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Le premier concours d'attelages de bœufs (concours de charges)

Comme suite aux considérations générales données dans le précédent numéro du Journal d’agriculture pratique (page 438), nous exposerons la méthode qui a servi de base à nos essais de Limoges. Dans les exploitations où nous avons pu faire des constatations comparatives (Grand-Jouan et Grignon), les animaux (chevaux et bœufs) étaient soumis au même régime hygiénique et alimentaire. La ration était pratiquement la même pour tous les habitants du même local. Certainement l’un en recevait ou en laissait un peu plus que l’autre, mais tous les aliments étaient de même qualité ; les individus étaient soignés de la même façon et ils ne différaient que par leur race et leur âge ; en tous cas, ils étaient assez comparables comme taille et comme poids.

[...]

Un jury spécial, nommé par la Société d’agriculture de la Haute-Vienne, était chargé d’examiner les attelages aux points de vue de la conformation et de l’appareillage des animaux ; les résultats de nos constatations intervenaient pour une certaine part dans le classement final, et la liste des récompenses accordées a été donnée dans la Chronique agricole (page 454).

Après avoir passé à la bascule, les animaux, examinés par M. Serre, médecin-vétérinaire départemental, étaient mesurés (hauteur au garrot), et on notait leur âge probable d’après la dentition. Chaque paire de bœufs était attelée, par l’intermédiaire d’un dynamomètre, à un camion chargé (fig. 83) dont on augmentait la résistance à l’aide d’un frein jusqu’à ce que les animaux ne puissent plus avancer ; on obtenait ainsi l’effort maximum qu’ils pouvaient développer (le camion a été prêté et approprié aux essais par les soins de M. Parry, trésorier de la Société d’agriculture de la Haute-Vienne). Les paires de bœufs étaient ensuite chronométrées pendant leur déplacement au pas allongé (sans traction) sur un parcours de 50 mètres. Les différents résultats constatés sont indiqués par le tableau de la page 470, dans lequel nous avons classé les animaux d’après leur poids vif.

Dans une autre série d’expériences, les attelages devaient déplacer le plus rapidement possible le même camion pesant 3000 kg (tare et chargement) sur le même chemin en pente ; on chronométrait le même parcours de 50 mètres. Malheureusement, la voie en terre battue ne présentait pas, sur tous les rayages, la même résistance au roulement, ni la même pente : la traction du chariot variait de 260 à un peu plus de 300 kg, suivant les rayages suivis ; le temps employé a oscillé de 21’’4 dixièmes à 44’’2 dixièmes, correspondant à des vitesses de 2,33 m à 1,13 m par seconde.

Enfin, l’après-midi, il s’agissait de démarrer et de tirer sur la voie précédente, rendue mauvaise par les essais antérieurs, un chariot pesant 8000 kg (fig. 84) ; bien que cet essai ait été déclaré facultatif, tous les concurrents de la 2e catégorie ont fait effectuer ce travail exagéré par leurs attelages, qui s’en sont très bien tirés, aux applaudissements du nombreux public qui suivait les expériences avec un vif intérêt.

On voit par ces chiffres que les bœufs limousins sont d'excellents animaux de travail.

Enfin, ajoutons pour terminer, que le succès obtenu par le concours de Limoges s'ajoute à ceux déjà si nombreux remportés par la Société d'agriculture de la Haute-Vienne, à laquelle restera l'honneur d'avoir entrepris un concours dont les essais sont les premiers qui aient été ainsi organisés tant en France que dans les pays étrangers.

Max RINGELMANN

Source : Extrait de M. Ringelmann , «Les bœufs de travail de race limousine au concours de Limoges», 
Journal d'agriculture pratique, 1905, vol. 2, p. 466-471.

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