Boufflers a demandé une copie du Préambule et des règlemens qu’on a promis de lui envoyer.

M. de Bourges a observé que M. de la Luzerne pourrait objecter relativement à la publicité que la Société veut donner à ses règlemens et à son préambule l’effet que l’arrêt de M. de Castries3 produisit sur les Nègres qui, prenant pour une annonce de leur liberté ce qui n’était qu’une amélioration de leur sort, se révoltèrent avec fureur et voulurent, en brisant leurs fers, hâter l’instant de leur délivrance ; et qu’il était à craindre que s’ils apprenaient que le gouvernement
authorise une Société qui s’occupe de leur affranchissement, ils ne voulussent tenter des efforts dangereux.

On a répondu à M. de Bourges que la modestie du titre de la Société dissiperait facilement les craintes qu’on pourrait concevoir de la publicité que l’on veut donner à son existence.

M. Gramagnac a fait observer que les objets qu’on avait à proposer à l’assemblée générale exigeant une très prompte décision, il serait peut-être à propos de hâter le jour de sa convocation ; que depuis longtems M. Daudibert sollicitait une réponse, sur la proposition qu’il avait faite à la Société relativement à la captivité des Français dans les États barbaresque, et qu’il serait de l’honnêteté de le satisfaire le plus tôt possible.

M. de de Montcloux a ajouté sur la motion précédente que l’assemblée générale n’avait pas été informée de la prière qu’on avait faite à M. Clavière de continuer ses fonctions de président, qu’elle n’avait point encore non plus approuvé la décision qui confiait à M. Gramagnac l’intérim de la place de secrétaire, et qu’il était cependant très nécessaire que l’assemblée agréa dans peu les offres de bonne volonté qui faisait accepter à M. Gramagnac les fonctions de cette place.

On a répondu à tous ces motifs que l’assemblée générale était fixée au premier mardi de 7bre et que l’intervalle était trop court pour que l’on prématurât la convocation des membres.

M. Clavière a fait sentir que les circonstances présentes réduisant les effets publics à un taux très modique, on pourrait peut-être saisir cet instant de crise pour former à la Société un fonds qui, réalisé dans la suite, produirait une somme plus ou moins considérable pour les dépenses les plus indispensables, et que l’on trouverait facilement de quoi acheter des effets en faisant un emprunt sur la Société même.

On a trouvé que la proposition de M. Clavière méritait d’être prise en
considération et d’être portée à l’assemblée générale.

Le Comité a ajourné à mardi prochain

É. Clavière Gramagnac DM

1. Jean-Jacques Vidau de La Tour, était directeur de la Librairie depuis 1785.
2. César-Henri de la Luzerne, ancien gouverneur général des Isles sous le vent était depuis le 24 décembre 1787 Secrétaire d’Etat à la Marine.
3. Le maréchal de Castries avait été secrétaire d’Etat à la Marine du 13 octobre 1780 au 24 août 1787.