Mieux avisés que nous, les Belges ont créé dans leur colonie du Congo une ferme de dressage d’éléphants et déjà une cinquantaine d’éléphanteaux, capturés en forêt, sont en plein travail, utilisés aux transports, à la charrue et autres instruments agricoles.
Ces éléphants sont les premiers sujets dressés de toute l’Afrique contemporaine colonisée ; ainsi est détruite la légende si longtemps accréditée de l’éléphant d’Afrique irréductible. […] Ceux de la ferme de dressage belge ont permis de labourer et cultiver de vastes étendues de terrain jusqu’alors improductives et la ferme possède actuellement de grands champs de manioc et de riz, qui sont une ressource précieuse dans ce pauvre pays jusqu’ici stérile.
Il n’y a pas de culture vraie sans animaux domestiques, leur utilisation est intimement liée au rendement du sol. Aucun animal domestique ne vit au Congo en forêt équatoriale : cheval, bœuf ou ânes importés meurent rapidement, décimés par la mouche tsé-tsé, à laquelle seul l’éléphant est réfractaire.
[…]
Autrefois nombreux en Afrique, les éléphants sont en voie de disparition. Le commerce de l’ivoire est cause de toute le mal. L’utilisation de l’éléphant au Congo français, tout en restreignant le portage, permettrait la mise en valeur d’immenses terrains dont la culture est jusqu’ici forcément délaissée : manioc, riz, coton, etc. Le pays changerait complètement le jour où l’éléphant d’Afrique serait utilisé dans la brousse tropicale comme son congénère des Indes dans la jungle de l’Hindoustan.
Nos voisins, les Belges, nous donnent l’exemple ; il est fort à désirer qu’on les imite avant la disparition imminente de la race.
Capitaine DEVEDEIX,
Ex-capitaine commandant les sphahis du Chai Tchad Ouaddaï
Source : Extrait de capitaine Devédeix , «Ferme de dressage d’éléphants au Congo belge, leur utilisation en agriculture»,
Journal d'agriculture pratique, 1911, vol. 1, p. 369.
