On connaît le principe du touage, employé sur les rivières pour le déplacement des remorqueurs ; M. Georges Filtz, ingénieur constructeur à Juvisy (Seine-et-Oise), a eu l’idée d’appliquer le même principe pour le déplacement d’un appareil de culture.
Le tracteur Arion, expérimenté dès 1910 par M. Louis Petit , agriculteur à Champagne, près Juvisy, est maintenant en service courant depuis le mois d’octobre dernier pour les labours d’automne à Champagne, où nous avons pu le voir fonctionner dernièrement. Le tracteur à 4 roues porte sur le côté un jeu de poulies à gorge commandées par un moteur à explosions à 4 cylindres, d’une puissance de 30 chevaux ; un câble d’acier fixé aux deux extrémités du champ s’enroule sur ces poulies ; lorsque celles-ci sont mises en mouvement, le véhicule se déplace, se tirant lui-même sur le câble ; les roues ne sont donc nullement motrices et portent seulement le tracteur, du poids de 1 400 kg.
Le véhicule est attelé sur le côté à une charrue permettant les labours à plat, brabant double ou charrue-balance ; à l’extrémité de la raie, la charrue est basculée et le tracteur revient en arrière, traçant une autre raie. Deux sièges vis-à-vis permettent au mécanicien de se trouver toujours face en avant, et les roues directrices sont tantôt à l’avant, tantôt à l’arrière du véhicule.
Les ancres sont constituées par 2 petits chariots à 4 roues, dont 2 sont munies de disques en tôle pénétrant en terre et assurant un point fixe pour le câble ; on les déplace, sur la fourrière, à chaque extrémité de la raie, d’une quantité égale à la largeur de travail. Deux hommes sont nécessaires sur le chantier : le mécanicien pour conduire l’appareil et un aide pour déplacer le chariot-ancre et retourner la charrue.
La figure 3 représente l’appareil en travail ; on y distingue les poulies, le brin tendu du câble à l’avant du tracteur, le brin mou à l’arrière et un chariot-ancre. Nous avons constaté qu’en travail, la vitesse d’avancement de l’appareil est d’environ 6 km à l’heure pour effectuer un labour de 0,26 m de profondeur et de 0,34 m de largeur, avec un fort brabant double à versoirs à claire-voie.
F. de CONDE
Ingénieur agronome
Source : F. de Condé , «Le tracteur Arion»,
Journal d'agriculture pratique, 1912, vol. 1, p. 19-20.