On sait que, dans les herbages normands, les animaux passent toute l’année dehors. On doit comprendre cette expression dans son sens le plus large, c’est-à-dire qu’elle s’entend du jour et de la nuit, dans toutes les saisons. […] Je me souviens de la stupéfaction provoquée, dans une réunion belge, par le récit d’un voyageur racontant une excursion en Normandie, lorsqu’il rapportait que les vaches qui donnent le fameux beurre d’Isigny passent leur vie dehors, hiver comme été.
Cela ne veut pas dire cependant que les animaux ne soient jamais défendus contre les intempéries. Au contraire, les herbages bien tenus sont munis d’abris, sous lesquels les bœufs et les vaches peuvent se réfugier soit pendant la nuit, soit lorsque le vent souffle en tempête, comme il arrive fréquemment dans les régions maritimes, soit lorsqu’il pleut à torrents, soit lorsque la neige couvre l’herbe.
Ces abris sont souvent des constructions primitives, sortes de hangars en planches, garnis intérieurement de râteliers. Ce sont aussi des constructions plus solides, en planches et torchis ; parfois même ces constructions affectent une véritable élégance rustique, telle celle que montre la figure 60. Cet abri a été photographié dans un herbage des environs de Troarn (Calvados), qui fait partie des vastes prairies de la vallée de la Dives.
L’abri joue un deuxième rôle : il sert à emmagasiner les réserves de foin que l’on doit toujours avoir à la disposition du bétail pour les plus mauvais jours de la saison d’hiver. À cet effet, un grenier est aménagé sous le toit pour recevoir la provision de foin ; on y accède par un escalier sur un des côtés latéraux.
La surface des abris varie naturellement avec l’étendue de l’herbage ; elle doit être telle que tous les animaux qui chargent l’herbage puissent s’y réunir, quand ils sont incommodés par les intempéries.
G. GAUDOT
Source : Extrait de G. Gaudot , «Les abris dans les herbages normands »,
Journal d'agriculture pratique, 1909, vol. 2, p. 408-409.
