Depuis longtemps, M. G. Ryf publie chaque année, dans le Bulletin du comice et du syndicat agricoles de la région de Sétif, un rapport très documenté sur ses expériences ; il en a été fait plusieurs fois mention dans le Journal d’agriculture pratique ; nous extrayons les notes suivantes, relatives à la campagne 1904-1905, du Bulletin de février 1906. […]
Une nouvelle machine, qui moissonne et bat en même temps, a été introduite dans notre contrée par la maison Massey-Harris, représentée par M. Tribaudeau à Philippeville. Cette machine très ingénieuse est construite solidement, avec soin ; elle est beaucoup plus simple qu’on ne pourrait le croire (fig. 132). Contrairement à nos craintes, cette machine faisait d’assez bon travail et ne se dérangeait pas souvent. Nous n’osons encore nous prononcer sur l’avenir de cette nouvelle machine en Algérie. Le grand reproche que nous lui faisons est de laisser toute la paille sur pied car elle ne ramasse, au moyen d’un grand peigne très bien étudié, que les épis. Il faut donc faucher et ramasser la paille après coup. Dans certains pays où la paille n’a pas de valeur, cet inconvénient est peu grave, mais dans notre région, avec nos longs hivers, la paille a une assez grande valeur.
Cette moissonneuse-batteuse travaille sur 1,5 m de largeur, comme nos petites lieuses. Elle pourra faire 3 à 4 ha par jour, rarement plus. C’est suffisant pour une petite exploitation, mais ne suffit pas pour une plus grande. Cette machine coûte 3 000 F. En somme, ce n’est pas cher si on considère qu’elle est moissonneuse et batteuse à la fois. Nous savons qu’en Tunisie on emploie un certain nombre de semblables machines. Nous serons donc fixés d’ici à quelques années sur la valeur pratique de cette machine très séduisante. On nous assure qu’elle se répand rapidement en Australie et dans la République argentine.
La Société coopérative de Mustapha a aussi introduit cette année une nouvelle moissonneuse à élévateur qui a fait ses preuves ; elle aura un grand avenir dans notre région où il y a beaucoup de récoltes courtes et claires qui se moissonnent très mal avec les lieuses. Cette nouveauté consiste en une moissonneuse-lieuse dont le lieur a été remplacé par un élévateur, comme aux espigadoras. Cet élévateur projette la récolte coupée, soit dans une voiture accompagnant la machine, soit dans un grand sac, suspendu à l’élévateur. Ce sac est vidé de distance en distance par le conducteur au moyen d’une manœuvre très simple.
Nous avons fait moissonner 80 ha de blé par une de ces moissonneuses transformées en espigadora et en avons été très satisfaits. La conduite est très facile. Son rendement est sensiblement supérieur à celui d’une lieuse, car il n’y a presque pas d’arrêts, surtout si on se sert de sac. Dans les petites et moyennes exploitations, cette machine peut très bien remplacer la grande espigadora qui est toujours la moissonneuse par excellence des grandes exploitations en terrain peu accidenté.
R. DESSAISSAIX
Source : R. Dessaisaix , «Notes sur l’agriculture algérienne : la moissonneuse-batteuse»,
Journal d'agriculture pratique, 1906, vol. 1, p. 712-713.